L’homme esquissa une grimace de dégoût. La musique de la boîte de nuit était devenue insupportable. Et puis cette foule de centaines de gens qui s’agitaient encore et encore inutilement. Le tout formait alors un vaste tourbillon psychédélique qui embrumait les sens. Mais il devait rester fort et vigilant. Ce soir une nouvelle proie s’ajouterait à son sanglant palmarès.
Tranquillement, confortablement assis dans un fauteuil, il attendait. Il savait que la femme viendrait. Il ne l’avait pas quitté des yeux depuis le début de la soirée. Elle s’épuisait, et naturellement, elle viendrait jusqu’à lui car le dernier fauteuil libre était celui situé en face du sien.
Il avait vu juste. La jeune femme, essoufflée, vint s’affaisser lourdement sur le fauteuil. Après avoir repris un cours instant sa respiration, elle plongea ses yeux bleus dans ceux de l’homme.
« - Bonsoir… articula-t-elle péniblement.
- Salut… Comment tu t’appelles? Demanda-t-il souriant.
- Mary. Et toi?
- Un très joli prénom pour une très jolie femme. Je ne sais pas toi, mais moi, je suis plutôt fatigué, alors je propose qu’on fasse un peu connaissance…
- Oui, pourquoi pas. Qu’est-ce que tu fais dans la vie?
- je suis un artiste. Peintre, et sculpteur et dessinateur. Mais ma spécialité est le travail sur modèle humain.
- C’est pour ça que ton style est si… original? Demanda-t-elle en riant.
- En partie, oui. Simple curiosité, c’est quoi ton genre de mecs?
- Plutôt genre musclé, et virile. Un peu comme mon voisin, Enzo Mac Kidney, un membre des forces spéciales anglaises. Qu’est-ce qu’il est beau…
- Quelle déception… Je n’ai pas la carrure d’un membre des forces spéciales, c’est sûr, et donc je ne pense pas être haut placé dans ton estime, mais j’aurais quand même l’audace de te dire ce que je pense de toi: je t’aime. C’est fou, je sais, on se connait depuis cinq minutes à peine, mais dès que je t’ai vu j’ai su que je ne te résisterais pas.
- ça surprend, c’est vrai… Mais ça me touche sincèrement. D’habitude, les mecs comme Enzo m’ignorent, me snobent. Ils me trouvent trop superficielle, et stupide.
- Non, ne dis pas des choses , tu es une personne merveilleuse, ça se voit rien que dans ton attitude. Ce sont eux qui ne t’estiment pas à ta juste valeur.
Rétorqua-t-il en plongeant son regard émeraude dans les yeux de Mary.
- Tu penses vraiment ce que tu dis? Demanda-t-elle en rougissant.
- Oui évidemment. Viens avec moi, on étouffe ici. Allons parler dehors. »
L’homme se leva d’un bon et tendit gracieusement sa main à Mary, qui la prit sans hésitation. Agile comme un serpent il fendait la foule, et Mary avait peine à le suivre. Elle ne contrôlait plus son corps. Elle obéissait à une sorte d’instinct qui lui disait de se laisser faire, car cet homme était apaisant, rassurant ,et aimant.
Ils dépassèrent la porte de la boîte de nuit pour entrer dans uns sorte de sérénité parfaite, le calme de la nuit. La douce étreinte du silence, acheva de redonner confiance à Mary. Avant même qu’il ait eu le temps de se retourner, Mary empoigna la deuxième main de l’homme, et d’un geste brusque, se blottit dans ses bras.
Surpris, l’homme cala sa tête contre celle de Mary, puis déposa un doux baiser sur son front. Mary releva alors la tête, et avança doucement ses lèvres fines vers celles de l’homme, qui l’embrassa doucement.
« - Je t’aime… susurra-t- elle.
- Moi aussi je t’aime…
- Est- ce que ça te dirais qu’on aille dans un endroit plus tranquille?
- Oui, bien sûr. Où tu voudras…
- Chez moi, ça te plairais?
- Oui ce serait génial mon ange.
- Parfait, alors suis moi… »
L’homme marchait aux côtés de la femme, son bras entourant sa hanche. Elle le regardait comme un enfant lorsqu’on lui offre un jouet. Il lui souriait d’un sourire carnassier, mais elle n’en avait cure. Tout ce qui la préoccupait semblait être le bonheur que sa relation naissante lui apporterait. L’homme sentait un étrange sentiment lui traverser le cœur: une sorte de chaleur, de sensation agréable qu’il rejetait mais qui tentait malgré tout de s’imposer. L’impression d’être aimé, apprécié, estimé.
Non c’était impossible, il ne pouvait pas ressentir cela! Il était le grand faucheur l’ange de la mort qui fait impitoyablement trancher la justice, sa justice! Alors il était hors de question de se laisser attendrir par une femme… Involontairement, il resserra sa main autour de la hanche de sa petite amie.
