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volume 1, Chapitre 5 « Le voyage de la paix » volume 1, Chapitre 5

Thot étudiait presque religieusement le rouleau de papyrus étalé sous ses yeux, prenant mille précautions afin de ne pas l'abîmer. Il recopiait les informations pertinentes, avec plus de précisions du fait de l’évolution des connaissances. Il s’appliquait au mieux afin de retranscrire, le plus fidèlement possible et en prenant compte des éléments nouveaux, afin d’offrir à la postérité les informations les plus justes et détaillées possible. Il en était arrivé à un hiéroglyphe particulièrement complexe à reproduire quand…

- Ne me prends pas pour un imbécile ! lui parvint la si douce voix colérique de Seth. Tu sais très bien ce que je veux !

… lui faisant faire une rature sur le papyrus qu’il était en train de retranscrire, gâchant ainsi tout le travail accompli au cours de la matinée. D’une main, il froissa de rage son travail gâché tandis que de l’autre, de celle qui tenait le pinceau, il jeta son nécessaire à écriture sur le sol de son bureau. Il en avait assez ! Ce n’était pas le première fois que la dispute des deux prétendants au trône lui faisait faire ce genre de chose. Et ce ne serait malheureusement pas la dernière… Il essaya d'inspirer et d'expirer lentement, afin de s’efforcer de regagner son calme. Il ne voulait pas s’énerver à cause de ces deux imbéciles ! Il prit donc sur lui, essayant de garder son calme…

- Parce que tu penses que tu ferais un meilleur roi ? s’éleva la voix indignée d’Horus. Laisse moi rire ! Au bout du compte, tu ne régneras plus que sur des cadavres ! Car tu ne sais faire qu’une chose quand un opposant se fait connaître : le tuer ! Or, le peuple finira forcément par se soulever face à la tyrannie que tu ne manqueras pas d’exercer !

… mais cette dernière réplique fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase symbolique de la patience de Thot. Il en avait assez. Si ces deux enquiquineurs voulaient se prendre le bec au sujet de la succession, grand bien leur fasse, mais qu’ils le fassent loin de son bureau !

Se levant brusquement de son bureau, faisant ainsi s’envoler quelques feuilles de papyrus face à son mouvement soudain, il se dirigea d’un pas colérique vers la porte de son bureau. Quand il l’atteignit, il l’ouvrit violemment la faisant claquer avec force contre le mur et sursauter les deux imbéciles.

- Fermez-la et allez vous disputer ailleurs ! Il y en a qui essaient de travailler ici, ne vous en déplaise !

--oOo---oOo---oOo–

Horus contemplait pensivement le Nil depuis le rebord d’une fenêtre du palais du Conseil des Dieux. Un pli soucieux lui barrait le front, inquiet de l’éternel indécision du Conseil pour la stabilité du pays. Si seulement Seth avait été capable de devenir un bon souverain, il lui aurait cédé le pouvoir avec joie pour mettre fin à l’incertitude du devenir de l’Egypte. Mais, malheureusement, malgré tout l’amour qu’il pouvait éprouver envers son amant, il n'était pas dupe pour autant. Il savait que Seth ne serait pas un bon roi. Il en avait eu la preuve lors de sa prise de pouvoir. Il ne savait pas juguler sa violence, et sous son règne sanglant l’Egypte avait énormément souffert. Son oncle était bien trop violent, seul, il ne pouvait que mener le pays à sa ruine. Mais d’un autre côté, il comprenait également la réticence des autres Dieux à lui confier les pouvoirs. Il n’en disait rien, mais il était parfaitement conscient de ses propres faiblesses. Il savait que, si Seth était trop dur, lui risquait au contraire de se montrer trop doux. Horus était conscient de manquer d’expérience et d’aptitudes à régner, et, à la vérité, il ne souhaitait pas obtenir le trône. C’était sa mère, Isis, qui rêvait de le voir à la tête du pays. Lui ne voulait pas d’une responsabilité aussi écrasante. Mais il ne voulait pas non plus voir le chaos occasionné si son oncle venait à s’emparer du pouvoir. Donc il restait dans la course à la succession, même s’il ne désirait pas être roi. Car même s’il ne se pensait pas digne de régner, il pouvait en dire autant de son oncle. Et il n’y avait pas d’autres alternatives. Le roi ne pouvait être que lui ou son oncle. Sinon, cela entraînerait une guerre civile. Donc il ne désirait pas le trône. Mais, pour la sécurité du peuple et pour la stabilité de l’Egypte, il était prêt à endosser cette responsabilité qui lui faisait pourtant horreur. Car un roi se doit de se sacrifier pour le bien du pays. Ainsi est le poids de la politique.

