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« Chère Atarillë,

Cette lettre, c’est toi qui l’as écrite. Avant de partir, j’ai eu le temps de la glisser dans cet ouvrage. Il fallait absolument que tu mettes la main dessus. Je comprends que tu dois être désorientée et je m’excuse de t’avoir fait subir ça.

Tu as fui, car tu voulais protéger ton royaume. C’était la seule solution, même si provisoire, pour épargner tout Eleysia de sa destruction. C’est un déchirement de quitter sa patrie ainsi, de fuir pour aller je ne sais où. Mais c’est le choix que j’ai fait, à l’encontre des conseils de mes proches. Ils étaient persuadés qu’une autre issue existait, mais je ne supportais pas l’idée de leur imposer mes miasmes, les volutes noires de ma malédiction.

Dans ce livre, tu auras toute l’explication de ta vie. Ta vie n’est pas celle que tu auras eue sur Terre. Ta vie est ici, à Eleysia. Ne t’attarde pas trop sur certains passages. Ce que tu vas apprendre dans ces quelques mots te sera déjà assez déchirant. Notre existence fut parsemée de joie, de douceur, mais aussi de sang et d’horreur. Tu es une jeune reine, pas toujours comprise par ses pairs, mais qui a toujours essayé de donner un équilibre à son peuple. J’étais et je suis toujours à contre-courant. J’ai fait des erreurs monumentales, mais je ne les ai pas faites dans un but malveillant.

Cette guerre, contre les Cauchemars, est née des limbes de la guerre des Trolls. Ces êtres ont perdu l’esprit et le sens de leur mission. C’étaient des gardiens de la nature. Mais ils ont explosé en voyant l’action des humains sur la Terre. Ils ont voulu les éradiquer et pour ça, ils ont cherché à récupérer les pommes primordiales. À cause d’eux, la pomme d’or, créatrice de vie, a disparu. Sindeyir a disparu. Ce n’est pas un simple artefact ayant la forme d’une pomme originelle. C’est ce qui nous reste de la première étoile ayant brillé dans le cosmos. Elle fut recueillie on ne sait comment dans une pomme de cristal et est devenue la babiole féerique que l’on connaît. Si les trolls s’en sont pris à nous, c’est que Nandeyir, la pomme d’argent, la deuxième étoile, est en ma possession. J’en suis la gardienne.

J’ai réussi à la préserver et nous avions gagné la guerre, mais à quel prix. Le pays fut ravagé, les pertes furent très lourdes, énormément de civils furent emportés. J’étais désespérée. J’avais Nandeyir, que j’avais protégé de toute mon âme. Nandeyir pouvait permettre de recréer au moins les bâtiments, le paysage, les maisons pour tous ces gens sans logis. Je voulais aider mon peuple et leur offrir le meilleur. Alors j’ai fait le vœu que tout soit reconstruit.

J’ai été idiote. J’ai oublié que tout vœu avait un prix. J’ai pensé naïvement que je trouverai une compensation à cet acte plus tard.

Mais les Cauchemars sont arrivés. Des nuées d’êtres décharnés, aux milles bouches et mille yeux, aux tentacules en décomposition, qui ne sont là que pour amener destruction et horreur sur les terres.

Nous avons lutté comme nous avons pu. Mais je fus maudite et j’ai fui comme une lâche, car j’aimais trop mon peuple et ma famille.

Pardonne-moi d’avoir été une idiote. Si tu es là, c’est que tu es revenue à la maison, c’est que peut-être, ils avaient raison.

Je prie tous les Dieux pour que l’on s’en sorte, pour que ce fléau cesse. Pour que le soleil brille à nouveau sur les landes féeriques. J’ai condamné par ma bêtise des peuples qui étaient déjà affaiblis. J’espère maintenant la réparer.

Je compte sur toi,

Atarillë, reine d’Eleysia, Pays d’Argent.»