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volume 17, Chapitre 2 « Quatre Amours : Renarde » volume 17, Chapitre 2

L’avait-il vu ? L’avait-il entendu ?

Toute de velours vêtue, elle s’était introduite chez lui, au détour d’une coursive. Habillée d’argent étamé de doré, ses yeux glacés reflétaient pourtant une chaleur qu’il n’aurait jamais soupçonnée.

La nuit s’avançait, minuit avait sonné et les habitués prenaient leurs aises, lorsqu’elle avait, la porte, bousculée. Élégante, sans paraître pour autant clinquante, son teint de porcelaine tranchait avec singularité l’ébène de sa chevelure, enfermée dans un lourd chignon piqué d’aiguilles immenses.

Comme tant d’autres avant elle, elle avait pris place sur un tabouret, sa veste posée sur ses genoux. Ses yeux couleur eau avaient croisé les siens et ils avaient échangé quelques mots.

Il avait alors souri et attrapé une coupe qu’il avait remplie de liqueurs cristallines, avant d’y piquer une olive. D’une parole, elle l’avait remercié puis s’en était emparée, cependant qu’elle s’était levée pour s’en aller s’attabler à une table solitaire et retirée.

Ses yeux s’étaient attardés, puis avaient dévié ; d’autres clients attendaient.

Toujours enjoué, il leur susurrait alors des paroles de velours, leur dérobant au passage ces quelques fragments de sentiments dont il agrémentait ses créations.

Minuit, une heure, deux heures, le temps défilait et les silhouettes s’éclipsaient ; la dernière toujours elle était, toujours à son comptoir, elle s’attardait, les lèvres pincées, les yeux baissés.

Combien de temps ainsi demeurait-elle ?

Jamais il ne le savait, jamais il n’éprouvait le désir de la retenir, jamais il ne souhaitait subvertir les sentiments qui, ainsi, l’animaient, même s’il en avait, depuis longtemps, percé le secret.

Pourtant, une flamme, en son âme, s’était éveillée et jamais il ne l’éteindrait, quand bien même elle lui serait fatale.

Le temps passait, les jours, les semaines, les mois défilaient, et toujours elle s’en venait retenant, chaque fois qu’elle disparaissait, les mots suspendus à ses lèvres.

N’osait-elle lui avouer son secret ? Ou était-ce lui qui se taisait ?

Un soir qu’il avait baissé le rideau, ne laissant filtrer que de minces raies de lumière au travers, il avait aperçu sa silhouette et avait hésité. Mais lorsqu’il avait ouvert la porte, il ne vit qu’un renard au pelage d’argent dont les yeux avaient la couleur de l’océan.


Texte publié par Diogene, 25 mars 2021 à 08h28
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