Zhagar était affalé sur une chaise en pierre, devant une longue table aussi rudimentaire que le reste de la salle. À sa droite, son conseiller Malvendu se grattait la barbe d’un air songeur. À sa gauche, son informateur Rathor affichait un sourire satisfait, bombant fièrement le torse pour mettre en valeur une médaille – celle de ses sept années d’études des lois ténébreuses.
En face de lui se tenaient deux créatures. La première, un humanoïde élancé à la peau turquoise tirant vers le vert clair, avait des griffes blanches éclatantes, une immense chevelure blonde traversée de mèches rouges et d’étranges moustaches flottantes. Son voisin, plus massif, était un cyclope à la peau écarlate, doté de cornes imposantes. Respectivement : Terlock et Berlok.
À leur côté, un orc particulièrement féroce fixait la table avec un regard perçant. Sa peau vert foncé était marbrée de taches brunes et de cicatrices. Des dents acérées dépassaient de sa bouche, et son physique impressionnant était mis en valeur par un plastron massif. Il jouait distraitement avec un énorme couteau, le faisant tourner entre ses doigts. C’était le général des armées, Xur.
Enfin, il y avait deux autres personnes, mais leur rôle étant si aléatoire qu’on ne prendra même pas la peine de les nommer.
Zhagar, visiblement déjà lassé, s’adressa à la salle :
— Bon… Où en sont les élections presque législatives ?
Rathor s’éclaircit la gorge avant de répondre :
— Les villes ont été informées. Seuls les représentants des Ténèbres ou du Mal pourront se présenter.
Le Seigneur des Ténèbres souffla bruyamment.
— Parfait. Espérons qu’il y ait le moins possible de partisans du Mal élus.
— Quant aux infrastructures, il ne manque plus que votre autorisation pour lancer les travaux, ajouta Rathor en consultant ses papiers. Ah, et il y a certaines plaintes qui ont pris… comment dire… une certaine ampleur.
Zhagar ferma brièvement les yeux sous son casque.
— Vas-y, balance.
Rathor prit une petite inspiration avant de commencer :
— Les gobelins demandent une audience. Et le plus surprenant, c’est qu’ils se sont mis d’accord entre différentes tribus, ce qui veut dire que c’est potentiellement important. Ensuite, nous avons… vous savez qui, dit-il en désignant Terlock et Berlok.
Terlock hocha la tête poliment.
— Effectivement.
— Les trolls demandent aussi une hausse des salaires, poursuivit Rathor. Ceux qui gardent les ponts affirment qu’ils gagnent juste assez pour survivre, mais qu’ils n’ont aucun loisir. Par ailleurs, les trolls de l’armée réclament un meilleur équipement, parce que, je cite : "On le mérite quand même." Enfin, les trolls civils se plaignent d’être traités encore pire que les elfes, car la majorité des infrastructures ne sont pas adaptées à leur taille.
Zhagar ouvrit la bouche pour répondre, mais Malvendu le coupa :
— Voilà qui illustre parfaitement les Chroniques d’Irgen de Salz-Arin. Et tout le monde sait que la fin dit… "Il vaut chasser le loup avant…"
Zhagar fronça les sourcils.
— Avant quoi ?
— J’ai oublié. Ça fait une éternité que je l’ai pas lu, répondit Malvendu en jouant distraitement avec sa barbe.
Le Seigneur des Ténèbres secoua la tête et reprit :
— Bon. Pour les gobelins, programmez-moi une audience quand vous voulez. Depuis la fin des conquêtes, j’ai du temps à tuer. Pour les trolls… Les civils ? Rien à foutre. C’est pas mon problème s’ils sont trop grands. Ceux de l’armée ? D’accord, une légère amélioration de l’équipement. Quant à ceux des ponts… Ajoutez une taxe quelque part, je sais pas où, histoire qu’ils puissent se payer un resto par mois.
Rathor hocha la tête et poursuivit :
— Il y a aussi eu un mouvement pour l’augmentation des droits des femmes.
Un silence pesant s’installa. Puis, sans prévenir, Xur éclata de rire en enfonçant son couteau dans la table.
— Femme + droits ? C’est quoi ces conneries ?! Elles ont déjà le droit de travailler et ça leur suffit pas ?! Sérieusement, ces animaux à cheveux longs manquent pas de culot !
Zhagar soupira, posant son casque entre ses mains.
— On va leur dire qu’on leur accorde le statut de soutien psychologique. Comme ça, elles auront un rôle en plus, et ceux qui pratiquent leur magie chelou auront enfin leur espace dédié…
Terlock, qui venait d’éternuer des paillettes, prit enfin la parole.
— Très bien. Comme vous le savez, nous sommes ici pour discuter et négocier des accords concernant les peuples que vous avez… disons… presque exterminés.
Il marqua une pause avant d’ajouter :
— Excusez-moi de me répéter, mais c’est juste pour être sûr que tout soit clair.
Malvendu haussa les épaules et déclara d’un ton détaché
— Je suis certain que mon arrière-arrière-arrière-petit-fils éloigné avait de bonnes raisons… Enfin, je le sais !
Zhagar, trop préoccupé par ce qu’il allait répondre, choisit d’ignorer complètement le fait que Malvendu venait implicitement de l’appeler son arrière-arrière-arrière-petit-fils éloigné.
