Les nuances de verts défilaient sous ses yeux si vite qu’il avait à peine le temps de les distinguer…. Et son inattention n’avait absolument rien à voir avec la tension qui refusait de quitter son corps depuis leur départ.
Non, non. Il n’était absolument pas gêné de se retrouver face-à-face avec la dirigeante du royaume à qui il a posé le plus spectaculaire des lapins quelques jours plus tôt.
Oh, une nouvelle crampe à l’estomac rien qu’à la mémoire de la scène…
Ses prunelles émeraudes se refusaient de croiser celles similaires de sa compagne de voyage, les à-coups du carrosse faisant vibrer son corps déjà tendu comme un arc.
Pourtant, il y a quelques heures, dans le salon de Riastel, tout allait bien.
Presque bien.
Ils avaient au moins réussi à échanger les courtoisies d’usage et à se regarder… à peu près... dans les yeux.
Mais la conversation avait essentiellement eu lieu entre elle et Riastel, passant des évènements récents concernant la Fédération aux remerciements de la jeune fée quant à l’hospitalité dont les Mikeno avaient fait preuve envers Raphaël.
Il avait rajouté à ce moment ses propres mots de gratitude, et avait rassuré d’un regard Riastel et Karula de ce qu’il ressentait : il était temps pour lui d’aller de l’avant, et d’au moins écouter ce que Siria avait à lui dire….
Sauf que depuis une heure et une distance qu’il ne saurait estimer, aucun mot n’avait brisé le silence qui régnait en maître incontesté dans le carrosse.
Il avait essayé, vraiment. Mais comment commencer ? La fatigue se lisait sur le visage de la jeune fille, ses yeux portant les cicatrices de ce qu’il supposait être une nuit blanche.
Et dire qu’elle avait refusé l’hospitalité de Riastel, alors que ça crevait les yeux qu’elle n’en pouvait plus…
Il ne savait pas qui de la peur d’entamer la conversation ou de la colère de la voir se négliger autant l’emportait dans le bazar qu’étaient ses émotions.
Il jeta un regard en coin discret, tentant de jauger le terrain avant de se lancer dans une énième réflexion stratégique sur comment débuter cette satanée conversation.
Un sourire apparu sur son visage en découvrant l’expression sereine qui se dégageait de la silhouette endormie de la fée, le pli qui s’était établi entre ses sourcils enfin effacé.
Et cela lui laissait un peu plus de temps pour établir un plan, parfait !
Une forme de soulagement l’emportait sur tout le reste désormais, alors qu’il sentait son corps se ramollir d’un coup, la tension s’échappant de chaque pore de sa peau. Il poussa un énorme soupir et entrepris de se lancer dans une de ses activités favorites : imaginer une multitude de scenarii pour se préparer à n’importe quelle éventualité.
Ses yeux errant de nouveau librement dans le carrosse, son imagination se mit à courir : une approche polie et contrite aurait quel effet ? Et si il se la jouait à la cool avec une pointe d’arrogance ? Après tout, il n’était pas le seul à être en tort, non ?
Ou alors, surfer sur la colère qu’il éprouvait plus tôt, en se mettant dans la peau du grand frère protecteur : une jeune fille ne devait pas négliger son sommeil de la sorte, voyons !
Son cerveau bouillait de tellement de possibilités qu’il n’avait pas anticipé un élément vital…. Le réveil de la principale concernée.
Le carrosse se mit tout à coup à tressauter en traversant une portion particulièrement accidentée de la piste qui traversait la forêt, les racines noueuses des arbres faisant gondoler la terre. Il se retrouva projeté vers l’avant, le visage de Siria se rapprochant comme au ralenti. Les secondes se rallongeaient, lui laissant le temps de voir tous les détails du réveil brutal de l’endormie, le froncement des sourcils, les yeux écarquillés par le choc et la moue boudeuse qui apparaissait sur ses lèvres entrouvertes dans un cri muet de surprise.
Son cerveau se mit à passer du coq à l’âne, son corps ressentant tous les effets de la peur puis de la panique pour ensuite se figer, comme résigné à l’inéluctable collision.
