Quelle ironie ! Sorti de la station Cadet, c’est la rue d’Enfer qui conduit au Paradis. Dois-je y voir un présage ou une sombre facétie ? Mais œuvrons encore, car derrière moi se dessine l’armée de Saint-Lazare qui s’avance pour mieux rejoindre celle des Filles-Dieu des Prés aux Filles de Dieu. Moines et chevaliers, munis de leur foi, s’en vont braver les démons de la rue de l’Enfer, quand les heureux survivants s’en iront trouver le réconfort entre les doux bras des pleureuses. Je m’amuse de ma propension à inventer toutes ces histoires, ce qui ne manque pas d’interpeller la fausse divinité perchée sur mon épaule.
– Où est donc passée ta sombre mine, Alvaro ? Qu’est-ce qui te fait sourire, ainsi ?
– Des aventures imaginaires. Une bataille rangée entre soldats de Dieu et progéniture des Enfers qui se déroulerait dans cette rue.
Dans l’avenue, personne ne prête la moindre attention à notre insolite conciliabule ; les lieux sont bien trop animés.
– Décidément, tu as l’imagination. Prends garde à ne pas déborder !
« Prends garde à ne pas déborder ! » l’avertissement sonne semblable à une sinistre sentence. Je suis assis sur un banc, un rictus dément peint sur le visage, tandis que s’échappe hors de ma personne une foule d’objets oniriques que j’identifie comme des équations et des figures géométriques. Je suis inconscient et le flot grossit, au point de menacer de déchirer la toile de la réalité. Quelqu’un s’approche. Je n’en distingue que la silhouette, terriblement familière. Je l’aperçois qui échange quelques mots avec Loki, avant de poser deux énormes valises, dont l’un ressemble à s’y méprendre à l’étui d’un instrument à musique. En effet, à peine l’a-t-il ouvert que je reconnais la ligne fine et élégante d’un saxophone. Il s’en saisit et glisse autour de son cou la lanière qui en assurera le soutien. Puis il fouille à l’intérieur de sa veste et en extrait un objet de la taille d’un porte-cigarette, que je ne reconnais que trop. Soudain, comme s’il avait deviné ma présence, chaussé de ces invraisemblables lunettes noires, il se retourne et me lance un sourire entendu. Incapable de me mouvoir, simple spectateur, je ne peux qu’admirer la scène qui se déroule. Sur un air saccadé et audacieux, le voici, le joueur de flûte de Hammelin. il attire à lui toute la foule mathématique et l’entraîne dans une folle farandole, dont le point final n’est autre que la seconde mallette grande ouverte au centre de la place. Musicien endiablé, il rassemble autour de lui le petit peuple à qui, en tant que Grand Ordonnateur, il montre où se cacher. À mesure que se poursuit son concert, la réalité recouvre son harmonie et le lieu sa stabilité et son unité. Le déferlement tari, assuré que plus aucune de ces féeries ne traîne dans les parages, il referme la valise. Il furète quelques instants puis, son saxophone toujours autour du cou, il s’approche de ma personne. Son visage me frôle, je l’entends me glisser :
– À bientôt, Alvaro !
Je ne peux lui répondre que l’on me sonne et m’assomme. Quelqu’un me rattrape et me relève.
– Oh, monsieur ! Tout va bien ? Vous ne vous êtes pas fait mal ? me questionne une voix que je ne reconnais pas.
Machinalement, je me passe une main sur le front pour la retirer aussitôt sous l’effet d’une vive douleur.
– Ne bougez pas, je m’en vais vous chercher un peu de glace. Philibert, veux-tu l’aider à s’asseoir ? Je crains qu’il ne retourne dans les bras de Morphée.
J’ignore si les mots sourd et aveugle décriraient ce que je suis en train de vivre. Je possède encore tous mes sens, pourtant comme tout me semble lointain, indistinct, pris dans une mélasse épaisse et invisible. Dans la rue, la foule demeure figée, une pomme est suspendue dans les airs, tandis que d’un seau renversé s’échappe une cascade qui éclabousse le trottoir. À quelques mètres de là des enfants sont stupéfaits, saisis dans leur course, à l’instar de ces amoureux qui échangent un baiser passionné. Sensation d’infinité et d’éternité, cela ne dure qu’une poignée de secondes, jusqu’à ce que la morsure d’un glaçon m’arrache à la transe. Mes lèvres remuent. L’on me répond. Des sons me parviennent. C’est ma voix, de contrebasse, puis celle d’un homme, à moins que ce ne soit une femme. Difficile de les différencier tant elles me paraissent étranges. Enfin, j’en appréhende le sens ; ma tête a heurté un lampadaire. Le torchon entre mes mains, je me relève et aperçois Loki fort occupé à picorer des friandises. Il ne cessera jamais de me surprendre. Cependant, en rien je ne m’explique cette troublante survivance d’un événement dont je ne possède aucune connaissance, non plus que cette sortie hors du temps. Au même instant, un détail me revient en mémoire. N’est-ce pas une paire de lunettes, semblable à celle que m’a remise Augustin, qu’a chaussé ce joueur de saxophone ?
