Tout excité, je descendis à toute vitesse rejoindre mes parents qui regardaient la télé dans le salon.
- Papa, Maman, regardez, j’ai reçu un message d’Algénor. Il nous invite à une cérémonie le
1er avril !
- Sacré poisson d’avril, dit Papa.
- Il faut répondre en mettant une pomme de pin sur le rebord de la fenêtre, précisai-je.
- Ça ne va pas être évident de trouver une pomme de pin ici, dit Maman.
- Ah bon ? Mais comment on va faire Maman ? Il faut absolument en trouver une.
- Laisse-moi réfléchir, dit Maman. Je crois qu’il y en a dans les décos de Noël. Viens avec moi au grenier on va regarder.
C’est fou le nombre de choses que les adultes arrivent à entasser dans un grenier ! On pouvait à peine se déplacer.
- Je crois que les décos de Noël sont tout là-haut, dit Maman en me montrant un carton inaccessible. Je vais chercher ton père pour qu’il nous aide.
- Pas besoin, lui répondis-je, je m’en occupe.
Je me concentrai sur le carton qui se déplaça en douceur jusqu’à nos pieds.
- C’est quand même bien pratique ton pouvoir, dit Maman en souriant.
Elle farfouilla dans le carton quelques secondes.
- Ah tiens, voilà une belle pomme de pin argentée. Va la déposer sur le rebord de la fenêtre et, s’il te plait, remet le carton où il était.
J’ai cru que ce vendredi 1er avril n’arriverait jamais ! J’avais beau essayer de vivre comme d’habitude, de travailler à l’école, de jouer avec mes copains, je me rendais bien compte que rien ne serait plus comme avant.
Ce n’était pas évident non plus pour mes parents qui, comme moi, se posaient mille questions mais qui ne pouvaient en parler à personne.
- Je me demande bien comment il faut s’habiller pour cette cérémonie, dit Maman.
- Tu as peut-être le temps de te faire une robe en feuilles, plaisanta Papa.
- Très drôle… sérieusement, je ne veux pas faire d’impair, répondit Maman. Trop habillés ils nous trouveront peut-être prétentieux, et pas assez, ils penseront peut-être qu’on leur manque de respect.
- A mon avis répondis-je, il faut juste être naturel et s’habiller comme on veut. Est-ce que tu t’es posé la question quand tu as vu Algénor pour la première fois ?
- Tu as raison mon fils. Je reste en jean. Pensez à prendre une polaire, les nuits sont fraîches en cette saison. Allons-y, il est temps de partir si nous voulons être à l’heure.
- Et prenez une lampe chacun, dit Papa, je n’ai pas envie d’aller vous repêcher en pleine nuit dans la rivière.
A cette heure tardive, il n’y avait personne sur la route et nous arrivâmes rapidement. Deux autres voitures étaient déjà garées. Un autre véhicule arriva et se rangea près de nous,
Un couple en descendit, accompagné d’une petite fille. Ils nous sourirent et nous saluèrent.
- Bonsoir, je suppose que vous allez à la cérémonie ? demanda le Monsieur. Je m’appelle Erwan, voici ma femme Maewen et notre fille Soline.
Mon père fit les présentations et nous prîmes ensemble le chemin qui menait à la grotte. Soline et moi fermions la marche.
- Je suis contente de rencontrer enfin des enfants qui ont vécu la même chose que moi, me dit Soline. C’est dur de ne pouvoir en parler à personne, tu ne trouves pas ?
- Si, lui répondis-je. Je sais qu’il ne faut pas pour protéger les korrigans mais c’est quand même frustrant de ne pas pouvoir se la péter avec nos pouvoirs !
- Tu as choisi quoi, toi, comme pouvoir, me demanda Soline ?
- Celui de la télékinésie, répondis-je, en fait c’est…
- Je sais ce qu’est la télékinésie, merci, me coupa-t-elle sèchement.
- Et toi ? lui demandais-je un peu vexé.
- Moi, j’adore les animaux, alors pouvoir communiquer avec eux, c’est un vrai rêve. Je refais le monde le soir avec mon chat et mon hamster…. C’est juste gé…
Oh ! regarde Gweltaz, c’est juste magnifique !
Comment décrire ce qui s’offrait à nos yeux ? Féérique, oui, c’est le mot, féérique.
Des millions de lucioles constellaient de lumière les arbres et les roches, formant comme un ciel étoilé à l’envers.
Des myriades de toiles d’araignées, tendues à la cime des arbres de chaque côté de la rivière, dessinaient une voûte de dentelle qui empêchait la rosée de tomber, nous protégeant aussi de la fraîcheur de la nuit.
