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Vive Adrienne.

Gambader comme la poule argentée, sur l’herbe bleue de ce jardin où s’étire un poirier orangé au soleil du soir… Puis s’asseoir auprès d’elle pour lui parler d’un songe, où un ver de terre lassé d’être, comme ses semblables, à tous les menus de la poule Adrienne, un jour de printemps, parlant au nom des siens, lui avait proposé un marché… Épargnes nous, et promets de ne plus nous voir, alors nous te dirons l’endroit où se cache le criquet Mithriaque, qui connaît le secret de la vie éternelle… Pour partager son secret, il te faudra le manger avant qu’il n’ait chanté au soleil de midi… Tu deviendras ainsi la reine des prés aux alentours, et tous te devrons respect et obéissance…

La poule Adrienne cligna de nombreuses fois de ses yeux ronds, dévisageant cet insupportable ver, qui prétendait la convaincre de ces fadaises, avant que d’être englouti…

Hochant vivement de la tête, et étirant ses ailes, dans un dernier clin d’œil, elle décida d’accepter le marché… Alors le ver insignifiant lui indiqua ce lieu caché où elle devrait trouver Mithriaque le criquet, et furtivement disparut dans son trou, pour à nouveau traverser le monde…

Le lendemain au petit matin, la poule Adrienne plongea sa tête dans l’eau de son baquet, et s’ébouriffant un grand coup la plume, elle secoua sa crête puis, d’un pas précis, partit à l’aventure dans ce vaste pré, dont elle se voyait déjà la reine…

Il était encore assez tôt pour qu’elle puisse tranquillement, se rappeler la confidence, que lui avait fait la veille le ver de terre, et mettre au point une suite fortunée à l’affaire…

Le ver lui avait dit qu’il se pouvait fort, qu’en prenant le sentier qui mène à l’allée de la treille, elle trouva un arbre très vieux, tant courbé sur lui même, que ses branches au gré du vent, lui caressent les racines. Puis, si elle savait y faire, en touchant du bec la plus longue des branches, et en faisant sur elle-même une pirouette, suivi de douze pas de côté en suivant le soleil, puis de seize autres vers le plus lointain buisson, et enfin cinq pas en fermant les yeux, en direction du bruit délicat d’une eau qui coule, il serait fort possible qu’elle découvrit la pierre noire, digne trône de "Querelle" le roi crapaud…

Elle était très fière de son plumage, mais compter n’étant pas son fort, et se rappeler non plus, il y avait là de quoi se perdre…

Et si le ver lui avait menti ? Car son devant et son derrière se ressemble tant, qu’il avait pu lui raconter des salades par le mauvais trou… Enfin bref, elle se mit en route, se disant qu’elle n’était peut-être qu'une poule, mais pas une idiote !

La poule Adrienne ayant déjà parcouru la moitié du chemin qui la mène à l’allée de la treille, toute chamboulée à l’idée de la pirouette qu’elle devrait prochainement faire, pensa qu’un peu de repos était de mise, surtout que depuis le matin, elle ne s’était rien mis sous le bec, pas le moindre grain ni la moindre bébête. Elle s’arrêta donc un instant pour poser délicatement sur le sol son derrière…

Soudain glissant près d’elle, un beau ver bien gras se hisse de son zigzag et, tout dressé sur le bout de son bout, il se penche en avant pour la saluer courtoisement, puis sans rien attendre se laisse fondre dans l’herbe et disparaît.

Pour Adrienne, c’est à n’y rien comprendre, voilà que son plat préféré ose l’approcher pour lui faire des civilités… La veille encore elle s’en était goinfrée, et rien que l’idée d’y penser semblait la rassasier, mais comme pour une poule, comprendre n’est pas entreprendre, elle se redressa bien vite, picora quelques mousses tendres, et quatre larves se tenant à longueur de son cou, ainsi qu’une becquée de cailloux, pour écraser le tout. Cela suffisait bien pour qu’elle tienne debout, donc, réajustant sa crête, elle reprit son chemin.

Alors qu’elle continuait sa ballade, en picorant de droite à gauche, quant soudain elle aperçut un curieux petit

animal, rarement rencontré dans sa contrée...