Augustin ? Est-ce bien là votre véritable identité ? Ce prodige est votre œuvre, n’est-ce pas ?
– Toutes mes excuses pour la bosse prochaine, Alvaro, me murmure soudain une voix feutrée.
Inutile que je me retourne, il n’appartient pas à notre monde. Il ne demeurera pas parmi nous.
– Voyons ! Je ne peux tout de même pas apparaître ainsi au milieu de la foule et semer la panique. Je ne suis que de passage, Alvaro.
Il s’éloigne et regagne le sien. Lequel ? Je l’ignore.
– Vous vous sentez mieux, me questionne quelqu’un dont je ne reconnais pas la voix.
Je cligne des yeux à plusieurs reprises, à cause du soleil qui m’éblouit, et découvre une dame coiffée d’un fichu multicolore qui lui donne des allures d’oiseau amazonien.
– Euh, oui… c’est possible, articulé-je avec les plus grandes difficultés.
Assommé, ma tête sonne comme l’une des cloches de Notre-Dame, tandis que s’élève la colline Montmartre au sommet de mon crâne. La poche de glace atténue la douleur, car je ne sens presque plus rien.
Pourquoi s’est-il excusé et qui a empêché ma chute ?
– Pardonnez-moi! Mais lequel d’entre vous m’a rattrapé dans la rue ?
Visages étonnés, visages étrangers, surtout des visages consternés, car pas seul d’entre eux n’est en mesure de me répondre. Qui donc m’a saisi alors que je rebondissais telle une balle de caoutchouc sur le totem de métal ? Je devine leur mine creusée par le désarroi et l’incompréhension. La peur dévore leurs âmes quand ils font face à un vide que rien n’explique. Puis elle cède la place à l’horreur tandis que l’angoisse fissure les masques de leur visage.
– Aucune importance. Je désirai seulement remercier cette personne.
Sous mes yeux, leurs traits pétrifiés et terrorisés reprennent des couleurs. Soulagés, ils se concertent et s’accordent à me trouver meilleure mine. Rassurés, ils me laissent partir.
En chemin, j’ouvre l’étui et enfile ces étranges bésicles fumées et irisées, pour mieux les ôter tant je suis pris de nausée et de vertige. Ainsi est-ce donc là reflet onirique de la ville, aux prises avec les nuées de songes et de fantasmes de ses bâtiments et de ses habitants, de l’inerte et du vivant. À contrecœur, je les range. Il sera raisonnable de m’exercer auparavant. À regret, car j’ai cru apercevoir la trace fugitive de cet homme creux qui se meut entre les trames réalistes. Inutile de jouer les bateaux ivres, quand bien même le canal ne serait qu’à quelques pas. Je me contente de ma superbe bosse que je porte en médaillon sur le front. De retour au monde, je cherche le numéro 10. C’est une rue riche de ses immeubles haussmanniens. Je flânerais volontiers à hauteur de la maison Pinet, cis au numéro 44 où s’élève deux magnifiques caryatides – mais qu’aurai-je besoin d’une nouvelle paire de chausses –, ou devant les vitrines des établissements Baccarat et des cristalleries de Saint-Louis. Hélas, le temps est une denrée rare et il me manque, car c’est avant la tombée de la nuit que je veux me rendre au quai des Orfèvres. Ne l’oublions pas, c’est à minuit que s’ouvrent les portes de l’Enfer.
Au pied du bâtiment susdésigné, un hôtel particulier clos par un portail en fer forgé où s’épanouit une myriade de fleurs comme autant d’accroche-cœurs. Je pénètre dans la cour à la recherche des boîtes aux lettres, lorsque surgit la concierge de derrière un massif de charmilles, sculpté en une topiaire pour le moins singulière. Toute de gris vêtue, la souris baguenaude entre les allées.
– Pardon, madame. Où se trouvent les appartements de madame Chandon ?
Pendant un instant, le vide emplit son regard. Quand l’aura-t-elle vu, juste avant ma venue ? L’idée m’effleure.
– Madame Chandon ! s’exclame-t-elle. Oh ! Mais cela fait plusieurs jours qu’elle nous a quittés. Que lui voulez-vous ?
J’exhibe aussitôt ma carte de visite et lui explique en quelques mots les raisons de ma venue. Mon exposé achevé, j’ajoute :
– Je n’ignore pas que la police est déjà passée solliciter votre témoignage. Néanmoins, n’auriez-vous point reçu de courrier de sa part ?
Ce faisant, j’effleure son épaule.
– Ma foi… Attendez, je crois que cela se pourrait bien. Je n’ai aucune idée précise de la date de son arrivée. Suivez-moi dans ma loge, je vous la montrerai.
