Jamais je n'aurais cru, un jour, devoir vérifier qu'aucun organe ne possède un trou béant dans un corps humain. Pour ce faire, je retire les croûtes formées par le sang coagulé sur la plaie, en plus du début d'infection que cela avait engendré. Ce fut d'ailleurs particulièrement écœurant.
Au moins, ce qu'ils m'ont appris m'aura aujourd'hui servi à quelque chose.
Peut-être que suite à cela, le bon Dieu m'acceptera dans son paradis utopique ?
Je préfère penser à autre chose, réfléchir... Cela m'arrive de temps à autre.
Et je pense... je pense... Et cela n'est jamais bon.
Je pense au fait qu'un seul foutu pourcent de la population mondiale possède plus de ressources et de richesses que les quatre-vingts dix-neuf autres. L'écart entre la classe moyenne et la classe haute se creuse de plus en plus au fil des années. Et le pire, c'est que tout cela est voulu et même mûrement réfléchi par ce putain d'un pourcent.
Les riches deviennent de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres.
Mais le pire... c'est qu'ils veulent nous enfoncer toujours un peu plus dans la merde et qu'ils y réfléchissent longuement. Sacrés bâtards.
Penser ne m'apporte jamais rien de bon.
Je suis énervée et frustrée au possible, à présent.
Je secoue la tête, et je me concentre sur ma tâche : il ne me reste plus qu'à désinfecter le tout puis à coudre la blessure, ce que je m'empresse de faire. L'odeur est absolument nauséabonde et mes yeux commencent à se fermer tout seuls. Cela est dû à une intense fatigue résultant de l'alcool précédemment englouti.
Lorsque je plante l'aiguille dans la peau de cet homme, il émet un geignement de douleur. Il a, par conséquent, conscience de ce qu'il se passe actuellement, bien qu'enivré par la boisson. Je m'attelle donc à terminer ma tâche au plus vite. Je suis véloce et chirurgicale dans chacun de mes gestes afin qu'il endure le moins de souffrances possible. Et de toute façon, je ne peux pas faire mieux.
Ceci terminé, je pose le pansement, puis j'entreprends de lui retirer absolument toutes les couches de vêtements qu'il possède. Je n'avais jusque-là que retiré son équipement pare-balles et déchiré son t-shirt en polyester noir, puisqu'il me fallait être rapide.
En fouillant dans les multiples poches de son treillis, j'en ressors une dizaine de chargeurs, deux Beretta, dont celui avec lequel il m'avait menacé, ainsi que diverses armes blanches. Un véritable arsenal que je prends soin de dissimuler dans l'un de mes placards. Hors de question que je me fasse poignarder ou tirer dessus au beau milieu de mon salon.
Après lui avoir retiré la quasi-totalité de ses vêtements, je le recouvre d'un plaid puis je m'octroie un repos bien mérité dans mon lit, en laissant mes outils sur la table basse, par pure flemmardise.
Avant de m'endormir, je ne peux m'empêcher de penser à lui. Je revois son corps musclé, parcouru de multiples cicatrices, synonymes d'un houleux passé. Je revois ses yeux noirs, emplis de haine et de douleur. Je revois ses mains tremblantes et je ressens son aura particulière. Il dégage un mélange d'animosité et de peur, c'est singulier... Peu conventionnel.
Il me semble être quelqu’un d’atypique, d’exceptionnel. Est-ce un mercenaire ? Un militaire ? Un espion ? Je ne connais rien de lui. Il m’intrigue.
Je m'endors sur ces réflexions et je me réveille, le lendemain matin, avec un horrible mal de tête.
La lumière filtrée par mes volets m'aveugle et m'empêche d'ouvrir les yeux. J'émets un grognement guttural tout en me blottissant dans mes draps. Du moins, jusqu'à ce qu'une main puissante ne les retire. J'ouvre alors grand les yeux, les sens en alerte, presque effrayée par la menace que je ne perçois pas dans un premier temps et que je n’ai pas même entendue arriver.
Et je le vois, je croise de nouveau son presque hypnotique regard onyx, ces deux beaux orbes ombrageux dans lesquels je me complais volontiers. Il pose fermement sa main sur ma bouche pour étouffer toute tentative de cri, pendant que l'autre presse ma poitrine, me plaquant contre mon matelas.
Hé, connard ! Je t'ai sauvé la vie. Lâche-moi ! est ce que j'aimerais lui dire.
J’essaie de mordre sa main, dans l'espoir qu'il cesse cela et vite. Je n'ai pas peur de lui, je sais qu'il doit simplement être déstabilisé et sans nul doute angoissé. D'ailleurs, comment diable peut-il être déjà sur pied ? Je l'ai seulement recousu hier !
C'est... inhumain.
Néanmoins, je sens qu'il n'en reste pas moins affaibli. Il peine à se tenir sur ses jambes, et son faciès aux traits crispés me laisse penser que la plaie fraîchement pansée doit encore être douloureuse.
"Où... suis-je ?", articule-t-il avec difficulté.
Je reconnais son accent : russe, de surcroît ?
Il retire sa main et ne se retient pas même de grimacer en la découvrant désormais humide et marquée de mes dents. Bien fait.
"Chez moi. J't'ai trouvé dans une ruelle hier, tu t'en souviens ? Je t'ai soigné. De rien, au fait. C'est avec grand plaisir que je joue les citoyennes modèles. Servir son prochain, ce genre de conneries, m'empressé-je de lui dire, m'étonnant moi-même. C'est bon ? Rassuré ?
- Où sont-elles ?" me demande-t-il, ignorant mes questions.
Il doit sûrement parler de ses armes.
"Cachées. Je te les rendrai lorsque tu seras remis sur pied et que tu pourras te casser d'chez-moi."
Il semble alors peser le pour et le contre et, finalement, il me relâche en se redressant. Je peux enfin respirer en toute tranquillité et être libre de mes mouvements.
Taré.
J'attends donc que l'importun quitte ma chambre pour me rendre dans la salle de bain et m’y enfermer.
Je me sens quelque peu oppressée.
Il est entré dans ma chambre sans que je ne m’en rende compte !
Mes vêtements glissent sur le sol froid et carrelé, avant que je n'entre dans la douche en faisant coulisser les parois de verre. Je laisse déverser un flot ininterrompu d'eau chaude le long de mon corps. Les yeux clos, la respiration rapide, je ne cesse de me torturer l'esprit avec mon invité. Qui est-il ? Pourquoi était-il blessé ? J'héberge probablement un dangereux criminel ! Peut-être un membre d'un quelconque gang ? Je ne le crains naturellement pas, je suis suffisamment forte pour le maîtriser. Mais le fait est qu'il m'intrigue.
La suite des événements promet d'être pour le moins fantasque, à mon grand désarroi.
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