Nouveau défi, pour la Fabrique à mots de l'Allée des Conteurs cette fois !
Défi donné par Nascana : Pomme, Feu, Témoin dans un texte de 1000 mots minimum.
Une fois dans le salon de madame Peggy, Bella ne se fit pas prier pour tout révéler.
« Je suis profondément navrée, murmura la jolie brune, les mains jointes sur ses genoux. Je ne voulais causer de tort à personne…
— Vous avez quand même brisé des objets appartenant à l’institution ! protesta son employeuse.
— Si vous parlez de cette boule à neige, vous l’avez toujours trouvée hideuse. C’était Norma qui insistait pour la laisser sur la console ! »
Ashley jugea bon d’intervenir pour éviter aux choses de s’envenimer :
« Allons, mademoiselle Bella, expliquez-nous tout en détail, en commençant par le début. Pourquoi avez-vous monté ce subterfuge ?
— À cause de Leona…
— Leona ?
— Cette jeune servante. Norma l’a prise en grippe et lui reproche sans cesse sa maladresse. J’ai pensé que si l’endroit paraissait… hanté, l’attention se détournerait d’elle. »
La jeune femme semblait parfaitement sincère.
« C’est pour cela que j’ai fait en sorte que certains objets se brisent sans cause apparente, devant des témoins qui pouvaient attester de l’innocence de Leona.
— Je comprends, répondit le normaliste. Combien de fois avez-vous causé ce genre d’incident ? »
Bella prit le temps de réfléchir avant de répondre :
« Deux fois, je pense… »
Hadria fonça les sourcils. Ashley lui avait parlé de quatre occurrences, pas de deux. Soit elle mentait, soit elle n’était pas à l’origine de tous les incidents.
« À quelles occasions ?
— Une fois, dans le Grand salon… Et une autre fois dans le salon des Roses. »
L’attention d’Hadria resta focalisée sur son partenaire ; elle admira la neutralité de son expression tandis qu’il questionnait la courtisane aux cheveux noirs. La jeune Américaine éprouvait un mélange de déception et d’excitation. L’affaire ne serait pas résolue aussi rapidement qu’elle avait pu le croire, mais une explication surnaturelle demeurait possible. Elle laissa le normaliste finir l’interrogatoire pour se rendre auprès de Leona, qui attendait, nerveuse, dans l’antichambre. L’adolescente tourna vers elle un regard de biche effarouchée. Hadria lui adressa un sourire rassurant.
« Leona, nous sommes seules toutes les deux. Si tu as des choses à me confier, n’hésite pas. Je ne dirai rien à madame Peggy ni à aucune autre fille de l’établissement. »
Elle marqua une pause avant d’ajouter :
« Je ne le répéterai même pas à mon collègue, si cela te gêne. »
Les yeux de l’adolescente s’écarquillèrent :
« Votre collègue ? »
La jeune Américaine se demanda si elle n’en avait pas trop révélé. Malgré tout, la nécessité de mettre la petite domestique en confiance pesa plus lourd que ses doutes. Après un instant de réflexion, elle décida de ne dévoiler qu’une vérité partielle :
« Je m’appelle Hadria Forbes et je travaille pour la fondation Spiritus Mundi. Notre métier consiste à observer les manifestations surnaturelles et de déterminer leur origine. »
Techniquement, elle ne mentait pas : elle se contentait de passer sous silence l’existence de Gladius Irae, le bras armé de l’institution, qui luttait contre les crimes ésotériques. Certes, le cas de l’établissement ne rentrait pas dans ce cadre, mais Hadria ne l’excluait pas.
« Vous êtes ici… à cause des incidents ? »
Leona tortillait le tissu de sa jupe entre ses doigts. Elle avait les joues en feu, comme si la gêne la submergeait.
« En effet, Leona.
— Vous pensez que c’est moi ?
