Au sous-sol du Blueprint se trouvaient les bureaux des activités principales d’Anton : le cybercrime. Des serveurs et des machines à la pointe de la technologie, des connexions au Réseau à très haut débit, des espaces de réalités virtuelles privés pour ses clients.
Il louait certains de ces espaces sécurisés à ceux qui en avaient besoin, et, dans les autres, son armée de hackers s’activait. Adrian n’était qu’un ami de la famille en quelque sorte. Anton avait de l’affection pour lui et le contactait de temps en temps pour des missions précises, que les contacts du jeune homme dans les hautes sphères de la société l’aidaient à mener à bien. Il avait profité des largesses de sa mère et de l’entreprise pendant des années.
De nouvelles lunettes chaussées sur son nez et grâce aux implants insérés dans sa main, Adrian naviguait sur le réseau de Sélène — plus précisément sur la Toile Noire, la partie secrète et illicite du réseau.
Malgré sa concentration, il ne pouvait pas oublier la présence du patron du club dans son dos. Adossé au mur près de l’entrée, il le surveillait attentivement.
— Je t’ai dit que je mènerai à bien ma mission, lâcha le jeune homme, agacé.
Anton sourit.
— Je vois que tu reprends du poil de la bête. Quand tu auras fini, viens me rejoindre dans mon bureau et je te paierai.
Adrian hocha la tête. Lorsque le criminel eut quitté la pièce, il fut soulagé. Anton n’avait aucune idée de ses réelles connexions et de qui était sa famille, et il souhaitait que cela reste ainsi. De plus, sa présence nuisait à sa concentration. Il réveillait des émotions qu’il préférait oublier. Leur intimité perdue n’était pas un regret pour le jeune homme. Pourtant, Anton, malgré son apparente indifférence, ne semblait pas capable de lâcher prise. Et cela pesait sur Adrian.
Adrian se concentra sur sa tâche. Grâce à son implant, et à son assistante virtuelle, il naviguait sur les voies de la toile, à la recherche d’une porte d’entrée dans son serveur personnel. Il devait se montrer prudent et éviter les mouchards que les différentes organisations de Sélène et de la Terre avaient installés. L’intense concentration qu’il s’imposait réveilla à nouveau sa migraine, mais, heureusement, les autres symptômes ne réapparurent pas. Au contraire, il avait l’impression que son implant fonctionnait encore mieux. Il sentait le lien entre lui et le disque qu’il avait récupéré dans la pièce et nettoyé, via le câble physique branché entre les deux. Une mesure de sécurité rudimentaire, mais nécessaire, dans cet endroit.
— Te voilà !
Il inséra son code personnel et pénétra dans sa banque de données. Il vérifia que tout était normal, puis il téléchargea l’ensemble des données qui s’y trouvaient : le programme qu’Anton attendait impatiemment, ainsi que ses clés de cryptomonnaie et quelques applications bien pratiques. Puis il installa un programme d’autodestruction, qui allait supprimer entièrement la partition du serveur physique dans lequel il se cachait.
Lorsque tout fut terminé et qu’il ôta ses lunettes, il constata que l’ensemble de ces opérations lui avait pris quinze minutes, un temps record pour son implant daté.
Il débrancha le disque dur de son implant, et activa l’interface holographique. Il téléchargea le programme de détection de transition des clés de cryptomonnaies directement sur le serveur privé d’Anton, tout en imaginant l’expression joyeuse qui illuminerait son beau visage. Après une dernière vérification du disque, il se déconnecta du système.
— Qu’on en finisse et que je me tire d’ici, maugréa-t-il, en quittant son siège.
Lorsqu’il rejoignit le rez-de-chaussée, des employés étaient occupés à nettoyer et préparer le club pour l’ouverture. Il se dirigea directement vers une porte cachée derrière un rideau cramoisi, remonta le couloir et frappa à la porte du fond.
Elle s’ouvrit en glissant et il entra dans le bureau d’Anton. Celui-ci, installé à son bureau, leva les yeux de l’écran holographique qu’il était en train de regarder. Il sourit.
— Du beau travail, comme d’habitude.
Adrian se laissa tomber dans l’un des fauteuils.
— J’ai envoyé le programme directement sur ton serveur personnel.
Anton l’examina avec attention.
— Je t’ai viré le reste de ton paiement, commença Anton.
— Merci, répondit Adrian, perplexe.
Il avait l’impression que son ami était gêné. Il attendit, dans un silence qui se faisait de plus en plus pesant. Puis Anton poussa un soupir et reprit :
— Je suis désolé de t’avoir fait venir ici avec autant… d’hostilité. J’ai peut-être un peu surréagi. J’aurais dû faire attention à ton état.
— Ne t’en fais pas, fit Adrian.
— Tu ne veux pas me raconter ce qui t’est arrivé ?
Le jeune homme grimaça.
— C’est une histoire de famille. Je ne préfère pas rentrer dans les détails.
Son interlocuteur se rembrunit.
— Tu n’as pas changé.
Sans qu’il comprenne vraiment pourquoi, l’agacement enfla dans l’esprit d’Adrian. Il avait toujours souhaité conserver son jardin secret. C’était son droit. Surtout quand on était l’un des trois fils d’une femme aussi puissante que sa mère. Anton l’avait quitté parce qu’il ne voulait pas se livrer, alors qu’Adrian était parfaitement heureux avec lui. Il n’avait pas besoin de plus. Et, plusieurs années après, il avait le culot de s’en offusquer, encore !
Que pouvait-il lui raconter ? Ma mère est la fondatrice d’Héphaïstos corp. Oh ! et tant qu’on y est, elle est en pleine crise de paranoïa et a enfermé les consciences de mes deux frères dans une réalité virtuelle, et voulait faire la même chose avec moi. Il aurait pu en rire, s’il n’était pas aussi tendu. Il se força au calme. S’en prendre à Anton n’arrangerait rien. Ils avaient beau avoir été amants, il n’en restait pas moins un homme dangereux, qu’il ne fallait pas trop provoquer.
— C’est vrai. Il vaut mieux que tu n'en saches pas trop, c’est tout ce que j’ai à dire. Je vais me débrouiller.
Sans le lâcher des yeux, le patron du club se rabattit dans le fauteuil. Adrian se sentit soudain pris au piège de son regard acéré. Le brusque désir de tout lui raconter, de lui parler de sa famille et de ce qui venait de lui arriver l’emporta. Tu ne peux pas lui faire confiance. Pas avec ta mère. Elle doit savoir que tu es en contact avec lui.
La panique s’empara de lui. Il se redressa.
— Je dois y aller.
Anton fronça les sourcils, surpris.
— Adrian …
Le jeune homme fixa le criminel d’un regard défiant.
— Je dois partir, Anton.
— Très bien. Tu peux y aller. Mais, si tu as des problèmes, je peux peut-être t’aider.
Adrian le fixa un long moment. Pouvait-il le croire ? Il secoua la tête et se leva.
— Merci, Anton, souffla-t-il.
Il quitta le bureau et le club le plus rapidement possible. Sa rencontre avec Anton n’était pas prévue. Il n’avait pas pu récupérer ce qu’il voulait. Trop risqué de toute manière. Sur la place principale, il ralentit, et laissa son regard errer sur Sélène, qu’il apercevait à travers le dôme plus petit de Second City. Cette ville était son domaine ; elle était devenue un piège. Je dois ficher le camp de Luna.
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