Ambrelune s'étire dans la chambre silencieuse. Le soleil luit haut dans le ciel et elle se dépêche de rejoindre ses amis qui prennent leur petit-déjeuner en discutant du programme de la journée. En mordant dans un petit pain doré, la jeune fille demande timidement si elle peut s'accorder des vacances le temps d'avoir les résultats de ses examens. Ses amis font la moue mais ils l'assurent qu'ils se débrouilleront sans elle et qu'ils sont ravis de la voir s'amuser un peu. La jeune fille s'ennuie rapidement dans l'île où elle ne connaît pas grand monde, elle s'est promenée un long moment et comme il fait beau, elle décide d'aller se baigner pour passer le temps. Au bout d'une heure à nager dans le lagon parmi les poissons, elle revient s'asseoir sur le sable noir comme du charbon qui lui brûle les pieds lorsqu'elle court jusqu'à sa serviette et elle ferme les yeux en se disant qu'elle est heureuse. A midi, elle se décide à rentrer et après avoir rapidement vérifié si ses amis sont occupés à la boutique, elle se met à leur préparer un déjeuner. En découpant des légumes du jardin, elle s'interroge sur la possibilité que des graines de son monde puissent pousser dans leur potager. Elle sourit à cette idée et ses yeux se perdent dans le petit jardin de Raya. Lorsqu'elle va prévenir ses amis que le repas est prêt, elle se retrouve nez à nez avec un de ses professeurs qui lui adresse un bonjour distrait. Un peu gênée, Ambrelune répond machinalement avant de rentrer chez elle. Peu après, ses amis arrivent et ils lui relatent la conversation rapide qu'ils ont eu avec le vieil homme : « une élève qui pourrait être brillante mais qui a tant de lacunes que c'est du gâchis ». Gênée, la jeune fille comprend l'allusion et elle ne répond rien. Le regard que lui lance Andrea l'inquiète et elle craint qu'il ne la fasse travailler encore plus dur.
Le lendemain matin, le jeune homme toque à la porte de sa chambre alors qu'elle rêvassait en écoutant le bruit de la mer. Ambrelune relève la tête à son entrée et lorsqu'il referme la porte derrière lui, elle comprend que la conversation est d'importance. Durant quelques minutes, il ne dit rien se contentant d'observer la chambre en désordre. Enfin, il se racle la gorge et il s'assied à côté d'elle sur le lit.
- J'ai bien réfléchi et je crois que nous devrions profiter de ces vacances pour étudier ensemble les notions les plus importantes de ton année et de la suivante. Si tu les maîtrises, le reste sera bien plus facile.
La jeune fille fait la moue car elle avait espéré profiter de ses vacances tranquillement en se contentant seulement de faire ses devoirs.
- Je ne suis pas d'accord, j'ai besoin de me reposer.
- Oui, mais plus les semaines passent jusqu'à tes examens, moins tu auras de temps pour réviser. Le programme est lourd et il l'est d'autant plus pour toi, tu le sais. D'ailleurs, qu'en est-il de ton projet de voyager ? Tu aurais pu profiter de tes vacances pour le faire, non ?
Exaspérée, la jeune fille croise les bras, elle ne répond rien, le silence se prolonge et elle finit par exploser d'un ton vindicatif.
- Pourquoi te sens-tu obligé de faire une affaire personnelle de mes études ? Je peux me débrouiller seule. Figures-toi que j'ai dix-huit ans et que ça fait bien longtemps que je gère mon travail scolaire en autonomie.
- Pardon mais je ne voudrais pas que tu gâches tes capacités à cause de quelques lacunes parce que ce monde n'est pas le tien. Je croyais...dit le sorcier d'un ton calme.
- Je ne suis pas comme toi ! Tu ne vis que pour tes expériences et tes études ou presque. Ta vie, c'est ton laboratoire et tes grimoires ! Je n'ai pas l'intention de gâcher la mienne comme tu le fais, il y a d'autres choses importantes dans la vie. Pourquoi à la fin en fais-tu une affaire personnelle ? Nous étions bons amis et tu es en train de tout gâcher. Nous ne sommes plus qu'un professeur et son élève !
Elle sort en claquant la porte, le visage empourpré par la colère. Elle ne voit pas Andrea s'effondrer en larmes sur son lit. Après une longue promenade, elle trouve des clients qui lui disent attendre depuis une demi-heure d'être servis. Inquiète, elle hésite puis elle prend la responsabilité de répondre aux demandes des trois clients qui fort heureusement sont venus pour des choses courantes. Soulagée d'avoir réussi ses préparations, elle ferme boutique et elle part à la recherche de ses amis. Elle trouve Raya et Violine occupées à ranger et dépoussiérer la réserve en riant aux éclats.