Derrière lui, Seth arrivait d’un pas rageur, fulminant suite à la séance du Conseil qu’ils venaient de quitter tous les deux. Pour lui, c’était parfaitement clair, il était le seul choix possible mais les imbéciles du Conseil ne s’en rendaient pas compte. Son jeune neveu n’avait pas ce qu’il fallait pour régner. Certes il aimait ce jeune idiot, mais il était aussi lucide. Horus n’avait aucune expérience. Pire, il était bien trop à l’écoute de sa mère. A ce stade, autant couronner directement sa sœur car, dans l’ombre, il n’avait aucun doute quant au fait que ce serait elle qui prendrait les décisions. Car ne lui en déplaise, même si elle le cachait bien, Isis pouvait se montrer assez manipulatrice et Horus respectait toujours la volonté de sa mère.

Seth agrippa l’épaule de son neveu avant de le faire se lever et de le plaquer contre le mur à côté de la fenêtre, fulminant de rage. Horus se laissa faire, regardant juste son oncle avec un rien de résignation au fond des yeux. La dispute était inévitable, et il en était fatigué d’avance.

- Que puis-je faire pour toi, mon oncle ? demanda malgré tout le plus jeune.

La poigne de Seth devint plus ferme sur l’épaule de son vis-à-vis, le faisant grimacer légèrement d’inconfort.

- Ne me prends pas pour un imbécile ! grinça le dieu du désert entre ses dents. Tu sais très bien ce que je veux !

Horus poussa un léger soupir, ce qui augmenta l’intensité de la colère que ressentait déjà son oncle qui se fit plus menaçant encore.

- Et toi, mon oncle, lui expliqua calmement son neveu, tu devrais savoir depuis le temps que c’est inutile. Je ne renoncerais pas à mon droit de naissance.

Et ce, même s’il aurait voulu le faire. Mais il ne pouvait pas se le permettre, ce qu’il ne dirait jamais à son amant, bien sûr. Amant qui, à ses mots, lui agrippa violemment une poignée de plumes sur la tête afin de le forcer à le regarder dans les yeux. S’approchant jusqu’à être nez à nez avec son jeune rival.

- Un jeune pantin n’est pas digne de s'asseoir sur le trône, persifla mesquinement Seth sur un ton dangereusement bas.

Piqué au vif, Horus le repoussa violemment et commença lui aussi à s’énerver.

- Parce que tu penses que tu ferais un meilleur roi ? s’indigna-t-il. Laisse moi rire ! Au bout du compte, tu ne régneras plus que sur des cadavres ! Car tu ne sais faire qu’une chose quand un opposant se fait connaître : le tuer ! Or, le peuple finira forcément par se soulever face à la tyrannie que tu ne manqueras pas d’exercer !

Suite à cette réplique, Seth eut à peine le temps d’ouvrir la bouche pour répliquer qu’une porte s’ouvrit violemment un peu plus loin dans le couloir, révélant le visage ulcéré de Thot sur lequel on voyait une veine battre rageusement sur sa tempe.

- Fermez-là et allez vous disputer ailleurs ! Il y en a qui essaient de travailler ici ne vous en déplaise !

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Bès sautillait joyeusement dans le couloir, sifflotant tout en réfléchissant à la prochaine farce qu’il pourrait bien. Il s’arrêta net en entendant la voix de Thot :

- Fermez-là et allez vous disputer ailleurs ! Il y en a qui essaient de travailler ici ne vous en déplaise !

