– Réjouissez-vous, ma chère. Ensemble, nous allons accomplir de grandes choses, ricane une silhouette plongée dans l’obscurité.
– Pardon, je me corrige. Je vais accomplir de grandes choses et ce sera avec votre concours, que vous le souhaitiez ou non. Ah ! Sur ce point, vous me direz, je ne peux vous donner tort. Ce n’est pas avec vous, grands dieux, que j’ai marchandé. En effet ! Mais que voulez-vous, il avait une vieille dette, que j’avais oubliée. Quel sot, suis-je ! Enfin, comme il n’est pas…
L’homme suspend son propos.
– Ah ! Je ne trouve pas le mot adéquat. Même l’emploi du terme “humain” serait lui faire insulte. Tombé si bas, je serai la risée des enfers. Allons ! Un peu de bonne volonté, que moi ! C’est vous l’écrivaine. C’est vous qui avez signé et sombré dans les bras dionysiaques de la plume écarlate.
Le silence s’installe, lourd. Ourlés, ses yeux s’éclairent d’une lueur mauvaise.
– Ah ! Tout cela ne nous mènera nulle part et, pour vous dire les choses avec le plus de circonspection, il me rend service en vous mettant au mien. Simple formalité ! Un contrat, en trois exemplaires, signé et daté, et devant être remis aux partis. Le dernier ? Le dernier était destiné au bureau des âmes damnées, où il sera égaré. Pourquoi croyez-vous que les administrations sont aussi brouillonnes ? Une bien belle invention, ma foi, si facile à pervertir. Ah ! Pardon ! Voici que je digresse encore et que je m’éloigne des raisons qui m’amènent à vous.
–…
– Hum… Je remarque que vous n’êtes guère bavarde, très chère. Vous intimiderai-je à ce point ? Il m’avait tant vanté votre logorrhée. Non ? Qu’à cela ne tienne ! J’ai besoin de votre visage, non de votre âme.
–…
Voyons ! Je ne mange pas de ce pain-là. Je vous l’ai déjà expliqué, il me l’a seulement prêté, pas vendu ! Je n’ai besoin que de vos souvenirs, rien de plus.
–…
– Quoi ! Vous vous imaginiez que j’allais vous ressusciter, façon Jéhovah. Ah, ah, ah ! Mais, c’est complètement démodé. Lève-toi et marche ! Ah, ah, ah ! Si vous aviez contemplé leur visage extatique. À mourir de rire.
–…
– Il a eu de la chance avec ce pauvre bougre de Lazare. Rendez-vous compte, il était tombé sur le seul bonhomme qui avait été enseveli, alors qu’il avait juste le sommeil un peu lourd.
–…
– Cependant, vous avez raison. Je vais vous expliquer pourquoi j’ai besoin de vous. C’est fort simple.
–…
– Ah ! Pourquoi vous offusquez ainsi ? Ce n’est même pas douloureux. Que risquez, de plus ? Vous êtes déjà morte ! En toute sincérité, vos propos sont fort malvenus et impolis. S’il vous plaît, je détesterai torturer votre âme, ou la mutiler. Ne l’est-elle pas déjà assez ?
–…
– Vous jouez sur les mots, ma chère. Hélas, que pourriez-vous m’offrir de plus ? Cependant…
–…
– Pensiez-vous que je vous octroierai ce répit ? Je ne suis pas tout à fait comme lui. En effet, je suis au regret de vous décevoir. Nous ne nous délectons pas des mêmes mets. Et maintenant… Venez !
– Oh là ! Que faites-vous donc ici à une heure pareille ? Je m’en vais appeler la force impériale, si vous ne déguerpissez pas.
– Ah ! Veuillez m’excuser, très chère amie. Je suis à vous tout de suite. Ne bougez pas…
Ce matin, quelques pleureuses, venues se recueillirent sur la sépulture du moine Nicéphore, ont découvert la tombe profanée d’une certaine dame N. À la place, au fond du trou, a été retrouvé le cadavre exsangue du fossoyeur.
Extrait du Petit Sceaux
LeConteur.fr | Qui sommes-nous ? | Nous contacter | Statistiques |
Découvrir Romans & nouvelles Fanfictions & oneshot Poèmes |
Foire aux questions Présentation & Mentions légales Conditions Générales d'Utilisation Partenaires |
Nous contacter Espace professionnels Un bug à signaler ? |
2835 histoires publiées 1284 membres inscrits Notre membre le plus récent est Les Petits Contes |