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tome 1, Chapitre 13 « Walter » tome 1, Chapitre 13

-Tu es certain qu'ils vont bien, Walter?

Le vieil homme se laissa distraire quelques secondes de ses activités par la question et se tourna vers son fils, qui détaillait Olivia des pieds à la tête d'un air inquiet.

En effet, dès qu'Astrid eut déterminé l'endroit où se cachait Archer et qu'elle en eut averti les autres, Walter avait ardemment insisté pour qu'elle le conduise sur place. Ils étaient arrivés sur les lieux pratiquement au même moment que les renforts. Et ils étaient, d'une certaine façon, arrivés à temps et trop tard à la fois: à temps pour assister aux effets secondaires du vortex - c’est ce qui importait le plus à Walter à cet instant. Mais trop tard pour empêcher les Shapeshifters et leurs acolytes d'emmener Rob Archer avec eux.

Le bâtiment en construction où le drame s'était joué était éventré, une partie des briques formant le pourtour d’une fenêtre s’étant désolidarisées du mur et envolée sous l’effet de l’attraction. A l'extérieur, Olivia était figée, l'arme au poing, une expression froide sur le visage. A l'intérieur, au milieu de débris en suspension, le lieutenant Wuornos, tout aussi immobile, une main agrippant fermement le bras de sa partenaire; laquelle, les sourcils froncés et la bouche entrouverte, devait avoir été surprise par le phénomène alors qu'elle plaidait ardemment auprès d'Archer pour qu'il se calme.

D'après les appareils de mesure de Walter et les données relevées par son détecteur, le vortex avait été d'une puissance plus grande que les précédents. C'est pourquoi il n'était pas étonné du tout que les effets en perdurent plus longtemps. Un fait qui, une fois passé le moment de vive inquiétude que certaines de ses théories lui avaient occasionnées, n'était d'ailleurs pas totalement pour lui déplaire. Mais les autres membres de l'équipe n'entendaient pas les choses de cette oreille.

-Ils vont très bien, répondit Walter un peu sèchement à Peter avant de retourner à ses mesures.

Duke, remis de ses petits soucis d’équilibre entretemps par un traitement administré d'une main experte par Astrid, s'approcha et s’adressa à Walter tout en désignant du doigt ses amis immobiles.

-Ca dure trop longtemps. Il faut que vous fassiez quelque chose pour les ranimer.

Walter sentit une bouffée de colère l'envahir. C'était déjà assez frustrant d'avoir une équipe du FBI entière qui piétinait ses plate-bandes alors qu'il analysait les lieux, sans ajouter qu'on le distraie en mettant sa parole en doute à tout bout de champs. Qui était le scientifique ici, à la fin? Comment pourrait-il tirer au clair l'implication de l'autre côté et des Shapeshifters dans l'affaire si on ne lui laissait pas l'occasion de se concentrer?

L'espace d'une seconde, il fut sur le point de se tourner vers le jeune homme et de lui asséner une phrase bien sentie pour le remettre froidement à sa place. L'espace d'une seconde... il sentit revenir à la surface l'homme qu'il était il y a bien longtemps. L'être arrogant qui prétendait avoir l'esprit ouvert plus que n'importe qui, mais n'avait d'égard pour l'avis des autres que lorsqu'ils abondaient en son sens. Celui-là même qui, armé pourtant des meilleures intentions, avait été jusqu'à traverser la frontière vers un univers alternatif et ramener avec lui une autre version du fils qu'il avait perdu.

Et qui avait ainsi déclenché la guerre destructrice qui couvait aujourd'hui entre cet univers et le nôtre.

Cette pensée le frappa de plein fouet, cette image passée de lui-même s'imposa dans son esprit et lui fit honte. La colère s'estompa aussi vite qu'elle était venue et c'est d'un ton paternaliste qu'il répondit finalement à Duke.

- Si l'effet perdure de façon anormale, nous envisagerons...

Il s'interrompit en voyant le lieutenant Parker remuer légèrement.

- Pas immunisée contre les effets secondaires, dit-elle à mi-voix comme si elle achevait une phrase démarrée plus tôt.

-Bon retour parmi nous, ma chère, fit Walter avec un sourire aimable. Je vous l’avais dit, ajouta-t-il à l’attention de Duke alors que Nathan et Olivia reprenaient vie à leur tour, il n’y avait réellement pas lieu de s’inquiéter.

Réflexion qui n’empêcha pas Duke, l’air soulagé, de donner une courte accolade chaleureuse à Audrey.

-Je vais bien, lui dit la jeune femme d’un ton rassurant.

