L’arrivée de la jeune femme et de la troupe de chevaliers qui l’accompagnait passa pratiquement inaperçue. Il y eu bien quelques badauds qui s’agglutinaient derrière eux, mais rien de bien impressionnant. Lorsqu’ils entrèrent enfin dans le château, aux pierres vieillies datant de plusieurs siècles, pictées de mousses, et pourtant en bon état, ils étaient tous courbaturés et poussiéreux à cause de leur chevauchée. Tout d’abord, c'est à peine si on leur adressa un regard. Puis un jeune garde vint à leur rencontre. Il ne se présenta pas, mais exigea du groupe des explications. Il fut difficile de le convaincre que seuls les parents de la reine de Kinaroc pouvaient entendre leur message.
Le bruit provoqué par la légère altercation entres les hommes fit venir un autre garde, plus âgé. Il avait le crâne dégarni et portait une barbichette blanche qui ressortait sur sa peau brûlée par le soleil. Aussitôt l’atmosphère se fit plus joyeuse. Le nouveau venu renvoya le plus jeune garde à ses corvées et échangea plusieurs accolades avec les soldats crasseux de Kinaroc. Quelques blagues grossières ajoutèrent à la bonne humeur et tous semblèrent se détendre. Les soldats de Treinat et d’Ernel avaient appris à se connaître depuis que les deux royaumes s’étaient alliés, il y a de cela plusieurs décennies. Malgré quelques différents culturels, une franche camaraderie avait fini par remplacer les rancœurs d’antan. Le but de la visite fut vite mis de côté, le temps de se remettre du voyage et de saluer des amis de longues dates.
Un jeune garçon vint enfin s’occuper des chevaux assoiffés et l’on mena les hommes faire un brin de toilette au bord d’un étant proche. L’un des gardes ayant escorté la jeune femme, celui qui n’avait pas arrêté de raconter des blagues, se retourna vers elle, visiblement tiraillé entre son devoir et ses envies. Elle lui fit signe de ne pas s’inquiéter. Il lui adressa un regard désolé et rejoignit ses autres camarades. Seule, dame Azeo resta plantée dans la cour, adossé à la roulotte. Plusieurs minutes s’écoulèrent, mais personne ne se présenta à elle. Alors, elle décida d’explorer les lieux, de repérer les failles dans la surveillance du château. Elle savait que sa réputation l’avait précédée parmi le petit peuple et il ne faisait aucun doute pour elle que des gens se précipiteraient bientôt pour passer des contrats.
Plus jeune, après avoir découvert qui était vraiment cet homme l’ayant recueillie, elle s’était étonnée du fait que les mercenaires et assassins de l’Ordre de la nuit aient une aussi grande réputation, chacun sachant comment entrer en contact avec l’un des membres, sans que cela ne leur nuisent. Après tout, ils sont des criminels. Un soir qu’ils campaient dans les champs pour fuir une menace dont elle n’en savait rien à l’époque, elle avait pris son courage à deux mains et lui avait posé la question.
— Si les gens savent qui vous êtes, pourquoi ne vous dénoncent-ils pas ?
Chose étonnante et rare de sa part, il lui avait donné la réponse tant recherchée.
— Parce qu’ils ont trop peur.
— Pourquoi ?
— Parce que nous sommes des agents de la nuit. Une ombre parmi les ombres et que personne ne peut arrêter l’obscurité.
— Hum... Je ne suis pas convaincu.
— Oh ? Tu ne me crois pas ?
— Si ! Bien sûr que si ! Simplement, je trouve cette explication trop simple.
— S’ils font appel à nous, c’est qu’ils ont besoin de nous. De plus, si le boulot est convenablement fait, ils sont ravis. Ceux qui leurs nuisaient ont été éliminés par nos soins. Pourquoi vouloir faire arrêter quelqu’un qui t’a aidé ? Surtout que cela les forcerait à avouer nous avoir engagés, ce qui les condamnerait eux aussi.