Algénor vint à notre rencontre :
"Bonsoir et bienvenue, dit-il. Avant de commencer les festivités, je propose que nous fassions les présentations. Je vais commencer, si vous le voulez bien, par présenter les quatre Maîtres Korrigans qui sont encore là aujourd’hui grâce à vous.
Honneur aux deux dames car, certains ne le savent pas encore, mais le peuple korrigan a toujours respecté la parité et l’égalité des sexes. Je vous présente nos deux Maîtresses Korriganes Arsinoé et Adénora."
Arsinoé avait de longs cheveux bruns et de grands yeux dorés, assortis à sa robe couleur feuille d’automne. Elle expliqua d’une voix douce que c’était Corentin qui avait abrité ses pouvoirs et qu’il avait choisi le don d’invisibilité.
Corentin avait l’air vraiment sympa avec ses bouclettes rousses et ses taches de rousseur.
Ce fut ensuite au tour d’Adénora de se présenter. Elle était, elle aussi, très jolie avec ses grands yeux gris et ses cheveux blonds au carré d’où dépassaient deux petites oreilles pointues. Elle portait une jupe et une veste d’un vert forêt profond. Elle précisa que c’était grâce Soline qu’elle était encore là ce soir et elle se réjouissait que Soline ait choisi le don de parler aux animaux.
- Mais je laisse la parole au Maître Korrigan Arzawel, dit Adénora.
- Merci Adénora. Je m’appelle donc Arzawel et j’ai été sauvé grâce à Louane qui a choisi le don de lire dans les pensées.
Louane était toute fluette, avec des cheveux châtains coupés courts. Elle se tortillait sur place en regardant ses pieds.
- Et moi, je lis dans les siennes que la timide Louane voudrait que j’arrête de parler d’elle, taquina Arzawel.
Il semblait le plus fantasque des quatre. Il portait un costume rouge coquelicot et un chapeau haut de forme noir. Son large sourire et ses yeux bleus et rieurs le rendaient particulièrement sympathique.
- Mais si nous sommes tous réunis ce soir, reprit Arzawel, c’est grâce à Algénor. C’est lui qui a trouvé dans les grimoires le remède de la régénération pour nous sauver, c’est lui qui nous a persuadés de faire confiance aux humains, c’est lui qui a sélectionné les quatre enfants et leurs parents présents ici ce soir. Une fois les quatre Maîtres Korrigans rétablis, tout le peuple a pu être soigné et le bonheur est revenu. Pour tout cela, je vous demande de lui faire une ovation !
De tous côtés, on entendit des applaudissements, des vivats, des bravos. Des dizaines de korriganes et korrigans laissaient éclater leur joie. On apercevait furtivement çà et là les petites fées des bois qui voulaient, elles aussi, par leur présence, témoigner leur gratitude à Algénor.
- Assez, assez, grommela Algénor un peu gêné, vous allez me faire rougir. Pensons plutôt à remercier aussi ceux grâce à qui nous sommes tous là aujourd’hui, dont Gweltaz, à qui j’ai confié le don de télékinésie.
- Télé quoi ? demanda Corentin.
Soline et moi échangeâmes un sourire complice.
Algénor prit ensuite le soin de présenter tout le monde, y compris les écureuils et les chevreuils et ce fut très… très long. Mais cela nous laissa le temps de faire mieux connaissance Soline, Louane, Corentin et moi.
Nos parents, de leur côté, semblaient ravis d’être ensemble et de pouvoir partager leurs aventures et ressentis réciproques.
Un grand buffet était dressé sur les deux plus grosses roches de la rivière.
- Ça vous dit de boire et manger quelque chose demanda Corentin J’ai beau avoir dîné avant de venir, je mangerai bien un morceau de gâteau s’il y en a.
- Tu ne serais pas un peu gourmand ? lui demanda Soline.
- Oh si, très ! lui répondit Corentin.
Nous nous approchâmes tous les quatre du buffet. Un subtil mélange de parfums de fleurs et d’arômes de fruits nous enchanta les narines.
De grands plats en bois regorgeaient de crèmes, mousses et gâteaux. Devant chacun d’entre eux était disposée une large feuille de platane sur laquelle on pouvait lire, en lettres d’or ou d’argent, le détail de ce que nous allions déguster.
- J’hésite, dit Corentin, entre le gâteau à la noisette, les beignets de roses, les cookies à la fraise et au myosotis, les crêpes à la pomme verte et au lilas ou la mousse de jonquille à la coriandre. Je crois que je vais tout goûter… pour faire honneur aux cuisiniers, bien sûr, ajouta-t-il malicieusement.
Il y avait aussi le choix côté boissons et j’optai pour un verre de rosée du matin au nectar de fraise. C’était divin.
