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tome 1, Chapitre 5 tome 1, Chapitre 5

L’œil négatif de la prévôt était définitivement infaillible. Car Josh était bel et bien l’homme le plus coincé de la planète.

Ce matin dans les locaux de la direction tout le monde lui adressait un regard admiratif. N’était-ce pas l’homme, qui hier soir avait neutralisé un intrus dans les logements du personnel ? Et cela suite à une surveillance de sa propre initiative. Enfin un cadre, qui se préoccupait du bien être des simples employés.

Bon la réalité divergeait quelque peu de cette version. Et alors ? Josh pouvait bien profiter un peu de cette gloire. Après tout il n’y avait pas eu mort d’homme. Puisqu’entre les premiers soins appliqués par le vigile, et les avancés de la médecine moderne, le suspect s’en était tiré. A présent il se reposait dans une salle d’isolement (c’était plus politiquement correct que cellule).

Mais non Josh refusait une médaille imméritée. Il ne rendait même pas le joli (et un peu niais) sourire de la magnifique secrétaire du directeur. A son corps défendant, il faut préciser que l’ex-militaire était sujet à quelques préoccupations. Par exemple on l’avait laissé mariner le restant de la nuit. Cela était parait-il nécessaire à ce que son prisonnier, et lui récupèrent.

A présent le moment était venu de rendre des comptes à propos de son insubordination.

Le fait que Walter Ganes affiche son expression neutre habituelle ne voulait rien dire. Peu importe son action le directeur demeurait toujours consensuel. Même lorsqu’il virait le pire des branleurs il employait des termes du genre : « Vous ne nous convenez pas. », « Voyez cela comme un nouveau départ »…. Par contre l’absence de Christelle était déroutante. N’était-elle pas également concernée ?

Puis Ganes prit la parole. De son côté Josh ayant appris à le connaitre, effectua une traduction intérieurement.

« Mon cher Josh, cette nuit vous vous êtes permis certaines libertés. Néanmoins cette initiative demeurait liée à vos attributions. Vous avez aussi à cette occasion grandement œuvré à la prochaine résolution des soucis, que connait notre parc actuellement. »

« Vous avez déconné. Mais cette histoire de meurtre la fout mal. Alors du moment que ça permet de régler au plus vite cette merde, je ne dis rien. »

« De plus vous êtes un élément apprécié à présent au sein du personnel. »

« Nos employés vous prennent pour un justicier, suite à vos conneries. »

« Sans oublier votre rôle clé au sein de votre équipe. »

« Les vigiles comme la majorité de nos employés se composent d’étudiants, de non qualifiés, et de pauvres. Ils sont exploitables, et changeables à merci. Par contre il est indispensable d’avoir une poignée de personnes compétentes pour rendre le tout cohérent. Et vous en faites partie. »

« Par conséquent il ne me semble pas approprié de vous sanctionner durement pour cette incartade. »

« Pour toutes ces raisons je me contente de vous faire les gros yeux histoire de donner le change. »

C’était bien la peine d’avoir fait venir Josh jusqu’à la direction. Surtout qu’on l’informa juste après que Christelle l’attendait pour l’interrogatoire du prisonnier.

La rationalité et le sens de l’organisation de l’ancien soldat, en prirent encore un coup.

********************

Les concepteurs avaient placés volontairement le centre de surveillance dans l’endroit le plus retiré du parc, à savoir aux abords du dôme protégeant de l’océan. Cette situation pouvait sembler paradoxale. Car la vue des fonds marins aurait dû attirer du monde. Sauf que laisser les clients se détourner ne serait-ce qu’un instant des attractions payantes au profit d’un spectacle gratuit, relevait de l’hérésie. Donc le dôme était totalement opaque, et n’offrait rien d’autre qu’une couleur bleue.

Cette zone étant peu fréquentée, on ne s’était pas trop emmerdé pour la décoration du centre. Il s’agissait juste d’une huitre en position fermée.

