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tome 1, Chapitre 25 « Par monts et par vide » tome 1, Chapitre 25

Atarillë

Pour cette première mission, il nous fallait quitter le palais confortable des enfers, pour retourner sur Terre. Aussi étonnant que cela y paraissait, le miroir sacré était logé dans le Naiku, un temple shinto démonté et remonté tous les vingt ans. Le seul bémol était que pour l’approcher, il fallait faire partie de la famille impériale. Cependant, il était tout aussi important d’informer Amaterasu O mi Kami de notre mission et obtenir son aval pour emprunter son précieux miroir.

Il était, de ce fait, crucial d’avoir Kyoko avec nous. Arthur dut retourner au Palais, surtout depuis qu’il avait appris que de nouvelles attaques faisaient rage dans notre pays. J’étais morte d’inquiétude et j’espérais sincèrement que nous trouverions au plus vite tous les éléments nécessaires pour le rituel.

Je me sentais enfin à ma place, depuis le retour de mes souvenirs. Progressivement, certaines bribes de mémoires apparaissaient, me refaisant vivre des moments tantôt agréables, tantôt difficiles. Je me souviens de ma fuite précipitée, du combat m’opposant à la reine des Cauchemars, mais je me souviens aussi des moments tendres avec ma famille, des soirées à rire et à chanter avec Kyoko, où mes longues promenades dans des mondes fantasmagoriques avec Aloysius.

J’avais enlacé un bon moment mon époux, l’embrassant avant de le laisser retourner chez nous. Il prit une dizaine de minutes à me cajoler et me rassurer, ce qui m’apaisa quelque peu.

— Je ferais de mon mieux pour gérer ces problèmes au plus vite, je vous accompagnerais pour la mission du Seuil.

Je frémis en repensant à cet horrible endroit. Secouant la tête, j’en chassais les souvenirs pour me concentrer sur Arthur. Une lueur d’inquiétude voila son regard et il glissa sa main sur ma joue avec douceur.

— Tu es entre de bonnes mains, et Kyoko sera avec vous.

Je hochais la tête, venant cueillir un baiser sur ses lèvres rosées. Il me serra contre lui, intensifiant notre échange.

Aloysius se gratta la gorge, attirant notre attention.

Nous étions dans la salle du portail. Une vaste pièce ovale aux murs en voûtes d’une blancheur éclatante. Un grand portail sous forme d’arche se présentait derrière nous, rempli de champs magiques multicolores. À nos côtés se trouvaient Aphrodite, Belladona et Aloysius. Tempête semblait s’impatienter.

— Excusez-moi de vous importuner, mais...

— Oui, je sais Aloysius, soupira Arthur.

Il vint m’embrasser une dernière fois avant de s’écarter de mon étreinte, à contrecœur.

— Tenez-moi au courant de l’avancée de la mission, je ferais mon possible pour vous aider en cas de problèmes

— Il n’y aura pas de problème, ne t’en fais pas, répondit Aphrodite.

Il soupira et se rapprocha du portail.

— À bientôt, prenez soin de la reine.

Il incanta une phrase et il fut aspiré dans le flux d’énergie magique. Mon cœur se serra, je venais de le retrouvait pleinement et il devait partir si vite, mais la situation l’exigeait. J’avais toujours détesté les départs, mais ce n’était que partie remise.

Au bout d’une demi-heure, le portail s’activa à nouveau. Kyoko apparut alors, auréolée de reste de poussière astrale qu’elle épousseta de son kimono aux motifs floraux d’un geste de la main. Elle posa ses yeux verts sur moi, entrouvrant ses lèvres.

— Atarillë, c’est donc vrai, tu es bien de retour?

Arthur avait veillait à l’informer, selon ses dires, il ne voulait pas à nouveau risquer de perdre ses yeux. Il était vrai que ma meilleure amie avait toujours été caractérielle. Je souriais, hochant la tête. Elle fonça sur moi et me serra dans ses bras.