Intrigué, il s’approcha discrètement afin d'épier la scène. C’était la première fois qu’il entendait Thot crier, et plus encore, c’était la première fois qu’il l’entendait utiliser un tel langage. Il était donc extrêmement curieux de savoir ce qui a pu provoquer l’ire de ce Dieu pourtant si calme habituellement. Il se sentit même un peu vexé. Lui n’avait jamais réussi ne serait-ce qu’à le faire froncer les sourcils, alors crier, n’en parlons pas !

Quand il vit Seth et Horus partir chacun d’un côté opposé sous le regard noir de Thot, Bès commença à comprendre ce qui avait pu se passer, surtout en voyant le bureau de Thot grand ouvert avec quelques uns de ses précieux papyrus éparpillé au sol. Et c’est là qu’il eut une illumination. Il se frotta les mains en ricanant d’un air jovialement sadique. Désormais, il savait quelle serait sa prochaine blague. Il ne lui manquait plus qu’à convaincre son futur partenaire de crime mais ça, il ne se faisait pas trop de soucis : au vu de son état d’énervement, l’idée d'éloigner les deux zigotos ne pourrait que se révéler séduisante pour le dieu de la sagesse.

Bès s’efforça de prendre une expression innocente et sérieuse et se dirigea vers Thot. Il devait battre le fer tant qu’il était encore chaud. Traduction : il devait profiter de l’état d’énervement de Thot pour obtenir sa promesse d’assistance pour sa prochaine blague. Tout en jouant assez finement pour ne pas se prendre un retour de flamme du dragon écumant de rage qu’était présentement Thot. Mais sans ce paramètre pour pimenter un peu la future négociation, où serait donc le plaisir ? Il savourait d’avance le jeu dangereux qu’il était sur le point de commencer.

Thot allait retourner dans son bureau pour pouvoir, enfin, travailler en paix quand il vit Bès venir vers lui avec un air faussement innocent qui ne lui allait pas du tout. Allons bon, que lui voulait cet insupportable farceur maintenant ? Il s’efforça de ne pas faire connaître son exaspération à la nuisance en puissance qui venait vers lui et attendit de savoir ce qu’il lui voulait. Surtout, ne lui montrer son état d’esprit sous aucun prétexte, sinon tel un requin sur sa proie, le dieu malicieux ne le lâcherait plus ! Il espérait juste ne pas être victime de l’une de ses blagues car il n’était vraiment pas d’humeur à traiter avec cet insupportable personnage !

- Thot, commença d’une voix mielleuse Bès, mon cher Thot, j’aurais une proposition à te faire.

Méfiant, mais ne voyant pour le moment pas de raisons de le rembarrer, le dieu de la sagesse fit signe à son interlocuteur de continuer.

- Nul ne peut se vanter de maîtriser les arcanes de la magie mieux que toi, poursuivit le dieu malicieux, Ô grand Dieu de la Connaissance et de la Sagesse, n’est-ce pas ?

Thot plissa des yeux, sa méfiance à son paroxysme. Qu'est-ce que l’autre lui voulait pour ainsi le brosser dans le sens du poil ? Il fit néanmoins signe à l’autre de poursuivre, intrigué malgré lui.

- J’ai eu une idée lumineuse, que dis-je, merveilleuse et qui ne pourra que t’apporter une immense satisfaction. Mais pour pouvoir la mettre en application, j’aurais besoin de ton aide, Ô Puissant parmi les Puissants.

Thot haussa un sourcil, sceptique quant au fait que Bès puisse vraiment avoir une idée susceptible de lui plaire. L’autre dieu prit cette expression pour un encouragement à continuer.

- C’est en fait très simple : je voudrais que tu ensorcelles un objet afin d’envoyer Seth et Horus dans le monde des mortels…

- Hors de question ! réagit de suite Thot.

- Sous une apparence humaine et sans leurs pouvoirs, continua Bès en ignorant l’interruption de Thot. Ainsi, ils ne pourront pas revenir ici par leurs propres moyens et dépendront entièrement de ton bon vouloir pour revenir.

- Je t’ai dit non, s’agaça Thot.

