Petite, je longeait les murs. A l’école surtout. Je me faisais toute petite, certainement pour essayer de disparaitre au yeux des autres. Je ne voulais pas de leurs regards, de leurs jugements, de leurs insultes. J’ai grandi. J’ai appris à marcher au milieu d’un trottoir, d’une cour, d’une salle. J’ai appris à prendre la parole et à défendre mes idées. J’ai appris à exister au milieu des autres, malgré cette affreuse impression quotidienne d’être plus seule encore lorsque je suis (mal) entourée. Pourtant, je continue de m’excuser d’exister. Je continue de remercier chaque intérêt qui m’est accordé. Je continue de demander pardon lorsque les autres me poussent. Illégitime.
« Allo maman ? Je ne te dérange pas ? ». C’est ainsi que commencent toutes mes conversations téléphoniques. Je m’assure d’abord de ne pas déranger. J’appelle pourtant mes proches, des gens que j’aime et qui m’aiment, pourtant, je pars d’abord du principe que mon appel est dérangeant pour eux et elles. Je n’explique pas ce comportement, à part par un manque cruel de confiance en moi. En réalité, la petite fille au fond du puit n’est pas si loin. Je me rappelle alors les efforts que je dois fournir pour garder la face: « Fake it until you make it ».
Chaque jour est un cadeau dont je mesure la chance. Alors, à chaque heure quatorze dont je peux croiser le regard, je remercie: 09h14: merci pour tout, je t’aime. 11h14: pour ma famille, comme les cinq doigts de la main. 14h14: pour demain, parce que je crois en notre planète et en notre humanité. 17h14: pour ce corps que je me réappropris. 22h14: pour ma santé, mes amours, mes envies. De longues liturgies de reconnaissance sous forme de tics infinis qui rythment mes journées et donne un sens. Après tout, pourquoi moi ?
Et si tout cela n’était qu’une mascarade ? Nous y avons forcément tous et toutes pensé un jour. Et si, nous n’étions que les pantins d’une pièce de théâtre à grande échelle, qui joue inlassable le fil d’une humanité en quête perpétuelle de sens. Cela expliquerait beaucoup de choses. D’abord, notre besoin continue de créer des règles pour structurer une société qui n’a qu’un seul but: les transgresser. Après tout, cette logique n’a de sens que si elle nourrit un scénario. Ensuite, notre besoin de comprendre: de poser des mots, d’intellectualiser. Alors que nous ne sommes que des bêtes. Enfin, notre soif de hiérarchie. Pour toujours être le faible et le fort de quelqu’un.
Cet exercice même auquel je m’attelle, celui de poser des mots sur mes maux, des phrases sur mes phases, des rimes sur mes rides, n’est qu’une énième justification à mon existence. Je ne suis pas bizarre, lisez ceci, il y a une explication logique à mon comportement; quel effort minable ! Mais je le fais pourtant parce que c’est comme ça que j’aime vivre ma vie, en trois temps: 1- rêveries anticipatrice (pour imaginer de potentiels scénarios avant de les vivre). 2- regard en biais (pour ne louper aucune des informations et codes clés donnés). 3- analyse nourricière (pour extraire le meilleur de chacune des expériences vécues). Cela manque de spontanéité mais c’est efficace.
« Ça va aller ». C’est un peu le crédo pour lequel je suis connus dans ma famille. Une façon de voir le voir à moitié plein et de rassurer tout le monde. Parce que si mes émotions sont difficile à gérer, celles des autres sont de véritables cataclysmes pour l’éponge émotionnelle que je suis suis. Alors, je rassure. C’est peut être la seule chose pour laquelle je ne m’excuserai jamais: le fait de prendre beaucoup pour éviter de la souffrance aux autres. C’est mon rôle. Ou en tout cas c’est le rôle que je me suis attribuée. Peut être qu’un jour c’est vers mois que l’on enverra un merci. En attendant, je suis ici.
Je cours derrière la reconnaissance. C’est pour cela que je m’investie autant depuis toujours: bénévole, présidente d’association, élue lycéenne, académique… C’est pour cela que je mène autant de projet: un blog, des podcasts, des projets d’écriture… C’est pour cela que j’enchaine les diplômes: un DUT, une licence, un Master, bientôt un second Master et une Thèse. Parce que je ne sais pas qui je suis et j’en suis désolée, mais j’ai toutes ces expériences et diplômes pour justifier mon existence. C’est déjà ça.
Je suis. Puisque Je et que j’écris, ici. Mais je ne sais pas encore pourquoi et j’en suis désolée, pardon. Je cherche inlassablement pourquoi cette chance m’a était donné, tout en la chérissant comme le plus beau des cadeaux, merci. Je vous promet qu’un jour je saurai et que surtout je l’assumerai. Qu’un jour je me sentirai légitime d’exister. Sans pardon, ni merci, juste dans la joie d’être en vie.
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