— Et les nobles ? Et les rois ?
— Ce sont des gens comme les autres. Eux aussi ont des ennemis qu’ils préfèrent voir morts ou bien des personnes dont ils aiment connaître leurs secrets de manière à pouvoir leur faire du chantage. En fait, les hommes riches ou ayant du pouvoir sont ceux qui ont le cœur le plus noir. Ils n’hésitent pas à faire appel à nous pour un rien. Si l’Ordre venait à disparaître, beaucoup de nobles en souffriraient. Voilà pourquoi tous préfèrent tenir leur langue.
Il n’avait rien dit de plus, lui tournant le dos et lui exhortant de dormir.
Ce n’est que bien plus tard, alors qu’elle déambulait toujours dans la cour, mâchant une pomme trouvée dans l’écurie, qu’un jeune homme s‘approcha d’elle. Elle n’y prêta pas vraiment attention jusqu'à ce qu’il se plante devant elle. Plutôt grand, son corps paraissait mince malgré les nombreuses couches de vêtements qu’il portait, tous plus somptueux les uns que les autres. Ce n’était donc pas un garde. Sa cape aux bords en fourrure l’éliminait tout de suite de la liste du petit peuple et des serviteurs travaillants au fort, le plaçant dans la case des hommes fortunés. L’épée qui pendait à sa hanche le désignait comme un noble porteur d’un titre plutôt que d’un simple marchant fortuné. Ses cheveux bruns formaient de légères ondulations, tombant librement au-dessus de ses épaules. Certaines mèches bouclaient sur son front, faisant ressortir ses yeux d’un bleu peut commun et qui accaparaient l’attention de la jeune femme.
Il s’adressa alors à elle d’un ton empli de morgue.
— Manante, que faites-vous ici ? Vous n’essayez pas de nous voler tout de même ?
Le charme venait de se briser. L’étrange attraction qu’exerçait les yeux de cet homme avait pris fin dès qu’il avait ouvert la bouche.
— Oh ! Vous m’avez pris la main dans le sac.
La jeune femme avait décidé de jouer le jeu, de quoi la distraire. Elle agita la pomme à moitié croquée sous son nez.
— Nous allons en référer au souverain de ce château.
Il l’agrippa fermement par le bras, ce qui surprit la jeune femme et elle laissa tomber sa pomme.
— Regardez ce que vous avez fait ! Elle est fichue maintenant.
L’homme ne lui adressa pas même un regard et la tira jusque dans le château. D’un pas vif, sûr de lui, il traversa plusieurs couloirs. Le dallage au sol ainsi que les murs en pierres de tailles dans des tons grisâtres auraient pu donner un air inhospitalier et froid au fort. Néanmoins, cet effet était contré avec efficacité par de lourdes tentures aux couleurs vives suspendues à intervalles réguliers ainsi que par divers mobiliers en bois savamment disposés et dont l’essence donnait un aspect chaud. Là, un guéridon où reposait un vase empli de fleurs des champs ; ici, un tableau représentant un paysage montagnard en plein été, un groupe de dames ayant décidé de pique-niquer sur l’herbe enfin dépourvue de neige, le tout débordant de détails rendant la scène étonnamment réaliste.
A n’en pas douter par les merveilles qu’offraient les couloirs, les autres pièces dissimulées par des portes malheureusement toutes fermées devaient être fabuleuses à voir, débordant de décorations ravissant les yeux. L’image d’un fort reculé, perdu dans les montagnes austères de l’est, peuplé par un peuple barbare, et ne disposant donc que du strict minimum qui venait tout d’abord à l’esprit d’Azeo lorsqu’on lui parlait de Reanach venait de voler en éclat.
