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tome 1, Chapitre 2 « Au détour d'une rue » tome 1, Chapitre 2

"Dis moi Evan, si tu…"

"Moi Evan."

"Merci. Si tu avais la possibilité de régler un problème dans le monde entier, en un claquement de doigt, en pensant juste aux bonnes choses que ça apporterait et pas aux conséquences euh… géo-économico-politico-dramatico…

Francisco ?"

"Mégalo-pas coolo pratique, oui. Ça serait quoi ?"

"Hmmmm…"

Nous vivions une journée que nous vivions habituellement dans nos rêves. Avec l’énorme somme d’argent accumulée lors de notre rude journée de travail honnête, nous pouvions enfin nous offrir un luxe inégalé qui nous permettait de quitter la morosité de notre quotidien, à tout jamais plaqué sur les trottoirs et les murs de notre banlieue grise et délabrée, tel un chewing-gum fini trop loin des poubelles que l’on aplati façon crêpe artisanale ratée.

"Deux choses. Déjà, on se fait une crêpe après ?"

"Evan…"

Malo sortit un simple billet de cent, tout en m’offrant un regard inquisiteur.

"Pour tes beaux yeux noisettes, je t’offre la crêperie."

"J’aurai pas assez faim pour tout manger."

"On aura qu’à en ramener chez nous."

"Ou on ramène la crêperie chez nous."

Il était de ces moments où l’on se permettait de refaire le monde, tout en s'imaginant des absurdités. Un peu comme une contre-soirée après minuit, sauf que nous nous étions offert le confort ultime en cette soirée : des cookies. Ce n’était sûrement pas l’heure pour un dessert, un repas aurait été plus adapté à la situation, je le conçois. Néanmoins, il y avait une dimension rebelle à dévorer cette délicieuse pâte, couvrant tout un subtil mélange d'éclats de chocolat en toutes sortes, au milieu de ce fast-food empli de toutes ces personnes respectueuses des horaires de repas et de l’odeur permanente de sandwich sorti du four.

"Pfff, Flemme."

"Ouais t’as raison. Deuxièmement, tu peux répéter la question ? Tu m’a perdu au “Merci”."

Malo finissait de dévorer le troisième cookie, aux cacahuètes, avant de mettre la main sur un ensemble framboise et macadamia.

"Mh… Si tu pouvais régler un problème dans le monde, n’importe lequel."

"En vrai… J’installerai la fibre dans l’immeuble. Non, elle ne marcherait même pas. Euh… Dis moi toi, pendant que je réfléchis."

"J’avais pensé à arrêter les guerres, mais tout le monde veut ça."

Quelques secondes passèrent où les bruits de mastications venaient à couvrir cet instant de réflexion commune. Puis la discussion reprit, bouches pleines.

"Donc j’ai pensé à interdire les morts de guerre. Comme ça, on garde les guerres, on peut tuer des gens avec des armes mais ils réapparaissent juste après. Fini les crimes de guerre."

"Pas con. J’aurais plus demandé à interdire les SDF. Genre on est obligé d’avoir un seuil d’argent sinon on est forcé à recevoir de l’argent et vivre dignement."

"Rude."

"Ouais, je sais."

Sur le moment, j’avais sorti ça sans trop penser aux squats et camps de réfugiés que l’on voyait bouger de temps en temps autour de chez nous, pour échapper à la police ou aux règlements de compte, mais Dieu savait que si c’était possible, je les ferais passer devant tout le monde au comptoir anti-pauvreté. Si vous vouliez de l’humanité et du partage, c’était chez eux qu’il fallait réserver une place pour un aprèm de temps à autre. Et si l’art du vol vous avait fait effet, ils dispensaient des formations vachement complètes. Inconsciemment, je les avais remerciés de nous avoir offert les capacités de saisir une opportunité comme celle d’aujourd’hui.

"On devrait bouger, en vrai. Avec tout ce blé, on pourrait aller… Loin."

"La crêperie est à même pas deux rues d’ici."

"Mais non, abruti. Bouger de notre zone, aller voir ailleurs, là où les gens sont différents. Peut-être qu’il y a des endroits dans le monde où y a pas de misère comme la nôtre, genre… La misère ça serait comme une autre langue, un patois oublié, qu’ils comprendraient plus tellement c’est différent."

