J’étais assis à mon bureau et lisait péniblement la paperasse de la caserne. Lorsque j’ai accepté le poste de pompier en chef, je m’attendais à un peu plus d’action, comme aller sur les lieux des incendies, éteindre les feux, manier la lance à eau… Mais il s’est avéré que le poste de chef consistait à envoyer les autres vers l’action et à rester soi-même assis à un bureau pour vérifier les comptes et s’occuper de la paperasse. Si j’avais su, jamais je n’aurais accepté cette promotion. Sur mon bureau, un téléphone sonna. Ce téléphone ne sonnait que pour deux choses : un boulot administratif envoyé par le notaire, ou un incendie. Le premier était plus fréquent que l’autre et, à chaque fois que sonnait ce téléphone, j’étais tenté de ne pas répondre. Mais si c’était le deuxième, un tel acte ferait mourir de nombreux innocents. Je suis sûr que c’est un coup de mon patron pour me forcer à répondre. Je décrochai en soupirant.
- Caserne de Fiville, j’écoute ?
- Au feu ! Cria-t-on à l’autre bout de la ligne. Ma maison brûle, à l’aide !
Je me redressai et m’exclamai :
- Votre adresse, vite ! J’envoie une équipe.
- Douze rue des champs, faites-vite ! Ma femme et mes enfants sont à l’intérieur.
Je raccrochai précipitamment et activait le micro présent sur mon bureau.
- Trois camion au douze rue des champs ! Un incendie avec des personnes dans la maison !
Je gardai el bouton enfoncé. Je réfléchis à toute vitesse et ajoutai :
- Stagiaire Stephan, dans mon bureau.
Je relâchai le bouton. Mon supérieur allait me tuer pour ce que j’étais sur le point de faire, mais il le fallait. Je n’allai pas laisser les autres régler une affaire d’une si grande importance. Je me précipitai vers une armoire et enfilai l’uniforme qui s’y trouvait en quelques secondes. Stephan entra alors, et me demanda :
- Vous vouliez me…
- Stéphan, ce bureau est à toi pendant quelques heures. Tu réponds au téléphone, tu fais ce qu’on te dit, s’il y a une urgence tu envoies un camion. Compris ?
Je n’attendis pas sa réponse et sortit de la pièce en courant. Normalement, les camions n’étaient pas encore partis. Je traversai la caserne et sortit dans le garage. Juste à temps, le dernier camion démarrait. Je sautai sur une échelle qui se trouvait sur le côté de la cabine et toquai à la fenêtre côté passager. Le pompier qui s’y trouvait ouvrit la porte et je montai en marche.
- Capitaine ? S’étonna celui qui avait ouvert. Que faites-vous là ?
- Ne pose pas de question, je viens avec vous.
- Soit.
Le camion roulait à toute allure sur la route bétonnée, suivant les deux véhicules partis avant lui. Nous arrivâmes finalement devant une bâtisse en flamme. Devant, un homme faisait de grands cris et agitait les bras.
- A l’aide ! Disait-il. Mais femme et mes enfants ! Ils sont dedans !
Je n’attendis pas que le camion se gare et sautai en marche.
- Combien avez-vous d’enfants ? Demandai-je sans même regarder l’homme.
- Deux, des jumeaux de cinq ans, un garçon une fille.
Avant même qu’il ait finis sa phrase, je précipitai à l’intérieur de la maison, qui menaçait de s’effondrer à chaque instant, et lançai des regards frénétiques dans la pièce. Je découvris la petite fille et sa mère recroquevillé dans ce qui était une cuisine, entourées par les flammes et la fumée. Je saisis la femme sur mon épaule et prit la petite fille par son col qui, jadis, avait été blanc. Je bondis hors de la maison et les déposai dans les bras de l’homme. Sans attendre ses remercîments, je retournai à l’intérieur. Le fils n’était pas en bas, il était donc en haut. Je me précipitai dans les escaliers. Une marche s’effondra, puis une autre, mais je poursuivais mon ascension. Je parcourus l’étage du regard. J’entendis alors des sanglots qui me conduisirent dans les restes d’une chambre. Un petit garçon était bloqué sous une poutre et toussait abondamment. Je m’approchai et tentai de soulever le gros morceau de bois. Il était trop lourd je du réfléchir à toute vitesse, le feu gagnait du terrain. Je vis la corde des rideaux, en attachai une extrémité à la poutre et lançai l’autre par la fenêtre.
- Tirez ! Criai-je. Tirez tous, de toutes vos forces !
La moitié des pompiers laissèrent tomber les lances à eau et se jetèrent sur la corde. Ils commencèrent à tirer et je soulevai également la poutre de l’intérieur. Nos efforts combinés firent se soulever le gros morceau de bois. Lorsqu’il fut assez haut, je retirai d’une main l’enfant des décombres, puis me dirigeai à grand pas vers la sortie. Mais d’autres débris tombèrent, me bloquant le passage. Je commençai à tousser, la fumée remplissait tout l’espace. Je me précipitai vers la fenêtre, prit la corde d’une main, le garçon dans l’autre et m’élançai dans le vide. Puis le noir.
Le chef de la brigade des pompiers termina son récit devant les journalistes, qui notaient frénétiquement chacune de ses paroles.
- Monsieur, dit l’un, vous un véritable héros ! Votre témérité est sans égal !
Une infirmière entra alors dans la chambre.
- Les visites sont terminées, messieurs. Ce brave homme a besoin de repos.
Les journalistes sortirent de la chambre d’hôpital et l’infirmière s’approcha pour redresser l’oreiller du "héros". Puis elle se pencha à son oreille.
- Puis-je avoir un autographe ?
Elle tendit un papier et un crayon et le chef y gribouilla sa signature. L’infirmière sortit en rougissant de plaisir. « Heureusement, songea le pompier, que j’ai renvoyé le véritable auteur de cet exploit. Il ne peut pas me contredire, et me voilà devenu le plus célèbre des pompiers. Ah ! Les gens sont vraiment stupides, parfois… »
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