Continuant toujours de la traîner derrière lui, la tirant par le bras, l’homme ne fit même pas mine de ralentir lorsque se présenta une porte devant eux. Il appliqua simplement la main dessus et entra dans la pièce. Ouvrir la porte ne semblait pas lui avoir demandé beaucoup d’effort, les deux battants allant jusqu'à s’écraser bruyamment contre les murs. Ce simple fait impressionna Azeo. En effet, en plus du bois qui les composait, sûrement du pin, connu pour sa robustesse, les panneaux étaient renforcés par des barres de métal, permettant à la porte de faire un obstacle convenable au cas où le fort serait pris d’assaut, permettant à la famille royale de se trouver en sécurité. Cet homme était bien plus fort qu’il n’y paressait de prime abord.
Un vieil homme, assis confortablement sur un petit siège en bois, était entouré de jeunes nobles. Ils étaient en pleine discussion. La jeune femme observa tout d’abord les différentes personnes présentes, enregistrant distraitement leurs traits dans sa mémoire. Elle se concentra davantage sur le vieil homme dont elle déduisit qu’il s’agissait de Jakel Durandel, le roi. Savoir qui est qui et quelle place ils occupent d’un simple coup d’œil est l’un des talents à posséder pour quiconque désir survivre à la grande cour de Kinaroc.
Le temps avait accompli son œuvre, usant cet homme qui avait dû autrefois faire frémir quiconque se trouvant en sa présence. Aujourd’hui, il avait le dos et les épaules voûtés sous le poids de l’âge, lui faisant perdre de sa grandeur. Un ventre bedonnant tombait sur ses cuisses, tendant le tissu de ses habits. Son visage était gravé par les rides, mais possédait toujours des traits durs. Ses courts cheveux bouclés avaient blanchis depuis longtemps, tout comme ses yeux, voilés par l’âge. Pourtant, il gardait dans son regard une flamme qui le rendait plus vivant que bien des hommes, faisant ressortir des traces d’un vert profond qui devait égaler celui de l’émeraude.
Délaissant le groupe, Azeo reporta son attention sur ce qui l’entourait. La pièce, de taille moyenne, ne contenait qu’une table où étaient disposés divers papiers et cartes, ainsi que des chaises en bois. Rien de bien sophistiqué ni d’ostentatoire, juste du pratique. Des alcôves creusées dans les murs abritaient des statuettes à l’effigie de différents dieux, mais aussi des chandelles qui dégageaient une douce lueur. Malgré qu’il fasse jour au dehors, la salle ne disposait d’aucune ouverture permettant à la lumière extérieure d’y pénétrer.
De nouveau, la jeune femme s’intéressa aux personnes présentes. Deux gardes ayant rejoint le petit groupe se tenaient de chaque côté du roi. Ce dernier leurs porta un regard accusateur, ayant failli à leur rôle.
— Qui ose ainsi déranger le seigneur de ce château ? demanda le vieillard.
— C’est moi, Sire de Contespand. Je vous amène ici une voleuse que j’ai moi-même prise en plein forfait.
— Voyez-vous cela... Est-ce vrai, femme ?
— Oui, je mangeais une pomme.
— Un peu de politesse ! Tu parles à un homme infiniment plus haut dans la société que toi !
La jeune femme ne put retenir son sourire après les paroles prononcées par le jeune homme. Lui-même n'avait pas montré beaucoup d’égard à son roi en déboulant avec fracas alors que celui-ci était de toute évidence en pleine réunions.
— A bon ?
— Sale petite...
Il leva la main, près à frapper. Dans un geste provocateur, la jeune femme tendit la tête dans sa direction, lui présentant docilement sa joue.
— Cela suffit ! Il ne sera fait nulle violence à des gens de mon château sans mon accord. As-tu compris Doricien ?
— Oui, mon seigneur.
Se tournant vers les nobles encore présents dans la salle, le roi fit un petit geste de la main.
— Laissez-nous.
Et ils déguerpirent aussitôt, sans en demander plus.
