Extrait du journal d'Archibald de Roncépine
Je suis seul dans ma bibliothèque. L’odeur de l’encens que j’ai allumé envahit toute la pièce. Mais même cette fragrance douce ne parvient pas à calmer mon esprit aux abois. Cette attente est insupportable. Edmond est parti ce matin, après s’être assuré que je n’interviendrai pas dans le procédé. Comme si j’allais laisser mon fils mourir ! Toutefois j’ai dû mal à ne pas succomber à la terreur : et si ces rituels le transformaient en monstre ? Le privaient de toute conscience ? Si je le perdais malgré tout ? …
Je pensais qu’écrire ces questions les rendraient moins obsédantes : j’avais tort. Ce soir, même le spectacle des Monts Dorés s’enflammant sous les rayons rougeoyant du soleil couchant ne m’émerveille pas. Aldric est dans cette chambre, peut-être déjà mort ou bien corrompu par les arts impies de ce mage. Et je ne peux rien y faire.
Les paroles de mon frère ne peuvent quitter mon esprit : « Aldric doit vivre. Son existence est la clé de la survie du Duché. S’il meurt, notre traité avec le Bastion du Verre sera caduc. Et alors qu’en sera-t-il de nous ? Laisseras-tu le Duché asservi par les mages élémentaires une nouvelle fois ? » La haine avait envahi mon cœur à ces mots : comment pouvait-il faire preuve de tant de froideur envers son propre fils ? Comment pouvait-il manipuler mes sentiments, à moi son propre frère ? Évidemment que j’ai conscience de notre obligation : le lien entre nos deux familles ne doit pas se rompre, il est du devoir de la famille ducale d’y veiller, c’est écrit noir sur blanc dans ce maudit traité.
Une part de moi sait bien qu’il a raison. Il est le Duc ; son peuple passe en priorité. C’est pour cela aussi que notre père, il y a trente ans, a accepté d’enchainer notre famille à celle qui régnait sur le Bastion du Verre et que moi, le frère du Duc, ait dû participer à cet édifice en épousant Maryah. Une alliance qui profite aux deux royaumes. Une alliance qui nous a permis d’échapper au joug de la magie et de la contrôler.
Ah ! Maryah ! Comme tu me manques ! Comme Aldric te ressemble ! Si tu l’avais vu, si fier, si vif et si vigoureux avant son accident. Je chéris chaque minute passée avec ton fils et je l’aime comme le mien, même si son sang est celui de mon frère. Je ne peux prendre ma rapière et pourfendre le mal qui l’emporte. Cet accident l’a laissé dans un tel état ! Un corps affaibli et désarticulé, un esprit déjà perdu dans les lmbes… Le voir ainsi, gisant sur son lit, immobile et silencieux était une torture.
Et ce mage… Je ne connais pas son nom. De toute façon je suis censé l’oublier dès qu’il aura terminé son rituel. Sa peau bleutée, ses yeux créuléens si vifs et étincelants, sa silhouette à la fois fine et robuste m’interpellent. Il en émane une telle puissance. Les habitants du Bastion du Verre sont tellement différents de nous. Je ne peux qu’espérer qu’il tienne ses promesses et qu’il me rende mon fils comme il était avant son accident. Je ne peux qu’espérer qu’un jour Aldric ne deviendra pas victime de la haine du peuple de La Rosace envers la magie.
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