Pourquoi vous inscrire ?
«
»
tome 1, Chapitre 1 « Prologue » tome 1, Chapitre 1

Comment pouvez-vous nous regarder ?

Comment le pouvez-vous ?!

Vous nous avez conduits dans cet enfer ! Vous nous torturez ! Vous nous affamez !

Et vous osez encore nous regarder...

Vous contempler notre maigreur... vous contempler notre souffrance...

Guettant l'ombre de la mort...

Un jour, le monde saura. Saura pour tout ceci !

Pour l'exploitation ! Pour les expérimentations médicales ! Pour les sévices !

Pour tout !

Je ne suis plus humaine.

Je ne suis plus qu'un vulgaire squelette.

Mais un vulgaire squelette qui vous résiste encore.

Qui vous résiste encore !

Jamais je ne renoncerai ! Vous m'entendez ?! Jamais !

Je cracherai sur vos foutus bottes cirées jusqu'à la fin !

Je cracherai sur vos foutues gueules jusqu'à la fin !

Je cracherai sur la SS, la Gestapo et Hitler jusqu'à la fin !

La fin ?

La libération ou la mort...

Quoi qu'il en soit, je demeurerai la tête haute...

- Baisse le regard !

Baisser le regard ?

Allons... laissez-moi savourer au moins quelques secondes...

- Je t'ai dit de baisser le regard, sale femelle !

Sale femelle...

De la part d'une femme, c'est assez cocasse...

- TU N'ES QU'UNE MISERABLE VERMINE !

Les gouttes de pluie martèlent mon visage.

Les coups pleuvent.

- UNE SALOPERIE DE VERMINE !

Je ne tente même pas de me protéger. Tout ce qui m'importe, c'est de lui montrer que je sais encaisser.

- TU N'ES RIEN ! RIEN !

Les autres détenues ne s'arrêtent pas.

Les autres détenues font comme si de rien n'était.

Pas parce qu'elles se moquent de mon sort... non...

Parce qu'elles pourraient y laisser leur peau... tout simplement...

Les Aufseherinnen (1) sont des monstres avides de sang et de souffrance.

Elles n'hésiteraient donc pas à frapper les curieuses qui oseraient regarder le spectacle. Ou pire encore.

- ALORS TU VAS BAISSER TON REGARD !

Encaisser... encaisser sans lâcher un seul gémissement... tel est mon devoir...

Malgré le feu qui irradie mes côtes, je me retiens de crier...

- SALE PUTAIN !

Une putain...

Je l'étais parce que vous m'avez obligée à le devenir. Parce que la Kommandantur avait besoin de femmes pour purger les envies des SS ou des prisonniers « méritants ».

- Je crois qu'elle a compris...

Maria Mendl se stoppa immédiatement.

Tellement obnubilée par la douleur... au point de ne pas entendre le claquement familier des bottes des SS.

- … ils ont éliminé beaucoup de détenues aujourd'hui, Aufseherinnen. Il serait judicieux d'en conserver un minimum valides.

La bourreau s'écarte à quelques mètres de nous, sourire aux lèvres.

- Quant à toi...

Le SS s'accroupit à mes côtés. Je ravale mes larmes de souffrance.

- … ne t'avise plus de nous manquer de respect... ou je puis t'assurer que tu finiras rapidement dans l'une des chambres...

Je ne prends pas ses paroles au sérieux.

Car lui est différent.

- Ai-je été assez clair...

Lui, différent...

Oui, c'est un SS... enfin, à l'extérieur...

L'uniforme, la tête de mort, les éclairs...

Oui, en apparence, il était SS. Mais, en son fort intérieur...

- Réponds, détenue...

Ses doigts se glissent sous mon menton et le redressent avec rudesse.

Mes yeux fixent toujours le sol.

- Oui...

Le SS-Obersturmführer (2) se penche légèrement vers mon oreille gauche.

- Ne me fais plus pareille peur... je t'en conjure...

En son fort intérieur... il haïssait le nazisme...

Il haïssait cette Allemagne des Ténèbres. Et son chef, Adolf Hitler...

- Retourne au travail !

Sans crier gare, il me repousse violemment.

Cependant, je ne lui en veux pas...

Cela fait partie du jeu...

- Serais-tu devenue sourde ?! Au travail, putain !

Je me relève difficilement.

Mendl s'était acharnée sur mes côtes. Beaucoup trop.

Et malheureusement pour moi, les nazis éliminaient les prisonnières présentant la moindre faiblesse.

Sous le regard de Mendl, je rejoins mon Kommando.

Sous le regard d'Hanz Rosenberg, je rejoins mon Kommando.

A l'extérieur, c'est un nazi. A l'intérieur, c'est un anti-nazi.

Il avait adhéré au parti parce qu'il avait compris qu'Hitler préparait le chaos.

Il avait décidé de postuler chez la SS afin de combattre le nazisme de l'intérieur.

Il avait rejoint une petite poche de résistance allemande qui prévoyait d'assassiner Hitler.

Et il faisait tout pour me protéger dans l'enceinte du camp...

Qui aurait cru cela possible ?

Personne...

Personne n'aurait pu croire qu'un SS et une déportée puissent s'aimer...

Personne...

x----------x

1- Gardienne auxiliaire des SS dans les camps de concentration nazis

2- Equivalent de lieutenant


Texte publié par Honorine Baiker, 27 mai 2015 à 23h54
© tous droits réservés.
«
»
tome 1, Chapitre 1 « Prologue » tome 1, Chapitre 1
LeConteur.fr Qui sommes-nous ? Nous contacter Statistiques
Découvrir
Romans & nouvelles
Fanfictions & oneshot
Poèmes
Foire aux questions
Présentation & Mentions légales
Conditions Générales d'Utilisation
Partenaires
Nous contacter
Espace professionnels
Un bug à signaler ?
2905 histoires publiées
1299 membres inscrits
Notre membre le plus récent est Camille Marin (CM)
LeConteur.fr 2013-2025 © Tous droits réservés