L’accueil discret au sein de la direction avait suffi à mettre Josh mal à l’aise. Alors imaginez ce que cela donnait avec des tapes dans le dos, des exclamations du style : « Toi t’en as dans le pantalon, mon pote. » Et bien contentez-vous d’imaginer ! Car cette scène n’eut pas lieu.

Josh était parvenu à instaurer chez ses subordonnés une discipline empêchant ce genre de débordement, du moins devant lui.

Une surprise l’attendait tout de même. Christelle était seule assise près de la machine à café. C’était étonnant qu’un gros lourd de service ne soit pas en train de tenter sa chance avec elle.

En fait ça c’était déjà produit. Christelle avait stoppé l’audacieux dans son élan en une phrase :

« Tu me sors une réflexion sur mes seins, je t’arraches la b... »

Ce n’était pas plus mal au vu de la réplique, qu’il avait préparé justement :

« Vous vous êtes toutes options. »

Prudent et solidaire, le dragueur du dimanche était partit sans demander son reste en avertissant au passage ses petits camarades. Normalement la prévôt faisait (un peu) plus subtil. Seulement cette nuit passée à ronger son frein, l’avait rendu irritable, enfin plus que d’habitude. Elle avait particulièrement hâte d’en finir.

Toutefois elle se permit une délicatesse envers le vétéran.

« Bonjour, félicitation pour votre arrestation hier soir. »

Si Christelle était très douée pour déceler les sentiments chez les autres, il en était autrement pour dissimuler les siens. Et avec sa vie actuelle de recluse, ça ne s’était pas arrangé. Ce compliment ne sonnait pas sincère. A vrai dire il ne sonnait rien du tout : ni jalousie, in admiration, ni reconnaissance.

Josh renonça à comprendre l’enquêtrice sur ce point. Il en était encore aux raisons de son absence chez le directeur. En fait elle désirait seulement éviter le discourt de Ganes.

« Vous m’assistez pour l’interrogatoire, d’accord ? » Ajouta la prévôt.

Ça s’éclaircissait un peu dans l’esprit de Josh. Suite aux évènements de la nuit dernière, Christelle percevait une éventuelle utilité chez le chef de la sécurité.

Immédiatement après le duo se rendit jusqu’aux cellules… salles d’isolement. Leur conception était digne de leur appellation si policée. Pas question de barreaux, des bancs en bois dur, et des murs gris avec des graffitis. Là on trouvait des vitres renforcées, des banquettes, et des murs beiges avec des écrans. Les écrans en question (sans bouton d’arrêt, et incassables) diffusaient en boucle des affiches sur : le vol c’est mal, l’alcool c’est mal… Bref de quoi préférer les cachots avec les rats.

Dans l’une d’entre elle attendait tranquillement le fameux cambrioleur. Allongé sur le canapé il arborait l’air narquois du collégien fier de sa bêtise, bien qu’il se soit fait chopper. A la différence que l’homme concerné avait la trentaine, et risquait plus que quelques heures de colle.

« Encore un surdoué. » Pensa Christelle en pénétrant dans la pièce.

Elle accorda tout de même le bénéfice du doute au prisonnier, et par conséquent conserva sa stratégie originelle.

« Richard Magellan ? » Dit-elle.

« Lui-même. » Répondit le prisonnier en se redressant brusquement. « Le descendant direct du célèbre explorateur Fernand de Magellan, le premier homme à avoir fait le tour du monde... »

La prestation n’était pas mauvaise. Richard savait jouer de son beau regard bleu, et disposait d’une bonne gestuelle. Malheureusement le public n’était pas réceptif.

L’enquêtrice interrompit d’abord le monologue par un énorme soupir, puis prit la parole à son tour.

