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tome 1, Chapitre 3 « Le marteau, la chèvre et la boîte » tome 1, Chapitre 3

Abiès referma doucement la porte derrière-lui et gagna la cuisine. C’était à son tour de cuisiner pour la famille. Ilprépara d’abord la pâte pour les galettes d’accompagnement : composée de farine de maïs et de graine de fouchtra. En attendant que la pâte lève il alluma le four à bois. Il éminça ensuite des oignons, écossa des haricots noir, éplucha des légumes racine qu’il disposa dans un grand plat en terre peint. Une fois le four bien chaud il ouvrit la trappe, écarta les braises et glissa le plat à l’intérieur. Il pétrit ensuite la pate et format de petites galettes plates de la taille de sa paume. Il attrapa ensuite une grande pelle en bois avec laquelle il s’aida pour déposer les galettes dans le four. Abiès nettoya la cuisine puis partit se changer.

Vingt minutes plus tard il redescendit et sortit les galettes dorées. Il y en aurait assez pour la journée. Il s’installa à la grande table et commença à dévorer les galettes toutes chaude avec une confiture de baies sauvages. Il réfléchissait à l’incantation de la veille et à la possibilité de la présenter au conseil, lorsqu’il vit son père descendre l’escalier. Il sursauta et se précipita dans la cuisine pour sortir son plat : il était temps, une légère odeur de brûler s’échappa du four lorsqu’il l’ouvrit. Son père le salua d’un tapotement affectueux dans le dos et ajouta d’un grognement satisfait :

- Du missala, ça sent bon dans toute la maison !

- Que veux-tu, il n’y a qu’un jour sur trois ou nous mangeons dignement dans cette famille, taquina Abiès.

Il se servit un bol et le dévora si chaud qu’il se brûla la langue. Puis il laissa son père attablé et grimpa dans sa chambre récupérer ses affaires.

Sa chambre était la plus petite de la maison mais la mieux exposée. Il avait la vue sur les jardins et un accès direct aux terrasses, par temps clair il apercevait même le scintillement de la rivière en contre-bas dans la vallée. La pièce était meublée sobrement : un large lit en rondin, un vieux coffre en métal pour ses vêtements et des étagères qui croulaient sous les livres, pierres, morceaux de bois aux formes biscornues, et autres merveilles aux seuls yeux d’Abiès. Un grand tapis couvrait la moitié de la pièce dont il se servait pour la lecture et écrire ; il ne travaillait jamais assis au grand désespoir de sa sœur qui ne manquait jamais une occasion de critiquer son écriture pourtant irréprochable. Tout petit déjà alors qu’il apprenait ses lettres, Sauline prétendait ne pas arriver à le relire, alors il s’entraîna des heures durant, retraçant ses lettres, et recommençant encore et encore si bien qu’il écrivait aujourd’hui mieux que la plupart des enseignants. Il comprit des années plus tard que sa calligraphie était impeccable et que seul la jalousie nourrissait les reproches de la sœur. A cette découverte, Abiès prit conscience que d’innombrables sources de conflit n’était dû qu’à ce sentiment.

En quatre enjambée il avait traversé la pièce et attrapait à son porte manteau son sac à tout faire, y fourrant au passage une épaisse paire de gants.

Ce matin il devait rejoindre son dernier cours à la forge et l’après-midi serait consacrée à l’entretien des vergers. Ces deux dernières années avaient été chargées car il avait choisi un éventail de discipline : légumier, raboteur de chemin, forgeron, tisseur, couturier, brasseur, comptable, pâtissier, annonceur publique. Il en avait abandonné certaines comme la comptabilité et l’annonciation. Il se débrouillait avec la forge notamment avec les petits objets, il avait refait les poignets de porte de la maison et tous les couverts. Ses cours faisait parti de ses favoris, avec ceux de brassage de bière.

Humulia Houblon la brasseuse, qui portait bien son nom, était une merveilleuse instructrice, bienveillante et riche de conseil. C’était la seule à ne pas jeter des regards acides à Abiès, elle l’avait même clairement favorisé. Malgré son vif intérêt et son implication, Abiès ne parvenait pas à stabiliser ses essais : une cuvée pouvait être excellente et la suivante médiocre. Mais l’activité ou il excellait véritablement était la culture des espèces potagères; il gagnait chaque année en technique et en qualité.