Zhagar prit un ton calme et mesuré avant de déclarer
— "Soyons honnêtes, ce ne sont pas vraiment des exterminations."
Berlok fronça son unique sourcil, clairement contrarié.
— "Pas des exterminations ?! Vous avez presque anéanti mon peuple et celui de mon confrère ! Sans parler des Elfes de la Lune, des Lézardons des Marais, des Lézardons tout court, des Halfelins… Même les Mantes religieuses ont disparu ! Et que dire des Nains d'Argent, totalement éradiqués… Et encore, je n'ai même pas…"
Il fut brutalement interrompu par Xur, qui roula des yeux avant de lâcher d’un ton agacé
— "Oh ça va, hein ! On vous a conquis, on fait ce qu’on veut ! Vous allez pas chialer pour quelques morts, quand même ?"
Terlock leva les mains, tentant de calmer les esprits.
— "Du calme, s’il vous plaît. Nous sommes bien conscients de notre défaite et nous ne sommes pas là pour réclamer des terres ou un quelconque pouvoir. Nous voulons seulement négocier… Ces "quelques" massacres ont eu des conséquences lourdes, et nous espérons obtenir une forme de compensation."
Zhagar soupira longuement sous son imposante armure d’obsidienne.
— "Une compensation ? Vous voulez quoi, des augmentations de salaire ?"
Berlok serra les poings, prêt à exploser, mais Terlock prit les devants avant que la situation ne dégénère.
— "Oh non, rien de tout cela. Nous demandons simplement de meilleures conditions pour ceux qui sont en esclavage, et pour les autres, peut-être… une somme symbolique en guise de réparation."
Zhagar haussa un sourcil.
— "On verra… Mais je suis certain qu’aucune des espèces "en voie d’extermination" n’est actuellement réduite en esclavage."
Berlok éclata de rire, un sarcasme évident dans sa voix.
— "Vraiment ?"
Rathor sortit une feuille et parcourut quelques lignes avant d’annoncer :
— "En effet, il n’y a aucun esclave parmi les espèces que vous représentez… Juste quelques stagiaires à perpétuité non rémunérés."
Berlok explosa :
— "C’est encore pire !"
Sa colère fut immédiatement refroidie par une flèche d’énergie sombre tirée par Zhagar lui-même, qui vint se planter dans son pied. Berlok serra les dents sous la douleur, tandis qu’un silence gênant s’installait dans la salle du trône.
C’est alors que la porte s’ouvrit brutalement, laissant entrer un humain à la peau hâlée, vêtu d’une longue toge et couvert de bijoux. Il marchait d’un pas assuré, ses bracelets tintant légèrement à chaque mouvement.
— "Je suis ici pour faire affaire avec un certain… Bob ?"
Zhagar cligna des yeux.
— "Non. Moi, c’est Zhagar. Seigneur des Ténèbres, à la rigueur. Mais certainement pas Bob."
Malvendu s’inclina légèrement vers lui.
— "Seigneur, ne faudrait-il pas le faire patienter ? Nous sommes en pleine discussion politique…"
— "Nan, tais-toi. Bon, marchand, qu’est-ce que tu veux ?"
L’homme sourit largement avant de se présenter :
— "Je suis Zhartek Haggra, et je viens des territoires désertiques sous votre domination, plus précisément du Grand Désert de "Yl-fé-cho"."
Il marqua une pause théâtrale avant d’ajouter avec enthousiasme
— "Et je suis ici pour vous parler… d’éléphants."
Un silence pesant s’abattit sur la pièce, seulement troublé par le bruit du couteau de Xur qui tapotait contre la table. Zhagar brisa finalement le silence
— "Des… éléphants ?"
Zhartek hocha la tête avec un large sourire.
— "Vos armées ont besoin de montures robustes et imposantes. Regardez-moi ces bêtes : grandes, puissantes, majestueuses ! C’est la monture idéale."
Rathor, perplexe, prit la parole :
— "Mais nous avons déjà des Aldragons, des Loups Infernaux, et même des dragons tout court. Pourquoi aurions-nous besoin d’éléphants ?"
Zhagar acquiesça d’un léger mouvement de tête, mais le marchand poursuivit avec assurance :
— "Je ne dis pas de les mettre partout. Mais dans le désert, c’est une option parfaite. C’est du local !"
Zhagar haussa un sourcil.
— "On peut très bien déplacer nos créatures, non ?"
— "Oui, mais là, il n’y aurait aucun coût de transport. Pas de longs trajets, pas de complications logistiques, et une adaptation parfaite au climat !"
Zhagar sembla intéressé.
— "Hmm… continue."
— "En plus, ils sont faciles à dompter, ils n’ont pas une intelligence évoluée, donc zéro risque de révolte, pas de salaire à verser, et ça ne coûte presque rien à entretenir !"
Zhagar croisa les bras avant de conclure :
— "Ok, tu m’as convaincu. Toi et moi, on va faire des dingueries."
Terlock, toujours assis, leva timidement la main.
— "Et… qu’en est-il de notre discussion ?"
Malvendu se pencha en avant, le regard narquois.
— "Wow ! T’as cru que t’étais chez ta mère ?!"
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