LE PETIT ORPHELIN

"Bonjour monsieur" me dit le petit homme,

"Es-tu mon père? je ne connais personne.

Depuis petit je vis avec maman

Ma sœur Julie et pas d'autre parent."

Bonjour petit, ai-je bien compris,

Tu recherches ton père ?

Ta sœur Julie et toi aussi

Vivez avec ta mère.

Oui c'est cela monsieur, vous avez bien compris

Excusez-moi, monsieur, car j'ai dit "tu" aussi.

Je me suis accroupi vers lui

Et tendrement il m'a souri

Il y avait de l'innocence

Dans le regard de son enfance

Alors je lui ai pris la main

Pour lui chantonner un refrain :

"Petit, je ne suis pas ton père,

Mais j'aurais dû me taire

En discutant ainsi,

Tu vois, il y a sur la terre

Des papas qui se terrent

Et qui te cherchent aussi"

Au début, quelques larmes ont coulé sur ses joues,

Trop ému, j'ai changé mon discours

Afin qu'il puisse imaginer

Un père qui le cherche

Un père qui lui reste

Et qu'il pourrait trouver.

"Monsieur, par où puis-je trouver,

Celui qui m'a créé

Celui que maman pleure

Le poing contre son cœur ?

J'ai cherché de partout,

Dans ma ville comme un fou

J'y ai passé des jours

Et je cherche toujours."

J'étais bien embêté car je ne pouvais pas

Comme ça le laisser à chercher son papa

Et soudain c'était moi

Ce grand gaillard hardi

Qui devant cet émoi

Me sentais si petit.

Ô douleur profonde !

Qui êtes-vous donc?

Vous les pères infâmes qui couvrez de honte,

Le coeur d'une femme, celui d'un enfant,

Vous qui profitez d'un douloureux coeur,

Et qui promettez de faire son bonheur,

Vous qui profitez du corps d'une dame

Et vous enfuyez , que Dieu vous condamne !

J'étais toujours agenouillé

Tout englouti dans mes pensées

J'étais alors devenu blême

Alors mon regard écrasé

A -demi a dû se lever

Sa main n'était plus dans la mienne.

Le petit avait disparu

Qu'aurais-je pu dire, si j'avais su?

Ce devait être héréditaire

Pour me laisser seul là comme un père.