Souvent en surplus, Abiès troquait ce dont la famille manquait, il garantissait ainsi le confort de nouveaux tissus, des denrées de premières qualités, des livres ou encore des crayons et du papier. C’était sa soeur qui montait l’étalage au marché, souvent la dernière arrivée elle repartait invariablement la première. Tout le monde s’arrachait leur légumes. Cependant il n’en n’avait pas toujours été ainsi, les premières années lorsque Abiès tenait l’étalage il revenait toujours bredouille. Un jour ou il était malade, Sauline le remplaça et revint la carriole vide et les poches rebondies. Les gens s’imaginaient que c’était elle qui s’occupait des plantations, et avec son statut de guérisseuse elle attirait bon nombre de clients ravies de sympathiser avec une personne importante. Tenir le stand était le seul service que Sauline acceptait de rendre à son frère, car même s’il lui en coûtait, elle appréciait bien trop le confort.

Avec l’approche de la cérémonie l’emploi du temps d’Abiès s’était partiellement allégé, pour laisser le temps au jeunes gens de la même année que lui de préparer leur demande. Chez les guérisseuses, il était possible de changer de métier tous les trois ans surtout les postes les plus physique, comme l’entretien des lagunes d’épuration, l’entretien des voieries, les livraisons de messages... Tout le monde à quelques rares exception passait au moins un cycle de trois ans par ces postes. Ceux dont les deux requêtes étaient refusées commençaient souvent par là, c’était invariablement les turbulents ou les récalcitrants. D’autres gardaient leur poste toute leur vie.

Abiès était en retard, il dégringola les marches, fit un signe à son père et sortit dans la rue. La forge se trouvait proche de la place du marché, dans une petites rue annexe. Il adopta un rythme rapide, comptant sur ces longues enjambés pour rattraper son retard. Il atteignit bientôt la forge. Installée sous une large arche de pierre au rez de chaussée, une porte rouge tout aussi grande en gardait l’entrée. Les jours d’apprentissage Quercus, le forgeron, fermait la boutique. Il fit le tour de l’établissement par la ruelle de gauche, poussa le portillon en entra par la cour arrière. La forge était en marche, il pouvait entendre la voix du forgeron dominant le bruit des souflets entrain de distribuer ses instructions. Abiès enfila à la va-vite son tablier et ses gants, attrapa la dernière paire de protège oreilles (la plus miteuse) puis s’adossa à un mur derrière ses camarades. Son subterfuge pour passer inaperçu ne trompa pas Quercus, qui lui adressa un froncement de sourcil et un regard agacé. A ce regard, Abiès se redressa les mains croisées devant lui.

Le maitre forgeron était de la même taille que lui, mais les similitudes s’arrêtaient là. Les épaules larges habitués à soulever de lourdes charges, il avait des mains aussi larges que sa tête avec des doigts épais et puissants. Pourtant trentenaire, il masquait sous un tissu son crâne précocement dégarni. Quercus était un drôle d’oiseaux, tantôt avenant et blagueur, tantôt grincheux et susceptible. Le forgeron termina sa phrase puis fixa son regard sur Abiès, il sut qu’il venait de déclencher le côté orageux du maître.

- Si tu crois que tu peux te permettre d’arriver en retard parce que c’est ton dernier jour ici, tu te trompe lourdement mon gars.

- Mes excuses Quercus, répondit Abiès en baissant les yeux sur ses mains.

- Tu ne t’en tireras pas avec des excuses. Les actes avant les mots, c’est ma devise. Tu seras chargé du ménage de ce soir : l’atelier et la boutique. Je veux que cela brille !

Quelques ricanements fusèrent, Abiès n’avait pas besoin de lever les yeux pour en connaître la source ; Iris, Raph, Citrus et sans aucun doute Gozo et Tarx. Ces cinq là étaient pour la majorité des enfants de guérisseuses, de famille puissantes, ou comme Iris de conseillère et aspiraient à des postes clés.

La matinée fut un calvaire pour Abiès, car sachant que le ménage serait assuré, les autres apprentis se délectaient de lui rajouter du travail. Éventrant les sacs de charbons, soufflants sur les bacs de cendre et renversant les sceaux d’eau.