"Malo, tu me fais peur à parler en grand comme ça. Je commence à croire qu’ils ont mis de la farine de sédatif dans les cookies."

Le cerveau humain est un organe incroyable. Il peut voyager loin, retenir des tas de trucs, réfléchir (contrairement à certains), etc… Mais s’il y a bien un truc pour lequel je lui en veux, c’est sa capacité d’adaptation.

On était bien à rêver sur cette table, encore sale du dernier repas, parmi tous ces gentils connards que l’on ne connaîtrait jamais, et ce de manière réciproque… Il n’était pas encore vingt-et-une heure que nos corps réclamaient une autre source de dopamine. Pas forcément plus puissante, juste une autre. Et rien que ça, ça me contrariait.

"Bon… On va les voir, ces putes ?"

"T’es sérieux avec ton idée ?"

"J’en sais rien, c’est la première qui m’est venue à l’esprit. Les magasins de vêtements ont fermé."

"Les parcs ne vont pas tarder non plus..."

Puis j’ai vu les mêmes cassos de tout à l’heure, déjà bien éméchés, en quête d’un bar qui ne les avait pas encore jetés ces derniers soirs, qui étaient en train de se prendre la tête avec un autre groupe, moins amoché pour le coup. Tout à l’heure, j’avais tout sauf envie de les voir, car il fallait rentrer. Maintenant… on avait le temps, et à force de rester fixés à ces chaises, on allait sacrément se frustrer. Une envie de me mesurer à ces gentils petits cons qui titubaient dans les rues en parlant fort, saisissant chaque opportunité de se battre avec n’importe qui histoire de foutre la merde tant qu’ils sont pas trop conscients, le tout devant monsieur et madame tout le monde qui voulaient juste passer une agréable soirée avec les enfants.

"Non, on va pas se battre ce soir Evan."

Malo avait compris. Il savait comment je réagissais face à ce genre d’injustice. Il se leva de sa chaise en laissant un pourboire très généreux, puis me regarda de haut avec un sourire narquois.

"On va jouer les flambeurs au casino. Prépare ton style, car on va tout perdre aux jeux !"

Nom de Dieu, ce mec pouvait avoir des éclairs de génie. Bien évidemment, il s’agissait de se ruiner, ou plutôt ruiner Lewis et son trench-coat tout noir. Forcément, Malo allait nous mettre dans la merde. Mais qui suis-je pour ne pas me laisser entraîner par l’un des plus grands connards de mon quartier.

"Que le meilleur perde."

********************************************************

J’avais quitté la planque de Martis depuis une bonne dizaine de minutes. J’étais pensif. Je me remémorais tout ce que j’avais appris ce soir-là. Ce n’était définitivement pas une affaire classique, je sentais que quelque chose dans tout ça n'était pas net, et c'était la raison pour laquelle je devais tirer cette histoire au clair rapidement. Mais pour le moment, je n’avais aucune preuve pour appuyer ce que mon instinct me susurrait. Je devais resserrer l’étau et intensifier les recherches. Il fallait des résultats concrets, et vite.

Je me stoppai à un angle de ruelle. Après un regard rapide aux alentours, je me dirigeais vers les rues les moins fréquentées, le bruit de mes pas résonnant dans les ruelles vides et la buée de ma respiration traçant comme un sillage brumeux derrière moi.

Arrivé à une intersection quelques instants plus tard, je pris le temps de vérifier les environs. Comme prévu, aucune âme dans les parages.

C’est alors que mon téléphone sonna. C’était ma patronne. Je décrochai.

"Ici Lewis."

"Bonsoir, Lewis. Confirmez votre identité."

C’était la procédure habituelle. Elle voulait à chaque fois s’assurer de l’identité de la personne qu’elle avait au bout du fil, sans exception.

"Numéro d’agent 133. Rapport de mission de renseignement, nom de code Pathfinder."

"Chiffres fétiches ?"

"1, 3, 7 et 9."

"Une date marquante ?"

"...17 Avril."

"Restez au bout du fil."

En attendant qu’elle finisse ses vérifications, je quittais le bâtiment et déambulais dans les rues en direction du parking où ma voiture était garée, à environ quinze minutes à pied.

"Identification confirmée. Statut des cibles ?"

"Décédées."

"Excellent travail. Êtes-vous en possession de nouvelles informations ?"