« Je suis de la prévôté. Vous savez ce que c’est tout de même ? »

« Un rassemblement de gens, qui n’en savent pas autant qu’ils ne le croient. »

« C’est aussi des personnes ayant les moyens de vérifier rapidement les identités bidons. »

« Être le successeur d’une personne n’est pas une question de gène. C’est un état d’esprit, c’est partager… »

Et voilà qu’il faisait dans le lyrisme. Il y avait tout de même plus important que de justifier son ascendance légendaire.

« Il y a eu une tuée. » Se chargea de lui préciser Christelle en coupant sa tirade.

« Justement je ne voulais pas, qu’elle soit morte en vain. »

Décidément Christelle enchainait déception sur déception. Jusqu’ici elle conservait le mince espoir que Magellan ne soit pas au courant pour le décès. Ce qui excusait son insouciance.

Son interlocuteur prit ce ressentiment pour un regain d’intérêt. Enfin quelqu’un le prenait au sérieux.

« Voyez-vous il existe… » Poursuivit le prisonnier avant de s’interrompre.

Il désigna Josh d’un regard voulu discret.

« Cet homme vous a sauvé la vie hier soir. » Rappela la prévôt face à cette soudaine méfiance.

Magellan oublia alors ses réticences, et déballa fièrement toute son histoire. Cela le démangeait sans doute depuis longtemps. Visiblement il adorait s’écouter parler.

Refusant la terne réalité au sujet d’Atlantis, il était tombé dans un délire complotiste. Selon lui « on » dissimulait la véritable nature de la civilisation disparue, et en gardait jalousement les bienfaits. Bien décidé à lever le voile sur cette affaire notre aventurier amateur s’était rendu sur place, et avait fureté çà et là (notamment au musée).

Visiblement son comportement insolite avait dû intriguer Gina. Puisqu’elle rentra en contact avec lui de sa propre initiative. Elle parvint même à lui faire révéler les raisons de sa présence. Voyant en Magellan un pigeon potentiel, l’employée lui proposa la vente de reliques cachées. D’où le rendez-vous nocturne et discret.

C’est alors que Magellan était tombé sur le cadavre. Pensant que « ils » étaient responsables de ce meurtre, il décida de se faire discret. Frapper à un moment aussi opportun et avec une telle précision prouvait, que « ils » disposaient de leurs entrées dans le parc. D’où la réticence de l’aventurier de pacotille envers Josh. Cela expliquait au passage la tentative de cambriolage. Magellan voulait récupérer les reliques.

Hélas les révélations n’allèrent pas plus loin. Le prisonnier était arrivé après le meurtre, et n’avait absolument aucune précision à apporter à ce sujet.

Normalement l’entretien aurait dû s’arrêter là avec une petite inculpation de cambriolage. Après tout Magellan tenait plus de l’idiot, que du délinquant. Sauf que Christelle s’était tapée cette histoire pathétique sans progresser d’un pouce sur le meurtre. Soit il lui restait son autre piste. Mais elle voulait tout de même une compensation en échange de sa patience.

« Au fait voici les reliques que j’ai déniché avant vous dans la chambre de Gina. » Dit-elle en tendant les parchemins, qu’elle avait gardé sur elle en cas de besoin.

La prévôt savait, que Magellan disposait de bonnes notions en archéologie. Il allait donc découvrir la falsification, et réaliser sa bêtise. Il ne restait qu’à Christelle de profiter du spectacle.

L’aventurier tâta, observa… On allait y venir. Brusquement il releva la tête, puis s’adressa à l’enquêtrice d’une voix tremblotante.

« C’est… vous qui avez fabriqué çà pour me berner. Mais ça ne prend pas. Vous êtes avec « eux » ! Voilà la vérité ! »

Décidément cet homme aura été une déception jusqu’au bout. Il était grand temps de passer à autre chose.

« On se casse. » Se contenta de dire Christelle au vigile.

Pourtant le pauvre avait besoin d’un peu plus. Car une question lui trottait dans la tête.

« Qu’est-ce que je fous là ? »


Texte publié par Jules Famas, 15 avril 2016 à 15h18
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