Abiès n’arrivait pas à se concentrer, ses coups de marteau manquaient de précision et ne menaient à rien. Il ne pouvait qu’assister impuissant au saccage des lieux et aux heures supplémentaires de récurage en perspective. Cet acharnement réveilla en lui le sentiment d’injustice qu’il éprouvait face à son destin dans sa communauté. L’angoisse et la colère montaient en lui. Le martellement se fit plus rapide. Son don n’était pas une une tare, et sans ces préjugés il ne serait pas traité ainsi par son propre clan. Il fallait que cela cesse. Les coups de marteau étaient de plus en plus violent. Il s’imaginait le jour de la cérémonie, tenant un discours révolté devant les membres du conseil et réfutant leur arguments les uns après les autres… Soudain une vive douleur dans le pouce le tira brusquement de sa songerie et l’obligea à lâcher son outil. Le traître lui avait entamé la peau dans la partie tendre entre le pouce et l’index. Il avait tapé comme un diable pour réussir s’arracher la peau même au travers du gants. Il jura des insultes intelligibles. Cela aussi devait cesser. A bout de patience il s’apprêtait à rejoindre Iris pour lui faire manger du charbon, lorsque Quercus intervint. Le forgeron n’était ni imbécile ni cruel, et il remit dans le rang les perturbateurs en assignant la meneuse, Iris, à la même corvée qu’Abiès. La réprimande refroidit les ardeurs de la bande et permit à Abiès de se consacrer à son projet sereinement.

Ce matin les apprentis devaient terminer leur ouvrages destinés à la communauté. C’était le dernier exercice proposé par le forgeron et de loin le plus difficile. Abiès avait fini par remettre à neuf le système de pompe à eau du puits du vergers sud. Il ne lui restait plus qu’à camoufler quelques soudures mal dégrossies. La fin de matinée passa en un éclair, puis Abiès gagna le chemin vers le vergers tandis que ses collègues partaient manger. Abiès avait pris l’habitude de manger le matin et le soir afin d’éviter ces moments pénibles pour lui. Manger seul n’avait rien de plaisant.

Les vergers s’étendaient sous la ville jusqu’au bord de la rivière Sumena. La vigne vagabondait sur les parcelles escarpées mêlées aux oliviers. Plus bas sur les larges terrasses, les abricotiers, amandiers, arganiers, cacaoier, bananiers, theiers se coutoyaient dans une ambiance tropicale. Les potagers se trouvaient sur les petites terrasses au sud-ouest. Les plantations protégées par des haies basses et épineuses d’acacias, étaient d’une grande diversités. Chaque famille possédaient un espaces pour ses plantations à l’intérieur de la ville, ici les potagers étaient aux services et aux soins de la communauté. Les récoltes étaient destinés au troc avec les autres clans et à l’élaboration d’alcool.

Les plantes médicinales étaient entretenues par les communis et les guérisseuses sur un promontoire uniquement accessible par l’arrière de la salle du conseil. Le bois lucide, niché dans l’ombre du deuxième dôme n’était pas suffisamment illuminé pour certaines espèces. Les aromates eux étaient plantés le long des chemins, des maisons et des potagers. Il y en avait partout, dégageant de riche parfum de romarin, réglisse, anis, se modifiant à chaque nouvelle floraison. Cette particularité a valu au clan d’être surnommé Les Parfumeurs.

Abiès profita de son heure de liberté pour se rincer le visage et ses mains couvertes de charbons. Malgré les gants de nouvelles ampoules s’étaient installées sous les deuxième phalanges, et le coup de marteau mal placés lui engourduissait la main. Abiès les recouvrit d’un onguent gluant et d’un linge fin. Il avait apporté pour s’occuper un cahier à dessin dans lequel il débuta un croquis des vergers. Il vit bientôt le groupe des apprentis sortir de la ville et gagner le chemin des plantations.

