Appuyé contre le mur de l’entrepôt, dans l’ombre du bâtiment, le Sigilite scrutait l’entrée du large hangar, illuminée à intervalles réguliers par la lumière du phare qui guidait les bateaux jusqu’aux quais du port d’Argentlune : c’était une immense lanterne qui tournait sur elle-même, grâce à un mécanisme ingénieux. On l’appelait un gyrophare.
Le lieu appartenait à Grégoire Valronn, un antiquaire soupçonné de trafic de grimoires. La magie étant sévèrement contrôlée dans le Duché, il revenait aux agents du Sigile des Arcanes de traquer et de punir toute personne qui ne respectait pas les lois à ce sujet.
Grégoire Valronn avait beau être un homme respecté et influent, il succomberait lui aussi sous le couperet de la justice, à la seule condition que Sirian trouve des preuves de ses crimes. Il savait qu’il faisait preuve de témérité en fouillant l’entrepôt sans mandat officiel. Le Sigile s’apprêtait à abandonner les charges. Il avait pourtant vu dans son esprit qu’il était coupable. Une impression psychique ne pouvait être acceptée devant la cour de justice du Sigile, il avait donc besoin de preuves tangibles.
La nuit était glaciale et très sombre. Il s’emmitoufla davantage dans sa cape. Quelques minutes plus tard, l’antiquaire quitta le bâtiment et verrouilla la porte. Puis il descendit la rue en direction de la cité. Le Sigilite attendit quelques minutes puis traversa la rue d’un pas rapide, en prenant ses outils de crochetage accrochés à sa ceinture.
Arrivé près de la porte, il ferma les yeux et étendit ses sens: rassuré de ne sentir aucune présence dans le bâtiment silencieux, il crocheta rapidement la serrure, ouvrit la porte et se glissa à l’intérieur, tel un fantôme.
Il connaissait déjà les lieux, s’y étant rendu officiellement dans le cadre de l’enquête, avec l’un de ses collègues. Ils n’avaient rien trouvé de compromettant, mais il avait bien l’intention de remédier à cela. Seul il pourrait utiliser ses capacités beaucoup plus efficacement.
Il traversa la petite pièce, meublée d’un bureau, de quelques étagères et d’un meuble de rangement, prit une lanterne posée sur l’un des meubles et l’alluma avec un allume-feu. Puis il poussa la porte qui menait au hangar. La salle obscure s’étendait sur un seul niveau. Des poutres en bois s’élançaient jusqu’au plafond vitré. Chacune d’elles portait une lanterne éteinte. Entre elles des compartiments étaient séparés les uns des autres par des cloisons de bois. Des caisses marquées du sigle de l’entreprise de Valronn étaient empilées à l’intérieur.
Sirian se concentra et les vrilles de son esprit s’épanouirent autour de lui. La première fois qu’il était venu , il avait senti que quelque chose était caché ici, mais l’impression était diffuse et parasitée par les pensées des gens qui l’entouraient. Il inspira profondément et ferma les yeux.
Là. Sous ses pieds. Des émanations magiques, faibles mais bien réelles. Cet endroit devait contenir une cave. Il ouvrit les yeux. L’entrepôt était grand, et il savait que quelqu’un risquait de revenir, malgré l’heure tardive. Cependant, il vérifia méticuleusement le plancher de bois à la recherche d’une trappe ou d’un mécanisme.
Face au compartiment le plus proche du bureau, il repéra des traces étranges sur le sol : les lattes du planchers brillaient davantage que les autres, comme si elles avaient été cirées récemment. Il s’agenouilla, enleva son gant gauche et les effleura doucement : il sentit des aspérités régulières qui s’étendaient sur une longueur de cinq ou six mètres ; cachées par la couche de vernis, elles étaient invisibles.
Il se releva et entra dans le compartiment. Mu par une intuition, il frappa sur les caisses les plus proches et eut un petit rictus de satisfaction lorsqu’elle sonnèrent creux. Il en remonta la rangée et s’insinua dans l’espace étroit entre le mur et elles. Il l’inspecta et une sorte de glyphe gravé dans la pierre attira son attention : il appuya dessus et aussitôt entendit un grondement sourd.
En se retournant, il vit l’ensemble de la première rangée de caisses se décaler vers la travée centrale, dévoilant un escalier de pierre. L’esprit aux aguets, il leva la lanterne et emprunta les quelques marches qui s’enfonçaient dans le sol rocheux. La lumière dévoila progressivement une petite pièce, taillée dans la roche, d’une hauteur de deux mètres tout au plus. Elle ne contenait qu’une seule table en bois. Sur celle-ci était posé un petit coffret, sans aucun signe distinctif.
Il posa la lanterne et souleva le couvercle. Il n’était pas verrouillé. A l’intérieur, il découvrit un épais codex à la couverture de cuir couleur crème, ancienne si on en jugeait par les craquelures qui le parcouraient. L’effleurer suffit à provoquer des picotements sur le bout de ses doigts, qui remontèrent le long de ses nerfs. Il ouvrit l’œil de son esprit et celui-ci fut assailli par des effluves magiques, étincelles colorées qui s’agitaient en tout sens. Fermant son esprit, il éloigna la main du grimoire.
Il n’allait certainement pas laisser cet objet dangereux dans cet endroit. Il enfila à nouveau son gant, prit le livre et referma la boite. Il remonta et scella à nouveau la cache. Il prit un grand soin à tout laisser comme il l’avait trouvé. Il ne voulait pas que Grégoire Valronn ou ses sbires se rendent compte qu’il était venu, en tout cas pas avant que les agents du Sigile ne l’aient arrêté. Ils auraient ensuite tout le loisir de lui arracher toutes les informations dont ils avaient besoin.
Après s’être assuré que personne n’était en embuscade à l’extérieur, il quitta le bâtiment, verrouilla la porte. L’esprit aux aguets, il s’empressa de quitter le quartier du port, pour rejoindre le Sigile des Arcanes.
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