Les immeubles avaient disparu derrière le rideau de pluie. Le ciel noir pesait sur la ville et transformait le jour en nuit. Les seules sources de lumière étaient les lueurs jaunes des lumignons dans la rue et des lampes dans les logements. Cette après-midi-là, un orage avait éclaté et des éclairs déchiraient les cieux, dévoilant de leurs lueurs aveuglantes certains détails de la ville.
A l’abri dans son appartement du cinquième étage, Syl regardait par la fenêtre. C’était un spectacle grandiose, un spectacle de fin du monde, mais il y était totalement indifférent. Au bout de quelques minutes, il finit par se détourner et regarda l’horloge accrochée au mur : le temps avançait inexorablement. Il poussa un soupir et retourna en boitant s’asseoir à son bureau, face à son écran, seule source de lumière dans l’obscurité de son appartement. La page blanche le narguait depuis le matin. Il avait encore deux jours pour écrire une nouvelle pour son éditeur. Mais l’inspiration semblait l’avoir quitté.
Il se frotta les yeux, commença à taper une phrase puis l’effaça en appuyant rageusement sur son clavier. Les mots venaient si facilement avant l’accident. Et maintenant c’était devenu une souffrance, à tel point qu’il avait failli tout abandonner.
S’il n’y avait pas eu Esmée pour l’encourager et l’aimer, il l’aurait fait. Son inspiration avait disparu en même temps que sa magie, le jour où il avait été heurté par cette voiture. Les longs mois de convalescence à l’hôpital semblaient avoir détruit la petite étincelle qui le reliait au monde féérique. Ou bien était-ce la faute de la ville elle-même ?
Quand ils étaient arrivés, Esmée et lui, après leur diplôme à l’académie de magie, ils avaient été émerveillés par la grande cité moderne et technologique : ils y avaient vu de la beauté, ils y avaient vu leur avenir. Après tout c’était leur choix d’habiter et de travailler dans la capitale de l’Empire, là où la magie avait créé la technologie. Esmée y avait vu une opportunité de développer sa Technomagie et Syl l’y avait suivie, car, après tout, il pouvait écrire n’importe où.
Un mouvement attira son attention loin de ses souvenirs douloureux : Flocon venait de sauter sur son bureau. Assis juste à côté de son écran, il braquait ses yeux d’un jaune profond droit sur lui. Il sentit aussi un frottement contre sa jambe accompagné du roucoulement caractéristique de Xen. Nyx ne devait pas être bien loin. Il savait qu’ils étaient là pour le réconforter, lui donner du courage. Mais cela le laissa indifférent. Fermant les yeux, il se prit la tête dans les mains.
Un bruit de porte qui s’ouvre et se ferme le fit sortir de léthargie. Il cligna des yeux et regarda l’heure sur son écran : cela faisait bien une heure qu’il était resté là sans bouger. Il avait dû s’endormir. Un bruit de pas le fit se retourner : Esmée entra dans la pièce, trempée. Elle avait enlevé son manteau et ses chaussures dans l’entrée. Les chats se précipitèrent immédiatement à sa rencontre, pour s’arrêter nets à quelques centimètres de leur maitresse, le nez frémissant.
Syl fronça les sourcils et se leva. Esmée restait immobile et regardait son époux avec un sourire gêné.
- Tu trembles de froid, réalisa-t-il.
Il attrapa un plaid sur le canapé et le déposa sur les épaules de sa bien-aimée. Se faisant, il entraperçut une chose étrange dans ses bras. Il baissa les yeux pour mieux voir et comprit la réaction de leurs chats : un petit animal était pelotonné entre les bras d’Esmée. Syl prit doucement la petite créature : elle était minuscule et tremblait, ses grands yeux violets étaient écarquillés ; elle était très sale, mais on pouvait deviner que son pelage était de couleur fuchsia et qu’elle avait des embryons d’ailes sur le dos.
- Mais… mais c’est un … balbutia-t-il stupéfait.
Esmée hocha la tête.
- Un chat-fée, oui.
Syl le caressa, émerveillé, son sentiment d’indifférence à tout disparu.
- Dans cette ville, comment est-ce possible ?
- Je peux te raconter, si tu veux. Mais d’abord occupons-nous de cette petite bête.
La dite petite bête s’était pelotonnée dans ses bras et s’était endormie. Ses tremblements avaient cessé. Il la caressa doucement.
Deux heures plus tard, le chat-fée, après avoir été lavé, prenait un bon repas, en compagnie des trois familiers, encore méfiants. Syl était devant son écran et en train de raconter l’histoire du petit chat-fée retrouvé dans une benne à ordure, une après-midi d’orage.
A l’extérieur, une lumière vive commençait à traverser les nuages qu’un vent fort dispersait. En quelques minutes, on aperçut le soleil jaune orangé, haut dans le ciel, qui, juste avant de disparaitre à l’horizon au profit de la nuit, illumina la ville et ses environs.
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