- Ainsi, poursuit l’autre dieu en ne prenant toujours pas en considération les protestations de son interlocuteur, j’aurais le loisir de pouvoir faire une blague d’un tout autre niveau par rapport à d’habitude…

- C'est censé me convaincre d’accepter ?

- Et toi, tu pourras poursuivre ton travail loin des cris des deux rivaux. Qu’en dis-tu ?

Bès fit un sourire charmeur à la fin de sa proposition, tendant la main à son interlocuteur. Sûr de sa victoire.

Le premier réflexe de Thot fut de réitérer son refus, mais il repensa à la matinée de travail qu’il venait de voir gâcher à cause des deux idiots. Il devait bien admettre que ne plus les avoir dans les pattes pendant quelques temps ne pourrait qu’être un soulagement. Ne réfléchissant pas plus, il serra la main de l’autre dieu.

- Marché conclu, dirent-ils d’une même voix tout en se serrant la main.

- Je compte sur toi pour l’objet, je me chargerais du reste.

Après cette dernière réplique de Bès, il retira sa main de la poigne de l’autre dieu et s’éloigna en sifflotant d’un air guilleret, satisfait d’avoir pu convaincre Thot de lui porter assistance. Pendant que Bès s’éloignait en sautillant et sifflotant, Thot regarda sa propre main d’un air pensif, se demandant s’il ne venait pas de vendre son âme au diable pour un peu de tranquillité. Et c’est ainsi que naquit la légende du Pacte avec le Diable.

--oOo---oOo---oOo–

Intrigué, Horus retournait entre ses mains une petite statuette en argile en se demandant ce qu’elle était censée représenter. Dans un coin de sa tête, il se posait aussi la question de qui avait bien pu la poser sur SON rebord de fenêtre. Tous savaient qu’il aimait s'asseoir là pour réfléchir tout en ayant vu sur le Nil. Peut-être devrait-il songer à trouver un autre coin de méditation, car Seth venait assez régulièrement le retrouver ici pour se disputer avec lui. Et Thot disait vrai : ce couloir menait au bureau de travail de plusieurs Dieux qui, ainsi, étaient régulièrement dérangés à cause des intentions belliqueuses du dieu du désert.

D’ailleurs, en parlant du chacal, on en voyait la queue. Seth s’approcha de l’autre dieu dans la visible intention de poursuivre la dispute qui avait été interrompue quelques jours plus tôt par Thot. Horus en soupira d’avance, las. Depuis quelque temps, sa relation avec son amant était extrêmement tendue, ce qui était loin de lui plaire. Avant d’ouvrir la bouche, Seth vit la statuette que son neveu tenait dans ses mains et voulut la voir de plus près, intrigué malgré lui. Mais à peine eut-il posé le doigt dessus qu’un tourbillon de magie les entoura, son jeune amant et lui. Quand il se dissipa, il ne resta plus que la statuette par terre là où s’étaient trouvés les deux dieux auparavant. Ils avaient disparu.

--oOo---oOo---oOo–

Quand le tourbillon de magie les relâcha, les deux dieux virent qu’ils ne se trouvaient plus au palais. Pire, ils ne semblaient même plus se trouver en Egypte. Ils avaient atterri dans des ruines d’une allure inconnue, assez haut au-dessus du sol. En contrebas, ils voyaient une foule de gens avec d’étranges habits. Ils étaient vraisemblablement dans le Monde des Vivants. Mais pas en Egypte. La végétation qu’ils pouvaient voir au-delà des ruines ne ressemblaient en rien de ce qu’ils connaissaient. Et l’apparence des mortels était assez étrange et disparate. Ils se regardèrent l’un l’autre. Découvrant ainsi qu’ils n’avaient plus leur apparence divine, mais qu’ils ressemblaient à des mortels. Mortels vêtus de pagne, ce qui serait loin de passer inaperçu auprès de la faune locale.

- Putain, éructa Seth, c’est quoi encore cette blague ?!? (ne se doutant pas qu’il n’était pas loin de la vérité, mais incapable de penser que le coupable puisse être Bès, le sachant pas assez puissant pour un tel sortilège).

