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volume 1, Chapitre 7 « L'effet papillon (Amel M.) » volume 1, Chapitre 7

L’effet Papillon

de Amel M.

TW : Mort

L’air était doux en cette jolie fin de journée. Le coucher de soleil éclatant arrivait à m’apaiser. C’était l’une des meilleures vues qu’il m’était donné de regarder. J’adorais cet endroit, surtout pour la tranquillité qu’il dégageait, ainsi que l’apaisement que cela me faisait ressentir. La bonne odeur des fleurs, ainsi que le bruit de l’eau qui coulait doucement, m’enfermait dans une bulle de sérénité. C’est à ce moment-là qu’un papillon vola gracieusement devant moi. Je me risquai à lever mon bras dans sa direction. Il se déposa dans le creux de ma main, ses ailes d’un magnifique bleu indigo battaient avec moins de rapidité. C’était étrange et pourtant j’appréciais le moment présent. Ce genre de scénario était autant fantastique qu’invraisemblable. Rapidement, le papillon fut rejoint par quelques autres compères.

Ces papillons... Ils étaient beaux et gracieux. L’éclat de leur couleur bleu azur m’avait attiré instantanément. Ils étaient si... agréables à regarder. D’autant plus que ces bestioles me fascinaient toujours, la liberté qu’ils avaient à s’envoler aussi paisiblement... Au début, leurs contacts avec ma peau me chatouillaient. Puis, les machaons prenaient plus d’ampleur au fil du temps. Ils étaient tant nombreux sur mes bras découverts que je les chassai juste avec un battement de main. C’était peine perdue, les papillons s’étaient pour ainsi dire multipliés sur moi. Et un sentiment d’insécurité m’envahit. J’avais peur, je ne comprenais pas ce qu’il m’arrivait, pourquoi il y avait autant de papillons d’un coup ? Ces multitudes d’insectes s’obstinaient à vouloir se coller à moi. Tandis que j’étais emprisonné dans une phobie sans nom, j’avais cette sensation d’être piqué par d’innombrables aiguilles en même temps. Mes bras me grattaient fortement, la douleur que je ressentais était si horrible que j’en gémissais de douleur. Quelle ne fut pas ma frayeur en découvrant que ces bestioles étaient littéralement en train de me sucer le sang. Je frottai énergiquement mes bras, mais rien n’y fit, ils n’arrêtaient pas de me pomper mon hémoglobine. Plus le temps passait, plus je perdais de ma lucidité. Ma tête tournait férocement, le paysage se déformait devant mes yeux... Mais j’essayais tant bien que mal de combattre cette soudaine fatigue. Ma respiration se faisait plus saccadée, ce changement inattendu de mon manque de souffle m’inquiétait réellement. Je commençais seulement à réaliser la gravité de la situation : j’allais mourir. J’étais en train d’agoniser à cause de ces foutus papillons carnivores et avides de toujours plus de sang. Pour moi, c’était encore inconcevable de se l’avouer vraiment. Mon corps tout entier tremblotait, il persévérait malgré moi à lutter contre cette folie meurtrière... Mais mon esprit lui cédait plus facilement, mes paupières se refermaient progressivement. Je commençais vraiment à dérailler. Le sang que je perdais était si important que me je sentais faible et sans plus l’ombre d’une quelconque énergie.

— Reste encore avec nous quelques secondes, c’est bientôt fini Kyran.

La voix féminine et hautaine, qui me parvint sur un ton lyrique, me fit récupérer vivement de ma lucidité.

— Qui êtes-vous ? Comment connaissez-vous mon prénom ?

Avec beaucoup de mal, j’arrivai à distinguer sa silhouette dans la noirceur de cette soirée. Le lampadaire au-dessus de nos têtes me faisait voir son sourire diabolique. Ses lèvres maquillées de rouge rubis s’étiraient d’un grand rictus inquiétant. Je découvris avec stupeur des crocs bien aiguisés. Dans son dos, la dame avait de très grandes ailes de papillon. Cela me captivait tant que je pouvais décrire parfaitement leur nuance. Un magenta foncé qui descendait en dégradé sur du rose. Elle battait des ailes gracieusement et avec lenteur. L’aura qu’elle dégageait était maléfique et morose, cela m'épouvantait véritablement.

— Il faut bien que je m'informe sur mes prochaines victimes. Connaitre précisément ton quotidien, et quand sera venu le moment propice pour te rendre une petite visite, répondait-elle.

Tandis que je rassemblais mes dernières forces afin de me débattre, un rire sinistre s’échappa de mon interlocutrice. J’en frissonnai d’horreur.

À ce moment-là, je ne pouvais m’empêcher de cogiter sur les circonstances dans lesquelles je me trouvais.

Et si je n’avais pas décidé de m’installer dans le calme à cet endroit ce soir ?

L’effet papillon est la conséquence de nos actes... De ce que je sais, c’est ce qui impacte le futur en faisant nos propres choix, les prochaines situations que l’on pourrait potentiellement vivre. C’est ce qui pourrait faire pencher la balance si on choisit la droite ou la gauche par exemple... On associe souvent cela à un battement d’ailes, parce qu’il suffit d’un rien pour que tout bascule. Puisque toutes les petites décisions ont toujours de grandes conséquences.

C’était un sujet assez complexe, je ne savais même pas pourquoi je me lance là-dedans. Je me retrouvai face à une situation irréaliste, et je ne cessai de me poser des questions. Allais-je franchement vraiment mourir ce soir... ?

