Kalia, Forêt du Montana, Etats Unis, Dimension terrienne, 10 septembre 2018
Je regardais la carcasse à mes pieds sans un mot. La lune était pleine et éclairait le bois d’une douce lueur blanche qui rendait le tout argenté. Les immenses sapins se mélangeaient au séquoias. Il n'était pas si étonnant de trouver un animal mort au milieu d’une forêt, surtout dans ce genre de forêt où de gros prédateurs vivaient. Mais la mort de celui-ci était suspect . J’étais sur la bonne piste. Je m’accroupis pour l’examiner de plus près. C’était un cerf, une proie rapide et plutôt difficile à atteindre pour un prédateur seul. Mais ce que je traquais ne semblait pas avoir eu la moindre difficulté à lui ôter la vie. Il avait lacéré l’abdomen de l’animal avec des accoups qui avaient arraché les bord de la plaie de manière irrégulière. J'écartais les bords en sang et fut surprise par la chaleur de la peau. Le sang avait eu le temps de coaguler mais il ne devait pas être mort depuis longtemps. Au vu des organes que j’avais en vue et les autres cadavres que j’avais pu examiner, il ne manquait que le cœur à nouveau.
Ça faisait trois semaines que je traquais ce monstre. C’était tout un troupeau au départ et ils faisaient des morts par dizaine sur leur passage. J’en avais tué plus de la moitié au début de la nuit avec quelques acolytes. Le reste avait été éliminé petit à petit les jours précédents, les plus faibles au départ, souvent les jeunes ou les blessés. Les minotaures n’étaient pas des cibles faciles à traquer seul. Ils avaient une puissance brute incroyable, une peau épaisse, difficile à percer surtout pour des armes à distances, des cornes aussi solides que de l’acier et une vitesse de pointe de près de 40 km/h. Il était impossible de les attaquer de front, cependant la plupart d’entre eux avait une intelligence limitée et ne savaient pas nager.
Il ne restait qu’un survivant, l’alpha. Il avait délaissé tout son troupeau entre mes mains et celles de mes acolytes sans un seul regard en arrière. Ils les avaient amené à tuer, à devenir des cibles pour les dieux et ils les avaient abandonnés. ça me répugnait plus que le sang qu’avait dû faire couler le reste de sa meute. Heureusement pour nous, après avoir goûté à autant de sang, il était presque impossible à ce genre de monstre de s'arrêter et encore une fois il nous laissait une piste toute fraîche à suivre.
Je savais que mes yeux verts s'étaient mis à luire de pouvoir. Je sentais ma magie couler dans mes veines avec l'excitation de la traque. J’analysais la scène sous mes yeux évaluant le chemin qu’il aurait pris, sa vitesse, son amplitude de mouvement, sa force, son endurance et l’état d’esprit dans lequel il se trouvait. Tout cela je pouvais l’obtenir grâce à mon expérience. J’étais une traqueuse depuis mon plus jeune âge et être la fille d’Artémis aidait beaucoup dans ce genre de cas. Petit à petit j’enregistrais les informations, les définissaient à partir de brindilles cassées, de taches de sang laissées.
- Kalia ?
Je me relevais en retenant un sursaut essuyant mes mains sanglantes sur mon jeans C’était mauvais si je commençais à oublier mon environnement. Je regardais en arrière et aperçu mon accompagnateur. Sa peau teck luisait d’un brun sombre sous le clair de la lune. Ses yeux noirs naviguaient entre le cerf et moi plusieurs fois avant de rester bloqué dans mes yeux verts. Il avait un sourire lupin sur le visage qui m'agaçait au plus haut point.
Je m'éloignai de l’animal mort pour l’approcher. Cheveyo était un métamorphe, l’alpha des métamorphes d’amérique, ce qui faisait de lui l’heureux responsable de quelques centaines d'âmes. Chose que je ne lui enviais pour rien au monde. J’avais déjà la responsabilité de mes deux enfants et de Gabriel et ça me suffisait amplement.
Il attacha ses longs cheveux noir corbeau qui avait dut être détacher dut à sa transformation récente. Il ne portait qu’un simple jean usé laissant apercevoir des muscles saillants et naturels.
- Il a juste pris le coeur, comme pour les précédents. Il a dû arracher les bois quand il l’a attrapé. déclarais-je en montrant celles-ci quelques mètres plus loin. Il resta silencieux et reprit :
- Aria et Iria ont trouvé des traces au nord.
Je me redressais et m’enfonçais dans le bois vers le nord.
- Il n’est pas loin ! Le corps était encore chaud. Mettons nous en route.