Pendant que l’autre dieu s’énervait, Horus sentit poindre un soupçon d’inquiétude. Il ne savait pas vraiment ce qu’il était supposé faire. Devait-il élucider le mystère de la statuette (qui avait elle-même disparu) ou devrait-il plutôt se concentrer sur un moyen de rentrer ? A tout hasard, il essaya de faire appel à ses pouvoirs afin de reprendre son apparence divine. Ce fut un échec. L’inquiétude prit un peu plus d’ampleur. Il réitéra sa tentative. Mais le résultat demeura inchangé. Il essaya de faire appel à ses pouvoirs pour d’autres choses. Mais il n’obtint pas plus de résultat. Il sentit une sueur froide dévaler son dos. Il ne pouvait plus se servir de ses pouvoirs. Il était devenu un humain. Il releva la tête, cherchant son oncle du regard. Dans ses yeux, pouvait se lire une profonde détresse. Il se sentait impuissant, faible. Il avait peur.

Sentant que quelque chose n’allait pas avec son amant, Seth se calma. Il dirigea toute son attention sur le plus jeune. En voyant la détresse de l’autre, il sentit grandir en lui un élan protecteur. Il prit donc l’autre dieu dans ses bras et essaya de le réconforter. Mais cela ne changea rien. Horus continua de paniquer, sa respiration se fit sifflante. C’était la première qu’il se sentait aussi faible et démuni. Il se raccrocha désespérément à son oncle, avide du réconfort qu’il voulait bien lui offrir.

- Qu’est-ce qu’il y a ? s’inquiéta le plus vieux.

Horus enfouit sa tête dans le cou de Seth, tremblant violemment.

- Mes pouvoirs…, laissa-t-il échapper d’une voix étouffée.

Seth resserra son étreinte, protecteur. Mais il ne comprenait pas.

- Quoi, tes pouvoirs ?

Horus se mit à sangloter avec désespoir, resserrant son étreinte autour du plus vieux.

- J’ai perdu mes pouvoirs, souffla–il.

Seth se raidit. Il resserra son étreinte protectrice sur le plus jeune, puis essaya de faire appel à ses propres pouvoirs. Il dut se rendre à l’évidence. Tout comme Horus, il avait lui aussi perdu ses pouvoirs.

--oOo---oOo---oOo–

Après avoir réussi à calmer son neveu devenu hystérique, Seth en vint à une conclusion simple. Ils ne pourraient pas rentrer chez eux. Pas par leurs propres moyens en tout cas. Ils n’avaient qu’une chose à faire, prendre leur mal en patience en attendant que quelqu’un chez eux remarque leur absence et vienne les chercher. Cette réalisation eut le don d’assombrir son humeur. Mais il prit sur lui afin de ne pas le montrer à Horus. Son amant était déjà suffisamment perturbé sans en plus devoir le gérer, lui et son caractère assez merdique. Par contre, ne sachant pas quand les autres dieux se rendraient compte de leur absence (ils avaient plutôt intérêt à le remarquer rapidement sinon, quand il rentrerait, il leur ferait payer cet affront !), Seth se dit qu’il serait peut-être mieux d’essayer de se vêtir à la mode des autochtones afin d’essayer de se fondre dans la masse et de ne pas trop se faire remarquer. Et puis (essayons de voir le bon côté des choses, grinça-t-il mentalement), ce serait l’occasion d’apaiser les tensions avec son amant et de profiter un peu de sa présence. Mieux vaut voir toute cette mésaventure comme des vacances, acquiesça-t-il pour lui-même. Bon, maintenant, il serait temps de trouver de quoi passer inaperçu.

Tout en pensant cela, il vit passer deux jeunes hommes pas loin des buissons dans lesquels Horus et lui s’étaient cachés. Il se glissa discrètement derrière les deux humains et les assomma promptement avant de les dévêtir, ne laissant que leurs caleçons. Il mit l’une des tenues et revint auprès de son neveu avec sa trouvaille.

