Cole considéra le grand portail devant lui. Sven s’était stoppé net, mais son neveu n’y trouvait rien de particulier. Juste des barreaux les uns à côté des autres maintenus par d’autres barreaux perpendiculaires. Derrière, Cole discerna une loge. S’ils avaient croisé peu de gens depuis leur sortie de l’hôpital, le lieu derrière la grille semblait désert.
— Putain, qu’est-ce qu’on fout là ? s’alarma Nours au point d’éveiller l’appréhension de son ami.
— On t’a rien d’mandé, Debroe ! cracha Sven avec un mépris que Cole ne lui connaissait pas.
Son oncle stressait. Il grinçait des dents sans même s’en rendre compte. Lambda couina, peu rassuré par l’endroit. Dawn lui tapota la tête, mais ses sourcils relevés en accent circonflexe trahissaient son effroi. Un effroi qui échappait complètement à Cole.
Il poussa le portail dont le grincement sinistre trancha avec le calme de l’endroit figé dans le temps. Il dessina un pas de côté quand il lut la pancarte : “Prière de garder le silence.” placardée sur la façade de la loge. On avait dressé une carte aux traits grossiers, faits à la main, mais Cole n’eut pas le temps de la déchiffrer que son oncle prit les devants :
— C’est par là.
Dawn gémit :
— Il y a vraiment quelque chose d’important à voir, ici ? J’évite d’y venir depuis des années…
— Y en a pas pour longtemps, assura Sven d’un ton qui se voulait sans réplique.
Ils longèrent le chemin de graviers, puis bifurquèrent sur une allée plus petite, entourée de plaques de marbre sur lesquelles on avait entreposé des objets. Cole s’interrogea sur leur utilité, mais n’en trouva aucune. Ils tournèrent à nouveau. Une fois encore. Encore une fois. Cole n’aurait jamais trouvé le chemin seul… surtout sans savoir quoi chercher. Chaque plaque était différente, à sa façon. Parfois grises, parfois noires, d’autres fois blanches ; on avait gravé une colombe en plein vol ou un soleil sur le déclin. Est-ce qu’on vénérait la nature, ici ?
Ils s’engagèrent vers le centre du labyrinthe et Cole décréta que, non, ils n’avaient décidément pas mis les pieds dans un arboretum. Si l’herbe et les pissenlits qui émanaient du sol respiraient la santé, les plantes dans les pots sur le marbre criaient au mieux leur soif, au pire leur agonie. Celles, déjà mortes, n’avaient plus leur mot à dire.
Sven stoppa sa marche. Il trembla. Une veine battait contre sa tempe. Il désigna un chemin minuscule :
— C’est là, dit-il d’une voix hachée.
Cole se tint à côté de lui. Leurs épaules se touchaient presque.
— Qu’est-ce qui est là ?
— Me force pas à le dire.
Lambda avança le premier. Cole lui emboita le pas, la cage thoracique douloureuse.
— J’te préviens, ajoute Sven dans son dos, c’est rude.
On dirait qu’il va pleurer, pensa Cole. Dawn et Nours, dans un silence solennel, suivirent à la file indienne. Leur appréhension embaumait l’atmosphère déjà lugubre. Sven attrapa l’épaule de son neveu. Il le força à se tourner vers la droite. Les regards suivirent.
— Nom de Dieu, c’est quoi c’bordel ? lâcha Nours d’une voix blanche.
Dawn, perplexe, se contenta de secouer la tête. Cole figea son œil aigue-marine sur l’origine de leur surprise. Il serra la mâchoire. Son estomac le brûla, il retint la nausée. Sur la plaque de marbre, devant lui, il lut :
Fils aimé d’Ana Bern Coldman et de Jedefray Coldman
03 août 2000 - 21 décembre 2005
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