--Un, deux , trois, t’es pas moi !

1,2,3, j’suis pas toi !

1,2,3 … on n’est pas nous !

Bonjours M’dame, j’suis Culbute ! Alors, comment va ?

--Salut l’écureuil, moi je m’appelle Adrienne, Dri-dri pour les intimes, sauf que j’ai pas d’intimes… Je cherche quelqu’un qui saurait compter, pour m’aider à débrouiller de ma tête, une indication qui ma été donnée, selon laquelle, je vais devoir faire une danse effrénée, mais qui ne me revient qu’en désordre !

--Euh… Oh oui, compter, je sais ! En tout cas jusqu’à trois ! Tout le monde dit que je suis toqué, mais c’est pas vrai !

-- Trois, c’est peut-être un peu juste, Monsieur Culbute… Il me faudrait aussi la suite, s’il y en a une…

-- Oh ! une suite au trois ? On peut en faire une, il suffit d’y réfléchir…

Ah, on le dit, j’suis toqué ! Et bien moi, avec le un et le trois, je te fais le quatre…avec le trois et le deux, je t’arrange le cinq, avec le deux et le quatre, je te place le six… avec le trois et le quatre je dispose le sept, puis, avec mon sens de la mesure, avec le cinq et le trois je te fais le huit… avec le deux et le sept je t’installe le neuf… et en faisant un nœud des deux bout, magistralement je dépose le dix !

Adrienne reprit son chemin, accompagnée de Culbute, quant soudain celui-ci changea d’attitude... hystérique et la queue ébouriffée, fou de rage, il se mit à l’engueuler...

--Non mais dis donc toi, la poule, te gêne surtout pas... tu manques pas d’air, de fouiller ainsi dans mes réserves, que j'ai préparées pour passer l'hiver !

--Oh ! mille pardons joli petit écureuil ! Je ne fais que "des ptis trous, des ptis trous, toujours des ptis trous", faut bien que j’creuse pour trouver ma pitance. Et puis tu sais, une noisette suffirait à m’ étouffer, et je ne ferais pas long feu, alors !

--Joli, tu as dit Joli ! Moi je grimpe, saute de branche en branche, et parfois même j'arrive à voler de l'une à l'autre, mais je n'ai jamais croisé de miroir, pour voir à quoi je ressemble, à part certains collègues gris, que je trouve vraiment moches... Moi je suis roux !

--Dis-moi ptit rouquin ? Tu ne saurais pas par hasard, où je pourrais trouver un très vieil arbre, un peu bossu, dont les branches traînent par terre ?

--Ben, grâce à ton si gentil compliment, je veux bien t’y mener, car vois-tu les arbres, moi je les connais tous, et celui-là particulièrement, car j'y ai fait mon nid. Alors suis-moi !

Tous deux partirent donc, sans qu’Adrienne n’ait à faire la moindre chorégraphie en comptant ses pas… et bientôt arrivèrent auprès de cet arbre majestueux, qui semblait avoir mille ans.

Levant la tête pour se tenir bien droite, auprès de son nouveau compagnon, elle pensa soudain, qu’il fallait peut-être qu’elle pressa le pas. L'écureuil, lui, à l'aise, n'avait juste qu'à bondir pour facilement la devancer. Le soleil était à présent à mi ciel, lorsqu’elle aperçut enfin le vieil arbre, que lui avait décrit le ver de terre, qui n’avait pas menti, puisqu’il y avait bien là, un arbre majestueux, qui semblait avoir mille ans.

Et quel arbre ! Vieux, si vieux… Courbé, tant courbé… Ses branches, semblaient couler de lui comme une tumultueuse rivière, jusqu’à ses racines qui s’éparpillaient en une multitude de ruisseaux… De son écorce noirâtre surgissaient mille crêtes argentées, qui lui gantaient le tronc de sa cime jusqu’à la mousse du sol.

Devant tant de majesté, la poule Adrienne se trouva un peu sotte, mais, d’un pas décidé, s’approcha de l’arbre au plus près pour le saluer.

