« Althéa ! Plutôt que de pleurer sur votre sort, qui n’est absolument pas à plaindre, j’aimerais que vous vous empressiez de finir vos valises ! » hurla une voix aiguë.
L’intéressée sursauta.
La jeune femme était assise sur le bord de son lit, son visage caché entre ses petites mains. Il était baigné de larmes qu’elle n’arrivait à contenir. Elle se redressa, puis elle quitta hâtivement le vieux sommier pour s’affairer de plier ses vêtements et de les ranger dans sa grande valise.
La porte de sa chambre s’ouvrit brusquement quelques minutes plus tard. Surprise, elle lâcha la robe qu’elle s’apprêtait à plier. Une vieille femme à l’allure austère, coiffée d’un chignon haut et gris, de lunettes demi-lune surplombant un nez fin et légèrement crochu, la guettait de ses prunelles noirs.
« Bien, je préfère ça. » lui dit-elle en refermant la porte derrière elle.
Elle ramassa la robe aux pieds de la jeune fille puis elle la plia à sa place.
« Vous savez, vous devriez vous sentir chanceuse ! commença-t-elle. Le Comte Black est un homme puissant et-
- Il n’est pas un homme, mère, déclara sèchement Althéa.
- Certes, lui répondit-elle, il est un vampire. Mais un vampire charmant et possédant une grande fortune ! Pensez donc à vos sœurs... Nous n’avons plus rien, Althéa. Si ce n’est cette vieille demeure que nous peinons à maintenir en vie. Althéa, ma chérie… »
Elle posa ses mains abîmées, à la peau perdant de son élasticité, sur les joues de sa fille, avant de reprendre d’une voix plus doucereuse :
« Il faut qu’il vous choisisse comme Calice, Althéa. Sans quoi, nous risquons de vivre des jours plus difficiles encore qu'ils ne le sont déjà. »
Althéa hocha lentement la tête. Elle comprenait. Elle savait qu’elle n’avait pas le choix. Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher de trouver cette décision injuste.
Aînée d’une famille comptant six filles, elle se devait d’endosser cette effrayante responsabilité. Leur père étant mort depuis quelques années, il ne leur restait plus rien hormis les quelques terres entourant l’ancien manoir dans lequel elles vivaient.
« Séchez-moi ces larmes et habillez-vous mieux que ça. Ils ne vont pas tarder à arriver. Il vous faut être présentable. Vous devez attirer l’attention du Comte Black ! »
Althéa n’eut d’autre choix que d’obéir. Aussi, quitta-t-elle la pièce après s’être munie d’une robe quelconque.
Elle rejoignit la salle d’eau en traversant le vieux et sombre couloir qui l’en séparait. Des portraits de ses ancêtres étaient accrochés aux murs, ne rendant la sensation d’oppressement qu’elle commençait à ressentir que plus intense encore. Elle pressa le pas et, arrivée à destination, elle ferma vivement la porte derrière elle.
Elle fit couler l’eau de la baignoire, dans l’optique de prendre un bain chaud, puis elle commença à se déshabiller. Un long et grand miroir se trouvait accroché contre un mur et elle ne put s’empêcher d’y observer son reflet.
De long cheveux ébènes, ondulés, encadraient son visage à l'allure juvénile. Sa peau blanche, presque translucide, laissait entrevoir ses veines. Son corps mince, ne possédant presque aucune forme, la complexait : elle ressemblait encore à une enfant alors que ses vingt-et-un printemps étaient passés depuis quelques mois déjà. Un soupire las lui échappa, tandis que l’eau chaude de la baignoire l’accueillait dans une douce étreinte.
Elle se mit alors à penser au Comte Black et son esprit dériva sur la veille, le soir, lorsqu'elle rendit visite à sa sœur de cœur.
Elle était aux côtés de sa meilleure amie, dans sa chambre. Aucune d’elle ne parlait, elles se contentaient de se fixer silencieusement.
Elles étaient pensives, toutes deux avaient été choisies pour rejoindre le manoir du Comte Black par leur famille respective. Cela signifiait qu'elles allaient devenir rivales.
Ce fait effrayait Althéa qui craignait de perdre son unique amie.
Les mains tremblantes, le regard fuyant, elle attendait qu’Angelina, une jolie blonde aux yeux bleus et aux joues roses, prenne la parole. Et plus les secondes s'écoulaient, plus l'angoisse de la perdre augmentait. Elle ne se faisait aucune illusion, pourtant. Elle connaissait déjà l’issue de cette future discussion.
« Althéa, commença Angelina, je ne te laisserai pas gagner. »
Elle lui confia ces quelques mots sur un ton faussement doux. Une larme échappa à Althéa qui la savait impitoyable lorsqu'il était question de sa famille.
« J’en ai parfaitement conscience, Angelina. Cela me peine, mais je suppose que nous n’avons le choix… Puis-je seulement espérer que, cette histoire terminée, nous pourrons redevenir amie ? la questionna-t-elle avec espoir.
- Je ne sais pas. Nous verrons. À présent, j'exige que tu quittes ma maison et que tu ne viennes plus me parler. »
Ses dernières paroles lui firent l’effet de plusieurs coups de couteau portés dans sa poitrine.
Respirer lui devint plus difficile et parler impossible. Elle se leva, dans l'intention de s’éclipser, mais un vertige lui vint. L'émotion, la douleur qui en résultait, était si intense qu’elle en devint malade.
Althéa ferma les yeux et plongea sa tête dans l’eau. Elle voulait retirer ce douloureux souvenir de sa mémoire, l’effacer à jamais et prier pour qu’il ne s’agisse que d’un mauvais rêve.
« Althéa ! Que diable faites-vous dans cette salle de bain ?! »
L’intéressée sursauta à l’entente de la voix de sa génitrice puis elle se redressa très rapidement.
« Laissez-moi une demi-heure de plus, mère ! cria Althéa à son tour.
- Trente minutes, pas plus ! »
La brune attendit qu’elle s’éloigne pour souffler, soulagée. Elle s’empressa ensuite laver son corps et ses longs cheveux. Elle devait être impeccable, sa mère allait être exigeante. Plus que d’ordinaire, à son grand désarroi.
Les trentes minutes passées, de grands coups furent portés contre la porte en bois et verrouillée de la salle de bain. La jeune fille s’empressa d’ouvrir et tomba nez-à-nez avec sa petite sœur qui tenait dans ses mains une longue robe noire.
Elle la lui tendit gentiment, en lui adressant un regard plein de bienveillance.
Elle put ensuite entendre la voix de la chef de la maisonnée lui ordonner de porter le vêtement.
Althéa, lasse et fatiguée par toute cette agitation, obéit à contrecœur.
Le tissu de la robe lui paraissait un tantinet léger, elle en ressentit une légère appréhension. Aussi, lorsqu’elle se vêtit de la robe, elle se contempla dans le grand miroir avec crainte. Ses doutes se confirmèrent et ses yeux s’écarquillèrent. Son visage se déforma en une expression horrifiée, choquée.
La robe était transparente.
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