Cela résonnait comme un regret, mais n’était-ce pas là une réaction ordinaire d’un être humain ? Se demander où l’on se serait retrouvé si on avait pris une autre décision. Dans tous les cas, est-ce que je me serais quand même fait agresser ?

— Ne t’en fais pas, ton supplice ne durera pas. Tu finiras comme ces papillons, esclave de mes ordres.

Je n’avais jamais été un grand battant, j’avais constamment eu du mal à m’imposer. Renoncer maintenant ferait-il de moi un perdant ? Quel autre moyen avais-je en ma possession ? J’étais seulement l’une de ses nombreuses victimes, j’avais eu la malchance de la croiser sur ma route. Non... Il était hors de question que je reste un raté toute ma vie, je méritais davantage que de me morfondre sur mon pitoyable sort... Je refusais de rester dans cette prison, de devenir quelqu’un comme elle sans essayer de faire quelque chose. Je voulais me battre pour ma vie, je ne pouvais pas laisser mon destin dépendre de qui que ce soit.

Une vive douleur transperçait mon corps, je refermai mes mains sur ces insectes maudits.

— Je te l’ai déjà dit, arrête de bouger, ordonna-t-elle.

Mon dos me faisait extrêmement mal, j’avais l’impression de me déchirer en deux. Je ne savais pas si je pourrais résister longtemps comme ça... C’était affligeant mais je me levai tout de même. Et ce malgré le poids de mon corps qui devenait de plus en plus lourd.

Mon ennemie pestait tout en s’avançant vers moi. Elle n’approuvait pas ma soudaine envie de se révolter. Je passai outre son irritation. Ce fut avec force que la femme empoigna mon visage de sa main. Ses ongles s’enfonçaient dans ma chair, du sang glissait le long de ses doigts. La douleur commençait à devenir insoutenable, tout comme son regard de glace.

— Le processus de transformation est bientôt fini... Tu ne devrais pas tarder à te transformer. Reste tranquille.

Je me confrontai à elle avec le désir de poursuivre ma vie. En dépit de sa colère, ma persévérance la faisait doucement rigoler. Cette dame était tant sinistre que je ne pouvais pas me permettre d'être à ses bottes pour le restant de mes jours.

Ma tête me faisait horriblement souffrir, et les picotements dans tout mon corps s’amplifièrent ardemment. Elle lâcha son emprise sur moi, tandis que je gardais les mains sur mon crâne. Un sifflement retentissait avec férocité dans ma tête, j’en criai de souffrance. Mon mal-être devenait un tel supplice que je ne pouvais plus ignorer. Mon martyre continuait avec un mal de dents puissant qui irradiait dans tout le visage. Les papillons s’envolaient afin de se mettre derrière leur dangereuse reine.

Il me fallut quelques instants pour reprendre connaissance. J’étais agenouillé à terre, la douleur comme seule pensée.

— Il y a peu de personnes qui auraient réussi à tenir jusque-là, tu sais. C’est l’instinct de survie, c’est soit tu meurs, soit tu te transformes...

Je relevai le visage vers elle, ses yeux s’illuminaient d’un rouge sang menaçant. Malgré cette expression sombre, son regard brûlait d’une grande curiosité. J’avais l’impression de la fasciner.

— Obéis-moi.

Je ne ressentais rien... J’étais vide d’émotion, vide de l’intérieur. Mes blessures récentes me faisaient encore du mal. Je ne comprenais pas le sens de sa phrase, et surtout ce qu’elle attendait à présent de moi.

— Kyran !

J’attrapai avec force son cou. Le geste la surprit, elle ne s’attendait pas à ce que je me rebelle une seconde fois. Mais là c'était différent, je sentais une grande force émaner de moi. Je percevais facilement son incompréhension à échouer à me soumettre. Et ce fut grâce à cette réaction que j’arrivai à resserrer mon étreinte sur sa gorge. Bien sûr, elle essaya de s’en défaire, mais en vain. Ce fut comme si j’absorbais sa puissance sans le souhaiter. Son visage crispé et soucieux ne m’arrêta pas dans mon acte. Je voulais la voir souffrir autant que ce que j’avais pu ressentir plus tôt. J’entendais les battements de son cœur devenir moins réguliers... La voir mourir de ma main me procurait une satisfaction que je n’avais dès lors encore jamais ressentie.

— C’est... Impossible, affirma-t-elle faiblement.

— Ce sont les conséquences de tes actes qui t’ont poussée à prendre ce genre de décision.

Son dernier souffle s’accompagna d’une larme de sang. Ses pupilles exprimèrent une profonde crainte, avant de sombrer lentement. Son corps inerte tomba lourdement à terre. Je restai un moment devant elle, à réfléchir aux conséquences que cela impliquait.

Les machaons tournaient à présent autour de moi, ils brillaient d’une scintillante lumière bleutée. Je regardai mes bras, intrigué : les différentes morsures disparaissaient. Je sentis des battements d’ailes dans mon dos. Je compris que je venais de tuer leur reine, et que j’avais désormais récupéré sa place...

J’avançai devant cette jolie vue qui surplombait la ville. Je me sentais plus vivant que jamais. Dans cette pénombre, tout me parvenait très clairement. Cependant, j’avais soif. Soudainement rempli d’un nouveau sentiment, où toutes mes émotions n’existaient plus, j’étais avide de sang. L'hémoglobine m’attirait brusquement, et je savais déjà ce que je devais faire... Il fallait que je devienne comme elle, être encore plus fort qu’elle.

— Boum, l’effet papillon...


Texte publié par Collectif PV, 5 octobre 2022 à 21h46
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