--Bien le bonjour à toi, oh ! Arbre vénérable ! Me permettrais-tu de baiser de mon bec, la plus longue de tes branches ? Tu es pour moi le premier repère de ma quête, qui bientôt je l’espère, couronnera ma tête…

--Tu le peux bien volontiers la poule, car c’est un peu comme si nous allions danser… Et j’aimais tellement cela, danser, comme au temps de ma frêle jeunesse, quand le vent m’enlaçait en tournoyant, je me balançais frénétiquement au rythme de ses bourrasques… Mais cela fait des ans et des ans, que malgré son insistance à vouloir me souffler sa romance, il ne peut plus pour moi, vu ma corpulence, que rafraîchir tout juste le bout de mes branches…

Cela dit, Adrienne se pencha donc en avant pour achever son compliment, mais à peine eût-elle effleuré du bout de son bec, la plus longue des branche, qu’elle se trouva soudain soulevée par celle-ci, dans une pirouette vertigineuse qui lui fit passer devant les yeux, toutes les chandelles du monde…

Retombant, raide sur ses pattes de derrière, la plume sans dessus dessous et la crête blafarde, elle se demandait par quel miracle, elle avait pu échapper à une mort certaine, dans cet exploit, qu’elle se refuserait assurément de refaire, car cela serait sûr, cette fois elle en mourrait…

Alors elle se secoua vigoureusement, pour vérifier si elle vivait encore, et ce fut le vent, qui, amusé de la scène, vint lui remettre les plumes en place, dans un souffle vivifiant, qui lui redonna de l’air et lui caressa les joues, pour l’empêcher de succomber à son vertige…

Le vieil arbre, lui, riait à se fendre, en frappant le sol de toutes ses branches…

--Reviens me voir quand tu le veux, ma poulette ! Je te ferai danser autant qu’il te plaira, car tu m’as fait goûter à nouveau à ma tendre jeunesse, et cela je ne l’oublierai pas !

Te voilà à présent dans le sens qu’il faut pour continuer ta quête, qui je l’espère te profitera et, qu’un jour prochain, tu viendras me conter… Fais donc bonne route, ma belle, et si tu le veux, lors de notre prochaine rencontre, avec mon ami le vent nous t’apprendrons une toute nouvelle danse qui fait fureur ces temps-ci, chez les frênes qui bordent la rivière !

--Merci, lui répondit Adrienne, c’est bien gracieux de votre part ! Mais je vais pour l’instant, simplement si je le puis encore, essayer de me mouvoir ! Je reviendrai un jour, sûrement, mais plus tard, si vous me promettez, et j’insiste, de ne plus essayer de me décrocher la mâchoire, en transformant ainsi le tour de ma crête en pétard !

--Mais avant de partir "Splendeur de la forêt", puis-je te poser une question ?

--Bien volontiers si cela m’est possible d’y répondre !

--Eh bien voilà, du haut de tes branches, ne verrais-tu pas une rivière, car l’on m’a dit qu’il y en avait une qui coulait par ici, mais je ne l’ai pas encore trouvée. Je dois m’y rendre pour permettre à mon compagnon et le tien, l’écureuil, de se mirer un moment face à son eau, pour s’apercevoir qu’il est beau… 

--Croit-tu vraiment que si ce n’était pas le cas, je l’aurais accepté comme locataire ? A l’évidence non !

-- Je dois aussi, pour ma quête, rencontrer un certain "Querelle" le roi crapaud, dont je ne sais rien, mais avec qui je dois peut-être me confronter, pour gagner ma couronne…

-- Oh, ma poulette ! Tu es peut-être un peu présomptueuse d’espérer te mesurer à cet immonde bestiole… Prends bien garde à toi, il est retord et fourbe, tout autant que sa bave ! Mais si tu veux vraiment le trouver, eh bien, regardes la lune qui s’élève, et qui éclaire au bout de ce sentier, cet arbrisseau tout doré près d’un rocher. Derrière coule cette fameuse rivière que tu sembles chercher.

--Merci de ton conseil, j’en prends bonne note, et à bientôt j’espère, pour "danser" un tango tous les deux…

--Au revoir Pou poule, mais en partant, évites de piétiner mes racines, car à mon âge avancé, elles sont pleines de cors, qui me font terriblement souffrir. A bientôt ma belle !