« - Quelque chose ne va pas mon amour? S’enquit-elle en cherchant frénétiquement son regard.
- Non, non, inutile de t’inquiéter mon ange… Tout va très bien…
- Tant mieux alors! Parce que pour moi tout va très bien! Je dirais même plus, je ne me suis jamais senti aussi bien…
- Ce n’est que le début… Je te réserve une surprise de l’ordre du grandiose, quelque chose que tu ne verras nulle part ailleurs!
- Qu’est-ce que c’est? Demanda-t-elle le regard pétillant de curiosité.
- Tu seras le centre de ma nouvelle œuvre d’art, le public adoreras on va mettre le feu…
- Tu me surestimes peut-être un peu mon ange…
- Non, je suis sincère, tu seras parfaite, j’en suis sûr… »
Elle sourit puis sortit de son sac à main les clés de sa voiture. Elle enfonça les clés dans la serrure. La porte s’ouvrit et elle prit monta côté conducteur. L’homme s’assit côté passager, puis plongea son regard de glace au fond de celui de Mary. Elle ne pût lui résister et l’embrassa fougueusement. L’homme sentit la chaleur monter alors il retira sa langue brutalement et lui dit:
« - Si on se réservait ça pour chez toi? Demanda -t-il d’une voix sensuelle.
- Oh avec plaisir…
- Je t’excites à ce point? J’espère que tu n’habites pas trop loin, dit-il en souriant.
- Non j’habite à dix minutes…
- Alors ne perdons pas de temps… »
Lorsque le véhicule arriva à destination, mary ne prit pas la peine de le garer correctement. Elle, ainsi que l’homme, descendirent précipitamment et s’échangèrent des baisers brûlants. Mary retira sa langue la première. Elle avait chaud. Trop chaud. Elle farfouilla frénétiquement son sac pour en extraire les clés de l’immeuble, et les enfonça dans la serrure. Celle-ci pivota sans peine. Main dans la main, le couple naissant s’élança dans les escaliers.
Les marches défilaient sous leurs pas. Combien, Mary l’ignorait et cela ne la perturbait pas le moins du monde. À quel étage étaient-ils? Elle n’en savait rien. Tout ce qui lui importait, c’était d’être avec cet homme, ce bel homme, qui derrière des atours étranges camouflait une personnalité unique. Il n’avait pas le corps d’Enzo, mais il avait un charisme hors du commun. C’était tout ce qu’elle pouvait dire sur lui car elle ne le connaissait que très peu, mais cela n’avait aucune espèce d’importance. Elle l’aimait, et ça, c’était quelque chose qu’elle pouvait comprendre mieux que quiconque.
Une fois arrivée devant sa porte, elle se jeta sans les bras de l’homme en riant. Il lui souriait aussi. Et son sourire… oh son sourire… magnifique, fantasmagorique, orgasmique! Ils échangèrent un baiser brûlant de passion, puis Mary mis sa clé dans la serrure. Celle-ci pivota sans difficulté et la porte s’ouvrit. Ils pénétrèrent dans l’appartement. L’intérieur était très chargé et l’homme trouvait cela plutôt perturbant. Mais il ne s’agissait pas d’un appartement chargé de meubles à l’ancienne ou de quoi que ce soit de ce genre. Non, on aurait dit une chambre d’adolescente.
Toutefois il n’eût pas le temps de se focaliser là-dessus car Mary l’entraîna avec empressement dans sa chambre à coucher. Elle tira sur son bras violemment pour le jeter sur le lit. L’homme se laissa guider sans résister, et s’étala de tout son long sur le lit. Lorsqu’il se retourna il eût la délicieuse surprise de voir Mary en sous-vêtements. Son corps était bien dessiné, elle était svelte, mais ses courbes féminines étaient tout de même bien visibles: de très jolis seins, et des fesses que l’on ne croise que dans ses fantasmes les plus doux.
Lentement Mary, le regard brûlant de désir, s’avança vers le lit. Sensuellement elle se mit à genoux et rampa sur le lit pour passer entre les jambes de l’homme. Elle déposa un baiser sur son entre-jambe, puis remonta rapidement jusqu’à ses lèvres. D’un coup brusque celui-ci attrapa la tête de Mary, approcha la tête de son oreille et susurra:
« - Dis moi, est-ce que tu aimes les jeux sexuels mon ange?
- Oh oui, j’adore ça! Fais de moi ce que tu veux, je suis ta petite chienne… gémit-elle.
- Tu vas voir, ce jeu là vaut le détour… répondit-il en souriant. »
L’homme repoussa Mary sur le côté et se leva d’un bond. Il ramassa son manteau que mary avait jeté à terre, et en sortit un flacon de chloroforme et un joli mouchoir blanc en tissu. Après avoir imbibé le mouchoir, il adopta sa démarche de panthère et révéla son vrai visage:
« - Tu m’inquiète quand tu souris comme ça chéri…
- Oh, mais je t’assure qu’il n’y a aucune raison d’avoir peur… dit-il avant de lui plaquer le mouchoir contre le visage.