- On peut l’avoir à trois. ça fait trop de jours que tu n’as pas dormi et tu n’as pas mangé de la journée. Repose toi, nous te rejoindrons à l’aube pour te faire un rapport.
- Je dirige cette mission alors il est hors de question que je me repose sur vous ! Je ne suis pas le genre de chef à laisser des vies sous sa responsabilité se sacrifier pour mon propre petit confort !
Mais il n’avait pas tort. J’étais épuisée et depuis quelques heures mon corps me le montrait par des crampes et des courbatures. Ma vigilance avait aussi beaucoup trop baissé à mon goût. Je me dirigeais vers le nord et j'aperçu les traces de sang. Mais quelque chose n’allait pas, quelque chose me gênait, c'était trop facile. Je remontais mon sac à dos sur mon épaule et j’entendis Cheveyo m’emboiter le pas avec un soupire.
- Tu marches depuis des heures, j’ai senti ta douleur plusieurs fois lors de notre traque. Un chef blessé est un poids pour son équipe. Reposes toi.
- Cheveyo, je ne suis pas une gamine. Il n’en reste qu’un. Ensuite nous rentrerons.
Cheveyo me lança un regard amusé et reprit alors qu’il accélérait le pas me dépassant sans aucun effort. En même temps avec ses deux mètres de haut et mon mètre soixante dix la différence était assez importante pour que je doive faire deux pas alors qu’il n’en faisait qu’un.
- A mes yeux tu en est une, ma reine.
Je serrais les dents sans répondre. ce qu’il disait n’était pas faux, comme chaque paroles qu’il prononçait. Il maîtrisait l’art de la vérité. Cheveyo avait presque deux mille cinq cent ans, alors ma petite trentaine faisait pâle figure. Après tout, les métamorphes cessaient de vieillir à leurs vingt-cinq ans, jusqu’à leur mort. Du moins la plupart d’entre eux. Victorieux, il me dépassa s’enfonçant plus profondément dans le bois. Je m'arrêtais silencieuse. Nous continuions notre route, tournant le dos à la ville, aux humains.
- Aria et Iria ont suivi une piste ?
- Non, elles sont tombées sur les traces…
D’un même geste nous fîmes demi-tour. Nous dévalions le bois. Ils avaient bien plus d’avance maintenant. Nous l’avions sous estimé. Il n’était pas juste aveuglé par sa rage et son envie de sang. Il avait fabriqué des fausses pistes et il était sûrement au plus proche des hommes. Le chemin que nous prime était loin d’être une balade pour randonneurs. La forêt avait repris ses droits. Des racines épaisses, des arbres couchés, des buissons épineux.
Je traversais ce bois avec facilité, comme chaque fois que je posais un pied dans une forêt, un autre don de ma mère. Je semblais capable d’anticiper la moindre surface carrée sur lequel je marchais tant que j’étais en forêt ou en jungle. je distançait donc assez rapidement Cheveyo qui en plus de ne pas avoir ce don était beaucoup plus grand et avait des difficultés à se déplacer dans un endroit aussi étriqué.
Après avoir arraché une ultime branche de son chemin, il se transforma en un saut. Les craquements des vêtements se firent entendre et l’homme bruyant derrière moi devint un immense tigre à dent de sabre qui évoluait avec facilité dans la pénombre du bois sans un autre bruit.
Je m’imprégnais de la vitalité du bois et je sentis l’adrénaline courir dans tout mon corps, du moins c’est l’impression que cela me donnait. Je savais que mes yeux étaient devenus deux phares verts dans l’obscurité. Ma magie avait imprégné chaque cellule de ma peau et suintait de mes pores, alourdissant l’air autour de moi. Mes enjambées se firent plus fluides, mes pas plus puissants et malgré les quatre pattes de Cheveyo je le dépassais à toute vitesse. Tout autour de moi devient flou, presque imperceptible. J’étais certaine d’avoir jamais couru aussi vite de toute ma vie.
J’entendais les hurlements de Aria et Iria faiblement au loin. Puis ce fut les bruits de l’autoroute, et au vu de la densité de voiture que j’entendais passer, ils étaient proches de la ville. Si jamais ce monstre atteignait les banlieues, ce serait un massacre et c’est ce que j’étais censé éviter. Mes pieds touchaient à peine le sol. J’aperçus enfin la silhouette sombre de ce monstre qui courrait tête baissée droit devant sans se soucier du moins du monde des obstacles qui pouvaient se dresser devant lui.