Donc, Adrienne et son compagnon l’écureuil, voyant plus nettement la lune monter dans le ciel, aperçurent assez vite au bout du sentier, le fameux buisson tout paré de sa dorure. Ils arrivèrent assez vite près du rocher qui était à côté.

Soudain, sortant du dessous du rocher, qui lui faisait caverne, surgit un frétillant lézard tout de couleur bleue, avec de grands yeux émeraudes, mais à qui il manquait la queue…

--Que puis-je pour vous, jolis inconnus ?

--Tu vois qu’il te trouve beau, l'écureuil, chuchota Adrienne.

-- Je suis le gardien de ce lieu, et quiconque s’en approche, doit avant tout m'en donner la raison !

--Voila, dit Adrienne, je dois à tout prix rencontrer le roi Querelle, car une quête me mène à lui, pour un secret qui pourrait me permettre de devenir Reine sur mes pâtures…

--Vous savez, vous prenez bien des risques pour cela, car il est si discourtois, tempétueux, exécrable, et dangereux, qu’à votre place, je ne m'y risquerais pas... Moi, il m’a déjà mangé la queue, et j’ai échappé de justesse d'être gobé tout entier.

--C’est vrai qu’il a l'air terrifiant, mais je dois aller à la rivière, pour le voir, et que mon ami puisse se mirer dans l’eau, pour être sûr de sa jolie physionomie.

--Bon, je vous aurais prévenu… Il faut juste descendre un peu plus bas sur le sol caillouteux, et vous y serez, mais soyez bien sur vos gardes, car parfois il bondit si vite vers vous, en crachant sa bave paralysante, et en vous inondant de grossièretés, qu'il n’est pas aisé, même en étant diplomate de le rencontrer…

-- Merci de vos conseils des plus judicieux, nous resterons prudents. A bientôt Monsieur le gardien de ce lieu.

--A bientôt peut-être ! Faites tout de même, bien gaffe à vos fesses !

Ils descendirent tous deux, malgré les cailloux, qui abîmaient les griffes d’Adrienne, brièvement polies au matin, qui se demandait, de quelle façon ils devaient aborder ce sinistre animal, et arrivèrent enfin au bord de la rivière.

Là, il ne se passa rien, l’eau courait limpide et calme.

--Aller mon ami, profites de ce miroir, pour voir à quoi tu ressembles, tu t’y verras sûrement comme le plus beau des écureuils du coin !

--Ma foi, c’est vrai que je ne suis pas vilain, je comprends la jalousie de mes collègues, à cause de mes nombreuses conquêtes !

--Et modeste avec çà, s’esclaffa gentiment Adrienne !, puis elle reprit sa réflexion sur la manière d’aborder la grosse bébête...

Là, près du ruisseau qui déambule, elle glousserait une fable de sa façon, pour que l’immodeste Querelle sautant d’entre les jonc sur la margelle noire, surgisse, tout gonflé de rage de cet affront notoire, en ce lieu où lui seul a le droit de paraître. Lui, il pourrait lui dire comment trouver Mithriaque, cet autre chanteur en cet endroit, à lui faire de l’ombrage…

Alors, elle se mit à improviser… "Cot, cot, codec, je suis la reine de la pâquerette, et de picorer je ne m’arrête, cot, cot, codec, j’suis pas la poule du garde champêtre, cot, cot, codec, et chaque fois que je m’arrête, j’vais boulotter une bébête, cot, cot, codeeeeec !" 

Son petit ami rouquin se bouchât les oreilles, à l’entendre déclamer ainsi, il n’avait jamais entendu de chant aussi crispant que celui-ci, gueulé à tue tête…

C’est là, que d’un bond éclaboussant, surgit Querelle, écumant de rage et s’étouffant de sa bave gluante, bondissant en tous sens, pour exprimer son mécontentement…

--Non mais des fois, qui se permet d’avoir l’audace de venir ici ainsi, perturber mon noble repos, croyez-vous qu’il soit bien raisonnable, de vous comporter de la sorte ?

--Désolé, votre Altesse ! Je désirais vous appeler avec ma petite chanson, qui je le pensais vous plairait !