Je soupirais légèrement. Comment lui dire que je n’avais presque rien appris de nouveau en une journée complète ?

"Je crains de ne rien avoir à vous annoncer de neuf. La présence d’un cerveau à l’origine de l’attaque du fourgon a été confirmée. Cependant, aucun indice sur son identité, sa localisation, ni même son sexe."

"Je vois… Autre chose ?"

Je senti comme une légère frustration dans sa voix. C’était prévisible. Cette affaire durait depuis trop longtemps, du moins, pour ce qu’elle représentait. Ce n’était pas une histoire de menace d’État ou de trafics massifs à démanteler. Non, juste une histoire de fourgon blindé qui s’était fait intercepter et dont le contenu avait été dérobé.

"Martis et les jumeaux étaient en compagnie de deux autres criminels lorsqu’ils ont réalisé le casse. Aucune information à leur sujet n’a été donnée."

"Et je suppose que vous n’avez rien à m’apprendre de plus ?"

"Je regrette, mais c’est effectivement le cas."

Quelques secondes passèrent. Le bruit de mes pas fut la seule chose qui troubla le silence de ces ruelles pendant cette courte intervalle.

"Ça ne fait rien. Vous avez malgré tout rempli votre objectif principal qui était d’éliminer trois dangereux criminels. Toutes mes félicitations."

"Je ne fais que mon travail, boss."

Je devinai un léger sourire derrière son écran. J’avais l’habitude de répondre cette même phrase après ses congratulations, c’était presque devenu une sorte de petit jeu.

"Merci encore pour vos loyaux services. Je vous retrouverai dans une semaine au quartier général. Essayez de remuer un peu la ville pendant quelques jours, quelque chose nous a sûrement échappé."

"Bien reçu, je m’en chargerai."

"D’ici là, bonne chance Lewis. Fin de transmission."

Elle raccrocha, me laissant seul. Je rangeai mon téléphone dans l’une de mes poches de mon pantalon et m'époussetai un peu. Après quoi, je plongeai ma main dans l’une de mes poches de trench-coat pour vérifier si mes clés de voiture étaient bien là. C’était le cas.

"Bien, maintenant je n’ai plus qu’à rentrer au bureau pour faire mon débrief."

Je regardai l’heure sur ma montre. Je n’allais pas être en retard. Bien, enfin une bonne nouvelle, pour changer.

Cette satisfaction fut malheureusement de courte durée. En effet, après avoir marché sur quelques centaines de mètres, je senti que l'une de mes poches de manteau me semblait un peu plus légère que d’habitude. Confus, je m’arrêtai pour vérifier si cette impression n'en était pas une.

Vide. C'était pourtant là où j'avais mis mon portefeuille.

Après avoir vérifié l’autre poche, je vis qu’il ne s’y trouvait pas non plus. Impossible qu’il soit tombé pendant mes confrontations durant la journée, mes poches de manteau étant profondes. Seul un acte délibéré pouvait l’extraire directement de l’une d’elles.

C’est alors que je me souvins de la bousculade avec le type louche au beau milieu de la foule. Ne me dis pas que…

Soufflant du nez avec agacement, je fis immédiatement demi-tour pour retrouver ce jeune homme qui, semblait-il, n’était pas aussi innocent qu’il n’avait voulu le faire croire…

********************************************************

C’était un véritable trip dans lequel on s’était fourré. Pendant quelques secondes, mon cerveau avait déconnecté, histoire de remettre ses idées en place. Mais la roulette, qui faisait danser la petite bille, était bel et bien en train de décider frivolement de notre sort, et nous ne pouvions qu’observer notre avenir monétaire se dessiner sous nos yeux.

Rien qu’à l’entrée, le vigile avait voulu nous envoyer balader, car nos dégaines n’étaient pas assez “distinguées” pour accéder à ce genre d’endroit. Heureusement que notre cher Lewis avait décidé de retirer du liquide, sinon nous aurions pu dire adieu à une soirée d’excès et d'ivresse.

En rentrant, j’avais failli tomber à la renverse : c’était plus beau qu’une cathédrale, le bordel ! Tout avait été construit en pierres blanches immaculées, il y avait même des tableaux, pour dire ! À défaut de savoir prendre une décision, ces types avaient de l’argent, alors ils avaient fait en sorte que cet endroit puisse servir à tout et n’importe quoi.