J'arrêtais ma course folle plantais mes appuis au sol en arrachant le pendentif autour de mon cou. La chaîne tomba dans ma main droite prenant la forme d’un carquois qui se clipsa à ma ceinture. Le pendentif prit sa forme en grandeur nature. Mon arc était fait de bois olympien, créé par Héphaïstos lui-même, un cadeau de ma mère pour mon premier anniversaire. On pouvait mieux faire pour un bébé mais ça ne m’étonnais pas de la déesse de la chasse. J’armais une flèche et tirait dans l’instant,sans réfléchir aux conséquences derrière.
La flèche rebondit sur la peau cuirassée du monstre à tête de taureau pour se planter dans le sol. Son poils était sombre et dru et formait une crinière sombre qui se terminait juste au dessu des pectoraux, son torse était épais, musclée au possible, tels un bodybuilder mais restait humain, ses bras était couvert de poils noirs se terminant par des doigts épais aux ongles jaunis et aussi large que des crocs. Juste au-dessus de sa ceinture, les poils bruns reprenaient et ses deux jambes étaient celles d’un taureau se terminant par des sabots tout aussi sombre. Les yeux rouges se posèrent sur moi et de la bave tomba de son museau. Ses naseaux se dilataient avec force sous son souffle brusque.
J’allais devoir changer de flèches mais ma plus grande surprise fut de ne pas voir mes renforts. A quel point avais-je été rapide ? Je n’eus pas le temps de réfléchir. Le monstre fonça vers moi avec un beuglement tête baissée. Contrairement à la course que je venais de faire reprendre fut difficile. Le taux d’adrénaline avait eu le temps de descendre et ma magie bien que présente ne pouvait pas combler le fossé que mon état physique imposait. Je courais beaucoup moins vite et la distance entre moi et le monstre se réduisait drastiquement.
- Cheveyo !
Mais où était-il ! Affronter un minotaure dans ce genre de conditions c’était du suicide. Je tirais une flèche qui se planta dans les hauteurs des grands séquoias j’attrapais la corde qui se clipsa à ma ceinture et je fus tiré vers le haut en lâchant un hurlement de peur.
J’avais acheté ce bijou mais je ne le supportais toujours pas. Heureusement, il m’avait sauvé la vie plusieurs fois et je pouvais en rajouter une en sentant les cornes du monstre érafler ma jambe en déchirant mon pantalon. Je sentis ensuite mon sang dégouliner de mon mollet. Je me rattrapais à une des grosses branches m’installant à califourchon dessus rétractant le grappin. J’assurais cependant ma sécurité en m’attachant à l’arbre. Le monstre, loin d’être de l’intelligence basse de ses confrères, répétait des coups sur l’arbre dans lequel je m’étais réfugiée. Celui-ci tremblait violemment et j’avais peur qu’il le déracine. Je saisis mon arc prenant des flèches spéciales dont la tête était composée de bronze et crantée. Je tirais une volée à plusieurs reprises et à mon soulagement elles s’enfoncèrent dans le dos du monstre. Cependant celui-ci continua avec autant voir plus de force que précédemment et les secousses devinrent horribles. J’entendis même l’écorce de l’arbre commencer à craquer.
Je les aperçu enfin du haut de mon perchoir. Cheveyo en tête du groupe qui surgit des fourrées et sauta à même le dos du monstre. Ses griffes s'enfoncèrent dans le flanc de l’animal pour se stabiliser et ses crocs enserrèrent le cou presque invisible du Minotaure. Les deux louves attrapèrent chacun un des bras noirs de leurs crocs tirant en arrière pour le faire basculer. Mais l’animal bien plus fort qu’elles n’eut aucun mal avec les 80 kg de chaque côté de traîner les métamorphes et même de les soulever pour tenter d’arracher le chef de meute de son dos.
Profitant de la désorientation, j’armai à nouveau tirant une volée de flèche entre ses deux yeux. Trois qui se plantèrent profondément et traversèrent presque la tête. Il tituba en arrière les yeux exorbités et avant que Cheveyo ne puisse sauter il s'effondra sur le dos. Il eut un gémissement plaintif de Cheveyo mais celui-ci sortit de sous la carcasse en se tortillant sans blessure apparente. Je descendis de mon arbre et ma jambe blessée se mit à légèrement trembler alors que je désinstallais mon matériel.
- Personne n’est blessé ?
Les trois métamorphes me regardèrent et fixèrent ensuite le sang qui dégoulinait de mon mollet, le flux était déjà presque arrêté. Ce n’était qu’une éraflure. Mais les métamorphes étaient surprotecteurs et si je leurs en laissait l’occasion ils n'hésiteraient pas à m’emmener à l'hôpital juste pour ça. . Je m'éloignai donc de quelques pas en regardant ma montre. Déjà six heures, j’avais promis à mes enfants d’appeler lors du petit déjeuner. Après seulement quelques sonneries, ils décrochèrent. Ce fut mon fils, Saito qui répondit :
- Enfin ! Tu devais appeler hier soir !
