La France est un pays méritocratique, en tout cas dans les textes. Dans les faits, il s’agit surtout d’élitisme. Un élitisme à peine déguisé, derrière les grandes écoles, les concours d’entrées et les diplômes dorées. A travers cette deuxième lecture, il ne s’agit plus seulement d’être diplômé.e, mais d’être bien diplômé.e. La démocratisation de l’éducation à ainsi accéléré un système à deux vitesses, entre les meilleurs et les autres. Ceux et celles qui misent sur leur mérite et ceux et celles qui se contentent d’être au bon endroit. Il n’y a ainsi qu’un seule ligne de départ, mais certain.e.s ont plus de chevaux que d’autres.
Dans l’antre de la méritocratie, on a souvent entendu qu’il est du pouvoir de chacun et chacune de tracer son propre chemin. De se réaliser. De réussir. Les diplômes sont la valorisation de cette dynamique. Papiers dorées attestant de notre réussite sociale. Chaque détails de ceux-ci indique notre niveau de réussite. Le nom du diplôme obtenu, la mention, le nom de l’école ou université, l’année d’obtention, le pays. Tant d’informations qui nous classent. Je dit bien nous, en tant qu’être. Parce que je suis mon niveau social et je mérite le niveau social dans lequel je suis. Dans notre système actuel en tout cas.
Travail dure et tu réussira. La recette semble si simple, si accessible, alors pourquoi ne fonctionne telle pas à tous les coups ? Pourquoi ce ne sont pas toujours les plus travailleurs qui obtiennent les meilleurs diplômes, puis en cascade les meilleurs postes, les meilleurs salaires et les meilleurs niveaux de vie ? Parce que le travail ne fait pas tout. Parce qu’un diplôme peut se payer. Parce que les meilleurs établissements scolaires sont (trop) souvent rattachés à des quartiers, des arrondissements, des villes, inaccessibles pour les classes moyennes et basses.
Le concept de Transfuge de classe est l’apothéose de cette idée. Réussir à s’élever par le haut, à aller au delà de nos propres parents, comme une preuve du fonctionnement sinéquanone de l’ascenseur social. Vraiment ? Est-ce aussi simple ? Peut-on s’élever au delà du plafond de verre social perché au-dessus de nos têtes ? Oui. Dans certains cas. Rarement. Comment ? Je ne suis pas sur qu’ils existe un procédé établi. Au contraire. Combien ont échoué pour que deux ou trois qui ont réussi ? Ceux là, celles-là ont peut-être atteint les meilleurs écoles, obtenu les meilleurs diplômes ou saisi les meilleurs postes, mais à quel prix ?
Je suis obsédée par cette idée de réussir. Peut-être parce que je sais que j’ai les moyens de l’atteindre. Parce que j’ai l’endurance, les diplômes, la volonté et un soutien indescriptible de parents qui veulent me voir réussir. Peut-être aussi parce que j’ai un gout de revanche, face à un système qui m’a brouillé, moi, la première de la classe, l’angoissée, la perfectionniste. J’ai travaillé plus que la moyenne, j’ai démultiplié les stages, les projets, les mandats, et pourtant … Arrivée sur le marché du travail, j’ai fait face à un mur: Pas suffisamment d’expérience. Vraiment ? S’agit-il d’expérience ou de diplôme ?
J’aime à penser que les choses changent. Que l’accès au savoir, démocratise la réussite sociale. Derrière les écrans de fumée, le savoir se propage en masse, pour le meilleur et le pire. Les tutos, les MOOC, les badges numériques fleurissent et permettent à tout un chacun de monter en compétence. Pourtant, pour connaitre le système universitaire en son coeur, cette démocratisation peine à être reconnue et légitimée. On préfère considérer ces nouvelles reconnaissance de compétences comme des diplômes au rabais, histoire de continuer à différencier les sachant et les autres.
Souvent, je fais la liste de ces compétences accumulées au grès des expériences; l’écriture par le blog, les textes, les poèmes; le montage, par les vidéos et podcast; l’esprit d’analyse, par les lectures, les documentaires, la veille … Toutes ces compétences qui ne sont pas reconnues par un diplôme dans mon Curriculum Vitae. Comme en second plan tout en étant pourtant tellement centrales dans ma vie, pour la professionnelle que je suis. J’écris cette évidence pour la revendiquer. Parce que je fais le souhait de pouvoir défendre ces compétences, acquises en auto-formation au même titre que toutes les autres. Avec la même légitimité.
Il serais intéressant de questionner ce qui fait un.e bon.ne candidat.e. Comment on classe les gens pour un poste. Les biais conscients et inconscients. Cherche t-on des gens comme nous ? Valorisons-nous des parcours ou des titres, des noms de diplômes, d’école ? Pourquoi certains profils ressortent-il sur le papier, avant même une rencontre, face à d’autres aux mêmes compétences et expériences ? Cela serait intéressant parce que cela en dirait long sur notre société du travail. Celle qui valorise les personnes actives. Qui dénigre les autres. Une société qui fait de notre travail notre valeur et de notre valeur notre travail.
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