« Extrait du grimoire d'Ambrelune
Les deux lunes sont généralement aimées en Berethiel-Nienor car elle est un symbole de prospérité et de joie. Leur cycle diffère du nôtre, même si l'astre lunaire a la même forme que chez nous, il semble comme éthéré ou fantomatique. L'astre est lisse et sans tache, un disque pur qui illumine le ciel d'une clarté irréelle qui me semble plus proche de nous mais je n'ai pas trouvé de mention de la distance de Västra, la terre à Pitana, le nom des lunes. Il semble que leur cycle soit à peu près identique au nôtre avec une nouvelle lune, un croissant de lune et une pleine lune qui se succède à intervalle irrégulier à notre échelle mais régulier sur plusieurs siècles avec de fortes variations.»
- Bien, comme vous le savez, nous allons très bientôt entamer une session intermédiaire d'examen pour vous entraîner pour aux examens de fin d'année. leur déclare le professeur de ? en entamant son cours.
Ambrelune relève la tête et observe ses camarades qui semblent au courant de l'épreuve. Un peu pâle, elle pose la question qui la taraude.
- Dans toutes les matières ?
- Bien évidemment, des épreuves théoriques et pratiques vous attendent dans deux semaines pour une semaine entière. La date vous en sera communiquée très bientôt. Ouvrez vos livres à la page trente-deux, je vous prie.
Ambrelune observe autour d'elle et elle entend ses camarades rire de sa question. Un peu paniquée, elle tente d'évaluer le travail et de se représenter la pile de parchemins accumulés depuis le début de l'année qui lui semble colossale. Elle frissonne et elle sait qu'elle n'a pas le choix, elle doit réussir et réviser mais elle espère que la chance lui sourira.
Durant les deux semaines suivantes, la jeune fille travaille jusque tard dans la soirée pour réviser ses examens, même si elle sait qu'elle a assez travaillé pour réussir sans trop réviser. Les épreuves débutent dans une immense salle où les élèves sont assis sur des petites tables un peu trop serrées. Avec un soupir, la jeune fille se penche sur la feuille d'examen qu'elle parcourt rapidement. Soulagée, elle remercie le sort de l'avoir fait tomber sur des sujets qu'elle maîtrise suffisamment pour s'en sortir honorablement. Lorsqu'elle lève les yeux de sa feuille pour la rendre, elle sort dans un état second, pleine d'incertitude. Mais elle sent au fond d'elle qu'elle a réussi. Elle attend avec fébrilité les résultats, elle a tout juste la moyenne ce qui ne la pénalise pas pour son examen de fin d'année.
Rune est mélancolique depuis quelques jours, il se souvient de son rêve d'une cité de glace et il en a déduit que son chemin le ramène vers le royaume de Nix, ses diamants purs comme du cristal et Sabline auquel il pense souvent. Il prépare ses bagages en secret, ne sachant comment aborder le sujet avec ses amis qui se reposent après une période de travail intensif. Pourtant, il doit se décider, il ne peut pas partir comme un voleur. Mais il sait que l'île de Lathi est trop petite pour lui. Même si quitter le climat tropical de l'île pour la cité des glaces représente un sacrifice important, il est prêt à l'accepter. Dans un premier temps, il décide de se rendre là-bas pour faire des repérages pour voir comment il peut construire sa nouvelle vie, il en profitera pour aller faire un tour dans l'élevage d'huîtres qu'il a acheté. Il se décide à aller annoncer la nouvelle à ses amis qui travaillent comme de coutume dans leur laboratoire à la confection de leurs commandes. Raya le voit entrer et lui dit de se méfier des limaces de mer fluorescentes qui pourraient lui cracher leur venin irritant.Il baisse les yeux et il voit une limace d'un violette phosphorescent ramper sur le sol de la pièce.
- Bonjour, je vais retourner à Nix pour m'y installer de manière définitive. se décide-t'il enfin à lâcher.
- Mais...
Andrea coupe la parole de Raya pour rassurer le jeune garçon.
- Nous savions bien que tu finirais par repartir, ta place n'est pas avec nous, nous le savons depuis que tu as refusé de poursuivre tes études. Mais nous nous verrons souvent, nous y comptons bien.
Soulagé, Rune sourit et il rentre chez lui terminer ses bagages et écrire une lettre au père de Sabline pour qu'il fasse le nécessaire à son installation dans le royaume de Nix.