Alors qu’il ferma les yeux de crainte, ses pensées dérivèrent vers le nombre de clichés qui s’accumulaient lorsqu’il s’agissait de ses rapports avec Siria, une histoire qui n’avait rien à envier aux pire sagas de l’été ou de Noël… D’ailleurs, c’est marrant, sagas, c’est un mot qui se lit pareil à l’endroit et à l’envers ! Comment ça s’appelle ça déjà ? Ça finit en drome…. Nan, c’est pas hippodrome, c’est avec les chevaux ça.
D’ailleurs, en parlant de chevaux, ceux qui tiraient le carrosse manquaient de délicatesse, quand même! Il ne serait pas dans cette situation si….
Le mot palindrome flasha dans son esprit alors que son corps rencontrait enfin celui de la fée, qui, visiblement, était elle aussi restée sidérée le temps d’une dizaine de secondes. Le frisson de triomphe qui le parcourut après avoir retrouvé ce fichu terme s’évapora aussitôt qu’une de ses mains rentra en contact avec le cuir molletonné de la banquette.
Le soupir de soulagement qu’il laissa échapper entraîna une détente instantanée de ses muscles : il était sauvé, il avait réussi à ne pas s’étaler de tout son long sur dieu sait quelle partie du corps de sa compagne de route ! L’honneur et la bienséance étaient saufs !
Ce n’est qu’en ouvrant finalement les yeux qu’il se rendit compte qu’il était loin d’être sorti de l’auberge. Un souffle le séparait du visage interdit de Siria, et sa main libre reposait sur l’épaule de cette dernière, à quelques centimètres à peine de sa poitrine... tout comme son nez à en croire l’effluve de chèvrefeuille qui lui chatouillait agréablement les narines.
Il releva prestement le nez, pour observer son visage prendre la même teinte que les cheveux de la fée dans les prunelles au vert plus dense que les siennes à mesure que les secondes s’égrainaient.
Siria ne bougeait pas d’un pouce, son visage figé dans une stupeur ensommeillée et ses pommettes saillantes légèrement rosies par l’intensité du regard qu’ils échangeaient. Son esprit bougeait, lui, sans aucun souci, et la situation était claire.
Le moindre geste risquait de casser le fragile équilibre dans lequel le jeune homme se tenait, et aussi gênant que puisse être le contact de sa main sur son épaule, elle préférait cela à une possible chute... plus bas. Elle priait juste pour qu’aucun autre obstacle ne vienne faire bouger le carrosse plus que nécessaire.
Raphaël déglutit lentement, et la réalité de ce qui était en train de se passer fit soudain surface dans son esprit : comme si le contact venait juste de le brûler, il enleva brusquement sa main et tituba en arrière, le regard fuyant et marmonnant ce qui ressemblait à des excuses.
Siria expira lentement : elle ne s’était même pas rendue compte qu’elle avait retenu son souffle pendant ce qui lui avait semblé une éternité. Le pire était évité !
C’est à ce moment là qu’un nouvel à-coup secoua leur véhicule, déclenchant un nouveau vent de panique dans l’habitacle dont la température était décidément bien trop élevée au goût de la jeune femme. Ses muscles se tendirent, prêts à la faire se décaler ou à repousser le corps instable et imprévisible qu’était devenu Raphaël….
Corps si instable qu’il glissa sur le tapis recouvrant le plancher du carrosse pour se retrouver les quatre fers en l’air sur ce dernier, la tête appuyée sur le socle de sa banquette, en un « Merde !!! » retentissant.
La tension qui habitait le corps de Siria s’évapora en un éclat de rire qu’elle ne put contrôler, la fatigue et les émotions accumulées ces dernières heures écaillant son masque princier.
Jamais elle ne se serait permise de laisser quelqu’un la voir dans cet état. Jamais.
Mais l’honnêteté et la maladresse dont faisait preuve Raphaël était une bouffée d’air frais dans un carcan protocolaire qu’elle supportait malgré elle.Après tout, il fallait bien qu’elle tienne son rang, et qu’elle se montre digne de la dernière mission que ses parents lui avaient donné.
Elle en avait mal aux joues et au ventre, chaque coup d’œil jeté au visage hagard de Raphaël la relançant dans son hilarité.
