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Depuis toujours, je déteste l'automne, chose qui surprend tout le monde. Eux, soit aiment, soit s'en fichent. Alors c'est sûr m'entendre grommeler contre cette saison, ça leur paraît aberrant. C'est vrai après tout, il n'y a pas de quoi en faire une montagne. C'est le cycle de la vie.

Le problème c'est que même si j'essaie de l'ignorer, l'automne se rappelle rapidement à moi. Partout on ne voit que ça, on ne parle que de ça.

Par exemple, j'ouvre tranquillement les volets chez moi et là, je découvre les arbres dans un triste état : feuilles décrépies tapissant le sol, leurs congénères tentant vaillamment de rester en place mais tout ceci est peine perdue. Cela m'attriste.

Bien sûr, certains me diront que les couleurs sont magnifiques en cette saison. J'y vois juste du jaune moutarde, de l'ocre et du brun qui finiront par prendre la même teinte terne. Les forêts au Canada renchérit-on. Malheureusement, je n'y suis jamais allée et si je m'y rends j'espère voir autre chose que des feuilles mortes. Les pauvres recroquevillées, finissent écrasées sous nos pieds lâchant un dernier craquement comme symbole de leur capitulation. Il n'y a rien de magique là-dedans.

D'ailleurs, je tiens à faire remarque que lorsque l'on dit « l'automne de ma vie », ce n'est généralement pas un moment de bonheur. On est trop vieux pour travailler mais on doit le faire quand même. On regarde derrière soit pour voir ce que l'on a construit et on s'aperçoit que nos enfants ne partagent pas nos valeurs, ou alors qu'on a trop attendu pour en avoir et que maintenant ce n'est plus possible. On est assez âgé pour prendre conscience de ce qu'on a manqué et pas assez âgé pour relativiser, voir ne plus en avoir quelque chose à faire.

Après bien sûr, les gens me parlent des fêtes et événements. Parlons en ! On commence par quoi ? La rentrée !

Franchement, ce n'est pas le truc qui me met en joie. Adieux soleil et bonjour boulot !

Dans les magasins, je ne vois que ça « rentrée ». Moi, j'aimerais seulement trouver la sortie dans ce dédale.

Ensuite il y a Halloween : comme ça tu as le bonheur de voir débarquer chez toi, une bande d'enfants qui tambourinent dans ta porte alors que tu as déjà mal à la tête. Tout ça pour des bonbons. Le pire c'est que certains ne se foulent même pas pour leurs costumes : je me colle un tatouage trouvé dans les chewing-gums sur la joue et c'est bon.

Après, il y a la Toussaint, et sa tournée des cimetières, on nage dans la gaieté. Tout ça pour apporter des fleurs en plastique à des gens qui s'en fichent et pour cause, ils ne sont plus en vie. Chaque fois, tu te dis que tu ne le feras plus mais là, ta famille te piège en te disant que ça ne durera que cinq minutes. Ensuite, il reste à multiplier par le nombre de lieu que tu visites et ajouter les temps de trajet. Au finalement, tu perds ta journée.

Bref, il restera toujours ceux qui te disent « l'hiver c'est pire ». Sur ce point, je ne suis pas d'accord. En hiver, il y a Noël, le nouvel an et les galettes des rois. Au moins, c'est joyeux. On peut ajouter les plats bien gras avec du fromage, en plus des repas de fêtes.

Reste le gel, c'est sûr qu'on peut glisser. Néanmoins, les feuilles aussi c'est dangereux. Surtout si tu passes près d'un type armé d'une souffleuse... A ce propos, je me souviens d'une fois, où je ne m'étais pas aperçu que des feuilles mortes s'étaient agglutiné sur le talon de mon escarpin. Évidemment, je ne m'en suis rendue compte qu'une fois arrivée devant le recruteur. Comment se concentrer ensuite ? Forcement, je me suis agitée, essayant de cacher mon pied. Là, ça ne marche pas et je passe pour une folle pleine de tocs.

Je soupire. Il me faut quand même affronter l'extérieur pour rentrer chez moi. J'espère que l'automne ne me jouera pas un mauvais tour.

A pas rapide, je file vers mon objectif. Tout aurait été bien, si un coup de vent, n'avait pas fait se coller une feuille morte énorme sur le visage que l'homme qui me précédait. Face à ce spectacle, je ne peux rester insensible et j'éclate de rire. Pour une fois que je ne suis pas la cible.

Seulement, bien mal m'en a pris car à peine quelques pas plus tard, je glisse sur les restes végétaux détrempés. Me voilà donc les fesses par terre, agressée par l'eau.

Heureusement, celui dont je me suis moquée, n'est pas rancunier et vient même me donner un coup de main pour me redresser. Je le remercie et il ose me faire remarquer que j'ai une feuille collée à mon manteau. Gênée, je m'en débarrasse. Je déteste l'automne.

Depuis, je déteste toujours l'automne. Mais un peu moins qu'avant; après tout, c'est la saison où j'ai rencontré mon mari qui comme moi, a la fâcheuse manie de se faire agresser par les éléments.


Texte publié par Nascana, 30 novembre 2014 à 00h16
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