Elle expira de tout son être. Enfin! Elle venait de poser pied à terre dans l’endroit de ses rêves. Morimont. Un lieu magique, qui existait pourtant bel et bien. Un endroit qu’elle avait imaginé mille et une fois. Cet endroit hors du temps accueillait chaque année lors d’un week-end un festival de danse folklorique; ou « folk » pour les intimes. Celia n’avait encore jamais eu l’occasion d’y aller. Après des mois de distanciation sociale et quelques imprévus, c’était l’arrivée tant attendue dans ce château hors-pair.

Enfin, château, plutôt ce qu’il en restait! Ses ruines se dressaient fièrement dans une clairière. Il n’existait plus de tour, plus de chapelle, juste un tas de pierres. Cependant, un visiteur un peu curieux aurait très bien pu imaginer la lourde herse en fer forgé se lever pour accueillir les quelques villageois pour la journée.

A son entrée dans les vestiges du Morimont, la jeune femme posa sa main sur le mur encore frais par la rosée, en guide de salutation et respect. Elle fit signe à sa joyeuse équipe de la suivre. Ils venaient y passer du temps libre à jouer aux cartes et écouter les musiciens. Le long voyage et la réjouissance de ces trois jours de danses infinies les avaient bien fatigués. Pourtant, leur arrivée dans ces ruines les revigorait en un instant. Attablée à combattre avec acharnement ses adversaires avec son tas de cartes, Celia n’avait pas remarqué sa présence en haut du mur de pierre.

Depuis son assise en équilibre sur les pierres calcaire, Gabriel sourit légèrement. L’indifférence totale du groupe à saluer les êtres déjà présents dans le château l’avait amusé. « Bien le bonjour » n’aurait pas été de trop. Lui qui avait l’habitude solitaire, il admirait le groupe des cinq joueurs de cartes. Ils se bataillaient comme si leur vie en dépendait. Ses yeux bleu perçant s’attardaient sur la joueuse la plus fervente. Elle était entrain de revendiquer la mise posée sur la table par son concurrent. Elle dégageait une forte énergie passionnée, ce qui était d’autant plus contrastant avec l’indifférence qu’elle portait au groupe d’inconnus du haut du mur dont il faisait partie.

S’accrochant au rebord pour garantir sa stabilité, il ferma les yeux. Il ne pensait qu’à une seule chose maintenant. La même raison de leur venue à tous et toutes. Reconnecter avec leur corps, écouter les mélodies d’un autre temps, partager un moment hors de la réalité. Il fallait pourtant patienter jusqu’au crépuscule pour le début des festivités.