Ce dernier s’était tant bien que mal redressé et était resté à terre, adossé à la banquette. Autant attendre que la vague de racines se calme et que le voyage redevienne plus stable, après tout : visiblement, son équilibre s’était fait la malle quand il s’était levé ce matin…
Il grommelait dans sa barbe qu’il n’avait pas, cette dernière cascade achevant d’user sa réserve de patience. Les sourcils froncés et la moue boudeuse, il leva les yeux vers sa compagne de route pile au moment où le visage de celle-ci montrait tous les signes d’un fou rire, les lèvres pincées et les joues légèrement gonflées.
L’explosion hilare le gela sur place, bouche-bée, alors que le corps de la fée se désarticulait à la fois à cause des secousses et de son rire. Elle tapait du pied sur le plancher du carrosse, se saisissait la poitrine en essayant de se calmer mais échouait à chaque fois.
Raphaël finit peu à peu par sortir de son immobilisme, le propre coin de ses lèvres se relevant et un pétillement de gaieté remontant tout le long de son corps.
Oubliées la dignité régalienne du matin-même ou la gène d’il y a quelques minutes, il ne restait qu’un amas de quiproquo et de malentendus cocasses et ridicules derrière eux alors qu’il joignait le concert de rires.
Le carrosse resta agité de la sorte quelques minutes encore, les arbres se clairsemant dans le paysage et indiquant le retour à une route plus plate. Au moment où les cahots cessèrent, ils avaient repris leur souffle depuis quelques temps déjà, la trace d’un sourire encore collée à leurs lèvres.
- Maintenant que c’est plus calme, je vais pouvoir me rasseoir correctement !, dit Raphaël en joignant le geste à la parole.
Il prit appui sur la banquette et se hissa dessus, époussetant son pantalon avec désinvolture.
- Pourquoi ne pas l’avoir fait avant ? s’enquit Siria d’un ton étonné.
Raphaël haussa les épaules légèrement avant de reprendre.
- Si c’était pour retomber aussi sec, ça valait pas le coup. Je crois que les voyages en carrosse et moi ça fait deux….
- Vous n’aviez pas ce genre de problème de…. De l’autre côté ?
- On a pas vraiment de carrosse là-bas. L’équivalent serait une voiture ou un bus, et à part dans les virages, ça allait en général.
Siria ne poussa pas plus loin, malgré que sa curiosité ait été piquée. Et elle réalisa soudain que c’était la première vraie conversation qu’ils avaient : elle se remémora leur première rencontre, et sentit l’anxiété lui tordre le ventre. Comment donner suite, sans évoquer cette mortifiante expérience ?
Raphaël sentit le malaise, et pour cause : il ne savait pas non plus comment aborder le sujet sans risquer un nouveau froid ou un nouveau faux-pas. Mais il fallait le faire. Il se le devait, ainsi qu’à elle: si ils ne formaient pas équipe, au vu de ce que Riastel lui avait expliqué, ils ne s’en sortiraient jamais.
- Je suis désolé.
- Je suis désolée.
La même phrase simultanément, qui les fit s’interrompre dans le discours bien préparé que chacun s’était fait dans sa tête. Un sourire se dessina sur les lèvres de Siria, qui semblait reprendre sa phrase quand il l’interrompit.
- S’il vous plaît, laissez-moi continuer, votre euh….
- Siria ira très bien dans l’intimité.
- Siria… Ok… Je disais donc que j’étais désolé de ma réaction…. Excessive, lors de notre première rencontre. J’aurai dû vous laisser le temps de m’expliquer, et ne pas prendre la poudre d’escampette.
La fée haussa un sourcil interrogatif à sa phrase, et Raphaël comprit sa bourde.
- Ah, oui, vous ne connaissez pas les expressions de chez moi ici. Je n’aurai pas dû partir comme ça, voilà ce que ça veut dire. C’est marrant parce que cette expression est un peu inspirée du monde féerique, comme vos poudres magiques et tout ça…
Ahlalala, le pire arrivait, il partait dans tous les sens ! Ça y est, il allait de nouveau être étiqueté comme le chelou de service….
- Oh, nous n'avons pas vraiment de poudre magique, ici. Des onguents, des pigments pour peindre, mais tout ce qui est magique a un fonctionnement bien particulier.