Après quoi, elle se tourna vers Nathan et le serra à son tour brièvement dans ses bras. Il y eut un instant de flottement durant lequel tout le monde se demanda si Duke allait faire pareil. Mais celui-ci se contenta d’un vague geste de la main à l’attention du lieutenant.

-T’étais à peine moins expressif en version statue qu’au naturel, commenta-t-il. Mais content que tu sois revenu à ton état…disons…normal.

Nathan se contenta d’un sourire un peu pincé en guise de remerciement pour ce qui s’apparentait tout de même, venant de Duke, à un mot gentil à son égard.

Après ces quelques instants consacrés au soulagement, la première a vraiment revenir à la réalité concrète fut Olivia.

-Où est Archer ?, lança-t-elle d'une voix pressée.

-Disparu, répondit Peter. On est arrivés trop tard.

Olivia se mit à chercher quelque chose du regard autour d'elle.

-J'ai blessé un des kidnappeurs, il devrait être là.

-Ses complices ont dû l'emmener également, répliqua Nathan qui lui aussi examinait à présent les alentours.

Olivia piétina nerveusement sur place.

-On aurait pu l'interroger, maugréa-t-elle.

-Ils n'ont peut-être pas repris celui que vous aviez descendu avant ça, intervint Duke. Celui qui avait essayé de me...

Il esquissa de la main un geste autour de son visage et termina par un doigt passé sur sa gorge, comme si les mots « copier » et « tuer » le rebutaient trop actuellement pour qu'il les prononce, puis il continua :

-… enfin, vous voyez ce que je veux dire. Mais bon, il est mort, j'imagine qu'il ne nous servirait à rien.

Olivia et Peter échangèrent un regard entendu.

-On peut toujours aller voir, fit Peter .

Walter émit quelques protestations de ne pas pouvoir terminer ses relevés mais Astrid l'assura qu'elle continuerait à sa place, et il suivit donc le groupe qui se mit en route à la recherche du cadavre. Le lieutenant Wuornos vint rapidement marcher à côté de lui.

-Docteur Bishop ? Tout à l’heure Audrey et moi avons un peu discuté et nous avons une théorie sur la raison pour laquelle Archer intéresse tant les métamorphes. Mais nous voudrions être sûrs d’avoir bien compris ce qu’est cet autre univers dont ils viennent.

Peter les suivait de près et intervint dans la conversation, craignant sans doute que son père ne s’égare dans une de ces explications techniques et nébuleuses dont il avait le secret.

-Ce que nous appelons l’autre côté est une sorte de réalité alternative. Il y a là-bas des gens tout à fait comme vous et moi, une autre version de notre monde. L’histoire s’y est déroulée de façon légèrement différente, suffisamment pour qu’ils aient une certaine avance technologique sur nous. Entre autres « merveilles », ils ont créé ces êtres synthétiques capables de changer d’apparence, qu’ils utilisent comme espion en les envoyant chez nous par divers moyens que nous arrivons parfois à détecter, et parfois pas.

Nathan échangea un regard avec Audrey, signifiant que c’était bien à peu près ce qu’ils avaient compris.

-Alors, dit-il d’un air concentré, si j’ai bien suivi les démonstrations du Dr Bishop tout à l’heure, lorsqu’Archer crée un vortex, cela donne l’impression d’une tentative d’intrusion chez nous de leur part. Mais est-ce qu’il est possible que le vortex que cause Archer ici soit perceptible aussi de l’autre côté ?

Walter fronça les sourcils.

-Considérant que le phénomène implique une harmonisation partielle des vibrations au niveau atomique de...

-Walter, l'interrompit Peter, fais-nous la version courte et claire, s'il-te-plait. C'est possible, ou pas ?

Walter eut l’air surpris, comme si la réponse devait aller de soi pour tout un chacun.

-C'est plus que possible, fils. C'est certain. Si des objets de notre côté flirtent avec la frontière qui nous sépare d'eux, ils peuvent parfaitement le détecter s’ils ont un système équivalent au mien, ce dont je ne doute pas.

-Dans ce cas, expliqua Audrey, peut-être que ceux de l'autre côté réagissent un peu comme nous. Je veux dire, nous savons que lorsque le père de Rob Archer est décédé il y a quelques mois, il avait créé un vortex juste avant de mourir. Ma théorie, ce serait que de l'autre côté, ils ont repéré le phénomène à l’époque, et qu'ils se sont imaginé que nous tentions une intrusion chez eux.

-Après, continua Nathan, on peut supposer qu’ils ont dû finalement se rendre compte que personne n'était passé, mais qu’ils ont fini par tout de même envoyer des Shapeshifters chargés de trouver ce qui avait causé cette anomalie.