Ambrelune a décidé de se montrer plus assidue pour ne plus se trouver prise au dépourvu. Timidement, elle a été demander au secrétariat le planning des examens où il lui a été répondu qu'il n'y a pas de session de rattrapage et qu'elle ne peut compter que sur l'examen de fin d'année si elle a échoué. Un peu déçue, la jeune sorcière se dit qu'elle aurait dû poser la question avant mais qu'elle doit faire au mieux désormais pour réussir son année. Elle passe déjà beaucoup de temps à la bibliothèque pour lire tous les ouvrages qui lui tombent sous la main et même si elle sait que ces lectures non ciblées ne sont pas le meilleur moyen d'apprendre ce qu'elle ignore de ce monde qui est le sien. Le soir venu, découragée, la jeune fille pleure dans son lit. Isolée de ses camarades, incomprise de ses professeurs, dans un monde dont on attend d'elle une certaine connaissance, elle doute de pouvoir mener à bien son rêve, elle a trop de choses à apprendre. Peut-être devrait-elle voyager comme Rune ? Ou chercher un emploi dans une boutique de sorciers ? Après tout, elle a de l'expérience et elle pourrait espérer combler ses lacunes. La jeune fille étudie cette possibilité et il lui semble que ce serait la meilleure solution ; elle pourrait ainsi découvrir des ingrédients et des sorts inconnus et peut-être apprendre de nouvelles choses avec un sorcier différent qui utiliserait des ingrédients dont elle n'a pas l'habitude. Elle pourrait également se tourner vers un fournisseur d'ingrédients magiques qui lui offrirait un large panel d'ingrédients nouveaux sur lequel elle devra faire des recherches par elle-même. Ce sera long mais elle pense que ce sera le meilleur moyen de combler ses lacunes. Elle s'endort bercée par cette idée, un peu apaisée quant à son avenir.
A son réveil le lendemain, Ambrelune se sent mieux et elle se rend en cours en chantonnant. A côté d'elle un parchemin lui sert à noter au fil du cours les notions à éclaircir afin de ne pas perdre trop de temps ou laisser les zones d'ombre s'accumuler. De plus, elle emprunte à la bibliothèque des livres en berethel-nienorien pour parfaire sa connaissance de la langue qu'elle a apprise peu à peu au fil du temps même si par tradition, dans l'île de Lathi, le français est de mise ainsi qu'à la cour parmi d'autres langues. Mais le petit peuple ne parle pas forcément ces langues venues de son monde et si elle a toujours réussi à se faire comprendre jusqu'ici, la jeune fille juge que cela ne peut que l'aider. Même si ses cours sont dispensés en français, anglais et latin pour la plupart, elle arrive à peu près à s'y retrouver. Mais elle se rend compte de sa chance : elle fait partie de l'élite qui maîtrise ces langues même si depuis son arrivée, elle a amélioré son niveau dans la langue du pays. Néanmoins, elle sait que celui-ci n'est pas suffisant pour suivre ses cours. Epuisée par ses recherches personnelles quotidiennes, la jeune fille ne se rend pas compte qu'à force de rogner sur ses heures de sommeil et de repas, elle se met en danger. Et elle n'ose pas écrire à ses amis pour leur confier ses tourments, elle ne veut pas les inquiéter.
Ambrelune lève la tête de son livre et elle réfléchit qu'elle aurait dû penser qu'il existait d'autres écoles de magie dans le royaume.
- Je ne comprends rien ! Donc pour résumer, la fédération reconstituée comprend les royaumes de Berethiel-Nienor « le socle du royaume » qui est à l'origine de la fédération, Meoring « le royaume des flocons » et son climat polaire , Medelis « le trésor en grains » car ses habitants ont pour habitude de collecter et cultiver les graines qu'ils trouvent un peu partout dans la fédération sous l'impulsion d'un ancien roi passionné de botanique, Nix « le pays des glaces » qui partage sa plus grande île avec Meoring, Muir « l'arc-en-ciel perlier » et ses perles merveilleuses, Roupounaï « la sous-marine » et son île sous le niveau de la mer, Haldilaël « l'antique gardienne » pour sa forêt qui n'a pas bougé depuis l'aube des temps, Aëldoran « le précieux pays » et ses mines ; restent Sëndora « la mémoire du royaume » pour ses bardes qui récoltent, écrivent et chantent l'histoire de la fédération et des royaumes depuis la nuit des temps et enfin Mithlad l'exploratrice dont les navigateurs ont autrefois cartographié la fédération.
Une fille de sa promotion glousse de rire avant de lui répondre avec dédain :
- Tu croyais quoi ? Qu'il n'y avait qu'une école de magie pour toute la fédération ?
Vexée, la jeune fille prend son sac et elle décide de rentrer plus tôt chez ses amis. Elle manquera deux heures de cours mais peu lui importe, elle veut juste retrouver un peu de bienveillance et de douceur.
Le lendemain, alors qu'elle parcourt des grimoires pour réaliser des préparations sous la direction d'Andrea, elle s'interrompt.