Raphaël écarquilla les yeux : lui qui s’attendait à des rires ou un regard condescendant se retrouvait avec une réponse d’un naturel désarmant qui lui coupa le sifflet.
- En parlant de ça, je pense que vous n’avez pas à présenter d’excuses pour ce qu’il s’est passé. Vous ne pouviez pas contrôler vos pouvoirs sans en savoir un minimum, et la faute repose entièrement sur mon incompétence à vous accueillir comme il se doit.
Siria inclina profondément son buste, image-même de la contrition. Cependant, un poids semblait se soulever de sa poitrine alors qu’elle effectuait ce geste, l’espoir chevillé au cœur qu’elle soit pardonnée.
Raphaël traversa l’encablure qui les séparait dans le carrosse pour s’agenouiller et lui prendre les mains, la forçant à relever la tête pour l’écouter.
- Je… Ça me gène que vous alliez aussi loin pour présenter vos excuses. Et sincèrement, j’aurai du aussi prendre en compte votre rôle. Angus m’avait bien précisé que vous m’attendiez et que vous aviez un rôle important.
Il se rassit juste en face d’elle, sur la banquette opposée, le sourire facile et le regard moins troublé.
- Disons qu’on est quittes, et qu’on tourne la page ?
Elle hocha la tête, son regard émeraude soudain lumineux de curiosité.
- De ce que j’ai compris, on parle de magie dans votre monde ? Vous en avez aussi ? Comment cela fonctionne ?
Raphaël explosa de rire : alors c’était ce que ressentait Lyra quand il partait dans son flot de questions et de divagations...
Siria l’observait, les yeux ronds comme des soucoupes, et ne savait résolument pas si elle devait rire ou s’offusquer.
Le jeune homme respira un grand coup avant de reprendre le fil de la discussion.
- Désolé pour ce fou rire, votre expression m’a rappelé quelqu’un que je connais bien.
- Et que vous appréciez ?
Il marqua une pause, plongé un instant dans ses pensées.
- Pas autant que je le devrais je pense. Mais cet aspect de lui me plaît plutôt bien. Ah, et si vous pouvez éviter le vouvoiement, ça me fait trop bizarre. J’ai l’impression d’être vieux !
Ce fut au tour de Siria de marquer un temps, un sourire espiègle sur les lèvres.
-Volontiers… mais uniquement si vous l’abandonnez pour moi aussi, hors protocole.
Raphaël ouvrit la bouche tel un poisson hors de l’eau, et la referma. La petite princesse était plus malicieuse qu’elle ne le laissait paraître… Mais bon, après tout, ça l’arrangeait aussi d’avoir quelqu’un proche de son âge, en apparence tout du moins : ça rendait les choses plus confortables de s’adresser à elle comme si ils étaient égaux.
- Soit, Siria, partons là-dessus ! Bon, qu’est-ce que tu voulais savoir au juste ? Parce que ça va être compliqué de tout expliquer en si peu de temps, et puis, je veux aussi en savoir plus sur ton monde.
- On a approximativement encore cinq heures avant d’arriver à la capitale… On peut déjà parcourir une bonne partie des sujets les plus importants.
- Let’s go !
Le reste du trajet passa en un éclair, les deux jouant à un ping-pong verbal et assouvissant leur soif de connaissances. Et lorsque Raphaël posa un pied sur la terre ferme, buvant du regard le paysage qui l’avait tant émerveillé lors de sa première venue, il se prit à espérer que sa relation avec Siria continuerait à s’améliorer et qu’il pourrait vraiment répondre à ses espoirs.
Si le siège de la Fédération féerique l’avait marqué par son élégance et son raffinement, le palais où vivait Siria dégageait une aura plus sombre, qu’il n’aurait pas été apte à comprendre sans les explications que cette dernière lui avait donné lors de leur voyage.
Ce n’était pas une histoire de décor, loin de là : lové au sein d’un gigantesque jardin arboré, à la fois organisé et sauvage, il cochait toutes les cases d’un château sorti tout droit des légendes qu’il avait lu enfant sur les Fae ou le petit peuple. Les murs blancs reflétaient la lumière et faisaient ressortir la végétation qui courait jusqu’au sommet : lierre, glycine, chèvrefeuille… La nature suffisait à elle-même pour décorer les deux tours, même si à mesure qu’ils se rapprochaient de l’entrée, il réussissait à distinguer de fines gravures, probablement des mots mêlés aux entrelacs des arabesques.
