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tome 1, Chapitre 18 tome 1, Chapitre 18

Nous avions sacrifiés un jour de permission afin d’être présents ce jeudi matin dans ce petit café de Marseille.

Notre groupe était quelque peu isolé par rapport aux autres. Le seul connaissant l’un d’entre nous, moi à savoir, rejoignit notre table par politesse.

Ainsi ils étaient tous rassemblés autour de ma personne, ceux m’ayant aidé dans mes investigations sur Hamed : Lucas, Thomas, et Vincent en me révélant qu’il constituait une fausse piste (son aide étant involontaire Didier ne comptait pas).

La dernière pièce manquante vint à son tour : Justine.

L’ambiance déjà pesante s’accentua encore un peu. Thomas tenta de lui proposer de s’assoir, un geste humain et un peu naïf. Le but de cette femme n’était évidemment pas la causette.

Malgré le cliché du gentil couillon lui collant à la peau, j’ai toujours soupçonné Thomas d’en savoir plus qu’il ne le laissait paraitre.

D’après Guillaume il s’était renseigné peu après mon coup de fil pendant sa vigipirate.

Thomas avait certainement dû faire quelques rapprochements. Sans doute le tact le poussait à garder le silence.

« Tu viens faire un tour. » Me dit Justine.

Il était évident que cet instant allait venir.

Justine avait laissé son fils entre les mains de ses amis au café.

Pourquoi diable l’avait-elle amené ? Il devait avoir deux ans à tout casser. Qu’est-ce qu’il pouvait y comprendre ?

Je suppose que c’était par principe. Un peu comme pour la présence de Vincent et de Thomas, qui connaissaient à peine Hamed.

N’ayant jamais eu l’âme très romantique, cette notion m’échappait quelque peu.

On fit quelques pas, puis elle balança la fameuse question. Elle le fit de manière brute. Je crois qu’elle en avait tout simplement marre, et voulait en finir au plus vite.

« Alors ton enquête, t’as appris quoi ? »

Qu’est-ce que ça pouvait bien lui foutre à présent ! Le corps de son mari avait été découvert enterré dans un bois à proximité de Toulon, il y a quelques jours.

Les gendarmes à force de recoupements et de techniques scientifiques, étaient parvenus à ce résultat.

Il fallait s’y attendre que la fin de l’histoire soit apportée par les vrais professionnels

De mon côté je n’avais même pas eu le temps d’interroger, les fameux amis d’Hamed.

Remarque d’après ce que nous venions d’apprendre ç’aurait été probablement inutile.

Justine agissait je suppose pour les mêmes raisons la poussant à emmener son gosse assister à un enterrement dont il ne garderait aucun souvenir.

C’était son choix après tout.

« J’ai une explication pas très claire, et surtout aucune preuve. » Expliquais-je en guise d’avertissement.

« Je m’en contenterais. »

J’essayais que mes conclusions ne soient pas aussi brouillonnes que mes investigations. A vous de juger.

« La date de la mort approximative d’Hamed que les gendarmes t’ont donné. Elle correspond à une autre mais par overdose, celle d’un certain OSMAN.

Il faisait partie d’un groupe de connards de Malbousquet, le camp disciplinaire. Ils se shootaient tous avec une drogue frelatée. Lorsqu’OSMAN est mort à cause d’elle ils ont cachés le corps.

Puis après ils ont voulu retrouver le dealer.

Avant ça Hamed s’est retrouvé mêlé au décès d’OSMAN ou à sa dissimulation. Il a peut-être surprit une conversation ou des préparatifs sans le vouloir.

N’étant pas des leurs, ils ne lui faisaient pas confiance. Alors ils se sont occupés de lui plus tard. C’est pourquoi les corps n’étaient pas cachés au même endroit. L’instant, et les conditions étaient différents. »

Aurais-je pu y mettre plus de tact ? Je ne crois pas que c’était possible étant donné la situation.

Justine accusait le coup. Pourtant mon rapport ne contenait aucun détail choquant sur le décès de son mari.

La cause se suffisait à elle-même. Un hasard malencontreux et quelques salauds, il n’en avait pas fallu plus pour supprimer une vie.

La pauvre veuve atteignait ses limites. Elle parvint tout de même à baragouiner un remerciement d’après ce que j’en saisis.

Comme si je le méritais que ce soit pour mes actions ou leurs raisons.