Plus le temps passait et plus nous nous sentions proches avec mes trois nouveaux amis. Même la timide Louane commençait à se dérider en nous racontant des blagues nulles.
- Quelle est la fée que les enfants détestent le plus ? nous demanda-t-elle.
- La fée « C » ? proposa Corentin.
- Non, répliqua Louane, la fée « Tes devoirs » !
- Ah oui, pour être nulle elle est nulle ta blague, lui rétorquai-je en riant
- Dis Louane, dit Soline plus sérieusement, tu peux vraiment lire dans les pensées ? Tiens, je te propose un test. Je pense à un nombre compliqué et tu dois le deviner, d’accord ?
- OK, répondit Louane, vas-y.
Soline ferma les yeux et se concentra. Louane fit de même.
- 47 618, dit Louane après quelques secondes.
- Super ! s’exclama Soline, c’est bien ça. A toi Corentin, explique-nous comment tu deviens invisible. Tu es obligé de te mettre tout nu ou pas ? le taquina Soline
- Ben non, répondit Corentin qui était devenu tout rouge, je deviens invisible et les habits que je porte le deviennent aussi. Je n’ai pas besoin de me déshabiller.
- Mais comment tu fais pour disparaître ? lui demandais-je. Tu dois dire quelque chose, te concentrer ?
- Non, expliqua Corentin, quand je veux disparaître, il faut juste que je cligne des yeux trois fois et pareil pour réapparaître. Je vous montre.
Corentin cligna trois fois des yeux et disparut comme par magie.
- Non Corentin, dit soudain Louane, je lis dans tes pensées que tu veux me chatouiller. Choisis une autre victime.
Corentin réapparut l’air goguenard.
- Zut, j’avais oublié ton pouvoir. C’est super gênant que tu puisses tout savoir de nos pensées. Par exemple si j’ai envie d’aller aux toilettes et que j’y pense, tu vas le savoir.
- Mais tu es un vrai poète, Corentin ! plaisanta Louane. Je propose plutôt que Soline et Gweltaz nous montrent à leur tour de quoi ils sont capables. Honneur aux filles, à toi Soline.
- Est-ce que tu peux par exemple demander à un écureuil de nous apporter une part de gâteau à la noisette ? demanda Corentin.
- Tu ne penses donc qu’à manger ! s’exclama Soline, mais d’accord, chiche, je le fais.
Elle s’approcha d’un arbre et commença à émettre d’étranges sifflements et couinements. Quelques secondes après, un magnifique écureuil roux s’approcha d’elle et lui tendit une petite part de gâteau.
- Super ! reconnut Corentin mais j’aurais dû choisir un éléphant car la part est toute petite.
- Tu as fini par me donner faim à te voir manger tout le temps, dit Louane. Dis, Gweltaz, tu peux te concentrer sur la mousse de jonquille à la coriandre et la faire voler jusqu’ici, s’il te plait.
Je m’exécutai et la coupe de mousse s’envola de la table du buffet pour atterrir délicatement dans les mains de Louane.
- Merci Gweltaz mais sans te commander, dit-elle en me souriant, je n’ai pas de cuillère…
Algénor proposa alors à l’assemblée de se réunir sur le petit pont en face du moulin pour une surprise.
- Ah zut, dit le Maître Korrigan, la nuit est trop lumineuse à cause du clair de lune pour ma surprise. Je vous demande quelques minutes, je vais y remédier.
Il leva les bras et les fit tournoyer au-dessus de sa tête. De gros nuages vinrent se placer devant la lune, obscurcissant ainsi la nuit.
- Et maintenant, dit Algénor, place à la danse des esprits de la forêt.
Soudain, le ciel s’illumina et fut recouvert de draperies luminescentes, dignes des plus belles aurores boréales. Elles formaient des arcs de lumière verts, bleus, rouges et violets qui ondulaient de seconde en seconde en changeant de forme. C’était magique.
Le petit matin est arrivé. La fête était finie. Il était temps de partir.
Tout comme nous, nos parents semblaient proches, eux aussi, et n’avaient pas envie de se quitter.
- Donnons-nous rendez-vous le week-end prochain pour un pique-nique aux Chaos, proposa l’un d’entre eux.
En quelques secondes, le projet de pique-nique fut adopté. Nous allions nous retrouver samedi avec Corentin, Soline et Louane. Quel bonheur !
- Je suis heureux que vous soyez tous si proches maintenant, dit Algénor, mais nous devons, de notre côté, rester cachés la journée pour notre sécurité. Nous vous rejoindrons une fois la nuit tombée.
Après avoir chaleureusement remercié les korrigans pour cette magnifique soirée, chacun repartit, heureux à l’idée de se retrouver tous ensemble très bientôt.
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