Bane ouvrit la porte de son appartement, trouvant les lieux étonnement silencieux. Pourtant, il ne lui semblait pas que sa colocataire avait prévu une sortie. Une sueur froide lui dégoulina le long du dos. Elle avait un mauvais pressentiment. Elle ne savait pas ce que mijotait son amie, mais elle se doutait que cette histoire ne pouvait que mal se finir.

Bane entra, fermant la porte derrière elle. Le bruit de la serrure quand elle la referma lui sembla de mauvais augure. Et le silence, quasi surnaturel, des lieux n’était pas là pour la rassurer. L’habitation semblait plongée dans les ténèbres, la seule lumière, ténue, provenant du salon.

Avalant sa salive, mal à l’aise, la jeune femme se dirigea vers la seule lueur qui venait percer les ténèbres qui semblaient s’être emparé des lieux. Là, dans le salon, elle vit une scène qui lui sembla improbable. Morgane était assise en tailleur au milieu d’un cercle de runes, habillé de sa tenue de cérémonie druidique. Elle était entourée d’une multitude de bougies, psalmodiant d’une voix plus grave que son timbre habituel, comme en transe.

Un sentiment d’effroi se saisit de Bane. Elle ignorait ce que manigançait son amie, mais la vision qu’elle en avait en tant que témoin extérieur lui donnait la chair de poule. Elle se frotta les bras, transie de froid. Une brume s’éleva paresseusement du sol, surnaturelle. Une voix d’outre-tombe s’en éleva.

- Pourquoi m’avoir réveillé de mon sommeil éternel ?

A ces mots, Bane se tendit. Nom d’une gargouille ! Morgane avait invoqué un fantôme ! Etait-elle folle ?!? Maintenant, Bane était sûre que cette histoire finirait mal. Ces trucs-là étaient bien trop compliqués à gérer ! Et qui allait devoir réparer les pots cassés à la fin ? C’était bibi ! Elle avait la migraine d’avance face à la paperasse qu’elle devrait très certainement remplir suite à cet accident !

Pendant la prise de conscience de Bane, les paupières de Morgane avaient tressailli puis, doucement, s’étaient ouvertes sur les yeux anormalement noirs de la plantureuse rousse. Ne répondant pas à l’esprit, elle continua à psalmodier. Au fil de ses incantations, le revenant prenait de plus en plus de consistance, abandonnant son aspect fantomatique. Bientôt, apparut devant les jeunes femmes un homme plutôt séduisant, finement musclé, aussi roux que Morgane et avec de très beaux yeux verts.

C’est là que Bane reconnut l’individu que son amie avait convoqué. C’était Mordred ! Là, la Banshee sut pourquoi son amie avait invoqué ce fantôme-là en particulier. Enfin, si on pouvait le qualifier comme tel. L’homme séduisant qui leur faisait face semblait tout à fait humain, personne n’aurait pu soupçonner qu’il était mort encore quelques minutes plus tôt.

Mordred. Une autre victime des actions égoïstes de Merlin. Ce chevalier fidèle qui avait injustement été accusé de félonie. Le propre fils de Morgane. Après plusieurs siècles à se morfondre, à tempêter, à crier à l’injustice, la magicienne semblait avoir finalement trouvé l’envie de se venger des exactions de l’égoïste mage qui avait été son mentor avant de la trahir et de lui ravir ses pouvoirs.

Une question se posait néanmoins. Qu’avait donc fait Merlin de si terrible pour que Morgane veuille désormais réclamer vengeance ? Elle qui, malgré sa profonde détestation du Mage, semblait davantage décidée à le rayer de sa vie et faire comme s’il n’existait pas ? Un sentiment de révolte prit place dans le cœur de Bane. Qu’est-ce que ce scélérat avait osé faire, cette fois, à Morgane ?