Sishu guida les deux amis pendant une heure dans les rues de Tournerond ; les immeubles devinrent moins denses, laissant peu à peu la place à des parcs arboré.
Benny marché devant au côté de Sishu, sa maladresse commençait à percer ses gestes, révélant l’intérêt grandissant qu'il portait à la jeune-femme. Abiès le remarqua et se mit à ricaner à chaque faux pas de son ami. Sishu aussi semblait sous le charme, riant plus fort, presque anxieuse, elle tournait la tête au moindre bruit et avait sensiblement accéléré le pas.
Abiès commençait à avoir soif, cela faisait presque deux heures qu'ils ne s'étaient pas arrêtés. Lorsqu'il voulut saisir sa bouteille dans son sac, il prit conscience qu'il n'avait en réalité rien sur le dos et rien non plus sur celui de Benny : ils avaient quitté la ville sans leurs affaires. Les deux autres ne s'était pas arrêté et avait maintenant disparu derrière un virage. Abiès rejoignit le cours d'eau qu'il longeait depuis qu'ils avaient quitté la ville. Lorsqu'il eut étanché sa soif, il remonta rapidement la berge, et se retrouva nez à nez avec un renard à la toison blanche. Étonné, il se figea et contempla avec une légère appréhension l'animal. Ce dernier ne semblait ni troublé, ni effrayé, au lieu de s'enfuir il fixa sévèrement Abiès, ses paupières papillonnèrent rapidement.
Abiès sentit un frissonnement glacé lui parcourir la colone vertébrale, il avait comme une sensation de déjà vu, le comportement de l'animal n'avait rien de normal. Lorsqu'Abiès se décida à bouger, le renard fila en trottinant et disparu lui aussi dans le virage : le jeune-homme relâcha son souffle et se mit à réfléchir à toute allure, cherchant à retrouver le souvenir. Le pas léger du renard lui était étrangement familier.
Se rappelant soudain des ses deux compagnons, il se remit en route, s'approchant du virage, il décida à la dernière seconde de couper par le bosquet d'arbres : il gagnerait du temps. La tension de la rencontre avec le renard commençait à s'estomper, distrait, il chuta lourdement sur son poignet. Ses pieds s'étaient coincées dans des priirs, sa tête effleura un tronc, manquant de peu de l’assommer, son poignet lui palpité douloureusement. Il était tombé dans un buisson de priirs, une variété de ronces au épines écarlates larges comme un petit doigt. Avec un grognement de douleur il réussit à dégager son poignet tumifié, mais dans la maneuvre il s’enfonça plus profondément les épines dans les jambes et son bras valide. Il était maintenant complétement immobilisé, chaque mouvement lui déchirait la peau plus profondément, la douleur était lancinante le parcourant comme des dizaines de brulures palpitantes. Des larmes de rage lui montèrent aux yeux, il hurla des insultes, effrayant les oiseaux qui décollèrent dans un bruits d'ailes précipitées. La pression des Priirs se relâcha soudain jusqu’à ce qu'il puisse s'extirper complétement du roncier. Il était couverts de griffures perlée de sang vif, lorsqu'il eut finit son examen des dégâts corporels, il remarqua alors que les feuilles des Priirs jaunissaient de seconde en seconde, les tiges s'assombrissaient ainsi que les épines, perdants de leur éclat. Abiès saisit une feuille entre ses doigts, d'une légère pression elle se transforma en poussière dans un crissement sec. Incrédule, il observa un moment le roncier dans l'attente que ce dernier reprenne son aspect verdoyant. Rien ne se passa. Peu à peu une idée oppressante s'imposa dans son esprit :il avait tué la Priir.
Ce don qu'il croyait pur et bon, pouvait se retourner contre lui, ce constat l'horrifia ; glaçant son corps jusqu'au bout des ses pieds. Il avait dévitalisé une plante à cause d'une colère mal orientée, cela voulait-il dire qu'il pouvait aussi par mégarde, ou même volontairement blesser une personne ? La tuer ?
Pétrifié sur place par la peur, ce furent les appels de Benny depuis le chemin qui le remirent en mouvement, maladroitement, il rejoignit la sente par laquelle il été entré dans le bois, puis se mit à courir sur le large chemin en direction des appels de son ami. Il aperçut bientôt les deux silhouettes, continua de courir vers eux, toujours submergé par la panique des dernières minutes, il ne remarqua l'attitude étrange de Benny que lorsqu'il fut assez proche pour discuter.