— A vous ma... petite. Pour commencer, qui êtes-vous ?
La jeune femme se dégagea de la poigne du prénommé Doricien, avança de quelques pas et, mimant être vêtue d’une robe, fit une révérence parfaite.
— Dame Azeo, du château de Kinaroc, pour vous servir. J’apporte des nouvelles de votre fille, qui sont malheureusement bien sombres.
Le silence se fit quelques instants. La jeune femme savoura la surprise qui se lisait sur les traits des deux hommes. Autant l’expression du Sire de Contespand, lorsqu’il avait compris qu’elle était noble, la réjouissait, autant celle du roi la peinait.
— Je ne me souviens pas que l’on m’ait rapporté la présence d’une dame parmi la délégation de soldat arrivée plus tôt.
— Je peux vous assurer, seigneur, que je m’y trouvais bien. Néanmoins, il semblerait que personne ne m’ait remarquée, les hommes étant trop heureux de se retrouver ont été absorbés dans une joie toute masculine qui leur a malencontreusement fait oublier leurs devoirs. Je tiens à vous présenter mes excuses pour cette tenue peu conventionnelle. On a offert à mes compagnons de voyage de quoi faire un brin de toilette, mais comme vous pouvez le constater, ce ne fut pas le cas pour moi.
Le fait était que ses vêtements étaient maculés de boue, de poussière et d’autres salissures accumulées durant la route. Sûrement la raison pour laquelle personne ne l’avait identifié comme faisant partie de la gent féminine.
— Un oubli auquel on va immédiatement remédier. Sans vouloir vous offenser, ma chère, vous n’êtes effectivement pas très présentable. Ce bon Doricien va vous mener jusqu'à une petite rivière qui coule non loin d’ici et vous servira de protecteur. Je vous aurais bien fait profiter de l’une de nos baignoires mais le temps que l’on vous chauffe de l’eau, cela ira bien plus vite. Et puis je suis sure que ce n’est pas un peu d’eau froide qui vous effraiera après une telle chevauché, n’est-ce pas ? Nous organisons une fête en l’honneur de ma femme ce soir. Il s’agit de fêter son anniversaire. Cela nous ferait grand plaisir s’y vous acceptiez d’y prendre part.
— J’accepte avec joie, votre seigneurie. Ce sera pour moi un honneur.
Ce qui n’était visiblement pas le cas du Sire de Contespand, vu les poings qu’il serait tellement fort que ses jointures étaient devenues blanches.
Une fois lavée et revêtue d’une robe de velours rehaussée de fourrure, une jeune fille fit faire le tour du château à la jeune femme sur ordre du Sire de Contespand. Ce dernier n’avait pas tardé à s’enfuir, prétextant une affaire urgente. D’une taille bien plus modeste que le palais de Kinaroc, le fort avait néanmoins de plus grosses murailles où de nombreuses tours fleurissaient. Arrivé sur la plus haute des tours, la jeune femme admira le paysage tandis que la petite servante restait en retrait, sans pour autant cesser de fixer Azeo. Entre montagnes et forêts, prés et collines, le vert et le blanc rayonnait de partout sous le pâle soleil de midi. On aurait pu rester là des heures, à contempler l’horizon, sans jamais se lasser.
— C’est magnifique, n’est-ce pas ?
Surprise, la jeune femme se retourna d’un petit bon. Elle était tellement absorbé pas ses pensées qu’elle n’avait pas entendus la personne arrivé derrière elle. Elle s’en voulue. Si cela avait été un ennemi, elle ne serait déjà plus de ce monde. Soit qu’on l’ait fait passer par-dessus la rambarde, sois qu’on lui ait tranché la gorge. Ou bien les deux.
— Je m’excuse, je ne voulais pas vous faire peur.
— Non, non ! Ce n’est rien.
