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Le couvre-feu s’installera dans mon dans cinq minutes. Le temps presse. Les Protecteurs ne lâcheront pas les rues de la nuit. Dehors, il n’y a presque plus âme qui vive, tous, comme chaque soir à 18 h 55 sont déjà chez eux en train de dîner devant un programme télé diffusé par les chaînes de PundicoTV.

Il fait signe à ses deux compagnons de le suivre en silence. La pénombre leur permet de se faufiler dans les ruelles, de les dissimuler aux drones, ainsi qu’aux Term02, les robots policiers de Pundico. Ils n’avancent pas assez vite.

« Nous vous rappelons qu’il ne vous reste que trois minutes pour rentrer chez vous. Pour les exceptions, n’oubliez pas vos autorisations de sortie et ne dépassez pas le délai de deux heures. »

La jeune femme dans son dos frémit à l’entente de la voix féminine et son compagnon saisit sa main pour la rassurer. Il s’attarde un instant sur ce geste, devenu trop rare depuis les trente dernières années.

Après la Grande Crise de 2030 et la Seconde Guerre Froide qui s’en suivit, les pertes humaines semblaient se compter en milliard, sans que personne ne puisse émettre un chiffre réel. Les États se sont modifiés pour ne créer que trois grosses puissances mondiales et ainsi contrôler toutes tentatives de révolte venant du peuple.

La population, désespérée, apeurée, affamée, accepta sans objection l’arrivée de la société Pundico qui œuvrait dans l’ombre depuis des années. Les PDG leur ont servis un discours appâtant, leur jurant qu’avec eux la paix serait le seul avenir et qu’ils fourniraient de quoi les sustenter au quotidien. Un plan alléchant pour des peuples démunis. Sans aucun mal, Pundico a su s’imposer dans la vie de tous et le projet parfait se referma sur les plus faibles.

Un drone survole la zone et le ramène à l’instant présent :

— On doit bouger et, vite, il reprend en secouant la tête.

Toujours dans l’ombre, ils continuent à avancer, évitant les premières patrouilles de Term02. Il leur reste deux cents mètres à faire. Dissimulé derrière une benne, il observe la porte du salut quand à nouveau cette voix féminine qu’il a appris à haïr avec le temps retentit de nouveau :

« Le couvre-feu est installé. Veuillez ne quitter votre domicile que pour les déplacements urgent en prévenant les Officiers aux abords de vos rues. Les sorties des animaux domestiques se font toutes les quatre heures. Pundico vous souhaite une agréable soirée. »

Les lumières des chaussées se tamisent une opportunité pour eux. Le guide n’attend pas une seconde de plus et fonce directement vers la porte en métal qui les protégera. Aux yeux et à la barbe de Pundico. Il frappe trois coups contre la porte et une grille s’ouvre pour demander :

— Mot de passe ?

— Moura.

Quelques cliquetis se font entendre. L’homme et la femme dans son dos se raidissent alors que lui retient son souffle de peur qu’un Term02 ne les repère. Leurs Pundinex s’affolent sur leurs poignets, les informant qu’ils sont hors délai et qu’une alarme les concernant ne va pas tarder à être lancée.

Une fraction de seconde plus tard, ils entrent dans le vieux bâtiment qui sent le rance, odeur désagréable, mais qui pourtant le rassure instantanément. Les Pundinex sont neutralisés une seconde avant l’alerte et tous soufflent de soulagement.

— Tu as réussi vieux, le salue chaleureusement Jace, son meilleur ami.

— Tu doutes encore de moi ?

Puis, il se tourne vers le couple et lance :

— Vous êtes en sécurité. Nous allons désactiver votre Pundinex afin qu’ils ne puissent pas vous retrouver.

— Mais vous ne venez pas de le faire ?

— C’était une décharge d’urgence. Nous allons les reprogrammer le temps de votre séjour ici.

— Combien de temps allons-nous rester ? demande la femme.

L’homme glisse son bras dans une cage en métal, serre le poing et la mâchoire. Malgré le temps, la brûlure qui parcourt son corps ne faiblit pas. Un courant électrique désactive son Pundinex et, alors qu’il ressort son bras et grimace, il observe Jace en haussant un sourcil.

— J’te laisse faire les présentations et le tour du proprio, je vais me doucher.

— Attends ! Scael !

Mais il ne se retourne pas. Sa mission s’arrête ici. Tout le monde le sait. Il traverse le hall, regarde dans les pièces de gauche et droite où des réunions semblent avoir lieu, où certains travaillent sur de vieux terminaux, mais continue son chemin pour monter au premier étage.

Grâce aux avancées technologiques, des petits génies qu’il a rencontrés au fil de ses escapades ont su lui préparer des gadgets qui rendraient fous les ingénieurs de chez Pundico. En effet, vivre dans un bâtiment désaffecté n’est pas aisé, surtout quand celui-ci est répertorié comme inhabité. Gary et Lulu, deux férus de technologies ont créé des brouilleurs à images, qui fait croire au monde extérieur que l’édifice est plongé dans le noir alors que celui-ci bénéficie bien de l’électricité obtenue avec des générateurs bidouillés par Alex.