L’après-midi était consacrées à changer les animaux de parc. Les alpagas et les chèvres servaient à entretenir les plantations, en maintenant l’herbe à ras. Les apprentis formèrent quatre groupes de trois, les uns regroupaient les animaux à l’aide de grains tandis que les autres déplacaient les filets servant de clotures. Abiès faisait parti du second groupe, ses deux équipiers Willy et Cerise étaient ceux avec qui il s’entendaient le mieux. Sans être des amis proche, ils passaient tous les trois de très bon moments ensemble. Willy avait toujours un air surpris, comme si on le réveillait d’un endroit fantastique et qu’il ne se rappelait pas vivre ici. Cerise était une fille simple, franche, optimiste et qui détestait l’injustice, elle défendait systématiquement Abiès.

Après plusieurs heures d’efforts les chèvres consentirent à coopérer à la vue d’une nouvelle parcelle garnies de bourgeons et d’herbe grasse. Abiès et Willy était tombés plusieurs fois en aidant les autres groupes à regrouper les bêtes, les blessures d’Abiès se mirent à saigner et à palpiter douloureusement. Il songeait à faire appel à une incantation mais Cerise se proposa pour le soigner.

Ils remontèrent tous les trois au village et Cerise les invita à entrer. Elle partit chercher des bandages et un bôme cicatrisant, pendant que Willy préparait du thé. Ils s’installèrent ensuite tous les trois dans de grands sièges moelleux située proche d’une fenêtre. Abiès avaient retiré ses pansements boueux et nettoyée la plaie. Cerise commença par appliquer une eau florale désinfectante, puis enduisit généreusement l’entaille avant de la recouvrir de linge propre.

- Tu vas être obligé de recommencer tout à l’heure après le nettoyage de la forge. Tu n’as qu’à repasser si tu veux, proposa Cerise.

- Oh, j’avais oublié, grommela Abiès dont la douleur à la main s’était réveillé.

- Cela me rappelle le début d’année, ricana Willy. Tu as eu droit au récurage de la forge le premier jour d’apprentissage avec Quercus ! Qu’est ce qu’il s’était passé ce jour là déjà ?

- Il avait renversé la cuve d’or que Quercus venait tout juste de faire fondre, sur l’enclume, répondit Cerise.

- C’est vrai ! Il ne l’avouera jamais, mais il est fière de son enclume en or. Il l’a mise bien en évidence pour que tout le monde puisse l’admirer, dit Abiès en rigolant.

Ils échangèrent encore quelques plaisanteries au dépend du forgeron tout en mangeant de délicieux petit gâteaux roulés au miel et à la cannelle. Bientôt ce fût l’heure de partir et Abiès rejoignit la forge.

Le forgeron lui attribua ses tâches : inventaires des outils, pointage dans le livre de suivi, et nettoyage, puis réparer l’un des soufflets avec lui pendant qu’Iris s’occuperait du nettoyage de la boutique. La jeune-femme était d’une humeur massacrante, soupirant et insultant les objets. Après quelques dizaine de minutes à supporter sa comédie, Quercus lui assigna une heure supplémentaire et lui intima le silence. L’effet fut immédiat : mais si on ne l’entendait plus,  sa colère, elle était palpable. Il sentait l’irritation de la jeune femme à chaque fois qu’elle entrait dans la pièce, une vraie boule de nerf. Abiès venait de terminer l’inventaire, il ne manquait qu’une petite pince de précision. Il repensa aux projets du matin pour tenter de deviner lequel de ses camarades avaient pu s’en servir afin de rétrécir la zone de recherche. Alors qu’Abiès était accroupie une main sur rebord du foyer et l’autre tatonnant à l’aveuglette sous un coffre à la recherche de la pince égarée, Iris passa à coté de lui. C’est alors qu’elle trébucha, la caisse remplit de petites tiges de fer lui glissa des mains et vint se fracasser dans un tintement de métal sur la main d’Abiès. Un cri de douleur lui échappa, et la tête lui tourna lorsqu’il se remit sur ses pieds. La caisse avait atterrit sur sa main blessée. La douleur lancinante, remontait jusqu’à l’épaule au rythme des pulsations de son coeur : cette fois il s’était cassé quelques choses il en était convaicu. Lorsqu’il tenta de bouger son pouce, ce dernier suivi une courbe étrange. Les larmes lui montèrent aux yeux mais il se mordit la langue pour les retenir, il était exclu de pleurer ici. Iris se répandait en creuses excuses, une lueur de satisfaction dans le regard guettant le moindre trace de faiblesse de sa part. Devant l’état de son apprenti Quercus le libéra plus tôt que prévu, avec une tape dans le dos et un regard d’excuse.