Azeo chercha du regard la jeune servante. Elle ne l’a trouva nulle part. A la place, une jeune femme, recouverte d’une armure de plate, se tenait droite, les mains appuyées sur le parapet, ses yeux gris fixés sur le paysage. Un vent léger soufflait, faisant se soulever les mèches argentées de la nouvelle venue.
— Oh ! Mais quelle malpolie je fais ! Je ne me suis même pas présentée.
Plaçant sa main droite sur son cœur, se redressant et levant fièrement la tête, elle ajouta :
— Dame Astrid, chef des chevaliers du Dragon Blanc.
— Dame Azeo, noble du palais de Kinaroc.
Elles éclatèrent toutes deux de rire, puis fixèrent à nouveau l’horizon.
— Si je puis me permettre, pourquoi vous appelle-t-on chevalier du dragon ?
La jeune femme c’était souvent posé la question. De ce qu’elle en savait, tous les royaumes avaient un groupe de chevaliers d’élites portant le nom de chevaliers du Dragon. Seule la couleur qui était associer à se dragon changeait selon la contré. A Ernel, c’était les chevaliers du Dragon Vert. A Lorendi, celui du Dragon Bleu. Pourtant, elle n’avait jamais réussi à trouver d’où pouvais bien venir se nom. Certain disait que cela venait de la couleur des dragons que montait autrefois cette caste de chevaliers, mais cela paraissait peu probable a la jeune femme. Après tout, les dragons n’étaient que des monstres peuplant les légendes d’Ataria.
Elle espérait que la femme qui lui faisait face pourrait lui donner une réponse. Azeo aimait découvrir de nouvelles choses et découvrir des réponses à des mystères passés. Elle devait cette curiosité, cette soif de réponses à cet homme qui l’avait élevé. Il lui avait fait comprendre que l’on n’était rien si l’on ne savait pas ce qui se trouvait derrière nous. Chaque chose est là où elle est à présent parce qu’elle a un passé, une histoire qui lui a permis d'être là. La première fois qu’il lui avait expliqué cette façon de penser, la jeune femme lui avait ris au nez.
Perdue dans ses souvenirs, la jeune femme ne vit pas le regard de son interlocutrice se voiler, perdre de son éclat, bien que celle-ci continue de la fixer. Un frisson lui parcouru le dos face a se regard scrutateur qui n’avait rien d’humain. Après un petit moment de flottement, le regard de la chevalière retrouva son éclat, laissant Azeo perplexe, se demandant si elle n’avait pas simplement imaginé de ce changement chez la femme qui se trouvait devant elle. Agissant comme si cela ne faisait pas une bonne minute qu’Azeo lui avait posé une question, Astrid repris la conversation là où elle s’était arrêtée.
— Oh, ça ?
La jeune chevalière pointa son armure, là où était peint un dragon blanc, puis elle se pencha légèrement en avant, mis ses doigts a sa bouche et souffla. Un sifflement aigu résonna dans toute la vallée en aval. Azeo la regarda, septique.
— Vous allez voir...
Et la jeune femme tendit le bras. Un bruit sourd, comme celui de battement d’ailes, se fit entendre. Une ombre passa par-dessus leurs têtes et se posa sur le bras d’Astrid.
— Mais, c’est... Non, impossible !
— Incroyable n’est-ce pas ?
Perché sur le bras de la jeune femme, un petit dragon tout argenté fixait Azeo de ses yeux d’un bleu électrique. Il poussa un petit cri, ressemblant plus à un grognement. Azeo fixait la créature légendaire comme si celle-ci risquait de disparaître d’un instant à l’autre, simple fruit de son imagination. Le petit dragon darda sa langue fourche dans sa direction et inclina la tête sur le côté en une sorte de question muette. Mu par la curiosité, la jeune femme tendit la main en avant, ces doigts à quelque centimètre de la créature. Toutefois elle n’alla pas au bout de son geste. Ce ne pouvait pas être réellement un dragon.
— Ne dit-on pas qu’ils ont tous disparus ?
