Assise sur son lit, Loreila semblait avoir l'esprit ailleurs. Ces derniers temps, le stress la rongeait de plus en plus. Elle avait l'impression que l'univers était contre elle et faisait tout pour la mettre à terre.
Le lendemain était le 14 février. Le jour de l'amour. Pour la première fois depuis 22 ans, la jeune femme redoutait cette journée plus que tout. Soudain, son téléphone sonna. C'était sa mère.
-Allô ma chérie? Tu ne dors pas encore?
-Je vais bien, merci de demander. Et toi? Ironisa Loreila en s'efforçant d'être la plus naturelle possible.
-Haha c'est très drôle. Tu devrais être endormie maintenant. Demain est une journée très importante. D'ailleurs, est-ce que ton amoureux t'a dit où est-ce que vous allez passer la journée?
-Euh... non, pas vraiment.
-Va dormir maintenant,allez hop! Il faut que tu sois en forme demain.
En plus du stress, la jeune femme ressentit une affreuse culpabilité après cet appel. Elle avait encore menti à sa mère, et elle détestait ça . Depuis le 14 février 2048, tous les célibataires de 18 ans et plus disparaissaient mystérieusement le jour de la Saint-Valentin. Aucun d'entre eux n'a été retrouvé même 10 ans après. Loreila allait bientôt les rejoindre, car elle n'avait pas de partenaire, contrairement à ce qu'elle avait dit à ses proches. Dans quelques heures, elle allait disparaître sans même savoir où ni comment. Loreila se sentait lâche de les abandonner comme ça, elle leur devait des explications. Elle attrapa alors un bout de papier et un stylo, puis leur écrivit une lettre, comme à l'ancienne.
"Si vous lisez ces mots, c'est forcément parce que j'ai disparu. Et ça sera probablement le cas très bientôt. Je vous ai mentis. Je n'ai pas de partenaire avec qui passer la Saint-Valentin cette année... Je suis désolée de vous avoir caché la vérité. Je vous aime, prenez soin de vous. L.D♥️"
Elle posa la lettre sur sa coiffeuse puis alla se coucher, les joues ruisselantes de larmes.
La sonnette fit réveiller Loreila. Elle se releva d'un bond en se demandant qui pouvait bien venir chez elle aussi tôt un jour pareil. Lorsqu'elle passa devant la glace, elle aperçut ses yeux bouffis à force d'avoir pleuré la veille. Comment allait-elle ouvrir la porte avec une tête pareille?! Puis, elle se rappela que dans tous les cas, elle allait bientôt disparaître, alors son apparence n'avait plus aucune importance. Elle ouvrit la porte, mais il n'y avait plus personne. En revanche, un splendide bouquet de roses était posé sur le seuil, avec une lettre au beau milieu des fleurs. A la fois surprise et flattée, Loreila déplia le bout de papier. Le nom d'un restaurant et une heure étaient inscrits dessus, avec un petit cœur dessiné en dessous. Aucun nom, aucune initiale. Rien.
La jeune femme ne savait pas si elle devait etre heureuse d'avoir finalement eu un prétendant, et donc, de ne pas disparaitre, ou subjuguée qu'un inconnu l'ait invité le jour meme sans révéler son identité. Après quelques instants de réflexion, elle décida que la vie lui offrait une occasion unique et qu'elle ne devait surtout pas passer à côté.
Le moral soudain beaucoup plus élevé, elle passa le reste de la matinée à choisir quelle tenue porter, quelle coiffure faire et quel rouge à lèvre mettre. Lorsqu'elle fut enfin prête, elle sortit de chez elle et se dirigea vers le restaurant indiqué sur la lettre anonyme, excitée.
Arrivée à l'intérieur, elle remarqua tout de suite un charmant jeune homme installé au milieu. Il avait les cheveux noirs en bataille, les yeux bleus électriques et un corps parfaitement bien dessiné. Sa beauté pouvait faire fondre des glaciers. Lorsqu'il releva la tete vers Loreila et qu'un rayonnant sourire s'afficha sur son beau visage, la jeune femme sentit son coeur battre à une vitesse folle et des papillons lui chatouiller le ventre. Comment cela se faisait-il qu'un inconnu ayant la beauté d’une star de cinéma l'avait-il invité, elle, la femme la plus banale que la planète Terre portait? Elle respira un bon coup puis s'avança vers lui, les jambes flageolantes. Finalement, cette journée n'était pas aussi pourrie qu'elle ne le pensait.
Deux jours plus tard
L'appartement de Loreila Dupont grouillait de policiers et de membres de sa famille. Parmi eux se trouvait sa mère Sandra, qui ne cessait de pleurer dans les bras de son autre fille, Camille. Cette dernière pleurait aussi, mais elle essayait de garder la tête froide, au moins devant les inspecteurs de police.
- Madame Dupont, nous sommes vraiment désolés, mais tout prouve que votre fille n'entretenait pas de relation amoureuse, déclara l'un d'eux. Une lettre a été retrouvée sur sa coiffeuse, où elle a avoué qu'elle allait sûrement disparaître et qu'elle vous a menti en vous faisant croire qu'elle voyait quelqu'un.
- Ma fille n'aurait jamais pu faire ça! Jamais! Hurla Sandra à l'intention du policier. Montrez-moi cette lettre alors! Allez y j'attends!
- L'équipe de la police scientifique l'a emporté avec elle afin de l'étudier de plus près, je ne peux donc pas vous la montrer pour l'instant. Mais l'écriture est exactement la même que sur les fiches de révisions de votre fille. Il est donc peu probable que ça soit une autre qui l'a écrite et s'est fait passer pour elle.
- Non! Non non non! Ce n'est... Ce n'est pas possible...
Camille serra encore plus sa mère dans ses bras et lui demanda de se calmer, mais Sandra continua à crier et à traiter les policiers de bons à rien qui ne savaient pas faire leur travail comme il le fallait.
Pourtant, les enquêteurs étaient sûrs à 100% que la victime avait disparu comme des centaines d'autres célibataires ce 14 février, et qu'elle avait tout simplement caché la vérité à sa famille, honteuse. Ils avaient alors jugé l'affaire résolue et classée.
Au même moment, quelques kilomètres plus loin...
Loreila observait Aaron -si c'était vraiment son nom- s'avancer vers elle, impuissante. Le bel inconnu qui lui avait fait chavirer le cœur dès le premier instant était un psychopathe, et elle était sa proie. Il l'avait droguée et amenée dans une sorte de garage rempli d'appareils tranchants et empestant... le sang séché.
Il lui caressa le visage en la regardant d'un air impassible comme si elle était seulement un objet sans valeur sur lequel il allait se défouler.
- As-tu peur, Loreila chérie? Lui demanda-t-il en feintant d'être attristé.
Voyant qu'elle ne pouvait pas répondre à cause du bâillon qui lui avait mis sur la bouche, il éclata de rire.
- Ah oui c'est vrai! Tu ne peux pas parler... Ce n'est pas grave, ton corps me suffit, ma jolie.
Soudain, il sortit une lame de la manche de son sweat et lui écorcha la joue. Loreila sentit le sang chaud couler et poussa un gémissement de douleur.
- Quoi,déjà? Murmura Aaron en fronçant les sourcils. Ce n'est que le début, pourtant...
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