Son familier, un félidé aussi gris que les cheveux de sa maîtresse et au regard plein de malice, entre les bras, elle remarque soudain la présence de Loki.
– Ma foi, c’est un fort bel oiseau que vous avez là, s’enquiert-elle. C’est curieux, il ressemble à un phoenix… vous savez l’un de ses animaux fabuleux comme les griffons ou les chimères. Comment s’appelle-t-il ?
De bon aloi, ce dernier se dandine le long de mon bras et, fier comme Artaban, parade.
– Loki,
– Loki, dites-vous, répète-t-elle en écho. Pourquoi pas Thor, ou encore Baldr?
– Il est bien trop facétieux.
– Ma foi, Loki, monsieur Estrango, je vous présente Léon.
Cependant, blasé ou tout simplement trop fatigué, celui-ci s’est rendormi et ses pattes pendent dans le vide.
– Ah, ce n’est pas grave, soupire-t-elle en entrant dans sa loge.
En fait de conciergerie, il serait plus juste de parler de bibliothèque, car tous les murs de son intérieur en sont couverts. Il n’est pas un recoin épargné. Entrouvert sur une table, au trois quarts entamés, les Mémoires d’un fou de Léon Tolstoï, m’arrachent un sourire, car qui sait de quoi serait bien capable de félin d’apparence si placide.
– J’arrive, s’écrie-t-elle depuis sa cuisine dans laquelle elle a disparu. Le temps que l’eau chauffe et je suis à vous.
Absente, je me perds dans la contemplation de cet antre littéraire riche de ses trésors, d’autant que nombre de ces auteurs me sont loin d’être de parfaits inconnus. Hélas, je n’ai pas le temps d’approfondir mon exploration qu’elle surgit, un plateau entre les bras. Dessus est disposée une théière japonaise accompagnée de ses tasses et d’un pli décacheté.
– Voici monsieur ! Elle est arrivée la veille ou l’avant-veille. Je ne sais plus. Ah! que voulez-vous. Il arrive que ma mémoire me joue des tours, m’explique-t-elle benoîte.
Tandis que j’examine l’enveloppe, elle me sert une tasse d’un breuvage mordoré et épais. Sans hésitation, j’y trempe les lèvres et en savoure tous les arômes qui se développent.
– Exquis ! Qu’est-ce ?
– Du thé japonais, du matcha de Nishio, me répond-elle dans un sourire. Prenez donc votre temps. Cela lui laissera le temps de maturer et d’exprimer toutes ses saveurs.
– Merci ! murmuré-je.
– Puis-je ? ajouté-je en désignant l’enveloppe, ouverte avec délicatesse.
– Je vous en prie, monsieur Estrango.
Si j’en crois le cachet de la poste, la lettre a été déposée dans un bureau du 9e arrondissement, le 26 juillet 1924 ; la veille de ma rencontre avec ma cliente. Songeur, je m’interroge sur cette étrange coïncidence. À moins que ce ne fût, comme l’exprimerait le Docteur Freud, un lapsus. J’ignore pourquoi semblable idée me vient à l’esprit et je la repousse aussitôt. Ce lieu sera le dernier que je visiterai, car pour un homme capable de se glisser entre les mailles de la réalité , se cacher devient inutile. Quant à la lettre, laconique, elle mentionne le départ d’Edmée Chandom pour la Normandie le 30 juillet, afin d’admirer l’éclipse pendant la matinée du 31.
– Pardon, mais quel jour sommes-nous ?
– Lundi, monsieur Estrango, me répond-elle entre deux gorgées de matcha.
– Oh ! Pardon, je parlais de la date. Je suis un peu perdu ces temps-ci.
Interloquée, elle me dévisage quelques secondes.
– Nous sommes le 28 juillet, monsieur Estrango.
– Vous avez donc reçu cette missive aujourd’hui, n’est-ce pas ?
Elle cligne des yeux, compte, puis s’exclame :
– Oh ! Mais oui ! Elle n’a pu arriver qu’en ce jour.
– J’aurai encore une question, si vous me le permettez. Puis-je emprunter votre téléphone ?
– Faites donc, monsieur Estrango, sourit-elle en m’indiquant du bout de l’index le combiné noir suspendu au mur.
– Merci, c’est fort aimable de votre part.
Un carnet à la main, je m’empare du cornet. Après un bref échange, je raccroche perplexe. Est-ce une erreur de ma part ? Me serai-je fourvoyé ? L’image d’une veuve noire s’impose à moi ; sinistre présage. Soucieux, je n’oublie pas de saluer la sympathique concierge.
– Ce n’est rien, monsieur Estrango. Je ne suis qu’une modeste concierge.
– Vraiment ? songé-je, narquois. Peut-être est-ce mieux ainsi. Chacun ses secrets : sa bibliothèque et moi ? Moi ! Sans doute cette chimère qui a fait de moi sa proie.