Elle demeura quelques instants silencieuse avec moi à ses côtés ne sachant pas quoi faire.

La main sur l’épaule, la prendre dans mes bras, dire que j’étais désolé, dire qu’Hamed était un type bien….

Aucune de ces banalités ne me parut adéquate.

Puis Justine reprit la parole, et s’engagea un dialogue banal purement informatif. Nous n’étions pas en état de faire mieux.

« Bon je vais y aller. »

« Et ton gamin ? »

« Je me suis arrangé. Samira la grande brune au bar, le gardera cette nuit. J’ai besoin d’être un peu seule. Tu remercieras Thomas et Vincent de ma part. Ah et salut Richard aussi. »

« Richard ? »

« Oui un appelé, un roux baraqué. »

A cette annonce mon regard me trahit. Encore un plantage à mettre de plus sur mon compte.

Nous pensions en avoir fini. Et puis voilà que je devais révéler une horreur de supplémentaire à contrecœur.

Je ne disposais pas de la force nécessaire pour mentir ou me taire face à Justine.

Tout d’abord elle me procura des éléments confirmant l’évidence qu’il s’agissait de Michaël, et éclaira par la même occasion quelques points restés obscurs.

Michaël m’avait apparemment entendu citer Hamed lors de la sortie vengeresse, et également comprit que j’étais un appelé.

Peut-être qu’un de ses potes emprisonnés étaient parvenus à le contacter et à l’informer sur ce dernier point. Ou alors mon crâne rasé l’avait mis sur la piste.

Quoiqu’il en soit il remonta comme moi jusqu’à Justine.

Ensuite il endossa le rôle d’un appelé cherchant quelques camarades croisés pendant ses classes dont moi. Il prétendit également ne pas se souvenir mon nom.

Justine pensant bien faire lui fournit grâce à ma description, ce qu’il désirait : mon identité et l’endroit de mon affectation.

C’était comme si Michaël venait de me foutre une branlée.

Il m’avait retrouvé si facilement recherché par les forces de l’ordre sans les conseils d’un Didier, et à ma connaissance sans expérience dans le milieu de l’investigation.

Mon petit égo dégustait une fois de plus.

Puis Justine me ramena à la priorité. Elle avait donné, maintenant elle était en droit de recevoir.

Et pas de « oh c’est personne. » après toutes ces questions. Il ne fallait pas la prendre pour une conne.

Je décidais une fois de plus d’aller à l’essentiel. Seulement entre décider et appliquer.

C’est le regard fuyant et le timbre cafouillant que j’annonçais la vérité, et encore de manière détourné.

« Il est de la bande de connards. Il n’appréciait pas que j’enquête. Il m’a attaqué avec un couteau. Et… »

Justine finit ma dernière phrase si pénible.

« Et Hamed est mort d’un coup de couteau. »

Une fois ces mots prononcés elle s’appuya sur mur. Elle venait tout de même d’apprendre, qu’elle avait accueilli chez elle l’assassin de son homme.

« Où est-il ? » Demanda-t-elle avec une rage soudaine.

« En taule. » Je fus content de répondre.

Qui sait ce que Justine aurait été capable de faire sinon.

« C’est bien. » Dit-elle la tension un peu retombée.

Puis elle m’adressa un regard reconnaissant. Elle croyait à un acte volontaire de ma part, et non pas un plan improvisé par Tarek.

Bien entendu je culpabilisais. Mais il ne valait mieux pas en rajouter de mon point de vue.

« Et le couteau ? La police le détient. »

« Non. On l’a laissé sur place. »

Justine ne m’engueula même pas. Elle n’insista que sur l’urgence de retrouver l’arme.

Je m’y engageais bêtement, me prenant pour un justicier. La folie des grandeurs, c’est bien beau. Ça n’empêche pas la réalité pour autant.

Vous croyez que c’était possible de mettre la main sur cette lame paumée plusieurs jours auparavant dans un lieu de passage ?

Tout était finit. Il ne restait plus aucun mystère à résoudre.

Sauf le responsable l’argent volé à Lorient en supposant que cela ait une importance par rapport à tout le reste, et le dernier membre du groupe de Michaël à être encore dans la nature.

Le fugitif en question ne tarda pas à rejoindre ses camarades. Au moins ils ne seraient plus en mesure de faire du mal.

Une bien maigre consolation.


Texte publié par Jules Famas, 25 décembre 2015 à 11h39
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