— Et toi, qu’en penses-tu ? »
Les grands yeux bruns se relevèrent vers Hadria :
« Je suis maladroite. Je casse des choses… parfois. Mais quand ça arrive, je le dis. Même si ça met en colère mademoiselle Norma.
— Ce n’est pas une personne très gentille, n’est-ce pas ? »
Leona rougit davantage ; elle ressemblait à présent à une pomme bien mûre.
« Je ne devrai pas dire cela… mais… non, elle n’est pas gentille. »
La compassion que l’enquêtrice laissait transparaître avait brisé ses derniers murs. Hadria ne devait surtout pas ignorer cette opportunité.
« Est-ce qu’il y a d’autres personnes qui se montrent désagréables avec toi ? »
La servante secoua la tête avec vigueur :
« Oh, non, il n’y a qu’elle ! Madame Peggy et les autres demoiselles sont toutes gentilles. Madame Peggy m’a engagée à la sortie de l’orphelinat et mademoiselle Bella s’est déjà disputée avec mademoiselle Norma à cause de moi. »
Ses yeux s’emplirent de larmes.
« Je ne voudrais surtout pas qu’elle ait des ennuis par ma faute ! »
La jeune femme posa une main apaisante sur son bras :
« Ne t’inquiète pas, personne n’aura des ennuis. Jusqu’à présent, il n’y a eu que quelques objets cassés, et aucun n’avait de la valeur. Nous essayons juste de comprendre ce qui est arrivé… »
Hadria ne pouvait exclure la responsabilité inconsciente de la petite domestique dans les événements. D’après certaines analyses de la fondation, les cas de hantises apparentes et d’esprits frappeurs pouvaient être liés à la présence d’adolescents en souffrance, qui manifestaient des dons latents de psychokinèse. Quand les agents de Spiritus Mundi identifiaient un individu qui possédait ce genre de talent, elle lui offrait de le former, avec la possibilité à terme d’intégrer ses rangs. Tous n’acceptaient pas. Si le garçon ou la fille qui causait les troubles inconsciemment souhaitait rester malgré tout dans son lieu de séjour, la fondation entamait une médiation pour comprendre la raison des problèmes et les résoudre, autant que possible.
Mais pour Leona, quelque chose ne collait pas. Elle n’aurait su dire pourquoi – une intuition, peut-être, mais elle ne présentait pas les caractéristiques fréquentes chez les jeunes filles responsables de ce type de phénomène. Sa gratitude envers madame Peggy semblait profonde et sincère et elle imaginait mal un ressentiment caché. Malgré tout, elle pouvait se tromper…
Par contre, elle n’était pas certaine que la domestique lui avait tout révélé. Elle devait sans doute dissimuler quelque chose, pour montrer autant de confusion. Grâce à son don, Hadria n’aurait aucune difficulté à le découvrir, mais elle préférait que Leona parle d’elle-même.
« Les choses ne sont pas graves pour le moment, reprit-elle, mais un jour, quelqu’un pourrait être blessé. C’est pour cela que madame Peggy nous a demandé de comprendre ce qui se passait, avant que les choses ne tournent mal. »
Les lèvres de l’adolescente se serrèrent en une fine ligne blanche. Elle n’avouerait rien, ce qui signifiait qu’elle protégeait quelqu’un, mais qui ? Elle examina en détail la petite servante, et vit un trousseau de clefs qui pendait à sa ceinture, qui lui permettait sans doute d’entrer dans les différentes chambres pour y faire le ménage.
« Peux-tu me prêter tes clefs ? Je vais en avoir besoin… »
Leona hésita :
« Je ne suis pas sûre d’avoir le droit…
— Bien sûr que si. Madame Peggy nous laisse mener nos recherches comme nous le voulons. »
Quand elle quitta la petite pièce, Hadria tenait entre ses mains le trousseau de clefs. Même si le procédé la rebutait, elle allait enfin connaître le secret de Leona.
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