– Au revoir…
– Renée, monsieur Estrango, me murmure-t-elle presque gênée.
– Au revoir, Renée. Croyez bien que je ferai tout mon possible pour retrouver mademoiselle Chandon.
Sur le seuil de l’immeuble, je demeure pensif. Un autobus passe en direction Palais-Royal.
– Est-ce un hasard, Loki ? murmuré-je.
Le véhicule s’éloigne et disparaît dans le brouillard ; celui de mon esprit.
– Mais enfin de quoi parles-tu ?
Rêveur, j’entame une marche sans but ni savoir.
– Le 26 juillet. La lettre était datée du 26 juillet. Or nous sommes… revenus ce même jour.
– Où veux-tu en venir et aurais-tu déjà oublié le courrier que t’avait remis ta cliente ?
Amer, je ricane :
– Hélas de cliente, Loki. C’est une morte qui nous a parlé ce jour-là. Mais pardon, je m’égare. J’avoue je suis très troublé et tout me donne l’impression que quelqu’un savait que je me rendrais à cette adresse.
– Tu vas trop loin ! me rétorque-t-il. Personne ne peut lire le futur. Tout au plus, certains en aperçoivent-ils les reflets possibles. Peut-être cette lettre est-elle une bouteille lancée dans la mer temporelle.
Sombre, les paroles de mon compagnon heurtent le vide qui m’habite. Personne ne discerne l’avenir, mais l’on peut en infléchir le cours ou le modeler à sa convenance ; pour mieux me piéger.
– Qui sait ? Cependant, quelque chose me gêne dans ce courrier. Elle semble surfaite. Le ton est élégant, pédant même. Elle est rédigée avec soin, trop comme pour dissimuler le creux qu’elle contient. Tu m’objecterais, sans doute à raison, que mademoiselle connaissant le secret de sa concierge, elle lui aura adressé une missive rédigée en un langage châtié. Pourtant, tout donne à penser que ce courrier n’a été composé que dans le but de se conformer aux attentes de sa destinataire : celui de la rassurer. La question est : qui l’a donc écrit : madame Chandom, ou bien cet homme mystère dont la silhouette se confond avec les ombres, son fiancé… à moins que…
Du regard, j’embrasse l’entrée, noire et vorace, de la bouche du métropolitain de la station Cadet-Poissonières,
– Loki ! Que dirais-tu d’une promenade ? m'exclamé-je mon oignon et une feuille froissée à la main.
Surpris, ce dernier me fixe, interloqué.
– Ne seras-tu point en retard pour ton rendez-vous au Purgatoire ?
Je préfère sourire plutôt que de trahir l’angoisse qui me saisit, car voici que je souffre de trypophobie ce qui, en d’autres circonstances, pourrait prêter à rire.
– Non !
Dans chaque main, je tiens une lettre, celle reçue par Renée et la copie de celle confiée par feu ma cliente.
– Loki ? Ôte-moi d’un doute. Le courrier reçu par cette aimable concierge n’était pas marqué du sceau de cet infâme. Bien sûr, sinon tu n’aurais pu retenir un cri d’orfraie.
Une ombre noire couvre soudain le ciel et un orage se déchaîne. Ainsi, donc tu en décides pour moi. Je m’incline, Achronos. Pris de court, nous nous précipitons dans la gueule béante qui affleure à la surface du macadam. Au bas des escaliers, une femme marche le regard hagard et une torche à la main. De sa bouche entrouverte, s’échappe un souffle :
– Il y a toujours l’odeur des ombres… Tous les parfums d’Arabie ne rendraient pas suave cette petite main !
Derrière, une femme et un homme la précèdent dans sa folie. Pendant une seconde, ses yeux se portent sur moi et un sourire déforme son visage, puis elle s'éclipse dans un couloir. Trop stupéfait, je demeure un pied suspendu entre les marches. Je chute. Mon pied a glissé sur le marbre. Mon corps choit. Ma main attrape de peu la rampe. Je me relève, la femme a disparu, le corridor aussi, et Loki s’est réfugié sur un portique. Dehors, l’orage redouble de violence et déverse des cataractes d’une eau noire et glaciale.
– Tout va bien, monsieur ?
Une employée du métropolitain penchée sur moi me dévisage, dans ses yeux j’y lis l’effroi. Derrière elle, j’aperçois la tête d’un cheval, ses prunelles sont blanches et sa robe est pâle. Perché sur sa croupe, un petit être grimace. Comme la femme, celui-ci s’éclipse dans le voile obscur du cauchemar.
– Oui…
Ma voix n’est qu’un filet. Ce n’est plus une dame, mais un homme fort élégant qui me tourne le dos. De ses lèvres s’échappe un rire sinistre tandis que sa silhouette s’efface dans l’éther.