Non, il comprit réellement l’ampleur du malaise qu’elle lui avait décrit en mettant un pied dans ce lieu : la morosité emplissait l’air et les regards, se manifestait dans chaque atome. Cela le fit suffoquer, et il remarqua immédiatement la froideur avec laquelle Siria était accueillie dans son propre foyer. Personne pour la saluer, lui demander comment s’était passé son voyage. Juste le silence et le ballet des domestiques au regard fuyant.
Il jeta un regard à la fée, qui haussa les épaules d’indifférence. Cette réception glaciale lui coupa l’envie d’admirer le palais, et c’est les yeux régulièrement vissé sur le visage de celle qu’il considérait presque comme une amie qu’il évolua dans les couloirs et différents escaliers jusqu’à arriver devant une pièce qui prenait tout un étage de la tour orientale.
- Ta chambre, dit-elle en ouvrant la porte. Je me suis dit qu’avant de t’assommer avec la visite et la présentation aux uns et aux autres, tu aurais peut-être envie de te reposer.
Il hocha la tête, et mis un pied dans ce qui allait être sa bulle pour un temps indéterminé. La pièce semi-circulaire était baignée de lumière grâce aux nombreuses hautes fenêtres. A Aevalien, on vivait au rythme du soleil, il l’avait bien compris lors de son séjour chez les Mikeno, et cet afflux d’ensoleillement le changeait drastiquement de ses habitudes d’homme des cavernes collé à la console ou à son PC.
Il posa son sac au pied du grand lit, et observa le mobilier en bois, simple et aux couleurs claires: un bureau assez grand et une penderie longeaient le mur sur sa droite. La tête du lit se trouvait sur le seul mur droit, les pieds dirigés vers la fenêtre, et il remarqua le travail soigné de gravure sur bois sur cette dernière. Un fauteuil à l’air plus que confortable était posé entre la fenêtre et la bibliothèque dont il n’aurait pas l’usage avant un certain temps, se dit-il à son grand regret.
La chambre en elle-même respirait la fraîcheur, l’odeur des fleurs qui grimpaient sur le mur emplissant la pièce.
Il y avait vraiment pire comme lieu de vie, il devait le reconnaître. Le principal souci restait cette lourdeur constante… et il était bien décidé à soutenir Siria en allégeant tout ça.
- Ça me change de la mienne !
Siria leva les yeux au ciel avec un léger sourire.
- C’est étonnant que tu dises ça… Je vais te laisser t’installer….
- Et si tu te posais un peu aussi ? Je n’ai pas grand-chose à déballer, et si tu veux faire venir du thé ou de quoi grignoter, ça me tente bien.
Siria sembla un peu déstabilisée, mais acquiesça à la demande de Raphaël d’un hochement de tête avant de sortir de la pièce.
Raphaël reprit son sac et le posa sur le bureau pour en sortir le maigre contenu : sa tenue d’origine et deux tenues de rechange offertes par Karula. Il ouvrit la penderie et commença à ranger le linge bien plié sans mettre le bazar. Il suspendit son sweat Zelda à un cintre en bois, et referma la porte soigneusement avant de retourner examiner le bureau.
Un encrier et un porte-plumes reposaient sur la droite, et il prit ce dernier en main… Il n’avait pas pensé au fait qu’ils ne connaissaient sûrement le bon vieux BIC quatre couleurs.
Il grimaça en pensant à la galère qui s’annonçait, les tâches d’encre partout et son écriture déjà pas super lisible qui le serait encore plus.
Le bruit de la porte s’ouvrant lui fit tourner la tête, la plume toujours en main.
Siria entra et laissa ensuite passer une domestique portant un plateau qui semblait bien lourd. Il s’empressa de reposer la plume et de dégager le sac vidé de ses affaires en s’excusant platement.
La domestique était une fée assez âgée, dont les cheveux blancs étaient relevés en un chignon qui aurait pu lui donner un air sévère sans la présence de joues rebondies et roses.
