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Le soleil se couchait quand Améthyste arriva à la maison d’Isidore. Elle espérait qu’il n’était pas trop tard. Elle déposa son vélo contre le muret. Xylia était accrochée à son épaule et regardait cet endroit inconnu avec de grands yeux curieux.

La jeune fille secoua la clochette accrochée au-dessus du portail pour annoncer son arrivée. La luminosité baissait, mais les chauds rayons du soleil couchant illuminaient le village d’une lueur mordorée. Le ciel prenait une couleur bleu-marine.

La porte s’ouvrit au bout d’une minute et Isidore apparut. Il lui sourit et lui fit signe d’entrer. Améthyste obéit. En s’avançant , elle passa à côté de son étrange bicyclette et posa dessus un regard admiratif. Isidore s’effaça pour la laisser entrer. Elle pénétra dans un petit salon confortable, qui ressemblait beaucoup au sien.

Un feu brûlait dans la cheminée et il y faisait bon. Un homme d’âge mûr, à la

forte carrure, se leva de son fauteuil à son approche.

- Voici mon père, expliqua Isidore en fermant la porte.

Améthyste lui tendit la main.

- Enchanté, monsieur. Je m’appelle Améthyste. J’ai proposé à votre fils de lui faire visiter le village mais malheureusement je n’ai pas pu me libérer plus tôt. Mais je tenais tout de même à me présenter.

L’homme sourit.

- Enchanté, jeune fille. Isidore m’avait prévenu. Je peux vous offrir du thé ?

- Avec plaisir.

Il lui sourit en réponse et s’éloigna dans la petite cuisine. Améthyste s’assit et Isidore la rejoignit.

- Merci d’être passée, fit-il, avec un air un peu gêné.

- C’est normal. J’espère que vous vous habituez à notre village.

- Mon père est content de revenir dans cet endroit : il y a passé son enfance.

- Et toi ?

- Disons que j’aimais bien la ville où nous habitions…

Améthyste sourit mais ne répondit pas. Son père revint à ce moment-là et déposa un plateau avec deux tasses, une théière et une assiette de friandises.

- Je vais vous laisser discuter. Il faut que j’aille me reposer, je suis fatigué.

Effectivement, l’homme avait le teint pâle et les traits tirés. Il semblait malade. Améthyste fronça les sourcils mais n’osa rien dire. Isidore se leva et rejoignit son père.

- Papa, je me disais que je pouvais emmener Améthyste faire une petite promenade avec le zeppelin…

- Il fait nuit, Isidore. Ce n’est pas le bon moment. Une autre fois.

- Mais …

- J’ai dit non, Isidore, renchérit l’homme, avec un regard sévère.

Isidore baissa la tête, visiblement déçu. Son père lui chuchota « bonne nuit » et disparut dans le couloir menant vers sa chambre. Le garçon revint vers Améthyste, qui servait le thé pour se donner une contenance.

- Ce n’est pas grave. On pourra faire ça une autre fois.

Il ne répondit rien. Cela faisait tellement longtemps qu’il voulait voler avec son zeppelin.

Soudain, il planta ses yeux dans ceux de la jeune fille.

- Non. On va aller faire un tour. C’est une belle nuit : je suis sûr que c’est sans danger.

Améthyste cligna des yeux devant la témérité soudaine de son nouvel ami.

- Tu es sûr ?

Il hocha la tête. Elle sentit la même témérité couler dans ses veines. Xylia paraissait aussi excitée qu’elle à cette idée.

- D’accord, fit-elle en se levant.

Ils sortirent silencieusement dans le jardin. Le zeppelin attendait sagement dans l’allée. Le soleil avait disparu mais la lune l’avait remplacé. Le ciel bleu-marine était une invitation à se promener. Isidore commença à pousser l’engin pendant qu’Améthyste ouvrait le portail. En passant, elle prit le panier de son propre vélo.

- Pour Xylia, fit-elle devant le regard interrogateur du garçon.

Ils entrainèrent le zeppelin à l’extérieur du village, en haut d’une petit colline.

Isidore vérifia la pression de l’air dans le ballon, puis alluma la lanterne aux multiples facettes.

Il enfourcha le vélo et Améthyste se glissa derrière lui. Xylia s’installa dans le panier qu’elle avait accroché au guidon ; le pilote ajusta ses lunettes, enclencha deux petits leviers et se mit à pédaler avec force sur la pente douce de la colline. Le zeppelin s’envola doucement dans le ciel bleu-marine de ce début de nuit. Il n’y avait pas de vent ; l’air doux et frais leur caressait les joues alors qu’ils flottaient tranquillement au-dessus des collines et des chemins. Xylia battait de ses minuscules ailes, ravie de pouvoir enfin voler. Isidore aperçut sa maison. Il n’en revenait pas de sa témérité. Jamais il n’avait désobéi à son père. Les facettes de la lanterne laissaient des empreintes lumineuses devant eux.

Ils se promenèrent ainsi pendant une demi-heure, sans jamais trop s’éloigner, puis Isidore les ramena sur la petite colline. Améthyste, les joues rosées par l’air frais, était ravie de cette petite promenade. Après avoir dégonflé le ballon, ils firent rouler l’engin jusqu’au garage. Lorsqu’ils en sortirent en chuchotant joyeusement, le bruit de la porte d’entrée qui s’ouvrait les figea instantanément. Ils se retournèrent et virent le père d’Isidore qui les regardait d’un air sévère. Le jeune homme baissa les yeux.

Améthyste se garda bien d’intervenir : elle remercia son nouvel ami pour la promenade, salua son père et s’empressa de reprendre sa bicyclette pour rentrer chez elle. Elle espérait que la punition pour la témérité du jeune homme ne serait pas trop sévère. L’homme la salua avec chaleur et entraina son fils dans la maison dont il ferma la porte.


Texte publié par Feydra, 18 août 2022 à 13h26
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