J’ai le souffle court. La tête sur le point d’exploser, je tente de reprendre ma respiration. Je crois que j’ai trop chaud, non, trop froid. Je claque des dents en me retenant au mur derrière moi. Je vois des étoiles, des planètes, un trou noir. Plus mon souffle accélère, plus des pensées noirs, sans aucun sens, envahissent mon esprit: la guerre, la fin du monde, les virus, partout. Je vais mourir. Je vais mourir de peur. Je vais mourir d’angoisse. Je vais mourir de vivre.
Avant qu’elle arrive, la crise se faisait déjà pressentir. Depuis quelques jours les plaques de psoriasis avaient envahie mon corps; sur le ventre, les seins, les coudes, derrière mes oreilles, sur mon cuire chevelu. L’angoisse ressortait par tous les pores de ma peau. Je rongeait mes ongles en continu aussi. Parfois allant jusque’à manger les peaux dépassant de ceux-ci. En continu, je triturais, touchais, mordillais, mes doigts, mes pulls, mes cheveux. Au rythme de mes jambes s’agitant dans des spasmes non contrôlés, je faisait claquer mes phalanges, sentais mes cheveux.
L’anxiété est partout. Dans mes jours et dans mes nuits. Le soir, je m’endors avec des angoisses sans queue ni tête; persuadée que je dois me tenir prête, au cas ou je devrais fuir dans la nuit, réfléchissant à l’endroit ou sont positionnées mes affaires essentielles. Le matin, je me réveille la tête lourde, le point serré et le crâne déjà tambourinant; au grès de mes cauchemars passés, entre tranchés boueuses, viol insoutenable et ouragan ravageur.
Parce que la nuit n’est que la continuité de ce film sans fin, n’existant que dans ma tête. Je tente pourtant de placer des pensées positives avant de m’enrouler dans mes draps moelleux et protecteurs, mais je me fais vite rattraper. L’inconscient n’a besoin de personne pour rappeler à l’entièreté du corps que l’esprit souffre, recroquevillé dans des peurs envahissantes, vagues incontrôlables. Les points serrés, les dents grinçantes, les bras et jambes agités: mes nuits sont des champs de bataille, guidés par un esprit remplie de failles.
Le jour, les angoisses se nourrissent. Pour cela, il suffit d’allumer nos écrans de misère, portes grandes ouvertes vers les informations continues recrachant les violences et misères de notre monde. Parce que notre humanité n’est qu’une suite infinie de crises, ou en tout cas, c’est ce qui nous est racontée d’elle. Et pour moi comme pour beaucoup d’autres c’est devenu incontrôlable: j’ouvre les médias nationaux et internationaux, je clique sur les notifications, je regarde les vidéos, j’écoute les podcasts, toujours avec la même angoisse d’y découvrir une nouvelle raison d’avoir peur.
Je suis mon propre bourreau. Un monstre qui se complet à se faire peur, se nourrissant des misères, des crises, des guerres, des malheurs présents et à venir. Un monstre qui s’auto-détruit en vivant par procuration les horreurs du monde et de son humanités.
Parce que pourtant, je suis en sécurité. Je suis au chaud. Je mange à ma faim. J’ai un travaille pour subvenir à mes besoins. J’ai une famille que j’aime et qui m’aime. Je ne sais pas de quoi sera fait demain et je ne suis pas vraiment certaine de savoir d’ou je viens ou qui je suis, mais rien de nouveau finalement. C’est le corps même de l’être humain d’être dans l’incertitude. Alors pourquoi cette anxiété d’être et de vivre ?
Je n’ai pas toujours été comme ça, même si je me suis toujours senti à part. J’ai toujours su que j’étais mon propre monstre, mais avant le monstre restait dans sa cage. Aujourd’hui, le monstre a pris le pas sur la femme. Il la mange, la dévore, l’empêche de respirer et donc de vivre. J’ai peur qu’un jour le monstre prenne toute la place et que seule la folie soit maitre de mon esprit. Alors, le corps aura beau crier par tous les pores, ces cris silencieux resterons sans réponse.
Je m’assois finalement. Ramenant mes genoux contre mes seins, les entourant de mes bras. Je pose ma tête en leur coeur et commence à me balancer doucement: devant, derrière, devant, derrière, devant, derrière. Je tente de caler ma respiration à ce rythme de balançoire: inspirer, expirer, inspirer, expirer, inspirer, expirer. Mon estomac se dénoue. Mes épaules de relâchent. Mes yeux se ferment. Ma tête se vide. Je pense à un coucher de soleil. J’imagine un baiser. J’espère l’océan immense. Les tambourins introductifs du Boléro de Ravel me viennent en tête, fendant le bruyant silence. Lumière au bout du tunnel.
La crise passe. Les angoisse restent. L’espoir perdure.
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