— Cette petite est la dernière de sa race. Cela fait des années que les dragons blancs sont protégés par ceux de ce fort, en secret. Mais récemment des bandits ont attaqué leurs nids. Sur la cinquantaine d’œufs pondus cette saison, pratiquement tous furent fracassés. Tous les adultes ont été chassés ou emmenés pour leur peau, soit disant qu’elles font les meilleurs cuirs jamais fabriqués. Lorsque nous sommes arrivés, il ne restait que deux œufs intactes, cachés dans une crevasse. Nous les avons alors ramenés au palais.
Dans les yeux de la chevalière une rage sans limite brillait, ressemblant à de petites flammes et changea son regard en un brasier.
— Lorsque se fut à mon tour de veiller sur les œufs, une chose incroyable se produisit. L’un d’entre eux se fendilla, et un petit dragonneau en sorti. Chaque dragon est lié à son Drakir, une sorte de maître ou de dresseur. C’est la personne pour qui il choisit de quitter son enveloppe protectrice. Dire que ça a été moi... Enfin, nous avons réussi à sauver ce petit, au moins, et l’avons élevé comme nous l’avons pu.
Azeo fixa la jeune chevalière et son dragon. Elle se demandait toujours si elle n’était pas en plein rêve, mais de toute évidence ce n’était pas le cas. Néanmoins, la jeune femme se demanda pourquoi Astrid lui confiait un tel secret. Cela la surprendrait. Les dragons était une race éteinte depuis longtemps et tous les considérait comme des légendes. Pour cela, il était nécessaire que seule quelque personne soit au courant de leurs existences et donc uniquement les gens les côtoie. Certainement pas elle, une jeune noble venue d’un royaume voisin.
Suite à cette réflexion, Azeo se demanda si, tout comme Treinat, Ernel n’abritait pas aussi des dragons. Après tout, elle possédait bien un ordre de chevalier du Dragon Vert. La jeune femme se promis d’éclaircir cette question des qu’elle serait rentré à Kinaroc, retournant a l’instant présent.
— Pourquoi me raconter tout cela si c’est un secret ?
— Parce que vous me semblez être une bonne personne.
Un petit rire lui échappa. Le dragonneau secoua ses ailes pour garder son équilibre et colla son museau contre la joue de sa dresseuse.
— Oui, ma toute belle. Allez, va !
Et la petite dragonne pris son envol, majestueuse, et disparue, tache blanche au milieu des nuages.
— Si vous le désirez, je vous montrerais l’autre œuf.
Retrouvant ses esprits, comme si la présence du dragon l’avait anesthésiée, Azeo secoua la tête et revint enfin à la conversation en cour.
— J’en serais ravis. Mais ne faut-il pas l’autorisation d’un haut gradé ?
Se dirigeant vers les marches, la chevalière se tourna vers la jeune femme.
— Normalement si. Mais je ne pense pas que le chef des chevaliers dira quelque chose.
— Comment pouvez-vous en être si sûr ?
— Oh ! Mais parce que c’est moi.
Sur ces mots elle disparut dans les escaliers, son rire retentissant, laissant la jeune femme déconcerté.
Le soir venu, la jeune femme se dirigea vers la grande salle du château, non sans mal, ayant perdu sa guide avant d’avoir fini sa visite. Pendant son entrevue fortuite avec Astrid, sa jeune guide avait pris la fuite, laissant la jeune femme seule en haut des remparts. Elle avait flâné à gauche et à droite pendant quelque heure, profitant du manque de surveillance à son égard pour collecter un maximum d’informations sur le fonctionnement de cette forteresse. Puis, le froid venant avec le soleil couchant, Azeo avait demandé son chemin afin de gagner les quartiers lui ayant été alloué. C’est qu’elle devait se préparer pour la soirée en perspective.