--Me plairait, me plairait ! A qui croyez-vous parler ?, je suis ici le seul , à me targuer du talent d’être le meilleur en ce domaine !

--Je veux bien le reconnaître, si vous le dites, car je ne suis pas ici pour juger votre voix mélodieuse, mais pour que vous m’aidiez à trouver un certain Mithriaque. J’ai besoin qu’il me renseigne, pour une quête que je dois terminer au plus vite !

-- Comment osez-vous me parler de cet espèce de criquet, même pas sauterelle, qui prétend chanter mieux que moi ? Vous ne manquez pas d’air !

--Foutez-moi le camps tout de suite, ou bien je vous asperge de mes glaires pleins de verrues, pour enfin, vous faire quitter mon royaume !

--S’il vous plaît, "Délicieuse Altesse", aidez-nous, par pitié, il y va de mon honneur, et sur le champ, c’est juré, nous quitterons votre domaine !

--Délicieux ? On voit que vous n’avez pas goûté à mon acre et amer bave purulente ! En voulez-vous une tasse ?

--Non, non, "Votre Immense Altesse" sans façon !

D’ailleurs, l’on m’a fait part du différend qui vous oppose à lui, au sujet d’une rivalité, sur la qualité de vos vocalises réciproques… Et le but de ma quête, est justement de vous débarrasser de cet importun, qui semble tant nuire à votre Majestueuse popularité !

--Et que pourriez-vous donc faire pour cela ?

--Eh bien tout simplement, d’un coup de bec… le gober ?

--Boff ! Des carpes ont bien essayé, lorsqu’il se pose sur un nénuphar, mais aussi sottes qu’elles sont laides, elles l’on toutes loupé…

--Montrez-moi simplement où il est, et je vous promets de vous débarrasser de ce concurrent, coupable à vos yeux de lèse-Majesté !

--Si tu fais cela, je ferai à ma façon de ta chanson, un "tube" dans mon répertoire. Alors tu le trouveras, ce criquet de malheur, sûrement tout près de la cascade, qui plonge un peu plus loin, après le premier virage.

--Merci pour vos indications "Votre Vénérable Altesse", si elles sont vraies, nous y courons de suite pour le surprendre, avant le lever du soleil !

--C’est ça, c’est ça ! Courez donc, et cessez de me flatter, bande de vermines de courtisans !

--Bon, mon ami l’écureuil, partons vite car je crois qu’il s’énerve !

--Je m’énerve si je veux et quant je veux, gronda Querelle, qui devenait écarlate…

Ils s’éloignèrent donc vite, afin d’éviter sa colère.

--Aller, mon doux compagnon, filons vite de cet endroit, avant qu’il ne nous fasse un coup en douce... Et dis-moi ? Es-tu content de t'être miré dans la rivière ?

--Oh ça oui ! j’suis beau… Non le plus beau des écureuils, et cela me met en joie !

--Mais toi, par contre tu m’as étonné ! Quelle roublarde tu fais… Courtisane de pacotille, tu es bien coquinement arrivée à tes fins !

--Ben... faut savoir ce qu'on veut, et parfois la ruse est de bon aloi ! Moi je veux être la reine, sur mes pâtures, alors je suis prête à tout, pour obtenir ce titre et sa couronne !

--C’est pas tout à fait gagné tu sais ?

--Certes, il va nous falloir être prudents, et surtout malins, car je ne sais pas ce qui nous attend près de cette cascade. Mais nous avons encore le temps d'y penser, la lune n'étant pas encore couchée, et que le soleil roupille…

Adrienne suivie de Culbute, tranquillement longèrent la rivière, et arrivèrent près de l’endroit supposé, où devait se trouver Mithriaque.

--Adrienne comment vas-tu te charger de cette entrevue qui me semble risquée ?

--Eh bien, une poule çà pense pas, mais çà sait agir…

Et le soleil qui commence à montrer son museau, il faut que je trouve un stratagème… Voyons çà !

--Hello, ici y a-t-il quelqu’un ? Je recherche ce merveilleux "Cantor", dont on m’a tant parlé, il faut que je l’entende absolument, car j’ai besoin du meilleur pour fêter mon couronnement qui aura lieu bientôt !

