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tome 2, Chapitre 2 « In Nocte consilium » tome 2, Chapitre 2

Les événements avaient fait le tour de la fondation et chacun s’en était ému. Même si le jeune agent qui avait été victime du phénomène n'entretenait que peu d’interactions sociales avec ses collègues, chacun appréciait ce prodige d’érudition, détenteur d’un don unique, autant pour ses facultés que pour sa courtoisie manifeste. Tous ceux qui le pouvaient s’étaient mobilisés pour le sauver, et Erasmus en éprouvait une gratitude sincère.

Le dispensaire n’était qu’à une vingtaine de minutes à pied. Les longues enjambées du directeur lui en feraient gagner au moins cinq. Il aurait pu prendre un cab, mais il avait besoin de se vider l’esprit et de respirer un autre air, même si c’était le fog des rues de Londres. La lumière filtrée par la couche brumeuse jetait un éclairage irréel sur les pavés et les bâtiments, qui semblaient tirés d’un néant doré. Quelques policiers en patrouille lui lancèrent des regards suspicieux, jusqu’au moment où, en se rapprochant, ils constatèrent sa mise soignée et son allure autoritaire, qui faisait oublier ses traits plus excentriques. Et c’était fort bien, car Erasmus n’était pas prêt à parlementer avec les gardiens de la loi.

Comme toutes les autres implantations de la fondation, le dispensaire était dissimulé dans le fond d’une cour, derrière la façade ordinaire, à peine décorée de quelques corniches, d’un immeuble noirci par la fumée de charbon. Il s’élevait au centre d'un cercle d'arbres vénérables qui semblaient le cerner d’une barrière protectrice – ce qui n’était pas techniquement faux. C’était un bâtiment sévère de style élisabéthain, mais dont l’intérieur était aménagé dans la plus grande modernité. Il abritait des chambres pour les agents blessés, tandis que les bureaux étaient regroupés dans l'annexe donnant sur la rue. Le personnel comportait des médecins classiques, mais aussi des guérisseurs de toute sorte, ainsi que des clairvoyants, capables de déterminer la teneur des maux - physiques ou surnaturels - qui affectaient leurs parents, des exorcistes de différentes obédiences, experts dans l'art de chasser les esprits malveillants et des mages spécialisés dans celui de contrer les malédictions des tout ordre.

Les agents de Gladius Irea se trouvent souvent en position de rencontrer des afflictions qu’aucun médecin ordinaire ne pouvait diagnostiquer, encore moins soulager.

Quand il actionna le heurtoir, le concierge apparut au guichet ; reconnaissant Dolovian, il lui ouvrit avec empressement, avec un regard empli de compassion qu’Erasmus s’efforça d’ignorer autant que possible. Après avoir salué le domestique, il poursuivit sa route à travers le parc, jusqu’au dispensaire. Le jardin lui paraissait sombre et chargé de funestes augures, mais il savait que ce n’était sans doute que le fait de son imagination. Le hall était brillamment éclairé ; les murs avaient été peints d’arabesques colorées censées concentrer les énergies positives et enchâssés de cristaux possédant les mêmes vertus. Erasmus éprouvait un certain scepticisme, mais le tout ne manquait pas de charme esthétique. Mais cette fois-ci, il y restait totalement hermétique.

En l’absence d’Ella, c’était son assistant, Jeffrey Sanders, qui la remplaçait à la tête de l’établissement. Comme s’il avait anticipé l'arrivée d’Erasmus, il vint à sa rencontre dans le hall. C’était un homme mince au visage doux, toutefois capable d’une fermeté remarquable si nécessaire. Son tempérament terre-à-terre compensait la disposition parfois un peu trop passionnée d’Ella.

« Erasmus… Avez-vous du nouveau ?

— Hélas, non… Est-ce qu’il m’est possible… de le voir ?

— Bien sûr ! Mais… »

Jeffrey hésita quelques instants avant de poursuivre :

« Les effets de l’épuisement sont de plus en plus visibles. Ne soyez pas choqué... Je pense qu’il peut encore tenir quelques jours, avec l’aide de transferts d’énergie vitale que certains que nos guérisseurs sont capables d’opérer.

— Et après ces quelques jours… ? »

Jeffery secoua la tête :

« Erasmus, nous trouverons une solution d’ici là…

— Et si nous n’en trouvons pas ? » rétorqua d’une voix sourde le directeur de Gladius Irae.

Le médecin tentait de se montrer rassurant, mais c’était aussi un homme pragmatique.

« Son corps va finir par s’affaiblir totalement et son cœur s’arrêtera… comme on souffle une bougie. »

Erasmus sentit sa gorge se serrer :

« Nous ne laisserons pas les choses en arriver là », déclara-t-il d’un ton sourd.

Jeffrey se frotta la nuque en soupirant, puis fit signe à Erasmus de le suivre dans le dédale des couloirs. Même aménagés pour demeurer aussi stériles que possible, ils avaient été agrémentés de couleurs douces, afin de ne pas briser le moral des agents souffrants. La chambre se situait dans l’aile réservée aux cas les plus sérieux. Erasmus songea que cette fois, son protégé n’avait pas fait les choses à moitié.

Jeffrey lui ouvrit la porte et s’écarta pour lui livrer le passage.


Texte publié par Beatrix, 2 novembre 2017 à 00h36
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