Quelle ne fut pas sa surprise lorsque, le soir venu, elle franchit le seuil de la grande salle et découvrit tous les chevaliers qui l’accompagnait envahit par de nobles dames. Ils paraissaient à leurs aises, rigolant aux blagues de ces dernières, acceptant les salutations de certaines et refusant poliment les propositions d’autres. Seul l’un d’eux se tenait à l'écart, un œil réprobateur lancé au groupe. Azeo reconnue le capitaine. Au moins lui prenait son rôle au sérieux. C’est tout du moins ce qu’elle pensait jusqu'à ce qu’une Dame, quelque peu âgée, ses beaux jours étant à présent derrière elle, s'accrocha au bras du capitaine. D’abord surpris, celui-ci se fendis d’un sourire qui en disait long sur leurs relation.
Face à ce spectacle, la jeune femme dû se résoudre à accepter l’évidence : elle était seule. Non pas que cela lui déplaise, mais tout de même. Voir certain couple se former et se mettre à danser alors qu’elle elle restait en retrais dans un coin, le dos appuyer contre le mur froid, cette scène ne faisait que lui imposer sa solitude, aussi bien dans le cas présent que dans le reste de sa vie. Refusant de s’apitoyer sur son sort elle se mit à arpenter la pièce, saluant le roi. Scrutant la salle a la recherche d’un visage familier, c'est-à-dire du chevalier Astrid, du seigneur du fort, ou bien même du Sire de Contespand, elle n’en trouva aucun.
Fort déçus, elle songeait fortement à regagner ses appartements lors que le silence se fit dans la salle. Suivant le regard de ses voisins, Azeo fixa le couple qui se tenait fièrement sur l’estrade. Elle reconnue sans peine le roi de Treinat, bien que celui-ci ait changé de vêtements. Il arborait à présent fièrement les couleurs de sons royaumes, un mélange de blanc pur et de gris allant des tons les plus foncés au plus clairs. La femme qui se tenait à ses côté rayonnait de bonheur. Elle aussi avait les cheveux blanchis par l'âge. Elle les avait relevés en un somptueux chignon rehaussé de pierreries sur une armature en argent. Ses yeux pétillaient de bonheur et de joie de vivre.
Ne lâchant pas la main de sa femme, le roi de Treinat se lança dans un discourt, louant les qualités de sa reine et la remerciant de tout l’amour qu’elle lui portait. Azeo eu un pincement au cœur. Aurait-elle le doit, elle aussi, a un tel bonheur un jour ? Jusqu'à maintenant la vie ne s’était pas montrer des plus attentionnées à son égard. Elle se secoua mentalement et fini d’écouter l’allocution du roi. Celui-ci présenta leur invité, à savoir Azeo, rapidement mais avec tous les égards qui lui était due et fini par ponctuer que le banquet était ouvert. Puis, il embrassa sa femme sous les vivats des gens présent dans la salle.
La jeune femme se dirigea alors vers une tables ou divers mets de qualité étaient préparé et soigneusement présentés. Du gros gibier, sangliers et chevreuils, rôtissaient dans la grande cheminée, tandis que certains volatiles, comme des faisans, des cygnes et des paons, encore revêtus de leurs plumes et a qui ont avaient doré les becs, était disposé sur les tables, entourés de bannières et disposés sur des socles aux couleurs vives. Dans d’autres récipients richement décorés, on pouvait trouver betteraves, lentilles, choux, épinards ainsi que quelques fruits couteux tels que des figues, oranges, pêches, poires, et même fraises et framboises bien mûres. Un véritable festin, aussi bien pour les yeux que pour le palais.