– Bientôt…
Le rugissement de la rame couvre ses paroles. Les portes s’ouvrent. Une femme est assise en tailleur, la tête couchée entre ses genoux. Sa chevelure retombe et dévoile sa nuque blanche. Ses mains, en coupe, paumes tournées vers le plafond, reposent sur ses chevilles. Avec lenteur, sa figure se relève, toujours dissimulée par la masse noire de ses cheveux ; un doigt posé sur les lèvres. Paralysé, je n’ose m’avancer. Pourtant mes jambes me portent et mes pieds se meuvent tout seuls vers cette femme aux allures de spectre, baigné par le soleil. Tournée vers le ciel, elle fixe un point aveugle. À l’intérieur, un géant la couve du regard, les ailes déployées largement et les bras écartés. Je veux me retirer, mais sa queue gigantesque s’est enroulée autour de ma taille. Il m’entraîne. Il m’entraîne vers ces femmes qui dansent le sabbat. Je suis étendu sur une litière de feuilles et de mousse. Elles tournoient tout autour de moi et murmurent un nom que je ne connais pas. Au loin, j’aperçois un chemin dont elles me détournent. Un chien, à moins que ce ne soit une hyène, monte la garde ; sphinx énigmatique qui me barre la route. Soudain, une femme sans visage, ni bras, ni jambes surgit et tranche les rets qui me retiennent ; je heurte le macadam. Une vive clarté m’éblouit et une jument noire jaillit de nulle part ; c’est la rame du train du cauchemar, celle qui emporte les âmes dans la galaxie obscure. Une sirène hurle à la mort. Je sens que l’on me traîne.
– Alvaro, me souffle quelqu’un à l’oreille. Je ne serai pas toujours là pour toi. Heureusement que tu as un ami précieux.
Je cligne des yeux, la présence n’est plus. À la place je découvre la cour carrée du Louvre depuis le banc dans lequel on m’a assis.
– Loki, que… Comment sommes-nous arrivés jusqu’ici ?
– Par les quais. Ne nous as-tu point proposé une promenade ?
– Sans doute…, murmuré-je, absent. Loki, puis-je te poser une question ?
Surpris, celui-ci roule un instant des yeux.
– Que t’arrive-t-il, Alvaro ? Serais-tu tombé dans un trou de mémoire, par hasard ? Enfin, je t’en prie, interroge donc l’oracle que je suis.
Je ne relève pas la pique et poursuis :
– Te souviens-tu de ce qui nous est arrivé après que nous fûmes rendus sur cette lande déserte, non loin du plateau de Saclay ?
Perché sur la rambarde, celui-ci glisse tête en bas.
– Fort bien, nous avons croisé la route d’un fermier, Marc-Aurèle, accompagné de ses bœufs, Blaise et Pascal. Je me souviens encore des coups de balai de ces mégères qui voulaient me chasser de la propriété. Ensuite, nous sommes allés nous coucher. Au cours de la nuit, les bruits une dispute, dont le sujet m’échappe, nous ont réveillés.
– Et ensuite, le coupé. Y a-t-il quelque chose qui te revienne en mémoire ?
Outré, ce dernier me jette un regard courroucé qui, très vite, disparaît pour laisser place à une profonde perplexité.
– Rien, n’est-ce pas ? Que je devine, il y a un trou dans tes souvenirs.
– Oui, marmonne-t-il. Mais pourquoi donc toutes ces interrogations ? Qu’ont-elles à voir avec ta présente enquête ?
– Je crains de l’ignorer moi-même. Allons, nous avons une énigme à résoudre, mon cher ami.
Mais alors que je me lève, je tombe nez à nez avec un dragon de papier qui parade devant le passage Richelieu, accompagné de sa suite colorée. Un œil sur l’horloge, elle m’indique que mon rendez-vous n’aura pas lieu avant deux heures.
– Loki, si nous allions nous promener du côté du carrousel. Il y a un peu trop de soleil à mon goût par ici.
L’instant d’après, nous flânons au milieu d’une foule béate jusqu’à un kiosque couvert de glycines, où joue un petit orchestre de guinguette. Avisant un coin ombragé, j’y prends place. Comme je ne tarde pas à m’assoupir, je recommande à mon compagnon de me réveiller dès que mon rendez-vous sera arrivé. Bien mal m’en aura pris, car c’est à coup de bec sur la tête qu’il tire de ma sieste.
– Bonjour monsieur Estrango ! pépie une voix. Je vois que vous avez su profiter des lieux à leur juste mesure.
– Oh ! Bonjour madame Bourgueuil. Ma foi, ce banc était tout à fait à propos. Cependant, vous pouvez vous douter que je ne suis pas venu vous entretenir des bienfaits des glycines.
– Vous auriez pu, me glisse-t-elle malicieuse tandis qu’elle prend place à mes côtés. Je n’ai guère d’occasions d’en profiter et vous m’en offrez une que je ne saurai décliner. Mais expliquez-moi plutôt les raisons de votre venue. Vous êtes demeuré bien mystérieux et ce serait bien la moindre des choses que de vous rendre la pareille.