--oOo---oOo---oOo–

Seth trouva que ses étranges habits allaient étonnement bien à Horus, le faisant paraître plus jeune et plus vulnérable, nourrissant son sentiment protecteur à son égard. Par contre, pour lui-même, il se trouva tout à fait ridicule : le haut était trop serré, le pantalon était trop lâche sur ses hanches, dévoilant le haut de ses fesses nues. Mais maintenant qu’il y pensait, c’est vrai que le morceau de tissu qu’il avait laissé pour couvrir la nudité des deux garçons était visible sous le pantalon qu’il s’était approprié. Par contre, concernant Horus, les vêtements (bien qu’un peu grands) semblaient tout de même plus ou moins lui aller. Mais tant pis, il faudrait bien qu’il s’en contente. Après tout, en tirant un peu sur le haut, cela pouvait cacher un peu la catastrophe. Et il passait bien plus inaperçu que s’ils avaient gardé leur pagne.

Le plus vieux passa un bras par-dessus les épaules de son cadet (comme il voyait certains mortels faire) et déambula avec lui au milieu de la foule anonyme. Certains d’entre eux parlaient dans une étrange petite chose noir ou grise ou blanche, marchant d’un air pressé tout en regardant un étrange bracelet autour de leur poignet. D’autres flânaient paresseusement, seul ou en groupe. Riant ou en silence. A côté, sur une chemin gris et surnaturellement plat, fonçaient des monstres étranges dans lesquels avaient été avalés des mortels qui semblaient continuer à poursuivre leur vie, ne s’inquiétant pas de servir de repas à d’étranges créatures.

Seth commença à avoir un peu faim et attrapa une pomme présente sur un étal avant de poursuivre sa promenade.

- Eh ! l'interpella un mortel furieux de derrière l’étal. Et mon argent ?

- Plait-il ? laissa échapper le dieu du désert du bout des lèvres.

Le mortel sortit de derrière l’étal en relevant ses manches d’un air menaçant. Il tendit une main vers le dieu incognito.

- Vous avez pris une pomme mais il faut la payer !

Seth pencha la tête sur le côté et regarda son interlocuteur d’un air interrogatif.

- Je ne vois pas où tu veux en venir. Me réclamerais-tu de l’argent ?

Tout en posant sa question, le dieu prit un air confus. Il ne comprenait pas pourquoi ce mortel lui demandait de l’argent. Il était un dieu, il pouvait prendre ce qu’il voulait aux mortels et ils n’avaient pas à lui réclamer quoique ce soit !

Sentant venir la catastrophe, Horus prit la pomme et la rendit au marchand tout en retenant par la taille Seth avec son autre bras.

- Excusez-le monsieur, s’interposa–t-il rapidement, mon ami n’a aucune manière. Nous n’avons pas de quoi payer sur nous actuellement, je vous rends donc votre bien. Et je m’excuse encore de la gêne occasionnée.

Le dieu du désert, n’appréciant pas de voir son faucon s'aplatir ainsi en face d’un humain en oubliant son statut de dieu, le repoussa et commença à s’énerver.

- Qu’est-ce que ça signifie ? Pourquoi réagis-tu ainsi face à cet inférieur, Horus ?

Son neveu se tourna vivement vers lui et l’embrassa brusquement, faisant taire les protestations à cause de la surprise.

- Tais-toi, lui chuchota-il à l’oreille, tu ne te rends pas compte de la situation délicate dans laquelle tu nous mets. A leurs yeux, nous ne sommes pas des dieux. Tu risques de nous attirer des ennuis. Donc je t’en supplie, tais-toi.

Quand il eut fini de parler, Horus se détacha de son oncle, s’excusa à nouveau auprès du marchand puis il s’éloigna hâtivement en entraînant Seth derrière lui. Priant intérieurement pour qu’ils rentrent chez eux avant qu’une catastrophe ne survienne.

A son grand soulagement, un tourbillon de magie familier les entoura. Ils étaient rentrés à la maison. Le risque d’une catastrophe était donc écarté. Par contre, il espérait que Seth continuerait à se montrer bien disposé à son égard. Il devait avouer, non sans honte, qu’il avait pris goût au côté surprotecteur de son amant et qu’il serait attristé d’en être privé.


Texte publié par Miss Lune, 26 mai 2024 à 15h19
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