Abiès quitta la forge exténué, c’était bien sa pire journée depuis longtemps. Il remonta la rue silencieuse la main contre sa poitrine, tentant désespérément de la protéger d’un énième accident. Puisque sa main était abîmée autant en profiter pour essayer son incantation, ce serait un bon exercice avant son passage au conseil. Il rumina cette idée et décida de tenter l’expérience. Peut-être quelque chose pour calmer la douleur, puis il lui faudrait détecter la fracture avec un chant de raisonnance. Oui, d’abord s’occuper du pouce, les entailles pourraient attendre demain. Il arriva finalement sans encombre chez lui. Il espérait se faufiler discrètement dans l’escalier, mais il tomba nez à nez avec sa sœur. Elle remarqua tout de suite sa mine grisâtre et posa son regard sur sa main recroquevillée.

- Qu’est-ce-qu’il t’es arrivé ? On dirait que ton pouce veut dire bonjour à ton poignet, souffla Sauline les yeux écarquillé.

- Dur journée, pour résumer : un marteau, une chèvre et une boite.

Elle tendit la main vers Abiès et examina avec sa main avec douceur.

- Une chèvre, répéta Sauline un sourcil arqué par la perplexité. Mais déjà, sa concentration était focalisée sur la blessure, elle avait revêtu son visage de guérisseuse affairée devant son nouveau patient. Elle lui ordonna d’une voix que nul contestation ne ferait céder, d’aller s’asseoir. Elle disparut dans l’escalier. Le temps qu’Abiès atteignent le gros siège-englobeur, elle était déjà de retour. Sauline procéda avec méthode, commenca par défaire avec dextérité le bandage réalisée quelques heures plutôt par Cerise et pinça les lèvres devant les nouvelles écorchures.

- Et là, c’est à cause de qui cette fois ? D’une limace ?

- Le marteau, répondit Abiès en grimaçant. J’ai râté la tige de la manivelle que j’essayais de régulariser, cela date de ce matin. Cerise m’a fait un bandage après le travail dans le vergers, puis j’ai dû retourner à la forge pour du nettoyage et c’est là que la boîte m’est littéralement tombée dessus.

- Je vais voir combien il y a de fracture. Avec la chance que tu as deux sera un score honnête, répondit Sauline.

Elle ferma les yeux, sa main à plat à quelques centimètre au dessus de celle d’Abiès. Elle prit six grandes inspirations puis murmura quelques intonations. Abiès ressentait le son plus qu’il ne l’entendait. Il observait le moindre de ces gestes les gravant dans sa mémoire, tout en feignant un désintérêt profond afin de ne pas éveiller les soupçons de celle-ci. Les moments de bonne ententes étaient devenus rares ces dernières années, il ne souhaitait pas le gâcher. Sauline entama un chant lent, régulier, semblable au rythme d’une aiguille qui raccommode. Abiès sentit son pouce reprendre sa place naturelle. Toute sa main vibrait comme à l’atterrissage d’un saut trop haut, lorsque les pieds touche le sol et la sensation immédiate que son corps s’écrase sur lui-même. Un léger vertige le saisit, puis la douleur s’estompa. Alors enfin son corps entier se relâcha et il renversa la tête en arrière, soulagé.

Le voix de Sauline s’était tût mais l’air résonnait encore. Lorsque les dernières tintes de musiques s’évanouirent, Abiès souleva ces paupières pour observer sa sœur. Les yeux de Sauline papillonnèrent un instant puis ces iris bleues hirondelles se levèrent vers lui. Il lui adressa un sourire de remerciement, qu’elle lui retourna. Ils bavardèrent quelques minutes le temps que Sauline referme la plaie à l’interstice du pouce. Elle l’autorisa à se lever à condition qu’il accepte de boire un elixir pour le sommeil. Ils rangèrent les bandages, onguents, et fioles de sa sœur.

L’elixir fit son effet, car le sommeil enveloppa vite Abiès.


Texte publié par Margauttinaa, 21 juillet 2023 à 19h37
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