- Mais, ce produit c’est du…
- Oui, mon ange, du chloroforme… murmura-t-il. »
À son réveil Mary avait l’esprit embrumé, et la vue peu claire. Mais ses yeux s’accommodèrent rapidement, et elle fût secouée par un violent spasme de terreur alors que la terrible et inévitable vérité l’écrasait de toute sa masse: elle était condamnée. En effet, elle se rendit rapidement compte que ses membres était attachés. Elle voulut hurler mais la pression d’une lame sur sa gorge l’en dissuada. Mais sa peur atteint son paroxysme lorsqu’elle se rendit compte qu’elle était trempée jusqu’aux os, et qu’à en juger par l’odeur, il ne s’agissait pas d’eau, mais d’essence.
« - Mais qui es-tu exactement et qu’attends-tu de moi? Sanglota-t-elle.
- Mon nom est Bloody Widow… Je suis une femme prisonnière dans un corps d’homme. Répondit-il le regard chargé de haine.
- Comment ça?
- J’aime les hommes mais ils me rejettent parce qu’hélas moi aussi je suis un homme! Ils pensent que les filles dans ton genre peuvent les satisfaire mais c’est faux! Vous êtes toutes les mêmes, et vous leur brisez le cœur sans vous rendre compte de ce que représente le plaisir de tenir dans ses bras un homme que l’on aime…
- Mais pourquoi me tuer moi au lieu d’une autre? Gémit-elle.
- Parce que tu es un obstacle entre l’amour passionnel qui me lie à Enzo!
- Mais… je…
- La ferme! Rugit-il. »
Mary se figea de peur et regarda attentivement l’homme, le regard lourd de pitié. Celui-ci marqua un temps de pause et soupira d’exaspération.
« - Alors que vous avez tout ce que je convoite, vous le rejetez sans vergogne… Je pourrais essayer de t’expliquer mais tu ne comprendrais pas… »
Il releva la tête et recommença à sourire comme jamais. Il avait retrouvé toute ses forces et avait bien l’intention de jouir de la profonde détresse dans laquelle il avait plongé sa victime. Il passa sensuellement une main dans ses cheveux et se pencha vers sa victime.
Son visage était éclairé par la lumière de la lune, ce qui lui conférait une morbide majesté que l’on ne trouve que chez les dieux de la mort des anciennes légendes.
« - Sais-tu ce que je suis un grand humoriste? Dit-il d’un ton euphorique.
- Tu n’es qu’un salaud de la pire espèce et un monstre! Siffla-t-elle.
- Dans mon infinie bonté, je vais faire comme si tu n’avais rien dis… J’ai un goût prononcé pour l’humour pervers et ironique à la fois… Je ne rates jamais une occasion de m’amuser, et justement, ce soir tu me tends une perche en or…
- Qu’est-ce que tu as en tête? S’enquit-elle inquiète.
- Eh bien figure-toi que c’est justement l’homme que tu considères comme ton sauveur qui causera ta perte, et je trouve ça hilarant! S’exclama-t-il en riant à gorge déployée.
- Je ne comprends rien…
- Oh mais justement, la surprise sa fait partie du jeu…
- Non, attends! »
Bloody Widow s’immobilisa. Il lui lança un dernier regard lourd de mépris qui en disait long sur ce qui attendait Mary si jamais elle avait l’audace d’ouvrir ne serait-ce qu’une seule fois la bouche. Elle n’insista pas.
L’homme se dirigea vers la fenêtre, et l’ouvrit. Il s’empara d’un objet caché dans l’ombre que Mary avait de la peine à distinguer. Mais lorsqu’il apparut sous l’éclairage de la lune, elle comprit: il s’agissait d’un grappin. L’homme en attacha une extrémité à la rambarde. Il tira deux fois sur la corde pour tester son assise, puis, souple et rapide, il enjamba la rambarde et descendit.
La descente se déroulait sans encombre… Il se sentait comme un véritable ange de la mort, porté par ses ailes faites de ténèbres pures… Ses deux pieds caressèrent le sol doucement. À travers ses cheveux tombant devant son visage, flottait un sourire infantile et pur, mais dangereusement malsain.
D’un geste sec il secoua la corde à la manière d’un fouet et celle-ci descendit rapidement jusque dans la rue. Le choc du grappin contre le bitume brisa le silence nocturne. C’en était fait. Le glas de Mary avait sonné.
Machinalement il ramassa la corde et tourna les talons. Il effaça son sourire comme le vent balaye la poussière, pour laisser place à une expression plus que solennelle. Satisfait de son œuvre, silencieux et implacable comme la mort elle-même il disparut dans la nuit…
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