Je souris, car cela me rappelle ces semaines passées à hanter les musées afin d’y remettre de l’ordre, quand bien même certaines auront été récalcitrantes.
– Ma foi, je risque de vous surprendre, car j’enquête sur la disparition d’une jeune personne, madame Chandom. J’ai ouï dire que l’inspecteur Belin était chargé de l’affaire. Hélas, je crains qu’il ne soit jamais en mesure d’arrêter le responsable. Il me serait hasardeux de vous expliquer les raisons qui m’incitent à avoir de semblables réflexions. Je ne peux moi-même procéder à son arrestation. En revanche, je désire apporter mon concours à l’inspecteur Belin, d’autant plus que je crains que nous n’ayons guère plus que quelques jours.
– Pourquoi pensez-vous qu’il vous reste aussi peu de temps, monsieur Estrango ? m’interrompt-elle soudain.
– Une lettre reçue ce jour même par sa concierge. Il y est fait mention de la date du 31 juillet, jour de l’éclipse totale. De plus, je ne saurai vous l’expliquer, mais son contenu était pour le moins… lugubre et vous n’ignorez pas combien de personnes, au quai des Orfèvres, rêveraient de m’offrir une paire de bracelets chromés.
Elle ne peut retenir un sourire, non plus que Loki qui manque d’éclater de rire.
– Fort bien, monsieur Estrango. Il n’y a rien que je puisse faire pour ne pas vous rendre ce menu service. J’ai déjà rencontré par le passé l’inspecteur Belin. C’est quelqu’un d’assez solitaire, néanmoins il ne rechignera pas à vous recevoir. J’ignore en revanche s’il sera capable d’entendre vos théories. Sachez seulement qu’il est pragmatique et très ordonné.
– Merci, madame Bourgueuil !
– Mais je vous en prie ! Allons dans mon bureau. Nous l’appellerons ensemble.
Nous quittons alors le couvert végétal et nous enfonçons à la place dans un dédale minéral, hantées par de sublimes créatures de marbre blanc. Hélas, le temps n’est ni à la contemplation ni à la satisfaction et c’est d’un pas, aussi ferme que décidé, que nous plongeons dans les sous-sols du palais du Louvre. Passé les immenses fortifications, nous arrivons enfin dans son bureau. Rien n’a changé, tout y est mal ordonné : des piles de livres en équilibre métastable défient les lois les plus élémentaires de la gravité, des miniatures se jouent de nous en projetant des ombres inquiétantes sur les murs et des tableaux aux allures de cauchemars nous couvent du regard. Perdu au milieu de cette immensité, l’infortuné téléphone fait bien pâle figure.
– Prenez donc un peu de thé. L’eau est sûrement encore chaude, m’invite-t-elle en pointant un index sur un objet ventru, habillé d’une couverture écarlate, le combiné à la main.
Heureuse est cette femme dont le bureau comporte cette minuscule dépendance, car je n’ose imaginer un poêle au milieu de ce bric-à-brac. Pendant ce temps, Loki en profite encore pour se sauver et assouvir sa curiosité. Le temps de me servir et de me retourner que je la découvre tout sourire.
– L’inspecteur Belin vous attend au café des Maîtres Verriers, quai des Orfèvres !
– Ai-je le temps d’achever ma tasse ?
– Bien sûr ! s’exclame-t-elle. Finissez votre infusion, je vous raccompagnerai jusqu’à la station du métropolitain.
Soudain, ce n’est plus la conservatrice qui se trouve face à moi, mais une femme au regard noir et inflexible. Sur le mur, il me semble apercevoir l’ombre d’un homme porteur de la kunée.
– Monsieur Estrango ?
La voix de la dame me tire de la transe dans laquelle j’ai plongé un court instant.
– Pardon ?
– Pourquoi avez-vous dit que l’homme, que vous soupçonnez responsable de l’enlèvement de madame Chandom, était insaisissable ? Que nous cachez-vous, monsieur Estrango ?
De nouveau revient cette impression d’oppression, pareille à une main qui m’enserrerait le cœur. Puis, elle disparaît.
– Un fait singulier. Toutes les personnes qui ont croisé son chemin ne possèdent plus que des souvenirs ténus de cet individu, comme si ces derniers avaient été aspirés. Pour vous donner une image, il serait semblable à un vide, ou plutôt un trou, dans la trame de la réalité.
– Cela signifie-t-il qu’il se déplacerait sur un autre plan ?
– Son enveloppe charnelle, non ! Mais son âme… qui peut savoir ?
Un frisson me parcourt l’échine, car je ne devine que trop où elle évolue.
– Je souhaite que vous ayez raison, monsieur Estrango.