Ainsi, ils permettent aux réfugiés de vivre presque normalement, de pouvoir regarder à travers les vitres la ville dans laquelle ils ne peuvent plus aller pour le moment. Scael est conscient que cette vie n’est pas envisageable sur le long terme, mais malgré tout leurs efforts, aucun d’entre eux n’a encore découvert le moyen de libérer entièrement les couples.

Il entre dans la chambre la plus au fond, verrouille sa porte et se déshabille en rejoignant la petite salle d’eau attenante à la pièce avant d’entrer dans la douche. L’eau au départ froide lui arrache un frisson revigorant et il se laisse détendre par celle tiède qui arrive. Il se savonne avec les produits préparés par Marie, une vieille femme qui errait dans les rues de Metz sans but, avec son modeste caddie en métal à la recherche de détritus pour fabriquer toutes sortes d’objets jugés comme insignifiants aux yeux de Pundico et pourtant très utiles à cette communauté.

L’ancienne lui parlait souvent du monde d’avant avec nostalgie. Son incapacité à s’intégrer au Nouveau Monde avait fait d’elle une poussière aux yeux des PDG de la plus grosse société du monde. Scael la considérait comme une étoile, lumineuse au bout d’un tunnel qu’il trouvait trop obscur pour l’humanité. Ainsi, il chérissait cette femme comme un membre de sa famille.

Il secoue la tête pour empêcher ses pensées de se tourner vers cette partie de sa vie. Trop tumultueuse. Trop sombre.

Il arrête l’eau, se sèche à l’aide d’une serviette et se dirige vers l’armoire pour en sortir une combinaison beige qu’il enfile avant de redescendre pour manger un morceau.

— Si tu continues ainsi, ils vont découvrir notre planque.

Il se tourne vers la voix familière d’Asha, adossée contre le mur droit à la sortie de sa chambre et lance :

— Ils sont formatés, ils ne peuvent prévoir des actions qu’ils n’ont pas étudiées.

— Je te l’ai déjà dit, Scael, tes coups en douce avant la nuit ne me plaisent pas.

Son regard de couleur menthe à l’eau, l’une des seules boissons aromatisées que Matty parvient à préparer avec des ingrédients sains, accroche le sien pour lui faire lire son désaccord.

— Et tu voudrais que je m’y colle quand ?

— En pleine journée, le risque serait réduit de moitié, je te l’ai déjà dit !

— Je suis occupé la journée ! Et les risques seraient décuplés avec les Chasseurs !

Asha croise les bras sous sa poitrine, relevant le menton, fière :

— Pas si on agit en binôme.

— J’te laisserai pas venir sur le terrain. C’est trop exposé. Et on se ferait vite repérer.

— Je me fous de tes excuses !

Elle s’éloigne avec cette mine déterminée que Scael redoute. Asha est devenue l’ombre d’elle-même après la disparition de son petit-ami.

— Alors, pense à Elyot ! Il ne te laisserait pas faire.

Elle se tourne et crache :

— Il est mort. Il ne peut plus intervenir dans ma vie.

Puis elle reprend sa marche, non sans essuyer une larme de rage qui s’échappe de ses yeux.

Scael soupire de frustration et secoue la tête. Il est conscient que tous ici ne sont pas faits pour vivre enfermés. Au départ, son idée pouvait sembler noble : lutter contre un système qui voulait supprimer l’amour. Au final, c’est une société déchue d’émotion qu’il affronte et, lorsque certains d’entre eux récupèrent de la rage de vivre, il est dur de les maintenir en captivité, en retrait de l’action pour les protéger. Il ne pouvait se permettre, au nombre de ses efforts, de perdre quelqu’un. Elyot avait marqué un tournant dans ses actes, l’obligeant à agir avec plus de précautions.

Il regagne l’étage inférieur et se dirige vers les cuisines où un Gary, plein d’enthousiasme l’accueil :

— Hey ! Regarde ça Boss ! C’est un brouilleur à ondes ! Si on parvient à trouver les canaux qu’utilisent les Term02, nous pourrons les désactiver un instant, le temps de nous faufiler dans les rues !

— Tu sais que les fréquences changent constamment ?

— Oui, mais je crois qu’elles sont prédéfinies ! Quand Lulu travaillait chez Erisop, ils faisaient des tests selon un cycle précis. Je me demande si chez Pundico c’est le même principe…

Il regarde Gary, son air rempli d’espoir que rien ne semble pouvoir abattre et acquiesce en se servant un café :

— Quand pourra-t-on l’essayer ?

— Lulu veut vérifier encore certaines choses, elle veut vraiment que tout soit parfait… Disons la semaine prochaine ?

— Alors je m’en occuperais.

— Mais ce n’est pas ton genre de mission, Boss…

Il boit une gorgée de la boisson chaude avant de répondre :

— Je sais me faufiler dans la ville, je ne sacrifierai personne d’autre.

Gary l’observe, une pointe de tristesse brillant dans ses yeux verts en se demandant comment le Boss avait finit par en arriver là et s’il tiendrait jusqu’à la fin de ce qui promettait d’être un long combat contre des ennemis infatigable.


Texte publié par Tynah, 2 janvier 2025 à 18h24
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