Même si cela l’embarrasse de l’avouer, Luciel pense qu’il a raison. Si les Cieux avaient voulu les aider, sans doute l’auraient-ils déjà fait. Cela fait bien longtemps que le reste de son peuple a abandonné les derniers anges protecteurs dans le monde des hommes et s’est replié en ce lieu si lointain qu’ils ne ressentent plus les effets de l’Appel. Le jeune ange sent son cœur se serrer. Il n’est pas dans la nature des siens de montrer aussi peu de compassion… mais après tout, après tant de souffrances, ses frères ont, pour la plupart, perdu la leur.
Peut-être, s’il parvenait à retrouver le chemin des Cieux, pourrait-il porter leur demande de secours ! Malheureusement, cela nécessiterait une longue quête, et il n’en a pas le temps. Il appuie son front sur ses mains jointes, submergé par ces possibilités sans issues. La seule chose qu’il puisse faire pour l’instant, et encore, avec l'assistance de ses nouveaux alliés, c’est de revenir à temps auprès de Solia et la mettre à l’abri.
Quelqu'un lui saisit l'épaule ; il lève les yeux pour rencontrer le regard pétillant d’Aïzie :
— Je veux t’aider, moi aussi ! déclare-t-il d’un ton solennel. Si tu ne peux pas trouver les Cieux, j’irai moi-même et je ferai comprendre aux anges de là-haut le fond de ma pensée !
Luciel le dévisage, bouche bée, avant de murmurer :
— Aïzie… Tu ferais vraiment cela ?
— Bien sûr ! affirme son ami en se redressant avec fierté.
— Mais… tu ne sais même pas…
— … Où sont les Cieux ? Moi, non, mais je connais ceux qui peuvent nous y mener !
L’attention de tous converge vers le garçon aux cheveux roux, dans l’attente d’une explication de sa part. Il laisse passer un temps de mystère avant de poursuivre :
— Je parle des khaïtes !
Un silence interdit tombe dans la pièce, tandis que les regards convergent sur le jeune semeur.
— Les… khaïtes ? répète Luciel. Mais comment peuvent-ils connaître le chemin des Cieux ?
Ivara coince une longue mèche blonde derrière son oreille :
— Parce que le ciel n'a pas de secrets pour eux, déclare-t-elle de sa voix douce et musicale. Avant même que nous devenions leurs compagnons, ils l’ont parcouru en long et en large, et nous pensons qu’ils naissent avec ce savoir.
En premier lieu, Luciel éprouve du scepticisme à cette idée… mais puisqu’il possède des connaissances dont il ignore l’origine, pourquoi en irait-il autrement pour les khaïtes ?
— Rien ne nous empêche de voler jusqu’aux Cieux pendant que tu partiras retrouver ton amie, poursuit la jeune semeuse. Et si nous parvenons à trouver le monde des anges, nous solliciterons leur aide non seulement pour toi, mais pour tous ceux qui souffrent sous la coupe des seigneurs.
Luciel opine gravement. Malgré tout, certaines préoccupations pèsent toujours sur son cœur :
— Vous faites de votre mieux pour m’aider, et je vous en suis vraiment reconnaissant, mais…
Ses mains jointes se crispent sur ses genoux :
— … je ne voudrais surtout pas que vous considériez ma question comme de l’ingratitude… Vous savez depuis longtemps ce que font les seigneurs, n’est-ce pas ?
Les semeurs présents autour de lui baissent la tête, un peu gênés. C’est Romis, finalement, qui prend la parole :
— Luciel, je ne peux nier que nous le savions. Mais nous sommes un peuple pacifique et nous ne nous sentions ni la puissance ni le courage de changer cet état de fait. Ton arrivée parmi nous nous a fait prendre conscience de la cruauté de la situation. Tu peux remercier Aïzie : il a défendu ta cause avec une immense passion.
Le garçon roux garde un instant le silence, mais cette modestie est de courte durée. Ses yeux pétillent de fierté :
— Tu as toi-même servi ta cause, Luciel ! Personne ne peut résister à ton innocence !
— Mon innocence ?
La confusion se peint sur le visage délicat du jeune ange. Les adultes éclatent de rire, imités par Ivara.
— Ce n’est pas un défaut, Luciel, déclare Afras en posant une main sur l’épaule du jeune ange. Tu as su nous toucher par la pureté de tes sentiments. Je ne peux pas te jurer que tout va s’arranger du jour au lendemain, mais nous ferons de notre mieux. Et partir à la recherche des Cieux… Quelle plus belle aventure pour le peuple du ciel ?
En voyant les sourires autour de lui, Luciel se détend. Pour la première fois depuis des années, il se permet de contempler la lumière au fond du tunnel sombre où il se trouve enfermé.
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