A ces mots, sortant de son lit d’herbes sèches apparut un criquet joliment coiffé de belles antennes, qui dans un soupir, s’étira en fixant Adrienne et Culbute de ses gros yeux ronds…

--Mais, est-ce possible d’être réveillé de si bonne heure ! Comme si je n’avais pas suffisamment chanté jusqu’au dernier lever de lune !

--Vous avez entendu ma requête "Maestro" ?

--Pour sûr ! Cela m’a même fait sortir de mes rêves ! Vous allez, à vous croire, devenir reine ? Et de quoi dites-moi…

--De la contrée d’où je viens, à quelques lieux d’ici, et il ne manque que vous, pour que la fête soit royale !

--Allez, s’il vous plaît, pouvez-vous nous donner un petit aperçu de vos talent ?

--Bien sûr que je le peux, pour moi tout cela est facile ! Mais si tôt levé, il faut avant que je me dégourdisse la gorge, qui en cet instant est un peu en désordre !

--Prenez tout votre temps, nous allons pendant cela, faire trempette dans la rivière, ne vous en faites pas !

Alors, le criquet se mit la tête dans l’eau fraîche de la rivière pour effacer la brume de son esprit au réveil, et a grands coups de "glouglous" se gargarisa bruyamment, puis soigneusement lissa ses longues antennes…

A deux pas de là...

--Comment vas-tu t’y prendre dit Culbute à Adrienne, il va falloir feinter drôlement, pour arriver à tes fins !

--Oui, c’est sûr, il faut que je fasse confiance à mon instinct, sans trop me poser de question…

Et voila Mithriaque qui revient vers eux, enfin pleinement réveillé.

--Alors Maître, êtes-vous prêt à nous enchanter d’une de vos chansonnettes ?

--Chansonnettes ? Mais de quoi parlez-vous donc ? J’ai hérité de mon illustre père Criquetnisius, le don du chant parfait réservé aux Dieux, et n’ai que faire des freluquets qui se prétendent chanteurs ! Sauf que je suis habitué à me produire devant une foule assez dense, et quant cela n’est pas le cas, je deviens extrêmement timide, donc ne m’en veuillez pas trop, si en cet instant, je vous tourne le dos !

--Non, bien entendu, faites donc à votre guise, nous serons tout ouïe !

Le soleil grimpant assez vite dans le ciel, il était largement le temps d’agir, alors sans réfléchir, Adrienne ne se posant pas la moindre question, bondit sur le criquet, qui lui tournait le dos, et d’un bon coup de bec le goba tout net...

Puis rapidement, dans un soleil éblouissant, Adrienne et Culbute, traversèrent les hautes herbes qui bordaient la rivière, pour prendre le chemin de retour vers la contrée d’Adrienne.

--Tu sais Adrienne, à présent que ta quête est finie, dit Culbute, il va falloir à mon grand regret, que je retourne auprès de mon vieil arbre, où se trouve mon douillet nid, même si te quitter me rend triste, car je n’ai pas d’amis tels que toi…

--Eh ben, pourquoi t’en retourner, restons ensemble !

Car si me voici presque Reine, c’est aussi grâce à toi, alors restes avec moi, et lorsque je serai couronnée, tu deviendras mon page, et je suis certaine que tu auras un énorme succès !

Ils continuèrent leur chemin, et tout le long, Culbute fredonna une chanson…

--Dri, dri, dri, c’est moi que v’là ! L’unique rouquin de ce patelin, dri, dri, dri, vous allez voir mes demoiselles, que je suis un vrai coquin ! dri, dri, dri, etc. !

Et puis, plus loin sur une petite colline, ils rencontrèrent un vieux mulot, se reposant sur une pierre au soleil…

--Bonjour voyageurs, quel plaisir de vous voir ! Je ne vois rien dans les airs, pour l’instant qui me menace, alors je rêvasse sur cette pierre, en regardant bien le ciel, d’où pourrait apparaître un rapace. Je me nomme Mistigris !

--Quel curieux nom vous avez là, moi c’est Adrienne et mon ami s’appelle Culbute ! Mais pourquoi un nom de matou ?