À peine nous étions-nous remis de nos émotions qu’il fallait transformer notre argent en jetons pour pouvoir profiter des machines et des tables. Très confiants de notre nouvel apport, nous avions posé tous les billets sans même les avoir comptés, sur le comptoir du bureau de change. La dame avait récupéré l’ensemble de notre richesse, avec un sourire qui aurait pu abattre un bûcheron et son arbre, sans pour autant donner l’air d’avoir été impressionnée.

Malo avait alors été pris d’un sentiment à la fois plus qu’agréable et étonnamment frustrant : il était amoureux. Enfin, amoureux comme on l’avait été à l’école, un truc simple qui était sympa, mais ne pouvait pas vraiment durer. Alors qu’elle revenait avec une mallette, Malo avait pris une posture qui trahissait la scène qu’il allait jouer, mais il fut stoppé net par l’annonce du montant total des jetons.

"Cinq milles euros !?"

"Tout pile ! Vous voulez recompter pour être sûr ?"

Recompter le tout aurait pris la nuit entière, et on avait pas que ça à faire. Nous prîmes la mallette avec nous, tout en essayant de cacher notre stupéfaction, histoire de ne pas passer pour des personnages suspects, avant de rejoindre les jeux.

Rarement je m’étais senti aussi petit face à toutes ces lumières, ces gens bien habillés, ce chaos sonore… Et aussi perdu face à tant de possibilités.

"Evan, on fait quoi ? On commence par quoi ? Je sais pas quoi faire, je panique putain !"

"J’ai soif."

"Bonne idée, allons boire !"

Assis à une table mille fois supérieure à celle du petit restaurant de tout à l’heure, la carte des boissons semblait vouloir engloutir l’entièreté de notre patrimoine économique plutôt que de nous servir à boire. Pendant cinq bonnes minutes, nous l’avions parcourue avec la conviction de n’avoir pas les moyens pour ne serait-ce qu'appeler un serveur, avant de nous remémorer de l’ampleur de la collection de cartes bancaires à notre disposition.

Entre bières et cocktails se présentaient de grands crus de champagnes. Alors le champagne, c’était un concept très abstrait qui ne servait qu'à amplifier un sentiment de richesse dans les films d’espions.

"Quitte à se faire des films, autant se mettre dans la peau des acteurs !"

Le mec avait vraiment dû nous prendre pour deux grands enfants à qui on avait confié la carte bleue pour faire des courses, et qui s’étaient retrouvés par hasard dans un casino, parce que c’était beau les lumières, alors nous voilà. À voir sa tête, nos questions semblaient d’un banal absolu, car certains tics trahissaient ses pensées. Mais malgré tout, il avait su garder un professionnalisme presque parfait et nous avait servi un… Gilles Truc De La Machinière du domaine de Bidule, 2002. Bref, rien que le nom avait un prix.

Puis on avait dû le goûter pour confirmer qu’il nous allait. Au début, on n'avait pas compris pourquoi le gars était resté à nous regarder sans rien dire. Malo m’avait regardé comme pour me demander s’il fallait lui servir un verre, pour le remercier ou en guise de pourboire. En réponse, j’avais vidé la moitié de mon verre d’une traite.

"Le champagne vous plaît ?"

"Ah, euh… Oui, ça passe."

Quelle dinguerie, que c’était bon ! Le serveur avait pris le soin de remplir à nouveau nos verres avant de partir vers d’autres clients. Cinq minutes plus tard, la bouteille de prestige avait été vidée de son liquide précieux.

"Oh merde, on est de vrais sauvages."

"Non, on lui a fait honneur !"

"Hm… Je suis pas satisfait de notre comportement."

"Je comprends. La prochaine, on la respecte en mettant les formes."

C’était la première fois que je remerciais mon cerveau d’avoir un système d’adaptation pour se protéger des mauvaises habitudes, car même la troisième bouteille avait été descendue en un temps record.

"Zut, j’allais presque oublier qu’on devait jouer !"

"T’as raison. En route !"

Et c'était en me levant que je remarquais un détail loin d’être anodin. Ma main avait pris l’épaule de Malo qui se tenait sur le bord de la table, histoire de tenir debout. Mon regard avait rejoint ses yeux avant que ma bouche ne conclut :

"Je suis pas bourré, Malo. Je peux toucher mon nez en passant le bras sous la tête."