Tandis qu’elle prononce ses paroles, je surprends ses mains qui se tordent douloureusement. Quel secret peut-elle bien me dissimuler ? Est-ce que cela avoir avec la présence de ce réacteur éthérique, l’année passée ? Je me garde de l’interroger à ce sujet, car qui sait où je serai précipité.
– Je le pense. Un trou n’est que le reflet d’un plein, c’est ainsi que je le découvrirai sur ce plan que l’on appelle imaginaire.
Cependant, un pli soucieux barre brusquement le front de mon interlocutrice.
– Si je saisis bien votre explication, je crains alors de ne devoir doucher votre enthousiasme.
– Mais… pourquoi ? balbutié-je, inquiet.
– Les morts, monsieur Estrango. Ils n’ont plus d’existence matérielle, mais spirituelle. Comment le distinguerez-vous de toute cette foule ?
– Grâce à leur décalage vers le rouge.
– Je vous demande pardon, me demande-t-elle, interloquée.
Les yeux grands ouverts, je la dévisage sans comprendre :
– Ai-je glissé une allusion mal placée ?
Perdue, elle bafouille :
– Oh… euh. J’ai cru que… oh, oubliez ! Ce n’est pas grave. Belin sera heureux de l’aide que vous pourrez lui apporter. D’après ce que j’ai compris, cela fait plusieurs années qu’il enquête sur des disparitions de femmes qui auraient en commun un certain « fiancé ». Cependant, il sera bien plus à même de vous en donner tous les tenants et les aboutissants.
Je la remercie encore une fois avec chaleur, puis je m’engouffre avec anxiété dans les méandres souterrains de la capitale ; direction l’Île de la Cité. Dans la rame, je profite de l’absence de voyageurs inopportuns pour glisser quelques mots à Loki.
– Toi qui es toujours attentif au moindre de mes dires. Qu’ai-je répondu à madame Bourgueuil qui l’aura à ce point déstabiliser ?
Théâtral, il gonfle son poitrail et prend un ton professoral :
– Mon cher Alvaro, vous lui avez parlé de décalage vers le rouge et la pauvrette s’est mise à chavirer.
La bouche en fondement de poule, je le contemple l’air ahuri.
– Ah… j’ai dit cela… Bien…
– Tu es incroyable, Alvaro. Tu oublies ce que tu dis, tu ignores en quelle manière et tu aideras cet inspecteur Belin et tu demeures imperturbable.
Pour toute réponse, je hausse les épaules et sors de la rame.
– À quoi bon se tourmenter, Loki ? J’ai confiance en Augustin, si tant est que cela soit son nom, et son invention.
– Quand bien même, ronchonne-t-il. Cela ne m’explique pas cette histoire à dormir debout de rouge décalé.
– Nous aviserons plus en temps et en heure. N’avons-nous point rendez-vous avec le gardien des enfers ?
– Ferais-tu allusion à l’inspecteur Belin, par hasard ? s’esclaffe-t-il, tandis que nous remontons à la surface.
À hauteur du pont Saint-Michel, flânent de nombreux passants ; quelques-uns jettent des pièces dans la Seine, quand d’autres pointent du doigt les péniches qui paressent. Un peu perdu, je balaye du regard les lieux à la recherche d’une plaque ; celle du trop fameux quai des Orfèvres.
Cependant, à mesure que grandit la silhouette menaçante du numéro 36, j’imagine le tigre, fulminant derrière son bureau, car il demeure dans l’impossibilité de m’inculper et de m'enfiler ses si élégants bracelets d’argent. Je suis absorbé que je passe, sans le voir, devant la terrasse de la brasserie où m’attend l’inspecteur Belin.
– Pardon d’interrompre ta course folle vers l’infini et au-delà, Alvaro. Cependant, je crains que tu n’aies, dans ta précipitation, dépassé la terrasse des Maîtres Verriers, m’interpelle soudain Loki.
Coupé net dans mon élan, j’aperçois l’enseigne. Assis, un journal entre les mains, un homme d’assez haute stature, à la moustache impeccablement taillée, que je suppute être l’agent Belin.
– Inspecteur Belin, je présume, je m’enquiers auprès de lui, comme je m’approche de sa personne.
– En effet, me confirme-t-il d’une voix rauque. Monsieur Estrango, n’est-ce pas ?
– Tout à fait et encore toutes mes excuses pour mon attitude cavalière. Je ne connais que trop les envies de certaines personnes de votre maison pour oser m’y aventurer et mander à m’entretenir avec vous.
À ces mots, mon interlocuteur éclate d’un rire tonitruant.
– Si je vous narrai par quel chemin détourné j’ai obtenu mon grade d’inspecteur, vous ne qualifieriez pas ainsi vos manières, monsieur Estrango. Mais si vous le voulez bien, entrons ! Nous y serons plus à l’aise pour discuter.
Comme je repère une fenêtre grande, je glisse quelques mots discrets à Loki qui prend son envol, ravi de se dégourdir enfin les ailes, sous l’œil surpris de l’inspecteur.