--Ben, j’ai pris ce nom pour que les chats ne s’intéressent pas à moi, et ma foi pour l’instant, à part que je ne sache pas miauler, çà marche, êtes- vous en route pour la fête qui doit se donner plus au nord ?

--C’est çà même, et il faut que l’on se presse…

--On dit de ces choses là-bas… Les poules gloussent et regloussent, elles prétendent qu’une des leurs tente une quête perdue d’avance, car celle qui y prétend n’est qu’une vraie cloche, avec juste de l’avoine pour lui servir de cerveau !

--Elles disent cela ? Ah tient… Nous verrons bien lorsque je serai couronnée, et qu’elles deviendront mes servantes !

--C’est vous donc ? Oh je suis navré, j’aurais dû tenir ma langue, pardon pour cela, ne m’en veuillez pas s’il vous plaît !

--Au contraire, je vous en remercie, car il vaut toujours mieux savoir à l’avance, si des semblables serviles vous entourent… Et d’ailleurs tout cela glisse sur mes plumes superbement argentées, sans y laisser la moindre trace… Par contre elles vont voir ce que lèse-Majesté veut dire, et ce que "l’avoine" va faire de leur avenir !

--Au revoir, Mistigri, et caches toi, car là dans le ciel je viens d’apercevoir une silhouette inquiétante !

--Oui je me planque vite, et ptet bien à ce soir pour la fête !

Les deux amis reprirent leur chemin, en pressant le pas, après cette pose inattendue. Et Culbute fredonna à nouveau une chanson.

Arrivée à destination, Adrienne fût accueillie par une bande de poules hirsutes, en plein bavardages et commentaires… Cette quête, l’avait-elle véritablement réussie ? Rien ne le prouvait après tout… La douairière des poules s’adressa à Adrienne…

--Ma chère, un ver alcoolisé, nous a dit que d’une quête tu devais revenir, après l’avoir remplie ! Est-ce le cas ? Car nous avons préparé une fête pour cela, et il ne faudrait pas que tu sois revenue sans l’avoir réussie, car nous en serions tous fort déçus !

--Oui Madame, j’ai bien fait mon travail, avec l’aide et les conseils de bien des amis, et j’ai rempli au mieux cette mission ! Sauf que je suis bien incapable de vous en donner la preuve, à part la confirmation de mon amis Culbute, qui lui seul sait que j’ai remporté cette quête !

Toute l’assemblée s’esclaffa, et la crête d’Adrienne devint toute écarlate… Que faire, pour prouver à tous la véracité de ses dires ?

Soudain Culbute se mit à chanter :

--"dri, dri, dri" Hourra ! Hourra !

--Tu crois vraiment que c’est le moment Culbute, alors que mon "avoine" se liquéfie de honte ? Lui répondit sèchement Adrienne !

Adrienne avait oublié ce que lui avait dit le ver…

Mithriaque détenait le secret de la vie éternelle, et donc même gobé d’un violent coup de bec, il était toujours là, faisant partie totalement d’Adrienne, qui donc détenait elle aussi ce pouvoir, sans le savoir…

Le hourra de Culbute était tout à fait justifié, car soudain en un instant, les plumes argentées d’Adrienne s’enjolivèrent d’un superbe vert émeraude, et deux longues antennes avaient poussées de chaque côté de sa crête… Adrienne et Mithriaque ne formaient plus qu’un…

Alors, devant cette preuve irréfutable, toute l’assemblée se mit à genoux, ce qui pourtant est inhabituel pour ce genre de gallinacés, puis tous sautèrent en tous sens, ravis ou pas, de la glorieuse victoire d’Adrienne…

Elle fût alors couronnée Reine, et donna immédiatement le titre de Page Royal, à son ami Culbute. Et pour que la fête soit éclatante, elle profita de la voix exceptionnelle qu’elle possédait désormais, pour donner un fabuleux concert, aux convives présentes… La fête fût exceptionnelle, et sûr que dans mille ans, on en parlera encore !

FIN.


Texte publié par Ecirtap Namdot, 15 janvier 2025 à 00h45
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