Elle le remercia d’un respectueux signe de tête en posant le plateau qui contenait une théière accompagnée de deux tasses assorties, ainsi qu’un assortiment de ce qu’il supposait être des sucreries.
- Merci Althéa, dit Siria avec chaleur.
- Mais de rien, votre Altesse. Je suis ravie de vous voir de retour parmi nous, d’autant plus avec une si bonne compagnie.
Siria toussa d’un air gêné, et détourna le regard vers le mur, qu’elle trouvait soudainement passionnant.
Raphaël sourit à la domestique et lui tendit la main.
-Bonjour, je m’appelle Raphaël. Ravie de vous rencontrer et merci de me ramener de quoi grignoter, je mourais de faim !
Althéa rit de bon cœur en prenant la main du jeune homme, la serrant avec chaleur.
- Enchantée ! Vous avez l’air d’un charmant jeune homme, et bien élevé avec ça !
Ce fut au tour de Raphaël de rosir sous le compliment. Toujours souriante, la domestique s’éclipsa en leur annonçant que le dîner serait servi dans deux heures : elle ferma la porte derrière elle avec lenteur, jetant un coup d’œil amusé dans leur direction.
Un double raclement de gorge retentit, et le regard échangé valait tous les mots du monde : mais l’estomac de Raphaël eut la bonne idée de grogner, brisant ainsi la gêne alors que Siria approchait du bureau pour servir le thé.
L’odeur florale et acidulée flatta les narines du jeune homme, qui approcha le fauteuil qui se trouvait près de la fenêtre. Il tira ensuite la chaise et la recula avant de s’installer dessus, malgré les objections de la fée.
- Nan, nan, je vous prie de bien vouloir accepter cette marque de respect, votre Altesse qui vient de faire plus de douze heures de carrosse en une journée.
- A ce compte là, je préfère rester debout… Ça me changera en effet de la position assise !
Il rigola en la voyant faire les cent pas dans la pièce, sa tasse de thé fumante à la main.
- A votre aise, mais qu’on ne dise pas que j’ai manqué à mes devoirs de gentleman.
Siria réprima un lever d’yeux au ciel en s’appuyant contre un des murs faisant face au bureau.
Raphaël se saisit d’une mignardise, une sorte de fruit indéterminé enrobé d’une pâte croustillante saupoudré de ce qu’il supposait être du sucre, et l’engloutit avec délice. La texture faisait penser à un fruit confit, le sucre en moins et le côté juteux en plus.
Il ferma les yeux et dandina sur place de contentement, avant de recentrer son attention sur Siria.
- Je comprends mieux ce que tu disais sur le chemin… Désolé encore de t’avoir compliqué….
- On a dit quitte ! répondit la jeune femme en portant sa tasse à ses lèvres.
- Althéa est un sacré personnage en tout cas. Ça m’a remonté le moral de la voir débarquer, surtout avec de quoi recharger les batteries.
Il lui tendit la petite assiette et elle traversa la pièce pour se saisir de ce qui ressemblait à un macaron avant de s’asseoir sur le fauteuil. Raphaël sourit intérieurement à sa petite victoire, alors qu’elle soupirait.
- C’est la seule personne avec Angus à faire preuve d’un peu de chaleur et de bienveillance à mon égard. C’était ma nourrice étant enfant, et en l’absence de ma mère, elle…
Sujet sensible, sujet sensible, cria l’esprit du jeune homme. Ne fais pas de boulette.
Siria s’était fait violence pour parler de ça lors de leur retour, il l’avait instinctivement senti : mais malgré son insistance sur le fait qu’elle n’était en rien obligée d’en dévoiler autant, elle avait rétorqué qu’il devait être prévenu de ce qui l’attendait, vu que c’était en partie la raison pour laquelle il se trouvait ici.
Alors qu’il lui retendait les sucreries d’un air faussement séducteur, un de ses sourcils arqués en une invitation silencieuse à se resservir… et à rire, le souvenir de sa nouvelle identité remonta à la surface.
Raphaël, héros d’Aevalien et pourfendeur du grand méchant sorcier Mikhail… et doublement protégé des anges dont il tient ses pouvoirs.
Le seul capable de réveiller le couple souverain de la Fédération Féerique, plongé dans le coma depuis des mois : Titania et Obéron, parents de Siria.
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