Je soupirais regardant la montre à mon poignet une nouvelle fois et reprit :
- Tu parles comme ça à ta mère toi ?
- Désolé maman, mais j’étais inquiet.
- On a eu pas mal de boulot cette nuit alors je n’ai pas pu appeler.
- Tu as besoin que je recharge le carquois ?
Je posais une main sur mon carquois presque vide. Il ne me restait que quelques flèches. Mais nous étions près de la ville et je ne comptais pas réutiliser mon arc. J’avais grâce à l’aide de ma mère, créer un enchantement qui me permettait de porter mon arc en toute condition sous la forme d’une chaîne avec comme pendentif mon arc en miniature. Il existait depuis que j’avais 5 ans quand elle a compris que me trimballer toujours vêtu de mon arc même dans l’enceinte de l’académie n’était pas une si bonne idée.
Ce n’est que depuis que je suis arrivé dans la dimension des mortels qu’elle a eut l’idée de créer le carquois à partir de ma chaine. Mais vu le peu de magie dans cette dimension, il était difficile de faire apparaître des objets du néant. On avait donc choisi un enchantement de téléportation. J’avais deux carquois, celui à ma cuisse et celui dans un de mes placards ou pour que mes flèches apparaissent l’un de deux devaient être remplit.
- Si tu as le temps avant de partir à l’école. Gabriel n’est pas rentré tard ?
- il est arrivé vers quatre heure du matin. Une soirée de dingue apparemment.
- Prenez le bus alors.
Je n’entendais plus que la respiration de Saito. Mon fils n’aimait pas prendre le bus, pas parce qu’il voulait frimer, ou je ne sais quelle raison, mais parce qu’il n’aimait pas la foule et surtout les humains. C’était un garçon intelligent et à plusieurs reprises les professeurs m’avaient conseillé de le changer de lycée pour quelque chose de plus adapté. Mais il était têtu comme un mule et voulait rester dans la même classe que sa sœur, Lola. Il était “légèrement” surprotecteur envers elle, ce qui enclenchait des disputes fréquentes entre eux;
Ma fille quant à elle sautera sûrement de joie en apprenant qu’elle allait prendre le bus. Elle allait pouvoir voir ses amies plus tôt. Lola avait le don de se mêler aux mortels. Elle avait appris à vivre avec eux et elle les appréciait énormément. Parfois un peu trop à mon goût. Elle s'était engagée dans plusieurs activités de son collège, des clubs sportifs pour la plupart. Ma fille était une hyperactive, même pour une demi-déesse. Impossible de la tenir en place plus d’une heure, elle dormait très peu, pouvait faire des activités à la chaîne, une concentration plutôt faible sur la durée et des émotions très vives. Elle avait d’ailleurs repris le téléphone à son frère, le trouvant sûrement trop lent à répondre.
- Au fait Maman, oublie pas que ce soir je vais chez Emily ! On a préparé un truc de dingue pour son anniv avec les filles…
- ah oui… Gabriel peut y conduire ?
- Laisse tomber, je vais directement chez Emily après les cours pour aider son père à tout préparer.
- Bien, je rentrerai aujourd’hui, on se verra demain matin. Soit prête pour 10h.
Je vis Aria s’approcher de moi et regarder vers le minotaure qui bougeait encore. Avec trois flèches plantées dans la tête, il n’était toujours pas mort.
- Maman, Saito veut te…
- Désolé chérie, je te rappellerai plus tard. Je dois finir quelque chose.
Je raccrochais, glissant mon portable dans ma poche et sortant mon poignard à la lame de bronze de son étui de cuisse. Cheveyo avait posé une de ses grosses pattes sur la poitrine du monstre et Aria et Iria l'avaient imité en posant leurs pattes sur les bras. Je m'agenouillai à côté de sa tête attrapant une partie de la fourrure sombre et tirant pour que son cou soit exposé et dans un grecs ancien parfait je dis :
- Tu as souillé la terre sacrée des dieux. L’enfers jugera ton châtiment.
Je tranchais sa gorge d’un coup sec. La lame fine s’enfonça comme dans du beurre et le sang dégoulina sur l’herbe verte. En quelques secondes, le cadavre explosa en poudre d’or et le Minotaure avait disparu, comme s’il n’avait jamais existé.
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