"Non, tu peux pas. C’est la jambe. Et j’ai autre chose à faire que te regarder tomber."

********************************************************

J’avais suivi la trace du petit merdeux jusqu’aux quartiers riches. Je soupirais. Il devait probablement être en train de cracher tout l’argent que j’avais retiré. Non pas que cela allait me mettre sur la paille, j’avais encore une marge assez large, mais j’étais malgré tout bouillonnant. Cela restait mon bien, et j’avais un petit côté matérialiste qui se révélait lorsqu’on le titillait assez. Je fis le tour de plusieurs magasins chics, de quelques restaurants et autres boutiques extravagantes. Rien.

Il fallait que je pense comme lui. Si j’étais un voleur, que ferais-je avec quelques milliers d’euros fraîchement dérobés ? Envoûté par l’appât du gain en voyant toute cette richesse, j’aurais probablement tenté d’en gagner encore plus.

Gagner plus… Mais oui, évidemment, le casino ! Pourquoi n’y avais-je pas pensé ?

C’est après une centaine de mètres que je m’arrêtai devant l’enseigne. “Le Palais du Jeu d’Or” “Faites le grand saut vers la fortune avec nous !".

Pompeux, trompeur, et complètement ridicule. Pas de doute, c’était bien un casino.

Après avoir posé plusieurs questions à divers employés, je compris que mon voleur était bel et bien passé par là.

Je sortis puis longeai la rue, jusqu’à finalement me retrouver au bord de la Seine quelques instants plus tard. Cette fois, j’ignorais totalement où il aurait pu aller.

"C’est vraiment honteux c’que vous faites !"

"Malo…"

"Virer les pauvres débutants que nous sommes, sans même daigner nous expliquer quoi que ce soit ! Vraiment…"

Je fis encore quelques pas, avant de finalement apercevoir deux jeunes loustics à quelques dizaines de mètres qui, de par les beuglements incohérents qui sortaient de leurs bouches, étaient manifestement ivres. Ils s’avachissaient sur le parvis comme deux larves, leurs gestes mous et ridicules.

"On va rentrer, hein ? De toute façon, on n’a plus grand chose à faire ici."

"Mais bien sûr que si, on a grand chose à faire ! Tu vas te laisser faire par un connard pareil ?"

"Il le pense pas vraiment, vous savez. Hein Malo, que tu racontes que de la merde ?"

Je me rapprochais, puis m'attardais une seconde sur eux.

"Qu’est-ce que tu me baragouine, fils de meuble Ikea dont on n’a pas la notice et du coup on sait pas comment…" "Comment le…"

"Comment le monter ?"

"Ouais c’est ça !... Je disais quoi, déjà ?"

Attendez. Ces habits. Ce visage. Ces petits yeux de fouineurs. C’était lui, devant moi, et manifestement accompagné de son ami avec qui il avait sûrement dû faire la fête. Je remerciais ma bonne étoile, car au point où j’en étais lâcher l'affaire me semblait l'option la plus raisonnable.

"Qu’on allait rentrer illico presto se faire une pizza."

"Non ! Parce que de un, tu me mens ! J’aurais jamais dit ça, car tu sais très bien que je ne suis pas aussi raisonnable que tu ne le crois, Evan."

Un sourire carnassier se dessinait lentement sur mon visage. J’avais enfin ce petit enfoiré à portée de main. Vu la sale journée que j’avais passé, je comptais bien m’amuser un peu avec lui. Après tout, les deux trois petites frustrations emmagasinées n’allaient pas s’évacuer toutes seules.

"Ne dis pas ça, tu es… Comment dire…"

"J’espère que vous vous êtes bien amusés."

Mon ton sarcastique attira leur attention. Je vis l’expression de mon voleur pâlir. Il m’avait reconnu. Son camarade, lui, ne semblait pas comprendre la situation, ses yeux vides me fixant comme s’il essayait de former une pensée cohérente dans son esprit embrumé. Je souriais de plus belle en voyant leur état, comprenant que ce petit problème allait rapidement être réglé.

"Maintenant, si vous le voulez bien, j'aimerais récupérer ce qui m'appartient."


Texte publié par AlexeiSerov, 2 juin 2024 à 19h05
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