- Je cherche Andrea. Quand je suis rentrée, j'ai trouvé des clients qui m'ont dit attendre depuis un certain temps.
- Les clients sont encore là ? demande Violine.
- Non, je m'en suis occupée.
- Vous vous êtes disputés toi et Andrea. continue la sorcière aux cheveux rouge cerise.
- En effet et je suis partie, ce que je n'aurai pas dû faire. Mais il est tellement....sérieux que parfois, il m'exaspère.
- Comme nous tous. dit Raya. Il ne doit pas être bien loin, ce n'est pas son genre de partir comme ça. Il n'est sans doute pas parti bien loin, sinon, il nous aurait prévenues.
Les trois jeunes femmes partent à la recherche de leur ami et elles trouvent le sorcier aux cheveux vert émeraude endormi sur le lit d'Ambrelune, les yeux rougis.
- Il a pleuré. chuchote Raya. Et que fait-il sur ton lit ?
- Il est venu me voir dans ma chambre pour m'aider à réviser puis je suis sortie après notre dispute.
lui répond Ambrelune.
- Laissons-le dormir, il nous dira bien ce qu'il voudra. dit Violine en les prenant par la main.
Puis elle recouvre le sorcier d'une couverture avant de sortir après ses amies en refermant la porte.
Lorsqu'Andrea se réveille à l'heure du dîner, il s'étonne de se trouver dans la pièce silencieuse, couvert d'une couverture par ses amies. Il s'assied sur le lit et il réfléchit à la situation, Rune parti, Raya et son amie toujours ensemble, il se retrouve par la force des choses plus proche que jamais d'Ambrelune, il ne veut pas tout gâcher en se montrant trop protecteur avec elle, elle est jeune et loin de son pays d'origine mais elle est assez forte pour réussir sa vie sans sa surveillance constante. Il se lève avec un soupir et il rejoint les filles dans la salle à manger où il s'excuse de son comportement. Il a besoin de la jeune fille pour maintenir la boutique à flot ; il est bien conscient que si la boutique périclite, il leur faudra vivre et il devra partir loin de ses amis. Il a bien tenté de renouer avec quelques connaissances de l'île sans succès, le temps passé dans son corps de têtard puis les mois passés seuls avec Raya ont irrémédiablement distendu leurs liens.
Andrea jette un coup d’œil vers la porte de la boutique dans l'espoir de la voir s'ouvrir. Il tend l'oreille mais il n'entend pas la voix de Raya à l'extérieur. Il ferme les paupières un instant avant de les rouvrir pour regarder le client qui lui fait face, il ne peut pas le décevoir, la réputation de leur boutique est en jeu.
- Je vais voir ce que je peux faire.
Avec douceur, le jeune homme examine la main de l'enfant qu'il retourne un long moment entre ses doigts fins. Figée, la main semble desséchée et prête à se désintégrer au moindre choc, il s'attarde sur la peau brunie avant de passer mentalement en revue les solutions. L'absence de sa moitié-magique l'agace au plus haut point mais il tente de masquer sa colère. Il va vérifier une information dans un grimoire que Violine a laissé traîner sur le bureau avant de passer dans son laboratoire.
- Je reviens dès que j'ai terminé.
Les clients s’assoient pour l'attendre et le jeune homme se met au travail. Son idée est audacieuse mais elle pourrait réussir. Agacé par l'absence de sa moitié-magique durant les heures d'ouverture, le sorcier sent la colère le prendre comme une vague un jour de tempête. Il doit se maîtriser pour ne pas faire d'erreur, il griffonne son sort sur un morceau de papier avant de peser soigneusement ses ingrédients. Une demi-heure plus tard, soulagé, il rejoint le petit garçon qui retrouve bientôt son membre.
- Ne joue plus avec les fioles de ta sœur, d'accord ? C'est très dangereux de mélanger des ingrédients qu'on ne connaît pas. dit-il d'une voix douce en offrant à l'enfant une graine.
- Je t'offre cette graine. Tu la planteras dans un pot, tu l'arroseras quand la terre sera trop sèche et tu verras un petit arbre aux feuilles d'un vert tendre et aux fleurs de plusieurs couleurs qui s'illuminent doucement la nuit. Tu verras, il y a des fleurs bleues, mauves, violettes, roses. J'ai créé cette plante avec Raya, une de mes amies, nous l'avons appelé patarouffle à fleurs lumineuses. Elle te rappellera qu'il faut se montrer prudent en magie.