- Dites-moi ? Je me demandais comment se passaient les premières rentrées des classes ici ? demande Ambrelune pour trouver un prétexte afin d'échapper encore quelques minutes à ses devoirs supplémentaires.
Andrea devine la manœuvre mais il ne rappelle pas à la jeune fille que ses examens approchent et il réfléchit.
- Si je me souviens bien, mes parents m'avaient accompagné lors de ma première rentrée des classes et nous avons longuement discuté de la chance qui s'offrait à moi. Ils m'ont vanté la Haute Université de Magie et ils m'ont commandé d'étudier avec sérieux si je voulais être un grand sorcier.
Avec nervosité, le jeune homme joue avec ses longs cheveux verts et elle voit son regard se perdre au loin, dans ses souvenirs.
- Et toi, Raya ?
- J'avais déjà commencé à métamorphoser quelques petites choses sans importance à la maison et mes parents étaient excédés de toujours devoir rendre leur forme originelles à mes créations quand ils y arrivaient bien sûr... Et comme ils ne pouvaient pas toujours surveiller ce qui se passait dans ma chambre, ça se finissait souvent dans les cris.
Les bras croisés, Andrea regarde fixement sa moitié-magique et il ouvre la bouche un long moment avoir d'oser intervenir.
- Tes parents te laissaient pratiquer la magie seule avant ton entrée à l'école ? Sans surveillance ?
- Bien sûr, pourquoi ?
Le sorcier se tait sur cette affirmation de Raya puis il reprend la parole.
- Et puis, j'ai fait la connaissance de ma moitié-magique dès le premier jour. Nous étions amis comme si nos affinités magiques nous avaient rapprochés dès le départ. Nous avons longuement échangé sur les carnets où nous notions nos tentatives de sortilège. Mes parents n'étant pas sorciers du tout, ils s’inquiétaient beaucoup de mes expérimentations de premier niveau et pour les rassurer, j'ai pris l'habitude de tout noter.
Ambrelune fronce les sourcils un moment.
- J'avais pensé que tes parents étaient sorciers ?
- Oui mais pas de profession. Ils n'avaient pas achevé leur formation et ils faisaient des sorts mineurs. Ils vivaient de leur terre surtout, un peu d'agriculture et d'élevage mais je n'ai pas beaucoup de souvenirs. Tout comme lorsque j'étais têtard. Je me souviens que Raya me parlait et que je m'ennuyais beaucoup. Et de quelques sorts qui m'ont horrifiés. achève-t'il à mi-voix.
Elle a croisé le regard douloureux de son ami, noté son teint pâle, ses lèvres serrées et ses mains crispées. Elle l'entend soupirer un long moment puis elle l'entend bouger avant qu'il ne se racle nerveusement la gorge.
- Pardon, je n'aurais pas dû poser cette question. s'excuse Ambrelune.
- Ce n'est rien, c'est une question normale, je veux dire, nous sommes des amis proches et nous vivons l'un à côté de l'autre depuis plus d'un an. J'évite d'en parler, c'est tout. J'ai perdu ma famille quand j'avais dix ans et mon tuteur, un ami de mes parents à dix-sept ans. J'étais à peine majeur et seul au monde. Depuis, j'ai continué à étudier pour éviter de penser. Je crois que c'est devenu une habitude, un mode de fonctionnement qui convient à ma nature. J'aime expérimenter, comparer, réfléchir aux choses et la magie est un bon support d'expérimentation pour un esprit tel que le mien.
- Je vois. murmure Ambrelune avant de reprendre son travail.
Andrea aurait voulu oser lui confier son sentiment de solitude depuis que Raya s'est trouvé une âme sœur mais il craint de la voir se moquer de lui. Il sait qu'il ne pourra se retenir de lui avouer sa jalousie de la voir rayonner et avoir trouvé sa place auprès de Violine tandis qu'il se sent seul et de moins en moins à sa place aux côtés de sa moitié-magique.
- Bien, vous voici face à un os cassé, vous allez le remettre en place comme je vous l'ai montré. Un, deux, trois !
Les os de volaille craquent ensemble et Ambrelune ne peut retenir une grimace. Elle observe attentivement le résultat de son intervention et elle remarque que la réunification n'a pas aussi bien réussi qu'elle l'espérait.
- La zone de jonction n'est pas nette mais c'est un début. Cassez l'os de nouveau avec le marteau qui est sur mon bureau et recommencez.
Dix fois de suite, l'apprentie sorcière recommence avec des soupirs de plus en plus bruyants mais elle finit par contenter le professeur de soins magiques. Elle est la dernière à quitter la salle, les autres étudiants ayant réussi bien avant elle mais elle n'en a cure.
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