Calvin et Sven n’allaient plus tarder, d’après Marylou. La matinée avançait, elle avait eu le temps de tricoter la moitié d’une paire de gants pour leur nouveau protégé. Elle avait hésité longtemps : peut-être aurait-il fallu commencer avec des cache-pattes qu’on aurait enfilés à Lambda. Les chiens avaient froid, eux aussi. Elle s’était finalement résolue à utiliser ses fils et son aiguille pour le moins poilus des deux.
Elle plaça le gant de couleur crème devant son visage pour mieux l’admirer. Elle s’était surpassée ! Surtout pour la courbe du “S” noir au beau milieu. Tout le monde saurait qu’il appartenait à Sven. Daniel ne le volerait pas, celui-là. Il y avait bien cinq doigts et hormis un tout petit trou entre l’index et le majeur, il ne présentait aucun défaut. Il tiendrait chaud. Satisfaite, Marylou se fendit d’un sourire et le plaça dans un sac plastique. C’était un cadeau. Fallait bien le cacher. Garder la surprise.
Elle prépara du nouveau fil crème qu’elle fit passer dans son aiguille - Sven n’avait qu’un oeil, mais deux mains - quand un feulement attira son attention. Un gros chat blanc sale la fixait depuis un monticule de gravas sur lequel Marylou s’était adossée. Elle se décala assez pour remarquer qu’il ne portait pas de collier. Encore un malheureux livré à lui-même. Celui-ci, pourtant, lui fit moins de peine que Sven…
Elle plissa les yeux, mais ne vit que les sclérotiques de l’animal sans pouvoir discerner la moindre pupille. Un frisson lui glaça l’échine : Marylou savait que ce chat l’observait elle. Il baissait la tête dans sa direction et ses narines frémissaient. De plus en plus vite. La bave accumulée sur ses moustaches n'indiquait rien de bon.
D’une main lente, mais appliquée, Marylou chercha un restant de croquettes coincées quelque part dans son gros cabas. C’était celles de sa Pépète, avant que les flics l’embarquent sous prétexte de maltraitance animale. Parce que laisser une chienne avec sa maîtresse dans la rue, c’était pire que de la foutre dans une cage loin de la personne qui l’aime le plus. Et on laissait pas un animal dehors, par contre un humain…
Peu importe. Le gros chat, là, lui claquait la frousse. Elle ne le lâcha pas du regard, certaine qu’abaisser sa garde lui vaudrait la morsure ou les griffures de sa vie. Elle reconnut au toucher la consistance des croquettes de Pépète tandis que les poils du chat se dressaient sur son dos. Aller doucement, mais pas perdre de temps. Marylou ouvrit la paume de sa main où traînait la nourriture devant l’animal à peine intrigué.
— Tiens, murmura-t-elle, c’est du bon manger rien que pour toi.
Le chat feula plus fort, dans un gargarisme étrange. Il devait être malade. Une pneumonie, un truc du genre. Il n’avait pas faim. Pas de croquettes, en tout cas.
Il ouvrit la mâchoire et montra les dents, prêt à bondir.
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