Ne sachant que choisir, la jeune femme préleva un peu de chaque mets, tout en reniflant discrètement, à la recherche d’un quelconque poison. Elle n’avait aucune raison d’être sur ses gardes, mais assuré sa survie était devenus une seconde nature. Évidemment, elle ne détecta rien et savoura la nourriture. Toutefois, elle ne se sentait pas à l’aise. Elle sentait que quelqu’un l’observait, détaillait ses moindres faits et gestes. Se retournant d’un coup, elle surprit la jeune servante lui ayant servi de guide un peu plus tôt dans la journée. Elle avait encore le regard braqué sur Azeo et elle devint toute rouge, du menton jusqu'à la racine de ses cheveux. Néanmoins elle ne détourna pas le regard et inclina légèrement la tête vers une petite bourse qu’elle tenait à la main et sur laquelle un petit aigle était cousu.
La jeune fille requérait donc les services d’Azeo, non pas la noble femme, mais la mercenaire, comme l’indiquait l’animal cousu sur le petit sac, son emblème et moyen de la contacter. Ainsi, la jeune femme avait déjà du travail qui l’attendait... Elle reposa son assiette, se dirigea vers la servante et, la dépassant, elle murmura :
— Sur les remparts nord, à minuit.
Elle prit soin que seule la jeune fille l’entende et sorti de la salle. Son absence passerait certainement inaperçue. Il n’y avait personne qu’elle connaissait de présent et le roi était bien trop occupé à discourir avec certain noble tout en jetant des regards amoureux à sa femme.
Se précipitant vers la chambre qui lui avait été attribuée, la jeune femme réfléchissait déjà à sa future mission. Si une si jeune fille lui demandait un contrat, ce ne devait pas être pour rien. Surtout qu’elle ne s’adressait pas à n’importe quel mercenaire. Azeo ferma sa porte à l’aide du loquait et fouilla parmi ses affaires que des serviteurs avaient montées plus tôt de la journée. Elle dénicha facilement son arsenal. Elle y préleva deux dagues, quelques couteaux de lancer, et une papillote pleine d’un fort somnifère. Elle revêtit sa cape et sortie.
La nuit était sombre, une véritable aubaine. Toutefois, Azeo retrouva facilement la jeune fille.
— Que me veux-tu ?
— Vous êtes bien le faucon de la nuit ?
— Qui voudrais tu que je sois d’autre ?
— Pardonnez-moi ! C’est juste que je ne pensais pas que les rumeurs soient vraies...
— Sache que je n’ai pas que ça à faire. Pourquoi as-tu demandé mes services ?
— Il y a un homme, au château... Et, heu... Il fait certaines avances... un peu poussées aux jeunes servantes. Et je… Enfin, je me disais que... Euh...
— Tu veux que je lui règle son compte, c’est ça ?
— Oui.
— Mon aide n’est pas gratuite, tu sais ?
— J’ai de l’argent !
— Oh ?! Vraiment ?
— Oui ! Tenez, regardez !
La jeune fille lui lança le petit sac de toile. Azeo le soupesa puis vérifia son contenue. Plusieurs pièces de cuivres et une ou deux d’argent.
— Ce n’est pas assez.
— Je vous en prie, c’est tout ce que j’ai !
La petite servante était au bord des larmes. Azeo savait que cet argent représentait des mois et des mois de salaire, d’économie et de privation pour la jeune fille. Elle savait aussi ce que cela fait de ne pas pouvoir dire non à certaine personne sans risquer sa place, et donc sa vie. Oui, elle le savait très bien… Mais la jeune femme avait une réputation à tenir et ne pouvait pas se permettre de louer ces services au rabais.
— Revient me voir lorsque tu auras plus de pièces. Et si jamais il te vient l’idée de révéler mon activité pour te venger, sache que tu ne verras pas le prochain lever de soleil.
La jeune femme partit. Toutefois, la voix emplit de larmes de la frêle jeune fille parvint à ses oreilles :
— C’est le baron de Mont Castin ! Enquêtez sur lui et vous verrez que c’est une pourriture ! Je vous en prie !
Elle avait prononcé ces derniers mots tout en éclatant en sanglots, mais la petite servante était seule sur les remparts.
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