— C’est si bon de te retrouver pleinement! Tu nous as fait une frayeur, plus jamais je ne te laisserais fuir hors de ce royaume!

— Il va falloir retourner sur Terre pourtant...

Kyoko poussa un long soupir, hochant mollement la tête. J’esquissais un faible sourire.

— Mais avant tout, il nous faut rendre visite au monde des Kamis.

— Je vais vous y rendre, suivez-moi.

Kyoko se plaça devant le portail. Elle murmura en japonais, ses mains traçant des kanjis dans l’air. Parfois, je m’amusais à l’observer ritualiser de la sorte. La magie japonaise avait quelque chose de fascinant, codé, hiérarchisé, dans un ordre sublime et religieux.

Le portail prit une couleur crème, laissant apparaître un jardin de pierres blanches, au pied d’une montagne verdoyante. Elle me prit la main, m’offrant un sourire radieux. Nous nous engouffrâmes dans le paysage. Cette sensation était toujours grisante. Voir les flux magiques danser autour de moi demeurait toujours un instant de bonheur. Toute cette énergie vint me revigorer, déterrant des souvenirs de ma mémoire défaillante.

Nous arrivâmes dans ce décor serein et paisible. Devant nous, la montagne impérieuse nous faisait face. Le clapotement de l’eau caressait mes oreilles et me ramenait encore des sensations lointaines. Kyoko prit la parole.

— Nous sommes au pied de Takama-ga-hara.

Kyoko sourit, désignant un sentier de pierre blanche serpentant jusqu’au sommet. Un petit être vert, un kappa, selon mes souvenirs, apparut devant nous. Il portait un kimono gris, décoré de clochettes dorées et vint s’incliner bien bas devant mon amie.

— Ryuko-Hime, soyez la bienvenue à Takama-ga-hara, vous, ainsi que vos nobles amis.

Elle sourit et inclina la tête légèrement.

— Merci, j’aurais à parler à Amaterasu O mi kami, pour une affaire de la plus haute importance.

Le kappa ouvrit grand sa bouche de batracien. Il allait répondre, mais un parfum putride se glissa dans l’air. Je retroussais le nez. Une odeur de poisson faisandé mêlé au soufre et à la pestilence des abysses. Je reconnaîtrais, entre mille, cette trace olfactive...

Tournant la tête, je vis sa tête déformée, et ses yeux lumineux qui me dévoraient l’esprit.

Kyoko s’élança devant moi, sortant les dents. Elle fit apparaître son katana et le dégaina d’un geste vif et acéré.

— N’approche pas!

La créature avait une forme humanoïde. Ses longs bras décharnés se levèrent dans notre direction. Sa peau grise, presque transparente, tombait en lambeaux. Ce qui me marquait le plus, c’était ses grands yeux, billes opalescentes, dont j’essayais d’éviter l’éclat.

Le kappa se mit à fuir, criant aux renforts. Aphrodite, Aloysius et Belladonna se mirent en position de combat. Quant à moi, j’essayais de faire apparaître mon épée. Mais elle refusa de se matérialiser.

— Je t’en prie... J’ai besoin de toi!

À la place d’Assassine, longue lame d’argent, je n’eus que quelques étincelles entre les doigts. Je criais de rage, balançant un éclair en direction du monstre qui s’empala sans vergogne sur le katana de Kyoko. Elle ne parut pas gênée de voir sa chair ainsi déchirée et tendit ses mains griffues vers sa tête.

— Non!

Il ne fallait pas qu’elle la touche. Je le sentais au fond de moi, elle serait perdue sinon. Je m’élançais sans réfléchir, m’interposant entre elles. Je sentis un contact visqueux sur ma peau froide. Puis vint le vide. Le noir absolu, cette horrible sensation qui me dévorait l’âme depuis le début de l’enfer.


Texte publié par PersephonaEdelia, 17 novembre 2023 à 20h22
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