Andrea sourit à l'enfant qui l'embrasse sur la joue avant de partir avec ses parents soulagés.
- Je n'y arrive pas !
Andrea dans un mouvement de colère balaie sa paillasse d'un revers de bras. La porcelaine et le verre éclatent en mille morceaux sur le sol du laboratoire et il reste un long moment à regarder les dégâts.
- Je ne vais jamais y arriver seul... Les sorts complexes m'échappent sans Raya malgré toutes mes tentatives. Je suis un sorcier maudit, j'ai déjà perdu une moitié-magique et la deuxième a fini par me fuir. Quel sorcier sérieux et appliqué pourrait me correspondre suffisamment pour que nous unissions nos pouvoirs le temps qu'Ambrelune obtienne ses diplômes? Nous faisons du bon travail elle et moi et nous devrions y arriver moins facilement que si elle était ma moitié-magique mais suffisamment pour mes ambitions. Ou alors...
Le sorcier réfléchit et l'idée lui semble bonne même si elle suppose d'abandonner son nouveau foyer. S'il rejoint Ambrelune et qu'il s'installe à proximité de la Haute Université de Magie, il trouvera facilement tous les ingrédients dont il a besoin et il trouvera une société de sorciers avec qui échanger et tester de nouveaux sorts. Dans cette communauté qu'il sait audacieuse et dynamique, il pourra laisser son talent s'exprimer pleinement sans restriction. La concurrence est rude entre les sorciers qui ont pignon sur rue dans la ville mais il sait qu'avec Ambrelune, ils peuvent faire de grandes choses.
- Mais si elle rencontre sa moitié-magique à l'université... s'inquiète Andrea qui se traite d'égoïste aussitôt cette crainte formulée. Et pourtant, nous arrivons à faire de grandes choses et au fil du temps, nous avons réussi à accorder nos façons de travailler jusqu'à obtenir de bons résultats. Les choses ne sont pas aussi naturelles qu'avec une moitié-magique mais elles fonctionnent plutôt bien. Et Ambrelune ne m'a jamais parlé d'un sorcier avec qui elle ressent une entente particulière lorsqu'ils travaillent ensemble.
Un fol espoir envahit le sorcier et il se remet à ses préparations en chantonnant. Il ne veut rien précipiter mais il ne désespère pas de trouver un partenaire de travail plus sérieux que Raya.
Le jeune homme se dit qu'il pourrait peut-être aller rendre visite à Ambrelune afin de parler de ses projets.
- Et si elle les repousse ? Aurais-je la force de quitter cette île trop petite pour mes ambitions ? Avoir quelqu'un qui me comprenne auprès de moi me donnera la force de quitter ce qui fut mon foyer pour me lancer dans l'inconnu.
Andrea soupire, le regard perdu dans le lointain, il se prend à rêver à la glorieuse carrière à laquelle il aspirait autrefois avant son accident. Il se rend compte combien cet accident lui a fait perdre confiance en ses capacités et ses ambitions. Depuis deux ans, il reste sous la protection de Raya et il se demande si la peur ne l'a pas empêché de partir au loin pour affronter son destin et s'il n'a pas préféré après son accident se contenter d'une vie tranquille et confortable sans risque et sans imprévu.
Un craquement sous les chaussures du jeune homme l'amène à regarder à ses pieds et il se remémore son geste de colère. Confus, il répare rapidement ses dégâts avant de sortir pour prendre l'air. Il descend jusqu'à la plage et le froid qui le prend le fait frissonner mais il continue sa route enveloppé dans sa cape. Il regarde la mer et il envie Rune qui a eu le courage de partir au loin explorer de nouveaux horizons. La fédération est ouverte et il sait qu'il peut aller où son cœur lui dicte d'aller.
- Il y a certainement de nombreuses magies à explorer dans les autres royaumes mais pas tout de suite. Je n'irai pas seul et j'attendrai le bon moment pour partir à mon tour Si Ambrelune choisit de passer son Magistère d'honneur et qu'elle passe une année à l'étranger, je pourrai peut-être l'accompagner.
Le jeune homme se perd dans ses rêves de voyage et il imagine les nouveaux sorts qu'il pourra créer. Dans l'immédiat, il pourra toujours commander des livres pour satisfaire sa soif de connaissances. En chantonnant, il rebrousse chemin tandis que le soir tombe.
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