Du haut de son rocher, il surplombait la vallée, interrogeant sans cesse les murmures qui lui parvenaient. Dans le village, bien des choses se chuchotaient à son sujet, mais de cela il s’en fichait ; les hommes vivaient et c’était cela qui lui importait. À l’auberge, les bruits couraient et un homme, peut-être, plus téméraire que les autres, écoutait avec attention les récits qui se colportaient. Ainsi donc, l’on avait retrouvé un gamin sur la margelle de la fontaine et marchand près de la porte du vieux couvent ; tous deux persuadés d’avoir rencontré un enfant, fort singulier au demeurant, assis sur un rocher.
— Hé bien, moi ! Je m’en irai le défier ! se disait l’homme sans armure. Il est plus que temps de ramener la paix au village.
N’écoutant que son courage, il se mit en quête et marcha longtemps, bien plus qu’il ne l’aurait cru. Enfin, il aperçut l’enfant et lui fit face.
— Que fais-tu ? scanda-t-il, la lame au clair. Réponds, manant ! À moins que tu ne préfères que je te fende.
Mais l’enfant ne paraissait nullement impressionné ; ses mains virevoltaient devant ses yeux comme s’il jonglait avec quelques invisibles osselets et, dans un sourire, sur le ton de la confidence, lui répondit ainsi :
— Je suis venu terrasser le dragon et je l’ai vaincu. Je suis arrivé à temps.
Abasourdi, l’homme d’armes se demanda s’il ne se moquait pas de lui et, n’étant point homme à s’en laisser compter, il voulut abattre le rocher. Mais sa lame ne rencontra que le vide et, lorsqu’il la retira, il découvrit les écuries. Sa monture scellée l’attendait, de même que son armure, sa lance, son épée et son bouclier. Furieux que l’on se gaussât ainsi de lui, il enfourcha sa monture, harnaché et emmuré dans sa carapace de fer. Lancé à vive allure, il galopa en direction de l’enfant, qu’il aperçut bientôt danser sur son rocher dans le clair de lune.
— Te moquerais-tu de moi ? tonna le chevalier. Tu as ensorcelé les villageois ! De cela, j’en suis certain à présent. Maintenant s’en vient le châtiment !
Le chevalier chargea, mais sa monture s’arrêta net dans son élan ; l’enfant sautillait sur l’extrémité de sa lance.
— Voyons, messire ! rétorqua-t-il. Ne vous l’ai-je point dit ? Je suis venu terrasser le dragon et je l’ai vaincu. Je suis arrivé à temps.
À ces mots, la terre trembla et un nuage de poussière les enveloppa. Lorsqu’enfin l’homme d’armes put rouvrir les yeux, il était nu sur sa monture au milieu des jardins du couvent, sous les regards gourmands des nonnes.
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