– Vous avez apprivoisé une corneille ! Quelle patience et quel oiseau superbe ! s’exclame-t-il.
– Merci, inspecteur.
– Surtout, ne lui dites pas, il attraperait le complexe du melon, ajouté-je, malicieux.
Quelques minutes plus tard, alors que nous prenons place sur deux tabourets au comptoir, je réalise que je n’ai pas déjeuné, pour autant nulle faim ne semble se manifester.
– Inspecteur, madame Bourgueuil m’a laissé entendre que vous étiez sur les traces de plusieurs « fiancées » disparues. Que voulez-vous dire par « fiancées » ?
– Permettez que je nous commande un café et je vous expose la chose.
Surpris, je n’en acquiesce pas moins. Je n’ignore pas que les gens de ma profession sont souvent en délicatesse avec les forces de police impériale. Pourtant, cette alliance peu naturelle ne semble pas le troubler outre mesure. Sans doute, est-ce là la présence d’un esprit ouvert et pragmatique. Cependant, comme s’il devinait l'agitation qui m'habite, il ajoute dans un sourire :
– Cela fait maintenant plusieurs années que cette enquête piétine et je ne suis pas homme à refuser une aide, même de la part d’une personne que l’on a accusée puis relâchée ; détective de surcroît. J’ai lu les rapports de mes supérieurs à votre sujet. Si, ainsi que vous le prétendez, vous êtes capable de retrouver la trace de cet individu, alors vous avez toute ma confiance. Voici une lettre que m’a transmis le maire de Gambais au sujet de la disparition de deux personnes : la première est madame Anne Colomb et la seconde Célestine Buisson. En effet, il reçoit vers la fin de l’année 1923, un courrier de la part de madame Pellat, cousine de madame Colomb, puis quelques mois plus tard de la part de mademoiselle Lacoste, la sœur de madame Buisson. Comme la similitude entre les récits le frappe, il entre en contact avec ces personnes et prévient le commissaire Dautel. Hélas, il ne retrouve aucune trace de l’auteur de ses courriers. Dépassé, il s’adresse à moi et j'en arrive aux mêmes conclusions…
Je ne le laisse pas achever sa phrase et la complète à sa place :
– Aucune des lettres n’est signée et vous avez pourtant la certitude que ces dames ont rencontré le même homme, de même que les membres de leur famille.
En face de moi, Belin lisse avec anxiété sa moustache.
– Il n’y a pas que cela, monsieur Estrango… ces dames sont sûres qu’il leur a été présenté, bien qu’elle ne conserve aucun souvenir de leur entrevue avec lui.
Je hoche la tête en signe d’acquiescement.
– Je me suis rendu à l’observatoire de Meudon, vous en aurez fait tout autant. Au cours de mes discussions, toutes les personnes, avec qui j’ai échangé, m’ont donné l’impression d’un manque.
J’aperçois dans le regard de l’inspecteur une lueur d’intérêt qui m’encourage à poursuivre mon récit.
– Par la suite, je me suis rendu au domicile de madame Chandon, où j’ai eu un échange fructueux avec sa concierge. Elle m’a montré une lettre, soi-disant de sa main. Elle aussi est persuadée d’avoir rencontré le mystérieux fiancé et elle est demeurée incapable de me le décrire ni même de le nommer. Mais là n’est pas le point le plus saillant. En effet dans ce courrier, il est fait mention de la date du 31 juillet ; jour de la prochaine éclipse totale de Soleil. J’ignore si je m’avance ou non en l’affirmant, mais je suis persuadé que cette date est un lapsus.
– Certes, monsieur Alvaro. Cependant, cela sera sans conséquence si, comme vous me l’expliquez, cet homme disparait de la mémoire de ses interlocuteurs. Il n’a nul besoin de se dissimuler, sa nature même le lui permet, me rétorque l’inspecteur.
Je profite de ce répit pour déguster quelques gorgées de ce café corsé qui vient de nous être servi, puis poursuis tout en sourire.
– Bien sûr. Mais aussi invisible soit-il, il n’en dépose pas moins son courrier au bureau des postes, au 33 avenue Jean Jaurès dans le 19e arrondissement. Il habite très certainement le quartier. D’autant que me revient en mémoire un incident curieux survenu ce matin, dans la rue Paradis.
En quelques mots alors et par le menu, je lui narre mon accident. J’omets avec soin le trou dans le temps dans lequel je suis tombé, mais non la chute et l’incapacité des personnes à se souvenir de ce qui s’est produit.
– Au vu de votre récit, nul doute que vous avez croisé son chemin. Cependant, comment comptez-vous procéder, monsieur Estrango ?
Sourire en coin, je fixe l’inspecteur Belin du coin de l’œil.
– Accepteriez-vous d’être mon guide, dès lors que j’aurai perdu la vue ? gloussé-je, une étrange paire de lunettes entre les mains.
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