Peter écoutait d’un air pensif mais approbateur, alors que Walter paraissait s’être à nouveau égaré dans son propre petit monde intérieur.

-Sachant où et quand l'anomalie s'était produite, ils auraient fait le rapprochement avec la mort du vieil Archer, et leur enquête aurait amené l'un d'eux à « emprunter » l'identité et les souvenirs d'un ami de la famille Archer, réfléchit Peter tout haut.

-Oui, renchérit Nathan. Grâce à ces souvenirs, ils sont du coup au courant des infections et de la particularité d'Archer. Ils veulent s'en emparer… disons… pour vérifier s'il ne représente pas un danger?, ajouta-t-il avec un petit haussement d’épaule marquant son incertitude sur ce dernier point.

Peter agita la tête positivement.

-Ca se tient. Walter, tu en penses quoi ?

-Votre raisonnement pourrait expliquer comment les Shapeshifters ont repéré les capacités d’Archer, effectivement, répondit celui-ci, la mine grave. Mais je crains que vous ne leur ayez attribué à tort des circonstances atténuantes dans leurs raisons de vouloir le capturer.

-Que voulez-vous dire ?, interrogea Nathan.

Entretemps, ils étaient arrivés là où Audrey et Olivia avaient abattu le Shapeshifter tout à l’heure. Et il était toujours bien là. L’air vaguement dégoûté par le cadavre de l’être qui lui ressemblait presque trait pour trait, Duke s’était arrêté à plusieurs mètres et n’observait plus la scène que de loin, les poings serrés enfoncés dans les poches de son gilet. Les autres s’approchèrent beaucoup plus près.

Walter était impatient de se pencher sur le cadavre et faillit s’y précipiter sans délai, mais il se souvint que le lieutenant Wuornos lui avait posé une question, suffisamment importante pour qu’il prenne le temps d’y répondre au mieux.

-Les technique qu’utilisent ceux de l’autre côté pour l’instant afin de traverser entre les univers représentent un danger pour la santé de ceux qui effectuent le voyage. C’est en partie pour cela qu’ils n’envoient principalement que des êtres artificiels comme les Shapeshifters. Mais ils sont toujours à la recherche de nouveaux moyens de traverser en toute sécurité.

-Je ne suis pas sûre de comprendre, dit Audrey. Vous voulez dire qu’Archer pourrait leur fournir un moyen de traverser ?

Walter se tourna à nouveau vers Nathan.

-Vous vous rappelez ce que vous avez dit dans mon laboratoire tout à l’heure, jeune homme ? Que la plaque de verre qui était fissurée allait finir par se casser, sous les coups répétés de la bille que j’y lançais ? Voilà votre réponse.

Et cette fois Walter leur tourna le dos et se dirigea vers le cadavre.

-Attendez, fit Nathan, je ne vois toujours pas…

Le regard de Peter s’était éclairé et ce fut lui qui répondit à la place de son père.

-La frontière entre les univers est fragilisée à certains endroits, fissurée comme la plaque de verre, si vous voulez, . Apparemment Walter, et probablement les Shapeshifters aussi, pensent que si Archer utilise son pouvoir dans un lieu approprié, il pourrait… traverser.

-Avec quelles conséquences ?, demanda Nathan, interloqué. Parce que quand on voit les dégâts que fait déjà un vortex « normal »…

Peter eut un haussement d’épaule fataliste.

-Difficile à dire pour l’instant. Mais si j’étais à la place des Shapeshifters, j’étudierais soigneusement Archer, sous toutes les coutures, pour trouver l’origine de son pouvoir et déterminer s’il est possible de le maitriser ou de le modifier pour s’en servir de façon sûre.

Audrey et Nathan eurent une mine atterrée.

-Il faut absolument retrouver Archer, dit Audrey. Dieu sait ce que ces... choses... sont capables de lui faire pour arriver à leurs fins.

-Je crois que notre ami ici présent peut nous aider à remettre la main sur ses acolytes, lança soudain gaiement Walter, penché sur le Shapeshifter.

Tous tournèrent le regard vers lui.

-Je ne sais pas laquelle d’entre vous l’a tué, Mesdemoiselles, continua-t-il en s’adressant évidemment à Olivia et Audrey, mais vous avez eu la bonne initiative de ne pas viser la tête.

Il releva les yeux, découvrit des mines perplexes et des sourcils froncés et ajouta en guise de clarification :

-Vous n’imaginez pas à quel point cela complique l’interrogatoire quand celui a qui on pose les questions a une balle logée dans le cerveau.


Texte publié par Spacym, 2 juillet 2015 à 14h32
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