Marie-Christine aurait préféré mourir dans une grande ville agitée. Ou même dans un vieux chateau comme ses cousins d’Ecosse. Peut-être que l’attente aurait été moins pénible. Mais non, il avait fallu qu’elle tombe dans un trou, dans la neige, dans un trou paumé et s’y brise la nuque. Condamnée à hanter son petit bout de forêt, elle s’ennuyait ferme et n’avait d’autre choix que d’attendre que quelqu’un passe pour lui faire peur. En six cents ans, ce n’était arrivé qu’une fois.
Elle en était même arrivée au point où les animaux sauvages ne la fuyaient plus, habitués à sa présence. Elle aurait aimé faire ravaler leur fierté aux lapins et aux cerfs qui passaient quotidiennement au-dessus de son tombeau, mais c’était comme s’ils la narguaient, elle et son incapacité à leur faire peur. On pouvait dire ce que l’on voulait, hanter les bois, c’était sacrément mieux avant.
Alors qu’elle essayait de faire fuir un blaireau qui désacralisait sa tombe en urinant dessus, un bruit étrange dans le lointain l’interpella. Quelque chose s’approchait, et c’était plus gros que le gibier habituel. Un humain ? Elle sentit l’excitation la gagner. Enfin ! Enfin elle allait pouvoir prouver à ses cousins que elle-aussi pouvait faire peur ! Elle aurait aimer danser sur sa tombe, mais elle n’avait plus de jambes pour le faire.
L’homme s’avança prudemment dans la neige. Il portait une tenue bizarre, dans les tons beiges, comme les peintres de son époque, et une machine étrange formait une coquille mécanique dans son dos. Elle avait déjà vu ça dans un vieux prospectus qui avait volé jusqu’à elle. Un aspirateur. Mais pour aspirer quoi ?
Alors que l’homme passait au-dessus de son trou, elle bondit devant lui dans la forme la plus physique qu’elle le put. Son corps éthéré se déforma, ses yeux crachèrent un sang translucide et elle hurla de sa voix la plus tourmentée, comme on lui avait appris. A sa grande surprise, l’homme parut blasé, presque ennuyé. Il soupira, puis pointa l’étrange aspirateur sur elle.
Marie-Christine voulut laisser exploser sa colère, mais n’en eut pas le temps. Le bas de son corps se retrouva attiré à l’intérieur de l’étrange machine. Elle cria, terrifiée, et se débattit de toute son âme pour échapper à son sort. En vain. Elle se retrouva coincée dans une petite bouteille, à l’étroit.
On la déposa sur une étagère, au milieu de centaines d’autres. Son éternité, elle la vivrait désormais à gémir au milieu de ses comparses. Attention à ce que vous souhaitez, on peut l’obtenir de bien des manières différentes, certaines plus enviables que d’autres.
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