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“Horreur au supermarché”

C’était la stupéfaction hier matin, lors de la découverte du cadavre d’une mère de famille. Le corps de la victime, habituée du supermarché AdPrix du centre-ville a été retrouvé dans une benne à ordure derrière le magasin.

La rédaction a été avertie par un courrier déposé de manière anonyme. Notre journaliste, Laurent Rolle, est arrivé le premier sur les lieux et a fait la macabre trouvaille. Ce qui semblait être une blague de potache est en fait un terrible homicide. Le message reçu ce matin indiquait l’endroit où trouver le corps, tout portait à croire qu’il s’agissait d’un canular. Les termes employés dans la lettre ainsi que son mode de rédaction ne laissaient aucunement présager de la véracité de son contenu.

C’est avec horreur que notre envoyé spécial a trouvé la dépouille suppliciée de Marie Henne, 35 ans, mère de 3 enfants, atrocement mutilée, méconnaissable. La police a aussitôt été avertie. Les investigations nécessaires ont immédiatement été entamées pour confondre au plus vite le responsable de cet acte de barbarie.

L’infortunée victime semble avoir subi des sévices corporels particulièrement abjects, il y aurait même eu trépanation. Pour l’instant, la police ne se prête à aucun communiqué mais est à pied d’œuvre pour débrouiller le fil de cette enquête qui s’avère, n’en doutons pas, particulièrement ardue.

- Pas mal ton article Laurent ! On dirait bien que la vie reprend son cours pour toi ! Enfin une bonne nouvelle !

- On ne peut pas vraiment parler de bonne nouvelle ! C’était pas particulièrement réjouissant comme découverte je te signale !

- Bah, pour un vieux de la vieille dans ton genre, ça devait pas être si terrible ! T’en as vu d’autres ! Warf warf !

Quel con ce type vraiment !

Comme si Laurent s’était vraiment éclaté à apprécier le travail du dépeceur qui court la ville en toute tranquillité !

C’est vrai qu’il en avait vu d’autres. Il revenait de quelques années à couvrir les évènements en Afrique et des trucs moches, il en avait vu ! Mais il y a un monde de différence entre voir des atrocités commises par des gens qui se battent pour des idéaux depuis des siècles. Qui en sont encore, soyons honnêtes deux minutes, aux rivalités tribales et le travail méthodique et réfléchi qu’il avait pu observer tout à loisir ce matin derrière la benne du supermarché !

En plus, comble de l’horreur, il la connaît cette Marie Henne. Il la connait tellement bien qu’il est le père d’un de ses enfants, celui du milieu s’il se rappelle bien … Son aura de journaliste lui avait toujours facilité les choses avec les femmes et il n’avait jamais été du genre à s’encombrer de capotes. Ni même de prolonger une relation pour un motif aussi futile qu’une grossesse. Elle n’avait qu’à se protéger après tout, ou ne pas offrir son cul au premier venu derrière le dos de son mari! Leur histoire n’avait pas duré très longtemps, quelques étreintes pendant 2 ou 3 mois. Ca le faisait marrer de vivre des aventures comme ça, de voir ces nanas en mal d’exotisme, qui se faisaient chier dans leur couple, venir s’encanailler avec lui. Il y a avait toujours un moment où elles finissaient par le regarder avec un œil plus tendre. C’était le signal de la rupture, il ne voulait pas se charger d’une femme qui en pinçait pour lui, tirer un coup d’accord, roucouler, fallait pas rêver !

N’empêche, il l’avait reconnue tout de suite Marie ! Elle avait été bien amochée mais il connaissait son corps. Il avait rapidement repéré la tache de naissance sous son sein droit. Ce qui restait du visage avait achevé d’installer la certitude, il s’agissait bien de son ancienne maîtresse. Il avait eu un mouvement de recul. Et si le mari avait été au courant pour leurs petits cinq à sept et qu’il se serait vengé de sa femme des années plus tard. Et s’il avait choisi de le prévenir lui, Laurent Colle ? Histoire de lui signifier qu’il savait et que son tour viendrait également ?

Il avait rapidement rationalisé, la missive ne lui avait pas été adressée personnellement mais au rédacteur en chef. C’est lui qui avait désigné Laurent pour se taper la vérification. Il l’avait choisi lui parce qu’il n’était pas en odeur de sainteté à la rédaction, on lui collait toutes les missions chiantes. Pour bien lui faire sentir qu’il n’était pas le bienvenu au sein de l’équipe. Pour le coup, le rédac’ devait s’en mordre les doigts ! Au lieu d’un chien écrasé quelconque, il lui avait refilé le scoop de l’année, voire de la décennie ! Il devait en trépigner de rage et tourner dans son bureau comme un lion en cage ! Laurent sourit à l’évocation de cette image. Enfin il y aurait au moins un truc positif dans sa journée, il aurait bien fait chier son rédac’ chef, sans le vouloir, certes, mais le résultat était le même !

Il enfila sa veste et décida de rentrer chez lui plus tôt que prévu. Après tout, le traumatisme visuel de ce matin justifiait bien une journée écourtée. Il en profiterait pour aller se détendre un peu dans le bar topless à la sortie de la ville. Glisser des billets dans un string étroit, rien de mieux pour décompresser après une dure journée !

Il arriva chez lui assez tard, un message l’attendait sur son répondeur. L’inspecteur Strade de la Police voulait le voir au poste à la première heure le lendemain pour une déposition circonstanciée. La personne ayant laissé le message semblait particulièrement énervée. Il semblerait que son initiative de se rendre seul au rendez-vous donné dans le courrier, sans alerter les forces de l’ordre n’ait pas plu. Il grommela dans sa barbe naissante

- Sont marrants les flics ! Quand on les prévient, on les dérange et c’est toujours pour rien. Quand on prend la peine de ne pas les déranger, c’est forcément là qu’on aurait dû le faire … Fais chier !

Il se glissa tout habillé sous la couette et s’endormit d’un sommeil lourd comme le plomb.