Benny se tenait la tête légèrement tirée vers l'arrière, un bras dans le dos et le visage crispé. Ses mâchoires verrouillées et le regard inquiet de son ami finirent par alarmer Abiès, qui continua de se rapprocher avec vigilance cette fois. Lorsque Sishu parla, s'était d'une voix sarcastique, dénuée dans ses intonations de toute la douceur qui faisait habituellement son charme:
- Ah, le voilà ! Tu vois Benny ce n'était pas la peine de s'inquiéter pour lui.
-Qu'est-ce-qu'il se passe Bennny ? Demanda Abiès. Il scruta son ami et comprit alors que c'était Sishu qui maintenait Benny dans cette position.
Benny entama une réponse :
- Je suis désolé Abiès, je…
Sishu l'interrompit en lui donnant une violente secousse dans le bras, accentuant encore la contorsion ; le mouvement obligea Benny à se pencher vers l'avant en grimaçant de douleur.
- Non non non, pas de ça entre nous Benny chéri. On s'était bien mit d'accord, c'est moi qui parle. Elle s'était adressé à lui d'un ton faussement doux, puis elle reprit de façon dédaigneuse : je dois admettre que vous retrouver a été plus simple que prévu. Mûrine n'a pas été très clair sur ce point, mais je pense avoir un supplément à vous ramener rapidement.
L'esprit troublé, Abiès lui demanda :
- Qu'est ce que tu dis ? C'est ma grand-mère qui t'envoie nous retrouver ?
- Ramener, n'est pas tout à fait le terme qu'elle a employé, laisse moi me rappeler, ça va me revenir… Ah oui, je cite « mettre un terme à cette trahison, par tous les moyens à disposition d'une chasseuse de prime ».
-Ta capacité de déduction est aussi mauvaise que celle de t'enfuir, tu es certain Benny que c'est lui le cerveau des opérations ?
- Tu ne nous obligeras pas à te suivre, tu ne peux pas nous trainer comme ça sur cent kilomètres, rétorqua Abiès.
- Moi non, mais elle oui ! Dit-elle en indiquant d'un coup de menton la fôret: la était assise un renard blanc, le même qu'Abiès avait rencontré au bord de l'eau.
La compréhension se distilla sur le visage des deux amis.
- Une transani, souffla Benny.
- Je t'ai dis de te taire, aboya Sishu. Elle lui tordit un peu plus le bras, pour l'obliger à s'agenouiller devant elle. Benny tenta alors un geste qu'il regretta plus tard, il essaya de se dégager en se relevant brusquement et de bousculer la femme. Mais elle ne se laissa pas surprendre et d'une main experte elle le maintint en place fermement, puis lui écrasa la cheville d'un violent coup de talon, un craquement lugubre résonna suivit d'un hurlement déchirant de Benny. Son pied était tordu dans une posture inquiétante ; Benny gémissait de douleur. Nonchalamment, Sishu replaça délicatement une mèche de cheveux dans son chigon serré, puis braqua un regard ardent sur Abiès :
- Tentes quoi que ce soit Abiès et je lui brise la seconde, un grondement de la renarde appuya sa menace.
Les oreilles bourdonnantes, Abiès ne sentait plus son corps, son esprit se détachait de ses sensations, flottant dix pieds au dessus de lui, l’empêchant de réfléchir : comme sonné après une chute. Benny gémissait et jurait toujours. Les lèvres d'Abiès, animées en cet instant par leur propres volonté, entamèrent un chant, son corps répondit par lui même aux appels de douleurs de Benny. Autour d'Abiès, tout était noir et silencieux, inanimé.
Lorsqu'Abiès revint à lui, il découvrit les Priirs enroulées autour de la Renarde et de la chasseuse de prime, mais aussi à son grand désarroi autour de Benny. La chasseuse se débattait farouchement, elle saignait à plusieurs endroits. Abiès marmonna quelques mots puis aida son ami à se dégager des épines, le renarde claquait des dents à quelques centimètre de lui, grondant, tandis que Sishu les abreuvait d'insultes. Dans un excès de lucidité, Abiès lui fouilla les poches accessibles, récupérant son couteau, puis ils la laissèrent là, veillant à bien resserrer les liens.
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