Lev tourna le dos à son amie sans un mot. Leur relation était en train de s’effriter et c’était en partie de la faute de Taylor. Elle avait conscience que ses actes avaient de lourdes conséquences et espérait que leur lien d’affect tiendrait, dans le cas contraire il finirait par disparaître, laissant un profond gouffre les envahir. Elle ne voulait pas le voir s’effacer, mais elle ne savait pas si elle pouvait parler à Lev de ses pensées et de tout ce qui lui arrivait. Elle n’aurait pas dû douter : le lien était puissant, sauf qu’elle n’était pas une théurgiste comme les autres. Elle était une marginale, changée à jamais par les expériences de la vie et celles que son père avait pratiquées sur elle. Au final, elle se demandait sincèrement si Lev était capable de supporter tout ça.
Elle soupira en arrivant devant les portes rouges du Conseil : qu’importe ce qu’ils lui voulaient, elle sentait que ça n’allait pas lui plaire. Elle entra, marcha jusqu’au centre et se tint en face des cinq sièges. Ils étaient tous là : sa mère, Lenka, lui gratifia de son regard le plus noir ; Andrej la dévora des yeux, trahissant son côté pervers ; Zdenka était assise bien droite, les mains jointes devant elle tandis que son visage fin et bien dessiné ne montrait aucune émotion ; Klement était fidèle à lui-même : perdu dans un autre univers, marmonnant à des personnes que lui seul était en capacité de voir. Puis Hektor, pour ne pas changer, affichait un visage fermé au regard dur. C’était en réalité qu’une façade, il essayait simplement de tout faire pour être accepté et respecté en tant que président.
- Merci d’être venue, Taylor.
- Je n’ai pas vraiment eu le choix…
Elle avait parlé si bas que personne n’aurait pu entendre, mais Klement laissa échapper un petit rire et lui fit un clin d’œil.
- La confrérie a annoncé les évaluations pour dans un mois, annonça Hektor.
- Je suis au courant.
Lenka lui lança un regard chargé d’éclairs, et Taylor sut qu’elle se retenait de faire un commentaire quant à l’insolence dont elle faisait preuve, mais c’était plus fort qu’elle : elle ne supportait aucune personne présente dans cette pièce, à l'exception de Klement.
- Qu'est-ce que je fais là ?
- Nous voulons que tu t’occupes de Roch.
- Qui ?
- Roch, le fils adoptif de Tomislav.
Elle réfléchit et un vague souvenir de lui fit surface, elle ne lui avait pas prêté attention depuis son arrivée, car il semblait totalement insignifiant.
- Navrée, je ne fais pas dans le baby-sitting.
Lenka fit claquer sa langue contre son palais, et Klement rit. Personne ne se souciait véritablement de lui ou ne prenait ses réactions au sérieux. C’était à se demander pourquoi il faisait partie du Conseil, au-delà de ses compétences en médecine.
- Nous voulons que tu l’entraînes pour les examens, reprit le président.
- Vous vous foutez de moi j’espère !
- Surveille ton langage ! la sermonna Andrej, devançant Hektor.
L’animosité entre les deux était pitoyable. Taylor était fatiguée de voir le Conseil être géré par des théurgistes tous plus incompétents les uns que les autres.
- Cette décision ne vient pas de nous, tu t’en doutes, répliqua sa mère avec sarcasme. Comment pourrait-on te confier un novice ? Tu serais capable de le corrompre.
- J’oubliais qu’en plus d’être un monstre, j’étais une espionne pour le compte de mon père.
Hektor leva la main avant que Lenka ne réplique.
- Tomislav a insisté pour que tu l’entraînes, alors c’est ce que tu feras.
- Pourquoi ? Vous n’avez aucune confiance en moi et je n’ai pas de temps à perdre avec un ignorant.
- Tu es la meilleure et Tomislav veut la meilleure pour Roch, alors tu exécutes nos ordres sans discuter. Est-ce bien compris ?
Taylor resta silencieuse, puis leur tourna le dos et quitta la pièce.
- TAYLOR ! la rappela à l’ordre Hektor.
Les portes se refermèrent et Taylor emprunta les escaliers pour finalement s’arrêter à mi-hauteur. Elle s’appuya au mur, passa sa main sur son visage et rit jaune : elle allait devoir apprendre à un ignorant les bases et l’entraîner pour le rendre apte au combat en un temps record, les semaines à venir allaient être particulièrement longues.
Des théurgistes descendirent et passèrent devant elle sans lui adresser un regard, mais ils turent leur discussion par peur. Elle serra les dents, épuisée d’être la bête noire de son peuple. Toutefois, aller les frapper ne mènerait à rien, ça ne ferait qu’affirmer ce qu’ils pensaient, alors elle respira profondément et desserra les poings, mais elle sentit une vive douleur : ses mains étaient devenues rouge vif et de petites cloques s’étaient formées à divers endroits, à croire qu’elle venait de poser volontairement ses mains au-dessus des flammes. Cette soudaine blessure vint s’ajouter à toutes les étrangetés des derniers jours : comme si elle était progressivement en train de changer.
Elle monta les marches quatre par quatre jusqu’à atteindre sa chambre, puis posa sa main brûlée sur la poignée et eut l’impression que celle-ci allait finir en cendre. Elle grimaça, puis quelqu’un l’appela et elle fit disparaître toute trace de douleur sur son visage.
Lev approcha l’air inquiet, mais Taylor n’avait aucune envie de parler, surtout qu’un vertige la saisit et que des taches noires apparurent devant ses yeux. Elle activa sa marque de soin, mais les brûlures ne guérirent pas.
- Taylor ?
Elle entendait la voix de son affect comme un écho provenant des profondeurs, alors qu’elle ressentait une sensation étrange : l’impression d’être séparée de son corps tout en y étant associée, comme si un feu ardent la dévorait petit à petit, et à mesure qu’il prenait du terrain la douleur augmentait. Son corps entier devint rouge vif et des cloques apparurent sous ses vêtements. Elle se retint de hurler : la douleur était atroce, une souffrance en rien comparable à celle des cicatrices de son dos.
Elle ne pouvait pas rester à la vue des théurgistes : elle activa sa marque de téléportation sous le regard totalement désemparé de Lev. Il voyait son amie semblait brûler devant lui et ne savait comment réagir. Taylor aurait voulu lui dire quelque, mais qu’elle-même ignorait ce qui se passait, la seule qu’elle pouvait faire été de rejoindre le seul endroit susceptible d’y trouver de l’aide..
Elle atterrit avec lourdeur sur le sol, puis rapidement la douleur s’intensifia au point de la faire hurler : les cloques laissèrent place à de véritables flammes qui léchèrent sa peau et l’enveloppèrent. Elle voulait que tout s’arrête, elle voulait mourir sous le poids de cette souffrance insoutenable. Puis elle sentit quelque chose se planter quelque part dans son corps et elle perdit connaissance en sentant s’atténuer la douleur.
LeConteur.fr | Qui sommes-nous ? | Nous contacter | Statistiques |
Découvrir Romans & nouvelles Fanfictions & oneshot Poèmes |
Foire aux questions Présentation & Mentions légales Conditions Générales d'Utilisation Partenaires |
Nous contacter Espace professionnels Un bug à signaler ? |
2780 histoires publiées 1267 membres inscrits Notre membre le plus récent est JeanAlbert |