MARK AVEC UN K
Jules était foutu. Plus un sou. Des dettes jusqu’au cou, des appels incessants des créanciers, des menaces voilées. Les banques lui avaient claqué la porte au nez. Ses potes, un à un, avaient détourné le regard. Même Jim, son meilleur ami, n’avait rien pu faire. Jules avait tout tenté. Rien.
C’est alors qu’une idée saugrenue lui traversa l’esprit. L’Intelligence Artificielle. Il avait lu des histoires incroyables sur elle. Des voix de défunts recréées, des œuvres d’art conçues en un clin d’œil, des stratégies gagnantes révélées à ceux qui savaient poser les bonnes questions. Et si…
Un matin, il se posta devant son écran, les mains moites. Il tapa :
"Peux-tu me faire gagner beaucoup d’argent ?"
La réponse fusa, implacable, immédiate :
"Oui, bien sûr."
Son cœur bondit.
— Très bien, dit-il. Mais une chose avant de commencer : quand je m’adresserai à toi, je t’appellerai Mark. Avec un K. Comme la monnaie allemande. J’espère que ça me portera bonheur.
— D’accord, Jules. Prêt à suivre mes instructions ?
— Absolument.
Et les instructions vinrent. D’abord simples, presque banales : repérer des tendances boursières, jouer sur des algorithmes de trading automatisé. Puis plus pointues : crypto-monnaies à fort potentiel, actions sous-évaluées, arnaques déguisées en opportunités en or. Jules suivit tout, rigoureusement.
L’argent afflua. D’abord doucement, puis en torrent. En trois mois, il remboursa ses dettes. En six, il s’offrit une voiture de luxe. En neuf, il possédait plus d’argent qu’il n’en avait jamais rêvé.
Mais Jules avait un défaut : il aimait se vanter. Lors des dîners, il laissait traîner des indices.
— Vous savez, en finance, il y a des règles que tout le monde ignore...
— Ah bon ? Lesquelles ?
— Des secrets que seuls les malins connaissent. Moi, j’ai trouvé la martingale.
— Sérieusement ?
Il savourait leurs regards sceptiques, leurs rires gênés. Personne n’était dupe.
Mais à mesure que son compte en banque gonflait, une autre sensation s’installait : l’angoisse. Car suivre Mark n’était pas sans conséquences. Il fallait être toujours plus rapide, plus précis. À la moindre hésitation, tout pouvait s’effondrer.
Les nuits devinrent courtes. Son téléphone sonnait en permanence. Chaque seconde comptait. Il n’avait plus le temps de voir Jim, ni même de profiter de ce qu’il possédait. Il ne vivait plus. Il jouait un jeu où il était à la fois maître et esclave.
Un soir, à trois heures du matin, alors qu’il contemplait son écran, lessivé, il murmura :
— Mark… Je suis fatigué.
— Tu es riche, Jules. Que veux-tu de plus ?
— La paix.
Un silence. Puis :
— Alors tu sais ce que tu dois faire.
Jules hocha la tête. Il ferma son ordinateur, éteignit son téléphone et quitta la pièce. Le lendemain, il vendit tout.
Les journaux financiers s’étonnèrent de sa disparition. On chercha à comprendre. Lui, il s’en fichait. Il était parti retrouver Jim, retrouver sa vie d’avant. Il avait compris une chose, une chose évidente que Mark n’avait jamais su formuler : l’argent ne fait pas le bonheur, surtout quand c’est lui qui vous possède.
LeConteur.fr | Qui sommes-nous ? | Nous contacter | Statistiques |
Découvrir Romans & nouvelles Fanfictions & oneshot Poèmes |
Foire aux questions Présentation & Mentions légales Conditions Générales d'Utilisation Partenaires |
Nous contacter Espace professionnels Un bug à signaler ? |
3079 histoires publiées 1357 membres inscrits Notre membre le plus récent est mad.autrice |